L`ENJEU SPIRITUEL DU MOMENT PRESENT Conférence du père

publicité
1
L’ENJEUSPIRITUELDUMOMENTPRESENT
ConférencedupèreHenriLAUXsj
Recollectiondel’associationSocrateSaintPauldu26/11/2016-Paris
«Nousnenoustenonsjamaisautempsprésent»,écrivaitPascalilyadéjàplusdetrois
siècles.Préoccupésquenoussommesparcequiaétéouserapeut-être,nousfinissonsparêtre
absentsdutempsquiestlenôtre.Maisalors,oùsommes-nousenréalité?Quelleestcettevieàce
pointinquièted'elle-mêmequ'elles'épuiseentretantdemomentsquiluiéchappent?N'ya-t-ilpas
àreveniràsonprésent?Aretrouvertoujourscepointuniqued'oùprocèdelerenouvellementde
touteschoses?
LETEMPSDELAVIE
Qu'il ne soit pas facile de vivre au présent est une expérience bien commune, en effet. On
s'attache au passé et à l'avenir quand le présent est trop inconfortable. Avec nostalgie, on tend à
retrouver les moments les plus heureux de la vie : on se complaît dans les souvenirs d'un paradis
perdu que l'on rumine indéfiniment. Ou bien on se projette dans un futur idéalisé dont on attend
unesituationmeilleure.Onrêve,onestailleurs.Lesimagesfinissentparsesubstitueràlaréalité.On
s'y attache, et l'attachement prend le sens d'un asservissement. Le présent est comme arrêté,
paralysé:ildisparaît.Maiss'ildisparaît,quereste-t-ildelavie?
Al'inverse,ons'attacheaumomentprésentselondesrythmestoujoursplusrapides:iln'yaplus
nipasséniavenir.Restentl'urgence,lacourseentretoutcequiseprésente,àsaisiravantqu'ilne
soit trop tard. Le temps est court. Parce qu'il s'échappe, il importe de ne pas le perdre, ce qui
conduitàsur-occuperchaqueinstant.Onnerespireplus;onmeurtdetrop«vivre».Maisonsent
bienquevivre,cen'estpascela.Lestensionspsychiquesetphysiques,lesobsessions,leseffetsde
désintégration sociale, les rythmes incontrôlés du monde professionnel, les fatigues les plus
diverses,toutcelacontribueàdonnerauprésentcescaractéristiquesoùlesujetéchappeàlaréalité
desonhistoire.
Ce temps perdu dans des images ou des précipitations de toute sorte est un temps indéfini ou
sanslimites,dispersé,sansvéritablepoids.Ilnousdevientextérieur.«Nouserronsdanslestemps
qui ne sont pas nôtres », disait encore Pascal. Mais que croyons-nous faire dans cet ailleurs ?
Qu'espérer d'un temps qui, n'étant pas nôtre, ne nous donne pas d'être nous-mêmes ? Nous y
sommesétrangersànospropresaspirations;notrevolontén'aprisesurrienquitienne.Parlà,c'est
lelieuconcretdelaviequinouséchappe.Orcommentvivresansdonnerunlieuréelàlavie?
Rêvesetprécipitationsbrouillentlespistesetnepermettentplusdelirecequiarriveetd'écrire
cequel'onveutauplusprofonddesoi.IIyaquelquechose d'insenséànepassetenirautemps
présent comme à vouloir fréquenter des terres inhabitables, déserts où rien ne vit sinon telle ou
telleformed'animalité.
Comme le désert abrite les mirages, les mirages d'une existence dévoilent son désert à
l'existence. S'y résoudre est folie. Mais le non- sens a ceci de pervers qu'il cache ses manières
d'acquiescer, à la fois non voulues et toujours recherchées, dans une sorte de paradoxe qui dit le
conflitprofonddel'existence.
Aladifférencedecesmomentsoùlaviesebrouille,lemomentprésentestunmomentprécis,
poséentredeslimites,commeunedemeureaseslimites.Setenirauprésent,c'estsetenirchezsoi.
«LemondeestpleindegensquiveulentDieud'unevolontévagueetgénérale»,écrivaitSurin,ce
L’ENJEUSPIRITUELDUMOMENTPRESENT-ConférencedupèreHenriLAUXsj
Recollectiondel’associationSocrateSaintPauldu26/11/2016-Paris
2
mystique du XVIIe siècle1. Comment ne pas ajouter : beaucoup veulent vivre, mais d'une volonté
vagueetgénérale,c'est-à-diresansseteniraupointprécisoùilyaàvivreetdequoivivre?Orun
vouloirprécisestceluiquisortdeseserrementspours'appliqueràcequifaitl'ordinairedesesjours
etluidonneruneorientationréfléchie.Ilnes'agitpasdefairedisparaîtrelepasséoudeserefuserà
l'avenir.Bienaucontraire:lamémoireetl'attentedoiventanimerleprésent.C'estdansceticiet
maintenant,sansinsouciancenimaîtrise,quenousrencontronsnosforcesetnosfaiblesses,lelieu
le plus précis de nos tentations et de nos appels. Chaque instant doit devenir un événement, un
momentpleindecequ'ilrécapituleetinauguretoutàlafois.
Mais alors, vivre le moment présent, c'est vivre, tout simplement. Ici, il faut entendre deux
choses.Lapremière,c'estqu'iln'yapasd'autremomentàvivrequelemomentprésent.Toutesles
voies plus ou moins détournées et conscientes par où l'on se cache le présent retardent la vie —
jusqu'àmeneràlamort.Vivren'estpasautrechosequesedéciderpourletempsdonné,celuiqui
prendsensparcequ'ilestlarencontredelavolontéavecelle-même,dansl'imprévisibledesesjours,
jouraprèsjour.
Maisonentendraaussidansle«toutsimplement»qu'ilyaàvivreleprésentaveclaplusgrande
simplicité.Legoûtd'uneviesimplepourraitêtrelesigneleplusauthentiquedudésirdevivredansle
présent. Sans viser la recherche archaïque d'une « vie naturelle » prétendument paradisiaque ou
quelqueascétismehostileàlatechniqueetaumondemoderne,onverradanslaviesimpleunevie
désencombréedebeaucoupdechosesinutiles,etd'aborddecettecourseindéfinieaprèstousles
biensdisponibles—dontonneprécisejamaisceluiquiimporte—,uneviesansprécipitation,qui
prend son temps, respecte le rythme des saisons. Une vie simple retrouve la saveur des choses
élémentaires ; dans les complexités rencontrées, affectives, sociales ou professionnelles, elle veut
s'enteniràcequiconstruitdurablement.
Dèslors,leprésentdevientletempsoù,touteschosessesimplifiant,lavietendàsonunité.Ilest
véritablementtempsdelavie.IIsevitcommeuneattention.
LEMOMENTDEL'ATTENTION
Etreattentifouinattentif:l'alternativeparaîtsouventsecondaire,tantons'habitueàcequeles
fautes d'inattention relèvent de la distraction plus que d'une attitude foncièrement voulue et
répréhensibleentantquetelle.Onsesouvientdesfautesdel'enfance,àdemiexcuséesquandelles
relevaient de l'inattention, sortes d'étourderie sans gravité. Puis, avec les années, on a fait
l'expérience que l'inattention, apparemment vénielle, pouvait avoir aussi les plus douloureuses
conséquences. Dans l'ordre des relations humaines, combien de liens (parfois très chers) n'ont-ils
pasétédéfaitspardebanalesinattentions,toujoursgraves,puisdécisivesàforced'êtrerépétées?
Etreattentif,alors,c'ests'arrêter,arrêterensoibeaucoupdechoses(àchacundelesnommer)pour
setournerverscequiarrive;c'estparladécisiondesetendretoutentierversautrui,etverssoimême,etversplusgrandquesoi,quetouteslesvoixaurontchancedenepasseperdre.
Sil'attentionestsicentrale,c'estqu'elleappelleladécisionderompreavecletumulte.Comment
une existence tumultueuse entendrait-elle ce qui appelle, du plus proche au plus lointain ? Les
rythmeseffrénéss'interdisentl'attention;lesobsessionsducorpsetdel'espritaussi.Quandlavie
sepasseàentretenirdescomplexitéssansnombre,àseprécipiterdansdesimpasses,àséjourner
dansdesimagesvaines,commentpourrait-elleécouter?Queserait-ellecapabledeconstruire?Et
pourtant,c'estbienlàqu'ilyaurgenceàécouter.Quandlaviesedéfaitou,pluscourammentpeutêtre,peineàfructifier,ilyaàretrouverensoidusilencepourêtreattentifàlaréalitédecequiest
donné.Lesilence,lereposoulagratuité,ladistanceavecsoi-même,touscestermesveulentdirele
cheminparoùl'hommedoitapprendreàvivredanslapaixpoursetenirsurleterrainduréel.
1 Lettre 214, Correspondance, Desdée de Brouwer, 1966, p 727.
L’ENJEUSPIRITUELDUMOMENTPRESENT-ConférencedupèreHenriLAUXsj
Recollectiondel’associationSocrateSaintPauldu26/11/2016-Paris
3
L'attentionconsisteàrencontrerlesévénements.L'évangiledeLucracontequ'aprèsl'épisodeoù
Jésusenfantétaitrestéautempleparmilesdocteursdelaloi,Marie«gardaittouscesévénements
danssoncœur»(2,51).Recueillircequiseproduit,leméditerdanssoncœuretsonintelligence,
c'esteneffetprêtervéritablementattentionàcequisepasse.Tropdefaits«passent»,justement,
suivispard'autresquileschassent,dansuneinsignifianceperpétuelle,etl'on«passe»àcôtéd'eux:
onnelesrencontrepas.Ainsi,Jésusnesefaisaitpasfautedereprocherauxdisciplesleur
inintelligence:voiciqu'ilavaitmultipliélespainspourlafoule,etilsenétaientencoreàsesoucierde
leurnourriture(Mc8,14-21).Etdebeaucoupd'autresfaits—peut-êtredepresquetous—,ilenétait
demême.Ilsnecomprenaientpas,nevoyaient;pas,n'entendaientpas.Leurvien'étaitpas
attentive.Elleétaitenavanceouenretard,horsd'elle-même,horsduprésent.
Mais pour avoir sens, ce qui arrive doit être vu et entendu. C'est cela, la rencontre. Il faut le
temps du recueillement, le temps du cœur et de l'esprit, pour que les faits laissent se déposer ce
qu'ils portent. Alors, ils deviennent des événements, contemporains du sujet qui les accueille.
Habiter le présent appelle à ne pas laisser perdre ce qui survient. Que recueillir par conséquent ?
Touslesévénementspersonnelsquinousconcernent,biensûr:lesdécisionsprisesouévitées,les
refus et les ouvertures, les expériences de joie et de tristesse. Mais aussi les forces qui travaillent
l'histoiredanslaquellenoussommes,lesgrandsetpetitsévénementsparoùl'humanités'affirmeet
senie,carc'estdetoutcelaquenotreprésentseconstitue.Nousneserionspasattentifsàcequi
nousarrivesinousn'intégrionspaslemondequinoustraverse.Méditerlesévénementsdansune
veille incessante, cela revient à les interroger : sont-ils « insulte à la gloire de Dieu », « amour du
néant, course au mensonge », selon l'écho du psalmiste (Ps 4), ou rencontre de la justice et de
l'amour?Letempsportedesenjeuxdevieetdemort.Ils'agitdeluiprêterattentionpourvivrele
momentprésent.
C'estdoncl'attentionàcequiarriveaujourd'huietmaintenantquifaitduprésentlepointprécis
denotreinscriptiondansl'histoire.Leprésentaunedensité.Iln'estpasabstrait.Iln'aderéalitéque
parl'accueild'unpasséetd'unavenir.
ACCUEILLIRPASSEETAVENIR
Ilyaeneffetàsetournerverslepassé,danssonambivalencemême.D'uncôté,lepasséestle
tempsdelafondation,tempsdelanaissance,individuelleoucollective,avectoutcequiapuêtre
donné comme bienfaits. Un peuple se souvient de sa sortie d'Egypte, d'une marche fidèlement
accompagnéedansledésert,d'uneterreaccordée,d'unpardontoujoursrenouvelé;unhommese
souvient de sa sortie de servitude, d'une existence restaurée, d'un amour à ses côtés. Or cela ne
saurait appartenir à un passé révolu. Le souvenir de ce qui a été donné constitue le présent :
rappelerledon,c'estcontinueràenvivreets'animerdelaforcequ'ilcontient.D'unautrecôté,le
passé veut parfois être oublié : quand il a été douloureux, porteur d'échecs qui durent encore,
pourquoi et comment s'en souvenir ? Mais l'ignorer ne guérit pas la souffrance. C'est plutôt la
reconnaissancedecequiaétéquipeutêtrelechemind'unelibérationetmêmed'unepaixretrouvée. Alors, le passé mauvais, reconnu comme n'étant pas le dernier mot de notre histoire, aura
capacitéàêtrelepointd'oùtoutpeutrecommencer.
Etpuis,ilyaàporterattentionàl'avenir:consentiràl'avenird'oùnaîtraleprésent.Onconnaît
de multiples manières de se tourner vers le lendemain. Beaucoup désertent le présent : elles
entretiennentlerêve.Quandleprésentestinconfortable,ilfaitbonsereposerdansl'espoirdejours
meilleurs.Maisilyatoujoursdebonnesraisonsdenepassecontenterdumomentoùl'onestoudu
pays que l'on habite : l’ailleurs est désirable. Pourtant, quand il n'est pensé qu'à la mesure des
chosesconnues,commeunsuperlatifdecequel'onpossèdedéjà,cetailleursnevajamaisbienloin
:ildéplaceindéfinimentlespiquetsdelatente,maislaterrerestelamême.L'épuisementestassuré. Consentir à l'avenir, au contraire, c'est croire en une infinie promesse de vie, attendre avec
assuranceunenouveautésanslimite,àtraverslesbouleversementsdel'existenceetenrefusantde
L’ENJEUSPIRITUELDUMOMENTPRESENT-ConférencedupèreHenriLAUXsj
Recollectiondel’associationSocrateSaintPauldu26/11/2016-Paris
4
selaissersubmergerparsespeurs.Lerêveeffaceleprésent;l'avenirletransfigure.Iln'yaalorsde
présentpossiblequedansl'attentionàl'avenir.Onenfaitassezl'expériencedanslesmomentsde
deuil ou d'épreuve, quand la vie n'est plus dans la restauration de situations passées. Vouloir
reproduire ce qui a été est une impasse, tandis que la confiance en ce qui vient peut seule
refaçonnerleprésent,commesefaçonneunecréationnouvelle.
L'ordinaire des jours aussi est limité quand il s'arrête à la suite de ses instants, menacés par le
vide.Consentiràl'avenir—autrenomdel'espérance—,c'estalimenterleprésentàsasourcevive.
Leprésentvitd'êtreredonnéàlui-même.
DEVENIRUNEPRESENCE
Lavieéprouvéecommeattentionàcequiarrivepourraitexprimerainsisonenjeu:devenirune
présence, réaliser la Présence. Ce qui advient en Jésus permet de comprendre quelque chose de
cela.Prenonsunrécitdeguérison,celuioùJésusguéritlabelle-mèredePierre(Lc4,38-44),puisde
nombreuses maladies avant de se rendre dans le désert et, rejoint par les foules, de continuer à
prêcherdanslessynagogues.
IlestunemanièrecourantedecomprendrelesgestesdeJésuscommedesactionsdisperséesçà
etlà,presquedefaçonarbitraire.Ici,Jésusguérit;là,ilchasseundémon;plusloin,ilressusciteun
démon,commes'iltiraitdesaréservedesprodigesadmirables,séparéslesunsdesautres;unesorte
de«faitduPrince»,sansdouteexceptionnelmaisquelquepeuartificiel.Orquesepasse-t-ildansle
récit de Luc ? Une femme est malade ; Jésus est là ; il se penche vers elle — entendons : il est
vraimentlà,pourelle,partoutlui-même,etcequiépuisaitcettefemme(lafièvre)estmenacé.IIne
faitriend'autrequed'êtrelà,maisavecunetelleprésence,dansuntelrapportdeforcesaveclemal
(c'estlesensdelamenace),quelecorpsetl'espritdecettefemmeensontapaisés!
Lesoirvenu,cen'estplusunemalade,maistouslesmaladesquiviennentàluietqu'ilguérit.Il
guérit toutes les maladies, sans choisir, car sa force ne se divise pas : elle est pleine et entière.
Comment guérit-il ? Par la simplicité de sa main étendue. N'est-ce pas le signe de sa présence
entière offerte à ceux qui sont là ? Rien d'autre n'est dit, mais on le comprend : Jésus était d'une
présence telle, dans le présent de toutes ces foules, il était tellement libre que leur servitude ne
pouvait plus tenir. Et cette souveraineté était de chaque instant. C'est alors aux autres villes qu'il
fallait aller, toujours plus loin dans l'espace du pays et le cœur de l'homme, pour transmettre la
bonnenouvelledusalut,etlaréaliserdéjàdanslacontinuitédetantderencontres.Aufond,tous
ceux qui acceptaient de se tenir en sa présence étaient transformés : ils revenaient à la vie. Et ce
qu'il réalisait pour tous, Jésus devait vouloir que cela fût aussi par tout homme devenu disciple.
Appeléàpartagerl'espritdesonSeigneur,lediscipleestconviéàvivredecetteprésencepourêtre
cetteprésenceaumilieudetous.
Le langage commun comprend bien quelque chose de cette expérience. Lorsqu'on dit d'une
personne qu'elle « a de la présence », on signifie qu'elle habite réellement son lieu et rencontre
autruiavecjustesse:ellelemarque,letransformed'unecertainefaçon.Inversement,lorsqu'ondit
d'une autre qu'elle « n'est pas présente à ses paroles et à ses actes », on veut dire, à travers
l'insignifiancedulangageoudel'action,unedifficultéàêtre.Jésus,lui,estprésentàchaqueinstant
pourtouterencontre.
L’ENJEUSPIRITUELDUMOMENTPRESENT-ConférencedupèreHenriLAUXsj
Recollectiondel’associationSocrateSaintPauldu26/11/2016-Paris
5
MaisaumilieudesguérisonsracontéesparLuc,Jésuss'estretirédansunlieudésert.Encelieuà
l'écart,ilprêteattentionàlavoixdesonPère,cettevoixquilemetenmouvementetlerendattentif
àtoutevoixvenuedesfoules.AlasuitedeJésus,lemomentprésentestdoncceluioùonselaisse
rencontrer, habiter et saisir par plus grand que soi. On ne fuit pas la rencontre, on la laisse venir
quand elle choisit de venir, en un temps dont on n'est pas le maître. Nul calcul en cela, mais, au
contraire, une attention vécue comme veille incessante : l'appel de Dieu et celui du plus petit
deviennent le même appel, celui à « ne pas se dérober à son semblable », selon l'injonction
prophétique(Is58,7).Encorefaut-ilpourcelaméditertouscesévénementsensoncœur.Selaisser
habiter:devenirlademeuredeplusgrandquesoipourenabriterlesexigences,leurdonnercorps
enlesinscrivantdanslacontinuitédesjours.Selaisser saisir:lavoixentenduen'estpasdecelles
que l'on reçoit avec courtoisie chez soi pour un temps ; elle vient prendre la vie entière de celui
qu'elle saisit pour la conduire sur des chemins bien précis. Une vie saisie est une vie animée
désormaisparunautredontl'espritnefaitplusqu'unavecelle,àl'imagedePaulsaisisurlaroutede
Damas,puissurtoutessesroutes.
C'est bien dans le présent que se forment les manières d'être qui rendent la vie désirable et
apprennentàlasauverdesesimpasses.Leprésentn'estpasletempsdelarépétition,surditéou
inattention à ce qui vient, mais le temps de la nouveauté, accueil d'un esprit venu répandre son
souffle sur toute loi de l'humanité. Il a pour enjeu la réalité même de la vie évangélique. Il est le
milieuprécisoùuneattentionàcequiarriveapprendcequ'estaujourd'huivivreenvérité.Nonpas
dans les souvenirs ou la fuite en avant, non pas dans l'indétermination tumultueuse, mais dans la
mémoire de ce qui a été donné et le consentement à un avenir de promesse. Par l'accueil en luimêmedeplusgrandquelui,accueildel'uniquevoixdesonPèreetdel'humanitémultiple,Jésusse
laisse conduire : il donne jusqu'à l'extrême sa présence et suscite dans les disciples de nouvelles
présences,d'authentiquesformesdelaPrésence,commel'uniquelouangeduDieufaitchair.Ainsi,
danslasuitedestemps,leChristréaliselaprésencedeDieuaumilieudenous.
L’ENJEUSPIRITUELDUMOMENTPRESENT-ConférencedupèreHenriLAUXsj
Recollectiondel’associationSocrateSaintPauldu26/11/2016-Paris
Téléchargement