ANALYSE PAR MELANGES LINEAIRES DES DONNEES DE L’IMAGEUR HYPERSPECTRAL OMEGA A BORD DE LA SONDE MARS EXPRESS: METHODOLOGIE ET PREMIERS RESULTATS. S. Le Mouélic1, J-Ph. Combe 2, C. Sotin1, L . Le Deit1, A. Gendrin2, J. Mustard2 , J-P. Bibring3, Y. Langevin3, B. Gondet3 , P. Pinet 4 1 2 3 Laboratoire de Plan é tologie et Géodynamique, UMR6112, Nantes, France. Brown University, USA. Institut d’Astrophysique Spatiale, Orsay, France, 4 OMP, Toulouse, France. (Email : [email protected]). Introduction: L’objectif du spectro-imageur OMEGA à bord de la sonde Mars Express est d’identifier (et de quantifier) les minéraux présents à la surface de Mars. Depuis janvier 2004, l’ensemble de la surface a été observée avec une résolution variant entre 300 m et 4 km par pixel, ce qui représente plusieurs centaines de millions de spectres. La composition minéralogique des surfaces planétaires, qui est un paramètre clé en géologie, peut être théoriquement déduite des données hyperspectrales. En pratique, cette identification se heurte à des problèmes de mélanges entre les différents matériaux, tant à l’échelle macroscopique (juxtaposition de surfaces homogènes au sein d’un pixel) que microscopique (assemblages de minéraux au sein d’une même roche). Nous avons orienté nos efforts d’analyse sur des modèles de mélanges spectraux permettant de prendre en compte ces phénomènes, fournissant ainsi une méthode automatique applicable à l’ensemble du jeu de données. En particulier, nous présentons ici une nouvelle méthode basée sur des mélanges linéaires, caractérisée par un choix itératif des composants du mélange et par l’utilisation de pôles spectraux artificiels (spectres plats et pente pure) permettant de s’affranchir au premier ordre des effets d’ombrage, de la diffusion par les aérosols, de la taille des grains et des effets photométriques. L’analyse est restreinte au domaine 0.96-2.55 µm, qui contient les principales absorptions cartactéristiques des minéraux, et qui correspond à un seul détecteur d’OMEGA [1], ce qui permet de minimiser les erreurs de coregistration et d’étalonnage. Modèle de mélanges linéaires itératif: Des approches basées sur les mélanges linéaires ont déjà été utilisées sur des données hyperspectrales dans le domaine thermique [2]. Dans le visible et proche infrarouge, les mélanges linéaires correspondent à la juxtaposition de surfaces homogènes au sein d’un même pixel [3]. L’équation utilisée est : X=(At A) -1At Y, où Y est le spectre à analyser, A est la librairie de spectres de pôles spectraux (correspondant dans notre étude à des spectres de laboratoire de minéraux purs et aux spectres artificiels), et X aux coefficients de chacun des pôles purs. Cette inversion purement mathématique conduit parfois à trouver des coefficients négatifs qui n’ont pas de sens physique. Quand cela se produit, les pôles spectraux correspondant sont élimimés itérativement. Figure 1: Distribution des minéraux mafiques sur la zone volcanique de Syrtis Major, déduite de l’analyse par mélanges linéaires. Lorsque la bibliothèque de départ est suffiamment diverse pour couvrir l’ensemble des composés présents, cet algorithme permet de retrouver les proportions relatives de chacun des minéraux au sein d’une scène donnée. La librairie de mineraux utilisée pour notre analyse contient 27 spectres représentatifs de l’ensemble des grandes familles minérales (pyroxènes, olivines, phyllosilicates, carbonates, sulfates, oxydes, plus un spectre de glace d’eau, voir [4]). Résultats:. La figure 1 montre un exemple d’application à la zone volcanique de Syrtis Major, dominée par des mélanges d’orthopyroxènes, clinopyroxènes et d’olivine en proportions variables. Le centre du bouclier volcanique semble appauvri en orthopyroxène par rapport aux terrains environnants, plus anciens, qui sont composés d’un mélange d’orthopyroxène et de clinopyroxène. L’olivine apparaît de manière très localisée au niveau de Nili Fossae et au niveau de la caldeira du volcan (Nili Patera). Ce résultat est en accord avec l’analyse des données TES présentée par [5,6]. reliée à la proportion de ce même minéral dans une roche ou un sol. Figure 2: Exemple de détection automatique de gypse par l’algorithme en bordure de la calotte polaire nord . La figure 2 montre un autre exemple d’application dans un contexte géologique complètement différent, situé dans la région d’Olympia Planitia en bordure de la calotte polaire nord. La glace d’eau (fig.2c) et une vaste étendue de gypse (fig 2b) sont détectées sans ambiguité de manière entièrement automatique par l’algorithme de mélanges linéaires. La distribution du gypse déduite de cette approche est cohérente avec celle présentée dans [8]. Enfin, la méthode a été appliquée de manière globale, afin d’étudier notamment la répartion des minéraux mafiques à la surface de Mars. La figure 3 présente les cartes obtenues pour les clinopyroxènes, et les orthopyroxènes, trouvés majoritairement dans l’hémisphère sud, et les oxydes de fer, dont une composante est répartie de manière plus diffuse dans les régions claires. Conclusion : L’analyse des données OMEGA par mélanges linéaires permet d’identifier de manière automatique les zones spectralement dominées par un mineral donné, à condition d’utiliser des pôles artificiels (plats et pente pure) et d’optimiser le précessus de choix des pôles spectraux. Une étude détaillée de mélanges de minéraux en laboratoire est actuellement en cours afin de quantifier les seuils de détection de cette nouvelle méthode et de voir dans quelle mesure la proportion d’un minéral dans le spectre total peut être Figure 3 (a) albédo (b) oxydes de fer (c) clinopyroxènes, (d ) orthopyroxènes obtenus par mélanges linéaires. Les valeurs correspondent au pourcentage de chaque composé dans le spectre (ce qui ne doit pas être confondu avec une proportion absolue dans la roche). Références: [1] Bibring et al., 2004, ESA, SP,1240, 37. [2] Ramsey et Christensen (1998), JGR, 103, B1, 577-596. [3] Singer et Mc Cord (1979) L P S C, 10.1835S. [4] Combe J.-Ph. et al. (2006) LPSC, abstract#2010. [5] Hoefen et al., 2003, Science, 302. [6] Christensen et al., 2005, Nature, 436. [7] Gooding J. L. (1978) Icarus, 33, 483-513. [8] Langevin et al., 2005, Science, 307.