Événement
SAINTRY-SUR-SEINE /
LE MAG # 64 / MARS 2014
à embaucher les femmes, seul person-
nel disponible. La guerre a donc pour
conséquence directe l’ouverture aux
femmes de métiers jusque là réservés
aux hommes.
Dès 1915, l’Etat incite les indus-
triels à employer de la main d’œuvre
féminine dans les usines d’arme-
ment telles les usines Schneider
au Creusot : les «Munitionnettes»
ou «Obusettes» font leur appari-
tion, appelées ainsi parce qu’elles
fabriquent les munitions et les obus.
Les conditions de travail sont dures.
La journaliste Marcelle Capy témoigne
en 1917, dans «La Voix des femmes» :
«Chaque obus pèse sept kilos. En
temps de production normale, 2500
obus passent [deux fois par jour] en
11 heures entre ses mains… Elle sou-
pèse en un jour 35 000 kg. Au bout de
3/4 d’heure, je me suis avouée vain-
cue. J’ai vu ma compagne toute frêle
poursuivre sa besogne. 900 000 obus
sont passés entre ses doigts. Elle a
donc soulevé un fardeau de 7 millions
de kilos.». Elles travaillent également
à la fabrication des casques ou des
galoches de tranchées. Les autres sec-
teurs d’activités ont eux aussi besoin
de main d’œuvre. C’est ainsi que les
femmes vont être employées dans
les menuiseries ou aux Chemins de
fer comme chefs de gare, gardes-
voies, mais aussi à l’entretien des
wagons (soudure, nettoyage des châs-
sis à la brosse électrique...). D’autres
deviennent ambulancière, conductrice
de tramway parisien, livreuse, factrice-
jardinière des squares ou ramoneuse.
Elles remplacent même les garçons
de café à Paris… Autant de métiers
qu’elles exercent parfaitement, là
même où leur était contestée cette
capacité.
Des responsabilités
nouvelles
Dès 1914, de nombreuses femmes
deviennent «chefs de famille» et
disposent de l’autorité paternelle.
Elles gérent le portefeuille familial et
s’occupent des dépenses, rôle tradi-
tionnellement réservé aux hommes.
Les nouveaux métiers exercés vont
modifier les comportements des
femmes. Vestimentaires d’abord,
pour des raisons pratiques évidentes :
les femmes portent désormais des
pantalons et autres bleus de travail,
les robes raccourcissent, les cheveux
courts s’imposent. A la campagne, les
femmes remplacent les hommes aux
champs et deviennent agricultrices :
elles manœuvrent les
charrues, labourent
les champs, s’oc-
cupent des récoltes.
Même si l’appel à
la mobilisation des
paysannes du Pré-
sident du Conseil
René Viviani, le
7 août 1914, est
entendu, il s’agit sur-
tout d’une question de survie pour ces
femmes qui doivent prendre en charge
fermes, enfants et personnes âgées.
La guerre rend le quotidien des
femmes encore plus dur : le ravitaille-
ment alimentaire ou en combustible
est difficile, les biens sont affectés
en priorité à «l’effort de guerre». Les
emplois qu’elles occupent demandent
pourtant des efforts physiques consi-
dérables et les organismes vont
s’affaiblir. Les pénuries conduisent
les femmes à travailler davantage, les
tâches quotidiennes sont alourdies,
les conditions de vie sont de plus en
plus difficiles tant sur le plan matériel
que sur le plan affectif. Epuisées, elles
doivent affronter la grippe espagnole
en 1918.
Mais elles y arrivent ! Si les femmes
sont aussi dans l’attente de nouvelles
d’un mari, d’un fiancé, d’un frère ou
d’un père, la 1ère Guerre mondiale
fera 630 000 veuves, elles gagnent en
indépendance et en assurance.
Dès 1915, les
«Munitionnettes»
ou «Obusettes»
font leur
apparition,
appelées ainsi
parce qu’elles
fabriquent les
munitions et les
obus. RÉCLAME