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© Université de Liège - http://reflexions.ulg.ac.be/ - 19 April 2017
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L'ère des pesticides a démarré au début du XXème siècle et de nouveaux produits n'ont cessé de voir le
jour depuis lors. Cependant depuis quelques années, les pesticides sont surveillés de près et sont sujets à
controverse. Certains d'entre eux ont été retirés du marché en raison de leur dangerosité pour l'environnement
et/ ou pour la santé humaine. Leurs défenseurs estiment qu'ils permettent d'améliorer la qualité des produits.
Leurs détracteurs, quant à eux, dénoncent, outre les risques pour la santé et l'environnement, le risque que
les pathogènes développent une résistance aux pesticides, à l'image de celle que développent les bactéries
face aux antibiotiques trop utilisés.
Au vu des potentiels effets néfastes des pesticides, la lutte chimique contre les ravageurs fait doucement mais
sûrement place à la lutte biologique. Partout dans le monde, des scientifiques cherchent comment combattre
les nuisibles par des méthodes plus naturelles et respectueuses de l'environnement.
Les dessous du pouvoir attractif du miellat
Pour pouvoir entamer une lutte biologique contre les pucerons, il est nécessaire de bien comprendre leur
écologie, c'est-à-dire les interactions - et leurs conséquences - entre ces insectes et leur milieu biotique
et abiotique. C'est ce à quoi s'attèlent, depuis plusieurs années, des chercheurs de l'Unité d'Entomologie
Fonctionnelle et Évolutive de Gembloux Agro-Bio Tech, dirigée par le professeur Eric Haubruge. Ils étudient
les interactions entre les plantes-hôtes, les ravageurs et les insectes auxiliaires, c'est-à-dire les prédateurs
potentiels de ces ravageurs. En septembre 2010, dans l'article « Les pucerons trahis par leurs odeurs», il
était question de la phéromone d'alarme des pucerons. Les chercheurs avaient découvert que les prédateurs
de ces nuisibles, tels que les coccinelles, avaient appris à reconnaître leur phéromone d'alarme au gré de
l'évolution, leur permettant ainsi de localiser plus aisément les colonies de pucerons.
Dans le cadre de sa thèse de doctorat, Pascal Leroy s'est intéressé plus particulièrement au miellat rejeté par
les pucerons. En effet, ce liquide épais et visqueux, riche en sucres et en acides aminés, attire de nombreux
ennemis naturels de ces insectes ravageurs. Le miellat joue ainsi un rôle essentiel dans les interactions entre
plantes, pucerons et prédateurs de ces derniers. « On sait depuis longtemps que le miellat agit comme une
kairomone volatile ou de contact, c'est-à-dire qu'il agit comme un sémiochimique bénéfique pour l'individu
qui le perçoit. Mais cela n'avait jamais été expliqué » indique Pascal Leroy. « Nous avons donc voulu aller
plus loin et comprendre ce qui explique cet effet kairomonal du miellat ». Pascal Leroy et ses collègues ont
ainsi réussi à identifier une quinzaine de composés volatiles provenant du miellat. « On s'est ensuite demandé
ce qui pouvait expliquer l'émission de ces composés volatiles au départ du miellat des pucerons. Certains
provenaient tout simplement de la fermentation naturelle du miellat mais celle-ci n'expliquait pas l'apparition
de tous les composés volatiles identifiés », précise Pascal Leroy.