© AFD Document de travail n° 60 • Cycle du crédit et vulnérabilités financières : évolutions récentes... • mars 2008
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La situation macroéconomique des économies émergentes
s’est nettement améliorée au cours des dix dernières
années. Parmi les facteurs déterminants de ces évolutions,
une conjoncture internationale très favorable a sans aucun
doute accompagné les améliorations économiques et par-
fois institutionnelles de ces pays. En particulier, la forte
liquidité internationale, la hausse des prix des matières pre-
mières et l’apparition d’excédents courants dans la plupart
des économies émergentes ont contribué à stimuler la
croissance de leur secteur financier et notamment de leur
système bancaire.
Mais si l’ensemble du groupe « pays émergents » apparaît
globalement renforcé, du point de vue de la stabilité des
fondamentaux macroéconomiques, plusieurs pays pris iso-
lément demeurent vulnérables à la volatilité de l’économie
mondiale et aux fluctuations de la liquidité internationale.
Dans certains cas, des entrées massives de capitaux,
débouchant sur une croissance très forte du prix des actifs
et du crédit bancaire, suscitent des interrogations sur la
soutenabilité de ces tendances. Il s’agit alors de savoir si ce
type d’évolutions financières constitue des facteurs de fra-
gilisation susceptibles de déboucher sur des tensions
importantes, voire sur des crises financières.
Plusieurs phases de corrections brutales ont été enregis-
trées sur les marchés financiers émergents au cours des
dernières années (juin-juillet 2006 ; février-mars 2007 ; jan-
vier 2008) confirmant cette fragilité latente. Ces phases de
corrections débouchent généralement sur une séquence
qui est devenue classique :
1. la perception d’une surévaluation des actifs émergents
est corrigée brusquement lors d’une révision du risque à la
hausse et lors des premières rumeurs de difficulté finan-
cières dans les marchés matures (accélération anticipée de
l’inflation ou tension sur la liquidité des lignes “subprime
mortgages”, par exemple) ;
2. la crainte d’une surexposition au risque, couplée avec
des anticipations de baisse de la liquidité globale, incitent
les investisseurs à rééquilibrer leurs portefeuilles (flight-to-
quality) ;
3. ces arbitrages aboutissent enfin sur une forte augmenta-
tion de la volatilité dans les marchés émergents entraînant
une hausse des primes de risque (sur les actions et les
lignes de crédit) et une baisse des prix des actifs.
Les ajustements les plus significatifs sont observés dans
les pays qui dépendent le plus des flux de capitaux privés
internationaux pour le financement externe de leur crois-
sance. Dans chacune de ces trois phases de correction, la
liquidité internationale n’a jamais été réellement compromi-
se (notamment grâce aux opérations des banques cen-
trales occidentales) et le danger de tensions durables sur
les marchés financiers émergents ne s’est pas réalisé. Au
moins à ce stade.
Parallèlement, sur le plan de l’analyse macro-financière, les
flux de capitaux et le système bancaire font l’objet d’études
de plus en plus approfondies (facteurs déterminants, évolu-
tions des risques, conditions de la stabilité financière).
Dans ce contexte, nous nous sommes placés dans le
cadre de la théorie du « cycle du crédit » d’Hyman Minsky
(1964) et de plusieurs modèles qui ont incorporé la relation
capitaux-crédit-investissements dans la formalisation des
dynamiques de fragilisation et de crises financières. Nous
avons ainsi adapté les fondements de la théorie minskyen-
ne du cycle du crédit à un contexte d’économies ouvertes
Introduction