98 •Sociétal n°67
Entreprise
L’écart se creuse
Dirigeants Managers intermédiaires
Organisation
hiérarchique
Commandent plus directement par des
chaînes hiérarchiques plus courtes
Pouvoir affaibli par cette influence
plus directe du niveau central
Systèmes de gestion
Contrôlent plus directement l’exé-
cution du travail via les progiciels de
gestion intégrés (PGI/ERP)
Réduction de leur indépendance,de
leur marge de manœuvre
Statut social Gagnent en statut social à mesure que
les grandes entreprises se concentrent
Le statut de cadre se banalise en
France.National, il est moins reconnu
dans les multinationales
Rémunération Leur rémunération
afortement augmenté Rémunération stagnante
Cette divergence profite,àcourt terme,aux dirigeants. Mais elle menace de casser
l’actif même de l’entreprise,c’est-à-dire sa capacité à transformer le temps de travail
des personnes en productioncollective. Qu’est-ce,eneffet, que l’actif,au-delà du
capitalfinancier, desbiens propres et du capital immatériel (brevets et marques,
talents individuels…) ? L’actif essentiel de très nombreuses entreprises est un «capi-
tal social », au sens de «capital humain collectif ». Ce qui permet de produire effica-
cement, d’innover, de vendre, de s’adapter aux changements, c’est la vitalité du corps
social qu’est l’entreprise ;sacapacité à mettre la bonne
personne à la bonne place ;l’entente entre dirigeants,
cadres, salariés ;la bonne communication avec les par-
tenaires extérieurs, clients et fournisseurs ;larecon-
naissance de l’entreprise et de sa marque par le public.
Ce «capital social »est gravement fragilisé par la
divergence entredirigeants et managers intermédiai-
res. L’entreprise se mettrait en danger si elle préten-
dait traiter séparément sa dimension économique (qui
serait mondialisée,offensive, sa vraie dimension au fond) de sa dimension sociale
(qui serait à l’échelle nationale,défensive, presque une question de forme).
C’est déjà vrai pour l’entreprise taylorienne – chaîne de montage, hypermarché, cen-
tre d’appels… – où la transformation du temps de travail en production collective
passe par l’assujettissement des corps et des esprits des travailleurs à des instructions
préétablies. Peut-être la cohésion entre dirigeants et managers intermédiaires peut-
L’actifessentiel
de très
nombreuses
entreprisesest
un «capital
social », au sens de
«capital humain
collectif ».
L’actifessentiel
de très
nombreuses
entreprisesest
un «capital
social », au sens de
«capital humain
collectif ».