Aristarque de Samos Le système héliocentrique Avant l’heure • Depuis quand les hommes ont-ils regardé le ciel ? • Les Babylonniens aux environs de 2000 ans avant JC ont laissé des quantités de données. • Dans cet exposé, en partant de la culture Grecque, on ira : - D’environ moins 300 avant JC (Aristote, Platon) à - Plus 1600 après JC (Copernic, Galilée) Aristarque de Samos • Aristarque de Samos est né vers 310 av. J.-C., environ 12 ans après la mort d’Aristote dont la philosophie « fait alors force de loi » • Très peu de ses travaux en mathématiques et en astronomie subsistent aujourd’hui, la plus grande partie ayant disparu lors de l’incendie de la bibliothèque d’Alexandrie. Aristote • Aristote est né en 384 avant JC à Stagyre en Macédoine. Il a eu une activité extrêmement féconde s’intéressant à la philosophie, à la science… • • De 367 à 347 il suit l’enseignement de Platon à l’académie d’Athènes. Il rédige des traités sur des domaines variés marqués par l’influence de Platon. • A la mort de Platon il s’éloigne d’Athènes et fonde une école à Plassos. Le mouvement selon Aristote « Tout ce qui existe sur terre, est en mouvement ou susceptible de mouvement : soit parce qu'il reçoit celui-ci par communication d'avec d'autres corps, soit parce qu'il possède en lui-même son propre moteur. » Conclusion : • Pas de moteur = pas de mouvement Le ciel et la terre selon Aristote Les Grecs butaient un problème : • • Dans le ciel les astres se meuvent apparemment sans « moteur » alors que sur terre il faut un moteur pour qu’il y ait mouvement. • Aristote conçoit ainsi le monde : • • la terre est au centre, fixe et immobile. • • Le monde est incorruptible (parfait, éternel) au-dessus de l'orbite lunaire (monde supralunaire) • Il est corruptible (imparfait) en proie au devenir, en dessous (monde sublunaire). • Dans le système d’Aristote , comme dans celui de Pythagore, la terre est immobile au centre du monde, entourée d’une succession de sphères cristallines. • Le système d’Aristote sera amélioré par Hipparque et Ptolémée, mais en gardant les mêmes principes de base. Les nouvelles étoiles Chinoises • Les anciens astronomes Chinois ont été les seuls à noter soigneusement l’apparition de phénomènes relativement rares qu’ils ont appelé nouvelles étoiles qui apparaissaient puis disparaissaient. • • Ce sont elles que nous connaissons aujourd’hui comme supernovas. • Ils en ont enregistré plusieurs dizaines (90 ?) entre l’an -1400 et 1700 de l’ère moderne. En particulier au 14ème siècle av J-C: une supernova ("étoile invitée") a été observée près d'Antarès. • Leurs observations sont tellement précises qu’elles sont encore utilisées aujourd’hui pour retrouver dans le ciel les restes de ces explosions par des méthodes modernes. • Les observations Chinoises sont donc incompatibles avec l’image du ciel que se font du ciel Platon et Aristote. • Mais Platon et Aristote ne les connaissaient pas. Aristarque de Samos et son époque Aristarque de Samos arrive donc à une époque où les idées relatives à la constitution de l’univers sont bien arrêtées. • Ce que nous savons de ses travaux, nous l’avons appris par les écrits d’auteurs qui ne partageaient pas nécessairement son point de vue sur l’Univers. • L’œuvre d’Aristarque de Samos est caractérisée par des mesures : • Mesure du rayon de la lune • Mesure de la distance terre - lune • Mesure de la distance terre - soleil… • Pour cela il s’est appuyé sur la mesure du rayon terrestre par Eratosthènes Eratosthènes : • Eratosthènes a vécu au 3ème siècle avant JC à Alexandrie. • Il a réalisé la première mesure correcte du rayon de la terre • Il connaissait l’existence dans la ville de Syene (Assouan) d’un trou profond. • Il savait qu’à midi le 21 juin la lumière du soleil était réfléchie par de l’eau qui se trouvait au fond du puits. Ceci montrait que les rayons du soleil étaient verticaux. • Il savait aussi que ce phénomène ne se produisait que ce seul jour de l’année. • Il savait aussi que la direction du soleil n’était jamais exactement verticale à Alexandrie et que la direction la plus proche de la verticale était précisément le 21 juin. • Il a alors mesuré, grâce à l’ombre d’un bâton, l’angle fait par les rayons du soleil avec la verticale et a trouvé 7,2 degrés. • Syene étant au sud d’Alexandrie et la distance entre elles étant connue, il a pu en déduire la circonférence de la terre, supposée sphérique. • Il a trouvé 23.300 miles soit 37.490 km, proche de la valeur actuelle de 40.000 km. Aristarque de Samos • Connaissant le rayon de la terre il a mesuré : • Les distances : terre – lune et terre – soleil • Les rayons comparés de la terre, de la lune, du soleil Rappel : Les systèmes hélio et géocentrique • Un système héliocentrique est un système dans lequel les planètes tournent autour du soleil. • Un système géocentrique est un système dans lequel le soleil et les planètes tournent autour de la terre. Aristarque de Samos • Ayant mesuré les dimensions de la lune, du soleil, les distances terre –lune, terre – soleil… • Ses résultats l’ont amené à mettre en cause le système alors officiel : géocentrique. Diamètre de la lune • Le moyen d’observation d’Aristarque consiste à observer des éclipses de lune. • L’ombre de la Terre sur la lune est considérée comme étant un cylindre. • Ceci implique que la distance terre - soleil soit infiniment grande par rapport à la distance terre - lune • En réalité l’ombre de la terre sur la lune est un cône, dont le sommet est le soleil, mais l’angle au sommet de ce cône est très faible car le soleil est très loin de la terre et de la lune. • L’approximation consistant à considérer que l’ombre est cylindrique revient à admettre que cet angle est voisin de zéro. • En observant la Lune au cours d’une éclipse totale, Aristarque vit qu’elle restait dans l’ombre du Soleil pendant environ deux heures. • Or il avait mesuré le temps nécessaire pour qu’elle se déplace sur le ciel de son propre diamètre. • En position 1, la Lune est juste totalement éclipsée. • Au bout d’une heure, elle se trouve en 2, ayant avancé de son propre diamètre. • Au bout de 2 heures, elle se trouve en 3, toujours totalement dans l’ombre. Elle en sort alors. • Donc : la Lune est trois fois plus petite que la terre. Conclusion : • Le diamètre de la terre T étant connu depuis Eratosthènes, celui de la lune L l’est aussi et vaut : • L = 0,3 T Distance terre - lune • On voit la Lune sous un angle d’à peu près 32' • tg 32' = L / d = 0,0093 • Mais le diamètre L de la lune est connu et vaut : L = 0,3T • T étant le diamètre de la terre • Donc : • d = 0,3 T / 0,0093 = 32 T = 64 R • Conclusion d’Aristarque de Samos : • La distance terre – lune vaut 64 fois le rayon de la terre qui a été mesuré par Eratosthènes • Remarque : la valeur correcte est 60 fois le rayon de la terre donc assez proche de celle d’Aristarque. Distance terre soleil • Aristarque utilise l’éclairement de la lune : • Le Premier Quartier PQ se produit lorsqu’on voit exactement la moitié de la Lune éclairée. • • L’angle Terre-Lune-Soleil est alors droit, et ceci ne dépend pas de la distance du Soleil (c’est vrai sur les deux dessins ci-dessous). Si le Soleil était à l’infini, le Premier Quartier serait exactement à mi-chemin entre la Nouvelle Lune et la Pleine Lune • Ce n’est pas le cas, le Soleil est à distance finie. • Attention : les figures ne sont pas à l’échelle la distance terre – soleil est beaucoup plus grande que la distance terre - lune • On voit que le Premier Quartier est plus proche de la Nouvelle Lune que de la Pleine Lune (l’arc d’orbite à parcourir est plus court). • Si on suppose que l’orbite de la Lune est un cercle, parcouru à vitesse constante, l’intervalle de temps entre la Nouvelle Lune et le Premier Quartier est plus court que l’intervalle entre le Premier Quartier et la Pleine Lune. • Aristarque a mesuré le temps écoulé entre la Nouvelle Lune et le Premier Quartier, puis entre le Premier Quartier et la Pleine Lune. • Il a trouvé une différence de 6 heures ; il en a déduit un angle de 3°. • Il compare les angles LTH et LST et montre qu’ils sont égaux. En effet : • Le côté LT du premier est perpendiculaire au côté LS du second • Le côté HT du premier est perpendiculaire au côté ST du second. • On écrit : LTH = LST = La distance terre - soleil • On écrit, dans le triangle LST, le sinus de l’angle LST = • sin = LT / ST. • L’angle a été mesuré : = 3°, donc son sinus est connu. • la distance Terre-Lune LT est connue aussi ; Il en déduit la distance ST et conclue que : • la distance terre - soleil est 20 fois plus grande que la distance terre - lune • La difficulté de cette méthode tient dans l’observation de l’instant précis du Premier Quartier. • Aristarque s’est trompé assez largement sur le décalage ; la vraie valeur est de seulement 35 minutes et non de 3° Il s’ensuit que le Soleil est, non pas 20 fois, mais 387 fois plus éloigné que la Lune. Les dimensions du soleil • Les mesures d’Aristarque ne donnent pas un résultat exact, mais vont lui permettre d’obtenir un résultat intéressant : • Le soleil et la lune ayant sensiblement le même diamètre apparent, son diamètre est 19 fois plus grand que celui de la lune. En fait il est environ 400 fois plus grand Conclusion • Aristarque en déduit que le soleil est plus gros que la terre et qu’en conséquence c’est la terre qui tourne autour du soleil et non l’inverse . • Cette théorie allait à l’encontre des convictions religieuses et philosophiques de l’époque formulées par Platon et Aristote. Le rejet de ces conclusions • Des arguments de principe : • Aristarque de Samos est né quelques années après le décès d’Aristote, qui avait été, dans la première partie de sa vie, le disciple de Platon. • Or voici ce que dit Platon des expériences : Le texte de Platon : • « Si l’on voulait faire une recherche expérimentale en soumettant cela à la vérification, ce serait méconnaître la différence entre un homme et un dieu » • « car seul un dieu possède à la fois le savoir et le pouvoir nécessaire qui permettent de mêler les multiples choses en une seule et inversement de résoudre ce qui est un dans le multiple » • « tandis que parmi les hommes nul n’est à l’heure actuelle en mesure de réaliser l’une et l’autre de ces tâches, et ne le sera jamais à l’avenir » • A l’époque d’Aristote l’on n’imaginait guère que l’on puisse réfuter ou soutenir une hypothèse par l’expérimentation et l’observation. • On rejetait l’observation en faveur de ce que les physiciens appellent des expériences imaginaires . • Ces expériences imaginaires ont donné naissance à quantité d’idées fausses, par exemple qu’un objet lourd tombe plus vite qu’un objet léger (une erreur corrigée quelque 18 siècles plus tard). • Donc le résultat des mesures d’Aristarque ne fut pas considéré comme probant. Un argument scientifique • Dans le cas d’Aristarque, son hypothèse sur la rotation de la Terre autour du Soleil expliquait le mouvement nocturne et annuel des étoiles. • Mais elle contenait aussi la proposition suivante : lorsque la Terre tourne autour du Soleil, la position apparente des étoiles devrait varier légèrement. • Si on observe le ciel le soir à l’aide d’un télescope et si on note la position d’une étoile, on constate, si on l’observe six mois plus tard avec le même appareillage, qu’elle s’est légèrement déplacée. • Il s’agit d’un déplacement angulaire apparent qui résulte du passage de la Terre d’un côté à l’autre du Soleil. • Les étoiles sont tellement éloignées que l’on ne peut mesurer le déplacement angulaire à l’œil nu. • Aristarque aurait proposé cette explication, mais sans pouvoir la prouver. Des arguments peu objectifs • Il est sacrilège d’avoir déplacé le foyer du monde et de s’être opposé au dogme de la terre divinité… • Finalement, le modèle héliocentrique a été rejeté car, s’il offrait une explication de l’apparence du ciel de nuit et de ses changements, il ne pouvait être testé avec les instruments de mesure de l’époque. Autre partisan de l’héliocentrisme : : Séleucos • L’astronome Chaldéen Séleucos de Séleucie (né en190 avant J.C. ) a proposé un modèle héliocentrique pour expliquer les phénomènes célestes. • Séleucos nous est connu par les écrits de Plutarque • Il était partisan d'un système héliocentrique où la terre tourne sur elle-même et effectue en outre une révolution autour du soleil. • Selon Plutarque, Seleucos donnait même une démonstration de son système, mais son argumentation nous est inconnue. • Et le système géocentrique fut le système généralement adopté. 2.000 ans d’attente • Les Grecs étaient des observateurs méticuleux qui s’étaient efforcés de prévoir les mouvements des planètes. • Plusieurs savants Grecs : Hipparque puis Ptolémée ont amélioré le système géocentrique d’Aristote. Hipparque • Hipparque (-190 à -120 av JC) est considéré comme le plus grand astronome d'observation de l'Antiquité. Il fut le premier Grec à développer des modèles quantitatifs et précis du mouvement de la Lune et du Soleil. • Pour ce faire, il utilisa systématiquement les connaissances et surtout les observations accumulées pendant des siècles par les astronomes chaldéens de Babylone. • Mouvement du Soleil selon la théorie des épicycles. La Terre (T) immobile est au centre du cercle noir • Le soleil S décrit un petit cercle dont le centre P se déplace sur le cercle noir. Ptolémée • Claude Ptolémée (168 – 90 av JC) fut un grand mathématicien et un grand astronome. Il a perfectionné les résultats d’Hipparque en utilisant des mouvements épicycloïdaux. • Il doit en effet expliquer pourquoi Mars semble parfois reculer, puis reprendre sa marche en avant. Un exemple d’épicycloïde La figure précédente montre un exemple d’épicycloïde. Le cercle bleu est centré sur la terre • Le mouvement de Mars se situe sur le cercle noir qui roule sur le bleu. Mais cette description est insuffisante. • Ptolémée utilisera un système nettement plus compliqué non décrit ici. • Ce système, décrit par Ptolémée, est fort complexe. • Il permet d'expliquer, vu de la Terre, les variations de vitesse et d'éloignement des planètes. 2.000 ans d’attente (suite) • Il faudra attendre Copernic et Galilée pour remettre en cause les conceptions d’Aristote, Hipparque et Ptolémée. • Une raison essentielle est liée à la position de l’église qui considérait comme hérétiques ceux qui mettaient en doute les vues d’Aristote et n’hésitait pas à les envoyer au bûcher comme l’abbé Giordano Bruno • Aristote conçoit le ciel comme une zone dans laquelle règne la perfection et où tout est éternel. • Ceci est en parfait accord avec ce que J.C. dit de Dieu son père qui règne dans les cieux et où tout est éternel (per secula seculorum). • De façon générale le message chrétien est en accord avec la pensée des Grecs et d’Aristote : le ciel est le domaine des dieux, ce qui est vrai pour les autres religions monothéistes. Une exception cependant : Le message chrétien « nous sommes tous des frêres » n’est pas en accord avec les vues d’Aristote selon lequel on peut, par exemple, naître et mourir esclave. • Mais plus généralement la pensée d’Aristote n’est pas remise en cause, donc on ne peut mettre en cause la rotation du soleil autour de la terre. Copernic • Nicolas Copernic naquit en février 1473 a Torun. Ses aïeux partirent en Silésie vers Ie village de Kopernik, d’où le nom de famille, Copernic. Ils quittèrent vers 1400 ce lieu pour Cracovie ou ils s'installèrent. En 1495 il devint chanoine de Warmie. • II partit ensuite pour l'université de Bologne en vue de préparer un doctorat en droit canon mais là il s'intéressa à l'astronomie et, avec l'astronome Domenice Maria Novara, fit ses premières observations des 1497. • Il eut ensuite diverses activités : médecine, économie… mais avec un intérêt marqué pour l’astronomie. • Ses observations l’amenèrent à voir que la théorie officielle de Ptolémée rendait mal compte de certains mouvements des planètes. • Il rédigea des tables donnant des valeurs plus précises, mais refusa de donner sa méthode de calcul basée sur l’héliocentrisme qui ne fut publiée qu’au moment de sa mort. • Galilée, profondément chrétien, et attaché à l’église observera le ciel et, connaissant les travaux de Copernic, voudra établir la vérité. • Mais il se heurtera à l’inquisition qui, sans doute par peur du vide, refusera obstinément d’admettre la conception héliocentriste de notre monde. • Ses découvertes l’amèneront à rejeter l’idée de Platon selon laquelle l’homme ne peut ni concevoir des expériences ni les interpréter. • • Des idées d’Aristote relatives à plusieurs domaines furent ainsi remises en cause: • Les 4 éléments : eau, air, terre, feu • Les lois du mouvement • La chute des corps… Et finalement… • Le modèle HELIOCENTRIQUE prévu par ARISTARQUE de SAMOS • s’imposa • Dommage que les observations chinoises n’aient pas été connues des Grecs !