
LES COOPÉRATIVES DE SANTÉ
UN MODÈLE INTÉRESSANT
Les coopératives de santé ont permis de sauver des cliniques dans des régions souffrant
d’une importante pénurie de médecins. Après s’être ajustées aux critiques d’il y a quelques années,
elles offrent maintenant divers avantages à la fois aux patients et aux omnipraticiens.
Francine Fiore
La coopérative de santé est-elle le
meilleur modèle de soins de première
ligne ? Pour plusieurs médecins, cer-
tainement. « Elle se veut un modèle
original et performant en matière
de santé de proximité », affirme le
Dr Laurent Godbout, médecin de
famille à Trois-Rivières. Cette formule,
qu’il considère comme bien adaptée
à son milieu, lui a permis de sauver la
Clinique médicale de Pointe-du-Lac.
Au milieu des années 2000, à cause
de la perte d’effectifs et des difficultés
de recrutement, l’équipe de la clini-
que du Dr Godbout était passée de
cinq à deux professionnels, lui et la
Dre Johanne Donati, sa conjointe, éga-
lement médecin de famille. Plutôt que
de fermer leurs portes, ils ont choisi
d’essayer le modèle coopératif, déjà
expérimenté au Québec.
Le Dr Godbout a donc sollicité sa col-
lectivité pour conserver le point de
services que représentait la clinique.
La réponse a été très positive. Le
1er avril 2006, la Coopérative Solidarité
Santé Pointe-du-Lac était inaugurée.
« On a légué tout notre équipement et
autres biens de la clinique à la coop »,
dit le médecin. Graduellement, de nou-
veaux cliniciens se sont ensuite joints
aux deux omnipraticiens.
Aujourd’hui, la Coop Santé de Pointe-
du-Lac rassemble 5800 membres et
offre des services aux 7000 patients
de la Clinique médicale de Pointe-
du-Lac. Elle a attiré six médecins
omnipraticiens et emploie deux infir-
mières auxiliaires de même que des
secrétaires. Une infirmière praticienne
spécialisée vient une journée par
semaine, et une autre, à plein temps
cette fois, la rejoindra bientôt.
Le modèle coopératif, critiqué un temps,
semble aujourd’hui avoir plusieurs
avantages à offrir. Il pourrait peut-
être même constituer une solution de
rechange aux groupes de médecine
de famille (GMF), affirme le Dr Pierre
Martin, président de l’Association des
médecins omnipraticiens de la Mau-
ricie. « Le gouvernement n’est pas
toujours à l’écoute des GMF. Il regarde
simplement si ces derniers corres-
pondent au cadre établi et, si ce n’est
pas le cas, leur impose des restrictions,
dont des coupes dans leur finance-
ment », dit-il.
Pour le Dr Martin, cette nouvelle for-
mule est à considérer. « Il s’agit d’un
modèle moins rigide que les GMF. De
plus, il permet de miser sur l’inter-
dis ci plinarité. » Différents types de
pro fessionnels de la santé peuvent
ainsi être présents. C’est d’ailleurs le
milieu qui détermine les besoins et
les services offerts par la coopérative.
Par exemple, s’il y a des pro blèmes de
diabète, d’obésité ou de santé mentale
dans la collectivité, les res pon sa bles
engageront une nutrition niste, un psy-
chologue, etc. Le patient qui investit
dans sa coopérative pose un geste pour
maintenir sa santé, estime le Dr Martin.
La formule de la coopérative permet
aussi d’assurer la pérennité du centre
médical. « Ici, même après mon départ,
la coopérative continuera de fonction-
ner, car elle appartient à ses membres
qui ont la collaboration de l’équipe de
médecins de famille », mentionne le
Dr Godbout.
Les médecins, pour leur part, béné-
ficient d’une certaine liberté dans
la coopérative. Contrairement aux
GMF, leur clinique n’a pas à atteindre
un nombre de patients inscrits ni à
avoir une offre de services précise.
Toutefois, ils doivent répondre aux
besoins de leur collectivité. C’est cette
dernière qui finance leur coopéra-
tive, et ils en tiennent compte. « Nos
médecins pratiquent l’accès adapté,
affirme la directrice de la coopérative,
Mme Andrée Côté. Ils se gardent des
plages horaires pour les cas urgents.
Les patients adorent leur coopérative. »
QUESTION D’ARGENT
Environ 95 % du financement de la
Coopérative Solidarité Santé Pointe-
du-Lac provient des membres. La
contri bution d’un adulte se fait sous
la forme d’une part de qualification de
Dr Pierre Martin
Photo : Emmanuèle Garnier
16
Le Médecin du Québec, volume 50, numéro 1, janvier 2015