La dimension territoriale des politiques de l’emploi * Le cas de la France Sophie BOISSARD Ministère de l’économie, de l’industrie et de l’emploi 1) La politique de l’emploi a longtemps été une politique nationale pilotée par l’Etat et les partenaires sociaux Politiques de l’emploi : une compétence Etat (placement, reconversion) partagée avec les partenaires sociaux (assurance chômage, formation) Une logique de publics plus que de territoires : jeunes licenciés économiques 2) Au cours des années 1980, la dimension territoriale s’est progressivement renforcée Un mouvement général de décentralisation engagé à partir de 1982 qui a conduit à confier aux collectivités territoriales des compétences proches des politiques de l’emploi Régions : • Formation initiale professionnalisante (1983) • formation des demandeurs d’emploi (2004) • développement économique (1983) Départements : • insertion et accompagnement social (RMI 1988 -2003) Communes et intercommunes : • • développement économique placement 3) Les outils nationaux restent prépondérants sur le plan financier (1/2) • Le financement des collectivités territoriales reste largement minoritaire Qui finance la dépe nse pour l'e mploi 100% Em ployeurs 80% Régim es profes s ionnels ACOSS 60% UNEDIC 40% Collectivités territoriales 20% État 2005 2004 2003 2002 2001 2000 1999 1998 1997 1996 1995 1994 1993 1992 1991 1990 0% Source DARES. 3) Les outils nationaux restent prépondérants sur le plan financier (2/2) Dépenses pour l'emploi et allègements généraux en points de PIB 5,0 % du PIB Allègements généraux 4,5 4,0 Autres dépenses actives 3,5 3,0 Formation professionnelle 2,5 2,0 Incitation au retrait d'activité 1,5 1,0 Indemnisation du chômage 0,5 2005 2004 2003 2002 2001 2000 1999 1998 1997 1996 1995 1994 1993 1992 1991 1990 0,0 source : DARES. 4) La dimension territoriale vient des acteurs nationaux, selon une logique descendante Déconcentration progressive des moyens d’intervention de l’Etat à partir de 1989 : fonds national pour l’emploi (restructurations) contrats aidés, formation des jeunes demandeurs d’emploi Constitution de véritables services régionaux de l’Etat en région et en département (1993-1995) Mise en place d’instances de concertation au niveau territorial (partenaires sociaux, collectivités locales) La logique verticale par dispositifs (contrats aidés, stages) demeure prépondérante jusqu’au début des années 2000. 5) Des projets portés par des territoires se sont développés, notamment sous l’influence européenne : Politiques de placement et d’accompagnement - Missions locales (83) : -Plans locaux d’insertion par l’activité économique (avec le soutien du FSE en 1993) -Maisons de l’emploi (2005) : 220 structures, qui associent les réseaux nationaux sur un territoire et jouent un rôle d’anticipation, d’accompagnement des demandeurs d’emploi et de soutien à la création d’entreprises (un appui financier de l’Etat pour 80 M €) Gestion des mutations et des restructurations industrielles : Comités de bassin d’emploi (1982) Contrat de transition professionnelle (CTP) : expérimenté depuis 2006 dans 7 bassins Revitalisation en cas de structurations : des outils publics (contrats aidés) des contributions privées Au total depuis 2003 : 1,7 MD€ sur les contrats du site dont 30% à la charge de l’état (33 opérations) 235 M€ au titre de la revitalisation (350 conventions) Leur efficacité dépend de l’impliquation des acteurs locaux, notamment politiques 6) Les réformes du marché du travail engagées en 2007 intègrent pleinement la dimension territoriale, en tentant de laisser un réel espace pour les initiatives et les atouts locaux ½ Réforme du placement (2008) : Création d’un réseau unique de placement et d’accompagnement à partir de l’agence nationale (ANPE) et du réseau paritaire d’indemnisation (UNEDIC) Un opérateur unique (5 Md € de budget, 40 000 agents) Une forte dimension territoriale (échelon régional) avec un programmation au niveau régional des actions à mener À titre expérimental, un co-pilotage dans deux régions sera sans doute institué 6) Les réformes engagées en 2007 intègrent pleinement la dimension territoriale, en tentant de laisser un réel espace pour les initiatives et les atouts locaux (2/2) Réforme de la formation professionnelle : Principal enjeu : instaurer un pilotage à l’échelon régional permettant aux différents financeurs (branches professionnelles, région, service public de l’emploi) de définir ensemble leurs priorités et de calibrer l’offre de formation en conséquence Politique d’inclusion active (RSA) expérimentation dans 30 départements d’un dispositif facilitant le retour à l’emploi des bénéficiaires du RMI, grâce à un intéressement financier et un accompagnement (cofinancement Etat/ départements volontaires) En conclusion - La situation institutionnelle française (fort poids de l’Etat, nombreux niveaux de collectivités territoriales) a rendu plus difficile l’émergence d’une vraie territorialisation des politiques de l’emploi - L’amélioration structurelle du marché du travail constatée depuis deux ans s’explique en partie par une meilleure prise en compte de cette dimension qui a permis de mieux adapter les politiques menées à la réalité des bassins d’emploi • - La dimension territoriale est appelée à se développer, compte tenu de la multiplication des tensions sur le marché du travail et de la montée en puissance des régions, autour de la compétence formation et développement économique.-