218
géographique et à de multiples espèces d’alouettes vivant en climat tropical ou tempéré
(chapitre 6). En plus des alouettes cendrilles, j’ai examiné les alouettes à nuque rousse
(Mirafra africana) qui vivent en environnement tropical et deux espèces d’alouettes
néerlandaises, les alouettes des champs et les alouettes lulu (Lullula arborea) qui nichent en
zone tempérée. D’une manière intéressante, à l’échelle de l’OTU, bien que les analyses de la
diversité phylogénétique β ont montré que les communautés bactériennes du Kenya se
regroupent à l’écart des communautés issues des Pays-Bas, une analyse en réseau a révélé
que 47 des 75 principales OTUs sont communes, desquelles aucun pathogène potentiel n’a
été identifié. De plus, malgré l’absence de différences dans les propriétés immunitaires
parmi les œufs des diverses espèces d’alouettes entre habitats (excepté les alouettes lulu
dont la concentration en ovotransferrine est supérieure), chaque protéine antimicrobienne
a une fois encore été corrélée avec plusieurs caractéristiques bactériennes (ex. présence ou
absence de certaines OTUs et/ou abondance bactérienne).
Dans l’ensemble, les résultats de cette thèse fournissent de nouvelles perspectives dans
les relations entre les microbiomes associés aux coquilles d'œufs et les composés
antimicrobiens contenus dans l’albumen de ces œufs. Premièrement, la croissance sélective
d’espèces bactériennes singulières pourrait exister à la surface des coquilles d'œufs. Mis à
part les approches structurelle, phylogénétique et de diversité taxonomique abordées dans
cette thèse pour décrire le microbiome de ces coquilles, identifier les rôles fonctionnels de
ces micro-organismes devrait sans doute améliorer les connaissances portant sur les
stratégies qui contrôlent la survie embryonnaire. De plus, si les pathogènes sont rarement
présents dans les communautés microbiennes des coquilles d'œufs, comme cette thèse le
suggère, la quantité de protéines antimicrobiennes contenues dans les œufs d’oiseaux
pourrait alors être le reflet d’un investissement optimal. Ainsi, les fortes corrélations entre
les composés antimicrobiens et les micro-organismes des coquilles d'œufs seraient limitées.
Les risques restreints d’infections pourraient par conséquent réduire l’investissement
immunitaire maternel, généralement coûteux. Seules des études basées sur des expériences
ciblant des marqueurs fonctionnels (approche métagénomique) et leur expression
(approche transcriptomique) permettront l’identification des pathogènes et amélioreront
nos connaissances sur la sélection du microbiome des coquilles d'œufs. Plus généralement,
la plasticité génétique et phénotypique des femelles pourrait réguler l’investissement
immunitaire dans les œufs, constituant un aspect capital à approfondir pour comprendre
l’importance des microbes dans l’investissement maternel. La manipulation des
communautés microbiennes dans l’environnement de la femelle avant la ponte permettra
d’étudier si et dans quelle mesure la quantité de protéines antimicrobiennes déposées dans
l’albumen varie réellement en réponse à la pression microbienne environnementale. D’un
point de vue global, l’ensemble des résultats de cette thèse ouvre la voie à de futurs travaux
en éco-immunologie qui devront approfondir le rôle du microbiome des coquilles d'œufs,
via la sélection naturelle, sur l’investissement immunitaire maternel, ainsi que la nécessité
d’explorer la flexibilité physiologique des femelles au regard de la protection immunitaire.