L`Analyse appliquée du comportement (AAC)

publicité
CONSEILS- AUTISME
o
No 9, mars 2011
N 9, mars 2011
Renseignements et conseils sur les troubles du spectre de l’autisme (TSA)
L’analyse appliquée du comportement (AAC)
Qu’est ce que l’analyse appliquée
du comportement?
L’analyse appliquée du comportement
(AAC), aussi appelée analyse
comportementale appliquée (ACA)1, est
une approche structurée, basée sur la
théorie de l’apprentissage et la science
du comportement. L’AAC a deux volets
principaux : enseignement de nouvelles
compétences et de comportements
socialement acceptables et réduction
des comportements problématiques. Les
principes et méthodes de l’AAC ont fait
leurs preuves dans l’enseignement des
compétences et des comportements qui
contribuent à une bonne qualité de vie.
Dans l’appellation analyse appliquée du
comportement, chaque mot participe à la
description de l’approche.
Analyse : relation entre le comportement
et l’environnement
Appliquée : applicable à la vie
quotidienne
Comportement : phénomène observable
et mesurable
L’analyse appliquée du
comportement et les troubles du
spectre de l’autisme (TSA)
Malgré ce qu’on peut en dire, l’AAC
n’est pas réservée exclusivement à
la population autiste. Les principes
1 Veuillez noter que les appellations analyse appliquée du
comportement (AAC) et analyse comportementale appliquée
(ACA) sont deux traductions acceptées du terme anglais
Applied Behaviour Analysis (ABA).
de l’AAC découlent de la théorie de
l’apprentissage et sont mis en application
dans maintes activités d’enseignement.
Cela dit, il existe une différence
importante entre la population générale
(dite neurotypique) et la population
autiste. Les apprenants neurotypiques
s’adaptent plus facilement à différents
styles d’enseignement. Ils sont plus
flexibles dans leur apprentissage. Les
personnes ayant un TSA possèdent un
style d’apprentissage particulier auquel
les méthodes pédagogiques habituelles
ne sont généralement pas adaptées. Par
contre, les méthodes d’enseignement
associées à l’AAC correspondent au style
d’apprentissage particulier des personnes
ayant un TSA, d’où leur intérêt.
Plusieurs études démontrent l’efficacité
de l’AAC auprès des enfants autistes
d’âge préscolaire; par ailleurs, il existe
aussi des preuves de son efficacité auprès
d’individus plus âgés présentant un
trouble du spectre de l’autisme (TSA).
Quelle est la différence
entre l’analyse appliquée du
comportement (AAC) et
l’intervention comportementale
intensive (ICI)?
Il existe beaucoup de confusion entre
l’AAC ou ACA et l’ICI et cette confusion
est facile à comprendre étant donné que
les acronymes sont souvent utilisés de
façon interchangeable. En réalité, l’AAC
et l’ICI sont reliées, mais différentes. L’ICI
est l’application intensive des principes
1
CONSEILS- AUTISME
de l’AAC, c’est-à-dire que l’AAC est à la base
de l’ICI. L’intervention est considérée intensive
si on lui consacre plus de 21 heures par semaine
et si elle fait appel à différents programmes.
En Ontario, le programme d’ICI financé par le
gouvernement est géré par neuf fournisseurs
régionaux de services. Des lignes directrices
existent pour s’assurer que les programmes d’ICI
financés par des fonds publics sont offerts par des
professionnels compétents dans le domaine.
Les principes de l’analyse appliquée du
comportement
Un programme efficace basé sur l’AAC nécessite
une bonne compréhension des principes suivants :
• Le mot comportement fait référence à un
phénomène observable et mesurable, ce
qu’une personne fait ou dit;
• La collecte de données est essentielle pour
assurer la prise de décisions éclairées;
• L’analyse des antécédents (ce qui arrive
avant le comportement) et des conséquences
(ce qui arrive à la suite du comportement)
est essentielle pour comprendre la relation
entre le comportement et l’environnement
ainsi que la séquence d’apprentissage
A-B-C2 (Antécédent (A); Comportement (B);
Conséquence (C));
• La motivation est un élément clé de
l’apprentissage;
• L’utilisation de méthodes d’enseignement
précises facilite l’apprentissage de nouvelles
compétences et de nouveaux comportements.
Les méthodes d’enseignement
L’AAC est associée à des méthodes
d’enseignement spécifiques. Dans le but de
2 A-B-C : l’utilisation de la lettre B (behaviour) pour signifier
« comportement » est acceptée en français.
2
No 9, mars 2011
démystifier l’AAC et de démontrer son utilisation
au quotidien, des exemples de ces méthodes
seront présentés à la suite de la définition de
chacune.
Analyse de tâches : décomposer une tâche
en étapes afin que chaque étape puisse être
enseignée une à la fois.
Exemples : une recette, des instructions pour bâtir
un meuble, les étapes d’une tâche ménagère.
Enchaînement : stratégie utilisée pour enseigner
les étapes d’une tâche. Il y a deux types
d’enchaînement :
• Enchaînement à rebours : approche visant à
enseigner une tâche en commençant par la
dernière étape.
Exemple : aider l’enfant à attacher ses lacets,
mais il complète la dernière étape lui-même.
Une fois capable de compléter la dernière
étape, on lui enseigne à compléter les deux
dernières étapes, ensuite les trois dernières
étapes et ainsi de suite jusqu’à ce qu’il soit
capable d’attacher ses lacets lui-même.
• Enchaînement progressif : approche visant à
enseigner une tâche en commençant par la
première étape.
Exemple : apprendre un poème par cœur, une
ligne à la fois. L’élève dit la première ligne par
cœur et lit le reste du poème. Une fois qu’il
a appris la première ligne, il récite les deux
premières lignes par cœur et lit les autres.
Une ligne à la fois est ajoutée jusqu’à ce qu’il
ait appris le poème au complet.
Enseignement par essai distinct : stratégie
d’enseignement structuré comportant trois étapes
et un intervalle entre les essais
• Présentation du stimulus discriminatif (SD)
CONSEILS- AUTISME
• Réponse de l’élève
• Conséquence (renforcement pour une bonne
réponse ou correction pour une mauvaise
réponse)
Exemples : s’exercer à réciter les tables de
multiplications à l’aide de cartes-éclairs,
nommer la capitale d’une province désignée
par l’enseignant, imiter une action présentée
en exemple.
Façonnement : une nouvelle habileté est
enseignée à partir de ce que la personne peut
déjà faire, en changeant graduellement les
critères de renforcement (ce que la personne doit
faire avant de recevoir un renforçateur).
Exemple : l’instructeur de danse ajoute des
mouvements à la routine et fournit un
renforcement seulement après l’exécution de la
nouvelle routine au complet.
Incitation : informations ou indices
supplémentaires qui augmentent la probabilité
que la personne réponde correctement ou affiche
le comportement désiré.
Types d’incitations :
• Physique : guider physiquement l’individu
pour accomplir une tâche ou une action. Les
deux types d’incitations physiques sont les
suivants :
‑‑
Incitation physique complète : main sur
main.
Exemples : l’instructeur de ski place les
jambes de l’apprenant dans la position
de départ, le parent place sa main sur
la main de son enfant pour lui montrer
comment nettoyer la fenêtre.
‑‑
Incitation physique partielle : contact
physique léger et bref.
No 9, mars 2011
Exemples : l’instructeur de ski touche
légèrement la jambe avec laquelle
l’apprenant doit commencer sa descente,
le parent touche la main de son enfant
pour l’encourager à continuer à se
brosser les dents.
• Gestuelle : utiliser des gestes pour
communiquer les attentes.
Exemples : pointer du doigt, lever la main
pour indiquer « arrête », mettre un doigt sur
la bouche pour indiquer « silence. »
• Visuelle : fournir des appuis visuels pour
communiquer les attentes.
Exemples : la routine du matin est affichée
dans le vestiaire, utiliser des feux de
circulation pour informer la classe du niveau
de bruit permis, dresser une liste de tâches à
accomplir.
• Modelage (ou modélisation) : fournir un
modèle physique, verbal ou par vidéo.
Exemples : la vidéo d’instructions qui
accompagne le nouveau lave-vaisselle,
l’instructeur de danse exécute les
mouvements devant les élèves, le professeur
de musique vocale produit le son voulu.
• Verbale : donner des informations
supplémentaires oralement.
Exemples : répéter une consigne ou fournir
des consignes supplémentaires, dire les
premiers mots d’une réponse ou le premier
son d’un mot que l’élève doit lire.
• Positionnelle : placer le matériel afin
d’indiquer la façon de faire.
Exemples : placer l’objet demandé directement
en avant de l’apprenant, placer les souliers
de la bonne façon afin que l’enfant les mette
dans le bon pied.
3
CONSEILS- AUTISME
Hiérarchie des incitations : le niveau d’incitation
qui sera utilisé.
• Incitations décroissantes : on commence
avec un niveau d’incitation plus élevé et
graduellement on estompe les incitations
jusqu’à ce que la personne puisse répondre
de façon autonome. Cette hiérarchie est
efficace pour les nouveaux apprentissages
car elle assure un succès et évite que
l’apprenant fasse ou reproduise des erreurs
• Incitations croissantes : on commence
avec un niveau d’incitation inférieur et on
augmente le niveau d’incitation jusqu’à ce
que la personne réponde correctement. Cette
hiérarchie est plus efficace pour les habiletés
maîtrisées, car elle permet à l’individu de
répondre lui-même, évitant ainsi de devenir
« dépendant » des incitations pour passer à
l’action.
Contextes d’enseignement
L’enseignement peut se faire dans des contextes
différents :
• Séance d’enseignement direct :
l’enseignement est dispensé de façon
intensive, structurée et à l’aide de méthodes
directes, y compris les essais distincts.
Exemples : assister à des leçons de guitare, des
séances de tutorat.
• Enseignement en contexte naturel :
enseignement planifié ayant lieu dans une
situation authentique.
Exemples : apprendre à préparer son
dîner dans la cuisine, jouer de la guitare à
l’occasion d’un concert de jazz improvisé
(jam session).
• Enseignement fortuit : stratégie
d’enseignement qui profite des occasions qui
se présentent pour enseigner davantage.
4
No 9, mars 2011
Exemple : un élève apprend à compter
l’argent; on lui demande donc de compter
l’argent pour la journée pizza.
Le renforcement : une conséquence (à la suite
d’un comportement) qui augmente la probabilité
que le comportement se produise de nouveau
dans le futur. Le renforcement est un élément
essentiel de tout programme basé sur l’AAC.
• Renforcement positif : quelque chose que la
personne aime lui est donné à la suite d’un
comportement, ce qui a pour effet d’accroître
la fréquence du comportement en question.
Types de renforçateurs : social, tangible,
comestible, sensoriel, jeton.
Exemples : un joueur de hockey reçoit 1 $
pour chaque but compté (jeton), l’enfant va
chercher une vidéo après avoir terminé ses
devoirs (tangible).
• Renforcement négatif : quelque chose que
la personne n’aime pas (aversif) lui est
retiré à la suite d’un comportement, ce qui
a pour effet d’accroître la fréquence du
comportement en question.
Exemples : l’élève crie qu’il n’aime pas les
carottes et elles sont enlevées de son assiette;
une fois la ceinture de sécurité bouclée, la
sonnette arrête de faire du bruit.
Programme de renforcement continu :
le renforcement est donné à chaque fois que le
comportement désiré apparaît.
Programme de renforcement intermittent :
le comportement n’est pas renforcé à chaque fois
qu’il apparaît. Il y a quatre types de programmes
de renforcement intermittent :
• Renforcement à proportion fixe : le renforcement est donné après un nombre
fixe de réponses.
CONSEILS- AUTISME
• Renforcement à proportion variable : le renforcement est donné après un nombre
variable de réponses, selon une moyenne
déterminée.
• Renforcement à intervalle fixe :
le renforcement est donné pour la première
réponse après un intervalle de temps fixe,
toujours le même intervalle.
• Renforcement à intervalle variable : le renforcement est donné en fonction du
temps écoulé entre deux renforçateurs.
La durée de l’intervalle varie selon une
moyenne déterminée.
L’approche de l’AAC englobe plusieurs
méthodes d’enseignement. Il est indispensable
d’avoir une bonne compréhension de chaque
méthode et de sa mise en application pour
élaborer un programme axé sur l’apprentissage
sans erreur. L’apprentissage sans erreur vise
à structurer ou à organiser l’environnement
de manière à éviter les erreurs. Ceci permet à
l’apprenant de recevoir du renforcement plus
souvent et de vivre davantage d’expériences de
réussite.
Une fois que l’habileté est maîtrisée, il est
important d’assurer son maintien et sa
généralisation.
Maintien : capacité à utiliser les compétences
acquises au fil du temps sans avoir à les apprendre
de nouveau.
Exemples : être capable de faire du ski à
chaque année sans avoir recours à des leçons
supplémentaires, être capable de parler la langue
étrangère apprise lors de chaque voyage dans le
pays où cette langue est utilisée.
Généralisation : capacité à exécuter et à adapter
ce qui a été appris, à partir de consignes
différentes, dans des environnements différents,
avec des personnes différentes et avec du
matériel différent.
No 9, mars 2011
Exemples : être capable de conduire différentes
voitures de location, être capable d’ajuster ou
d’intégrer des recettes pour créer de nouveaux
mets.
Procédure de correction d’erreur : une démarche
planifiée face aux erreurs de l’apprenant. Bien
que l’apprentissage sans erreur vise à éviter que
les erreurs se produisent, il est impossible de
prévenir toutes les erreurs.
Deux types de procédure de correction d’erreur :
• Retour en arrière pour les erreurs dans
une séquence : fournir une incitation
immédiatement après la dernière étape
réussie et avant l’étape au cours de laquelle
l’erreur s’est produite.
• Donner la bonne réponse lorsque les
réponses sont erronées
Réduction des comportements
problématiques
Le deuxième volet de l’AAC vise à réduire
les comportements problématiques.
L’intervention en présence de comportements
problématiques est basée sur une Évaluation
fonctionnelle du comportement (EFC). La collecte
et l’analyse des données permettent d’examiner
systématiquement le comportement cible,
c’est-à-dire le comportement à modifier, afin
d’en découvrir la ou les fonctions. Les résultats
de l’EFC servent à élaborer un plan de soutien
adapté à chacune des fonctions répertoriées.
Le plan de soutien inclut aussi l’enseignement
d’un comportement de remplacement, c’est-àdire d’un comportement qui remplit la même
fonction que le comportement cible. Il est
important de prévoir un suivi continu afin de
relever l’existence ou l’absence de progrès chez la
personne en cause.
5
CONSEILS- AUTISME
La mise en œuvre des principes de l’AAC pour
réduire les comportements problématiques
exige une bonne compréhension des processus
d’évaluation, d’interprétation des données,
de formulation d’hypothèses et d’élaboration
des plans d’intervention. L’intégrité de cette
démarche repose essentiellement sur le travail
d’équipe, une équipe dont les membres ont une
bonne connaissance de l’analyse appliquée du
comportement.
No 9, mars 2011
Il existe des programmes d’études spécialisés
en AAC. Certains collèges de l’Ontario ont mis
sur pied un programme postdiplôme Autisme
et sciences du comportement. Ce programme est
offert en français à la Cité collégiale, avec l’option
de prendre les cours en personne ou en ligne à
temps plein ou à temps partiel. L’Université de
Brock offre un programme de maîtrise en AAC
(anglais seulement).
Une mise en application efficace de l’AAC exige
une bonne compréhension des principes qui la
sous-tendent ainsi que des stratégies et méthodes
de suivi qu’elle préconise. Bien qu’il puisse
sembler facile de mettre l’AAC en pratique,
il est également facile de manquer son coup.
L’approche par équipe et le suivi continu par un
professionnel compétent sont deux éléments qui
contribuent à la qualité d’une intervention ou à
l’efficacité d’un programme qui prend appui sur
l’AAC.
À propos de l’auteure
Suzanne Murphy compte 30 ans d’expérience dans le domaine de l’enfance et de la jeunesse, dont
plus de 20 auprès de la clientèle ayant un TSA. Elle agit également comme consultante spécialisée
pour Autisme Ontario en ce qui concerne les services en français offerts par cet organisme.
© 2011 Autism Ontario 416.246.9592 www.autismontario.com
Téléchargement