Baisse visuelle : quand le fond d`œil n`explique pas tout

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Cas clinique
Neuro-ophtalmologie
Baisse visuelle : quand le fond d’œil
n’explique pas tout
Visual loss: when the dilated fundus examination
does not explain the features
Z. Lazrak, C. Titah, C. Bok, C. Vignal-Clermont
(Service d’ophtalmologie, unité de neuro-ophtalmologie, fondation Adolphe de Rothschild, Paris)
Baisse d’acuité visuelle
• Hémianopsie latérale homonyme • Alexie • Hypertension
artérielle • Accident vasculaire
cérébral occipital.
Visual loss • Lateral homo­
nymous hemianopsia • Alexia
• Ar terial hyper tension
• Occipi­tal infarction.
U
ne patiente, âgée de 59 ans, droitière, d’origine gabonaise, consulte pour
une baisse visuelle bilatérale évoluant depuis deux semaines. Elle est dia­
bétique depuis 8 ans et son diabète est mal équilibré : son taux d’hémoglobine
glycosylée (HbA1C), qui doit généralement être inférieur à 7 %, s’élève à 9,6 %.
La sensation de voile prédomine sur l’œil droit ; elle est survenue au décours
d’une hospitalisation pour un épisode d’hypertension artérielle aiguë inaugu­
rale à 25 mmHg. L’examen du fond d’œil a alors conclu à un œdème papillaire
bilatéral. La symptomatologie oculaire persiste malgré l’équilibration de la
pression artérielle.
Examen
L’acuité visuelle est de 8/10 pour l’œil droit et 10/10 pour l’œil gauche. De près, elle
est très difficile à évaluer du fait d’une impossibilité de lecture. La vision est bonne
quand on effectue des tests par appariement mais la patiente ne peut lire les mots.
Nous notons également un problème de dénomination des couleurs.
L’examen du fond d’œil montre une rétinopathie mixte hypertensive et diabétique non
proliférante modérée avec un œdème maculaire focal (figure 1).
La tomographie par cohérence optique (Optical Coherence Tomography [OCT]) maculaire trouve une épaisseur centrale de 317 µm à droite et 280 µm à gauche (figure 2).
Légendes
Devant la discordance entre la plainte visuelle, l’acuité visuelle conservée de loin, la
rétinopathie peu sévère et la découverte d’une alexie, un champ visuel est demandé.
Celui-ci révèle la présence d’une hémianopsie latérale homonyme droite (figure 3).
Figure 1. Cliché en lumière verte de l’œil
droit (a) et de l’œil gauche (b) retrouvant
une rétinopathie diabétique non proliférante
modérée, une rétinopathie hypertensive
stade II et un œdème maculaire focal.
Une imagerie orbito-cérébrale avec injection de gadolinium en séquence diffusionperfusion et FLAIR montre la présence d’un accident vasculaire cérébral ischémique
(AIC) constitué, de siège occipital gauche (figure 4).
Le reste de l’examen neurologique est normal.
Discussion
Ce cas clinique illustre la survenue d’un AIC compliquant une hypertension artérielle
maligne, méconnue, chez une patiente à multiples facteurs de risque vasculaire. La
cause la plus fréquente des hémianopsies latérales homonymes est vasculaire ; les
accidents vasculaires cérébraux (AVC) sont ischémiques dans 80 % des cas et hémorragiques dans 20 % des cas. Les accidents ischémiques constitués représentent
75 % des AIC. L’athérosclérose en est la première cause, suivie par les cardiopathies
emboligènes.
L’hypertension artérielle est le plus puissant facteur de risque des AVC (risque relatif
[RR], entre 4 et 9), le diabète le multiplie aussi par 2 à 3 (1). Dans le cas de notre
patiente, il s’agissait d’un AIC du territoire vertébro-basilaire. La prédominance des
troubles visuels s’explique par le siège temporo-occipital des infarctus et plus précisément par l’atteinte de la voie ventrale et du système parvocellulaire.
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Images en Ophtalmologie • Vol. V • n° 1 • janvier-février-mars 2011
Figure 2. Tomographie par cohérence
optique (Optical Coherence Tomography
[OCT]) maculaire de l’œil droit (a) et de l’œil
gauche (b) : la dépression fovéolaire est
respectée.
Figure 3. Champ visuel de Goldmann de l’œil
droit (a) et de l’œil gauche (b) retrouvant une
hémianopsie latérale homonyme droite.
Figure 4. Imagerie par résonance magnétique (IRM) cérébro-orbitaire : coupes
axiales T2 (a), diffusion-perfusion (b),
FLAIR (c). Hypersignal au niveau du parenchyme cérébral correspondant à la zone
temporo-occipitale gauche ischémiée.
Cas clinique
Neuro-ophtalmologie
1a
1b
2a
2b
3a
3b
4a
4b
4c
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Cas clinique
Neuro-ophtalmologie
À ce niveau, les déficits possibles sont (2) :
▶▶ l’hémianopsie
latérale homonyme, les hallucinations visuelles ;
(troubles de la lecture) sans agraphie ;
▶▶ l’agnosie des objets et des couleurs ;
▶▶ si l’atteinte est bilatérale, la cécité corticale et le syndrome de Korsakoff.
▶▶ l’alexie
Le trouble visuel rapporté est lié à une hémianopsie latérale homonyme droite
associée à une alexie sans agraphie. Devant toute baisse d’acuité visuelle ou plainte
visuelle quelle qu’elle soit, la réalisation d’un champ visuel est indispensable. II
Références bibliographiques
1. Strandgaard S, Andersen GS, Ahlgreen P, Nielsen PE. Visual disturbances and occipital brain infarct
following acute, transient hypotension in hypertensive patients. Acta Med Scand 1984;216(4):417-22.
2. Perenin MT. Le syndrome occipital. Neurologie (17-036-F-10).
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