Le traitement médicamenteux personnel du patient lors des

Le traitement me
´dicamenteux personnel du patient lors
des hospitalisations de chirurgie programme
´e:
e
´tat des lieux, commentaires et propositions
Regular medication management during scheduled surgery hospitalizations:
inventory, comments and suggestions
G. KUSS
1
, Y. TSCHIRHART
2
, B. IDOUX
3
, B. MICHEL
1
1
Agence régionale de lhospitalisation dAlsace, 22, rue de lUniversité, 67003 Strasbourg Cedex
2
Direction régionale des affaires sanitaires et sociales, Cité Administrative Gaujot, 14 rue du Maréchal Juin, 67084 Strasbourg Cedex
3
CMRE HAS, UGECAM Alsace, Pôle Vallée de la Bruche, Centre Médical de Saâles, 67420 Saâles
Re
´sume
´.
La prise en charge du traitement me
´dicamenteux personnel du patient hospitalise
´en chirurgie programme
´e
pre
´sente la caracte
´ristique d’e
ˆtre situe
´ea
`l’interface des activite
´s de ville et hospitalie
`re. Le faible nombre de re
´fe
´ren-
tiels disponibles militait en faveur d’un e
´tat des lieux aussi complet que possible sur ce sujet. Celui-ci a e
´te
´re
´alise
´a
`
l’e
´chelle d’une re
´gion, sur 22 e
´tablissements publics, prive
´s et participant au service public hospitalier, par le moyen
d’entretiens pluridisciplinaires base
´s sur un questionnaire spe
´cifique. Les deux axes principaux de l’e
´tude ont
concerne
´les circuits des informations (circuit des prescriptions) et des me
´dicaments. Les re
´sultats ont permis de mettre
en e
´vidence la situation et la ne
´cessite
´d’optimiser l’organisation du circuit des informations, notamment concernant la
recherche et la transmission des donne
´es, et du circuit des me
´dicaments. En particulier, l’exhaustivite
´et l’actualite
´des
informations recueillies sont perfectibles, de me
ˆme que leur validation me
´dicale. L’utilisation des me
´dicaments appor-
te
´s par le patient n’est pas toujours justifie
´e, et leur stockage se doit d’e
ˆtre adapte
´. A la sortie, la transmission des don-
ne
´es et le retour des me
´dicaments doivent toujours e
ˆtre re
´alise
´s dans des conditions optimales. Suite a
`l’exploitation
de ces re
´sultats, dix recommandations ont e
´te
´e
´tablies puis pre
´sente
´es aux e
´tablissements de la re
´gion au cours de
re
´unions organise
´es dans chaque territoire de sante
´. Elles recouvrent l’ensemble des points d’ame
´lioration cible
´s.
Enfin, deux e
´valuations de pratiques professionnelles valide
´es par la Haute autorite
´de sante
´et adosse
´es a
`cette
e
´tude permettront aux e
´tablissements inte
´resse
´s d’approfondir leur de
´marche.
Mots cle
´s:
traitement me
´dicamenteux personnel, chirurgie, organisation
Abstract.
Managing regular medication for scheduled surgery inpatients is a sensitive issue since there is an overlap
between hospital and community pharmacy practices. Very few references dealing with this subject are available at
this time in France, which led us to try to establish an inventory of the different strategies adopted by hospitals throu-
ghout Alsace. The study presented in this article was carried out over 22 hospitals and clinics belonging to the same
French region, Alsace, and in which surgical activity takes place. For this purpose, inter-professional interviews were
done, using a specific questionnaire. Two main axes were developed and focused on in this study: recording and
transmission of medication histories, and drug use process. Results have clearly shown defects concerning drug infor-
mation recording: completeness and updating of data can be challenged. Medical validation of drug registration also
may be insufficient. Use of drugs brought by the patient may not be relevant, and storage may not be adapted. At the
end of the stay, information transfer and return of drugs brought by the patient may be inappropriate. Ten recommen-
dations were subsequently drafted, with the collaboration of the regional pharmacy inspection authorities, and aim at
being applied by hospitals in Alsace. Practice settings other than scheduled surgery are beyond their scope, although
many of the ideas and principles may be applicable. The finality is to propose simple guidelines and strategies to pre-
vent the main technical difficulties which may arise and have been targeted in this study. Moreover, two performance
assessments complementary to this study and approved by the French health authorities (Haute Autorite
´de Sante
´) will
allow interested healthcare facilities to improve their approach to managing patients’ regular medication.
Key words:
regular medication, surgery, organization
ARTICLE ORIGINAL ORIGINAL ARTICLE
J Pharm Clin 2008 ; 28 (1) : 39-46
doi: 10.1684/jpc.2009.0107
*Correspondance et tire
´sa
`part : G. Kuss
J Pharm Clin, vol. 28, n
o
1, janvier-fe
´vrier-mars 2009 39
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La maîtrise du circuit du médicament à lhôpital est un
aspect majeur de la sécurité de la prise en charge des
patients, liatrogénie médicamenteuse étant fréquente
[1-3]. Les événements indésirables graves de tous types sur-
venant durant lhospitalisation sévaluent à 1,3 pour 1 000
journées dhospitalisation en secteur médecine-chirurgie-
obstétrique [4], incidence recouvrant des erreurs de médi-
cation évitables [5, 6]. Lexistence dune interface ville-
hôpital peut engendrer des difficultés supplémentaires
dans la maîtrise du circuit du médicament. La communica-
tion entre professionnels est en jeu, et les règles de prise en
charge des médicaments apportés ne sont pas toujours clai-
rement définies. Des objectifs à atteindre en matière de ges-
tion des risques liés aux médicaments ont néanmoins été
élaborés, et sont encadrés par la double obligation pour
les établissements de santé dentrer dans les procédures
daccréditation [7] et de contractualiser avec lAgence
régionale de lhospitalisation dont ils relèvent [8, 9].
Lintérêt porté à la gestion des traitements médicamenteux
personnels à lhôpital sadosse aux résultats des procédu-
res daccréditation V2 de la Haute autorité de santé poin-
tant des défaillances à ce sujet [10], et est conforté par les
données de la littérature [11-15]. Ainsi, une étude néerlan-
daise a conclu que 25 % des médicaments en cours avant
ladmission ne figuraient pas dans le dossier médical
dhospitalisation, et quil y avait omission dau moins un
médicament pour 61 % des patients [16].
La présente étude sintéresse à la fois à la traçabilité de
linformation et au circuit des médicaments apportés par
les patients. Elle sadresse à lensemble des acteurs de la
prise en charge du patient : personnel médical et pharma-
ceutique, équipes soignantes.
Mate
´riels et me
´thodes
La méthodologie retenue est celle dune étude multicen-
trique, ciblant lensemble des établissements dAlsace
dans lesquels sexerce une activité chirurgicale. Les don-
nées ont été recueillies lors dun entretien multidisciplinaire
(a minima un pharmacien, un anesthésiste et un représen-
tant du personnel infirmier), conduit à partir dun question-
naire ciblant les principaux points critiques de la prise en
charge du patient en chirurgie programmée. Ce question-
naire a été préparé avec laide dexperts (pharmaciens
dont le pharmacien inspecteur régional, conseillère tech-
nique régionale en soins infirmiers, anesthésiste, cadre
de santé, et chargé de mission régional de la Haute auto-
rité de santé) puis validé par le bureau de lObservatoire
du médicament, des dispositifs médicaux et de linnova-
tion thérapeutique. Il est composé de trois parties : organi-
sation générale de létablissement, circuits des
informations et des médicaments, les deux dernières se
déroulant suivant lordre chronologique des étapes du cir-
cuit du patient (préadmission, admission, séjour, sortie).
Concernant le circuit des informations, les questions
posées ciblent les actions des interlocuteurs intervenant
dans le recueil des données et leur traçabilité. Les questions
relatives au circuit des médicaments visent à connaître le
devenir des médicaments apportés à lhôpital. Un établis-
sement a permis de tester le questionnaire afin dy appor-
ter les ultimes modifications, puis toutes les visites,
réalisées par la même personne, se sont échelonnées de
février à avril 2008. Les résultats sont fournis en pourcen-
tage du nombre détablissements visités, et pour certaines
questions, plusieurs réponses pouvaient être acceptées.
Au-delà des pourcentages relevés, certains schémas dor-
ganisation potentiellement optimisables ont permis lélabo-
ration des recommandations.
Re
´sultats
Vingt-deux établissements (publics, privés et participant au
service public hospitalier) sur les 23 sollicités ont effective-
ment participé à létude, ce qui représente au total 114
personnes. Les professions médicales, pharmaceutiques
et soignantes étaient représentées, ainsi que des qualiti-
ciens. Pratiquement toutes les spécialités chirurgicales
ayant une activité majoritairement programmée étaient
représentées, selon les principaux profils dactivité des éta-
blissements, notamment chirurgie générale, orthopédie,
chirurgie digestive et gynécologie.
Questions ge
´ne
´rales
Contrairement aux consultations danesthésie, les consul-
tations de chirurgie se font pour 50 % des établissements
en cabinet de ville. Une feuille de liaison est par ailleurs
fréquemment rédigée.
Au moment des visites, le circuit du médicament était infor-
matisé pour lensemble des services dans 14 % des établis-
sements, pour certains services dans 32 %, et ne létait pas
encore pour 54 % dentre eux. Une procédure traitant de
la gestion des traitements médicamenteux personnels est
en place dans 63 % des établissements, en cours de vali-
dation dans 5 %, et nest pas encore rédigée dans 32 %
dentre eux.
Circuit des informations
Les informations relatives au traitement médicamenteux
personnel peuvent être recherchées par plusieurs interve-
nants, qui pourront en réaliser une synthèse (tableau 1).
Le recueil commence toujours par un entretien avec le
patient. Le courrier du médecin traitant mentionnant le trai-
tement médicamenteux personnel est cité dans 41 % des
établissements. Il ne concerne toutefois que certains patients
et est rarement exhaustif (posologies et dosages non men-
tionnés), mais un duplicata de la prescription habituelle est
de plus en plus souvent associé au courrier adressé au chi-
rurgien. 18 % des établissements déclarent solliciter les
familles des patients, et dans 82 % des établissements, les
médicaments sont apportés en consultation danesthésie.
Dans la plupart des établissements (82 %) a été mise en
place une stratégie particulière : demande par affichage
en salle dattente dapporter une ordonnance actualisée,
feuille de liaison avec le médecin traitant fournie lors de la
prise de rendez-vous. Lautomédication (consommation de
médicaments inpendamment dune prescription médi-
cale) est systématiquement recherchée par les anesthésis-
tes ; les infirmiers posent cette question au patient dans
41 % des établissements.
La confirmation de lexactitude des informations recueillies
en amont est le plus souvent réalisée par linfirmier à lad-
mission, à laide des médicaments apportés.
La validation médicale des données recueillies peut être
faite par lanesthésiste (23 % des cas), le chirurgien
(45 % des cas), et/ou par un autre médecin (9 % des
cas). On peut dès lors considérer deux situations : celle
G. Kuss, et al.
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o
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´vrier-mars 2009
40
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dans laquelle les rôles ne sont pas clairement définis mais
où une validation a quand même lieu, mais aussi celle où il
ny aura pas de validation. Il arrive ainsi que des infirmiers
préparent des traitements non validés, mais aussi que les
médicaments habituels du patient soient inscrits par le
médecin sous le libellé « traitement personnel » sans
autre précision. Enfin, la feuille danesthésie sert fréquem-
ment de support de prescription, séparément de ceux utili-
sés en unité de soins. Lexhaustivité des données relatives
au traitement médicamenteux peut parfois être remise en
question.
Les libellés ne sont jamais convertis de manière systéma-
tique vers la dénomination commune internationale ou le
nom de spécialité. Dans la majorité des cas (68 %), le
libellé fourni par le patient est inscrit, la modification
étant effectuée par la pharmacie avec souvent une feuille
de liaison rappelant les équivalences. Dans 5 % des cas,
les 2 noms figurent automatiquement sur le dossier infor-
matisé. On peut concevoir les modifications de libellé
comme le passage dun médicament à un autre de la
même classe figurant au livret. Dans 68 % des établisse-
ments, cette substitution est proposée par la pharmacie et
ne sera effective quaprès accord médical ; dans les 32 %
restants, on utilise les médicaments apportés. Certaines
lignes de traitement peuvent être estimées non indispensa-
bles et suspendues (figure 1). Il arrive que la pharmacie
refuse de fournir certains médicaments, les médicaments
apportés par le patient sont alors souvent utilisés. Néan-
moins, si les prescripteurs suspendent un traitement, il est
très rare quils se prononcent sur sa reprise.
Lorigine des médicaments utilisés (pharmacie de létablis-
sement ou patient) peut être précisée. En pratique, dans
50 % des établissements, on ne précise pas de quel stock
les médicaments sont prélevés, dans 41 % dentre eux, il
existe une matérialisation de leur origine sur la prescrip-
tion ou dans les transmissions. Dans les 9 % restants, les
médicaments ne sont pas listés et il nest pas fait mention
de leur origine.
Le courrier de sortie fournit des informations sur le traite-
ment médicamenteux personnel de façon quasi complète
dans 54 % des cas : les médicaments sont nommés, mais
les posologies et dosages ne sont pas toujours repris. Dans
18 % des cas, seules les modifications apportées au traite-
ment antérieur au séjour y figurent, et dans 14 % des cas,
il nest pas du tout cité.
Le dossier accompagne le patient dans tous les transferts
internes. En cas de transfert vers un autre établissement,
linformation relative au traitement médicamenteux sera
transmise dans 27 % des cas par une édition de la feuille
de prescription du service, et dans 45 % des établisse-
ments, le courrier de sortie est lunique support de transmis-
sion dinformation. Certains médecins rédigent une lettre
brève pour le service daccueil juste avant le départ du
patient.
Le patient reçoit généralement une ordonnance de sortie
rédigée par le chirurgien, qui comporte uniquement les
médicaments associés aux suites opératoires. Cette ordon-
nance est systématiquement archivée dans 41 % des éta-
blissements, épisodiquement dans 32 %, et pas du tout
dans 27 % dentre eux ; le courrier de sortie reprendrait
alors ces informations. Une ordonnance dantibiotiques
sera par contre pratiquement toujours archivée.
Circuit des me
´dicaments
Il est systématiquement demandé au patient dapporter ses
médicaments en vue du séjour dans 59 % des établisse-
ments, fréquemment dans 32 % dentre eux et rarement
dans les 9 % restants. La demande est formulée dans la
majorité des cas en préadmission. Deux stratégies sont
envisageables : soit lon souhaite disposer des médica-
ments pour vérification et éventuellement pour pallier une
impossibilité de substitution, soit une utilisation systéma-
tique est prévue. Dans 14 % des établissements, suite à
un tri préalable, on demande au patient de napporter
quune partie de ses médicaments.
Lautogestion du traitement médicamenteux personnel est
systématique dans 14 %, fréquente dans 27 %, rare dans
41 %, et na jamais lieu dans 18 % des établissements ; le
traitement est alors géré par le personnel soignant. Lac-
cord médical attestant que les médicaments sont laissés à
la disposition du patient nest systématiquement rédigé
5 %
23 %
63 %
9 %
Toujours
Souvent
Rarement
Jamais
Figure 1.Fréquence de suppression de lignes de traitement
considérées comme non indispensables par les médecins
ayant participé à létude.
Tableau 1. Fonctions des personnes traitant les informations relatives au traitement médicamenteux personnel du patient et straté-
gies en place pour la synthèse des données.
Recherche
d’informations Participation a
`la synthe
`se
des donne
´es
Fonctions des personnes traitant les informations
Anesthe
´siste-re
´animateur (consultation d’anesthe
´sie) 22 e
´tablissements 16 e
´tablissements
Chirurgien (consultation en amont de l’admission) 17 e
´tablissements 11 e
´tablissements
Infirmier (au moment de l’admission) 20 e
´tablissements 18 e
´tablissements
Assistant ge
´ne
´raliste du service de chirurgie (admission) 2 e
´tablissements 2 e
´tablissements
Strate
´gies en place pour la synthe
`se des donne
´es
Document : feuille de liaison avec le me
´decin traitant, questionnaire d’anesthe
´sie
a
`remplir a
`domicile, demande d’apporter une ordonnance re
´cente du me
´decin traitant
6e
´tablissements Utilise
´s’il existe
Aucune synthe
`se en amont 4e
´tablissements
Toutes les valeurs chiffrées représentent le nombre détablissements ayant répondu « oui » à litem sur les 22 établissements visités.
Traitement personnel et chirurgie programme
´e
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o
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que dans 22 % des établissements. Il y a un accord oral ou
une inscription par linfirmier dans 18 % des cas. En cas
dautogestion, lobservance est validée dans 22 % des
établissements, et on demande au patient sil a pris son
traitement mais sans validation dans 31 % dentre eux ;
lhypothèse dune validation par le patient a été suggérée.
Les médicaments retirés sont stockés dans 82 % des cas
dans larmoire à pharmacie, et dans 55 % des cas, dans
un autre rangement situé en salle de soins. Dans un éta-
blissement, les médicaments apportés ne sont pas conser-
vés au service mais rendus à la famille à loccasion dune
visite. Les médicaments sont toujours individualisés les uns
des autres par patient, nominativement dans 95 % des éta-
blissements.
Concernant les alertes de pharmacovigilance par retrait
de lots, soit les médicaments hors dotation ne sont pas
pris en compte (73 % des établissements), soit les alertes
sont traitées quel que soit le médicament concerné (27 %).
Les pharmaciens des établissements ayant informatisé le
circuit du médicament ont la possibilité de savoir si le
médicament concerné a été prescrit, avec une transmis-
sion ciblée de lalerte aux services. Dans dautres établis-
sements non encore informatisés, la pharmacie transmet
lalerte aux cadres de santé, qui vérifient les feuilles de
prescription, ou bien léquipe pharmaceutique vérifie per-
sonnellement les armoires des unités de soins.
Lors du retour à domicile, les médicaments apportés par
les patients sont toujours rendus. Dans un établissement,
un item spécifique figure dans la check-list de sortie. En
cas de transfert, les médicaments sont rendus dans tous
les cas. Enfin, en cas de décès, les médicaments sont
adressés à la pharmacie dans 68 % des cas, pour destruc-
tion systématique, rendus à la famille avec les effets per-
sonnels du patient dans 59 % des cas, donnés à une
association humanitaire dans 5 % des cas et conservés
comme stock de dépannage au service dans 9 % des
cas. Le recyclage est généralement évité car lon ne peut
savoir si les médicaments ont été conservés en conditions
adéquates à domicile.
Discussion
La méthode retenue (visites avec interviews) pour mener
cette étude sur les traitements personnels en chirurgie pro-
grammée présente une limite, car les informations ainsi
collectées sont de nature déclarative. Elle présente néan-
moins de nombreux avantages : mise en œuvre simple,
reproductibilité, possibilité déclaircir certains points in
situ. Les réunions multidisciplinaires qui ont eu lieu à loc-
casion des interviews permettent de confronter les divers
points de vue et de recueillir des informations permettant
denrichir la réflexion sur ce sujet. Les visites sur place auto-
risent la présentation dune unité de soins, ou une démons-
tration du logiciel utilisé, ainsi que lobtention de
documents comme éléments de preuve.
Sur un plan général, le circuit des informations relatives au
traitement du patient est encore majoritairement basé sur
un support papier, mais la marche vers linformatisation
est en cours dans tous les établissements de la région.
Par ailleurs, la plupart des procédures en place (dans
68 % des établissements) concernent davantage le flux
des médicaments que celui des informations. Ces valeurs
sont à mettre en regard avec les résultats dune enquête
réalisée en 2007 par lObservatoire du médicament et
de linnovation thérapeutique de Corse et de Provence-
Alpes-Côte dAzur. Dans ces régions, 73,6 % des établis-
sements avaient diffusé une procédure de gestion des trai-
tements personnels, mais 38 % reconnaissaient quelles
nétaient pas appliquées [17], ce qui a également pu
être constaté lors des visites.
Linformation relative au traitement médicamenteux per-
sonnel se doit dêtre exhaustive afin de limiter liatrogénie
[11-13] ; il ne doit pas y avoir de doute sur le traitement
suivi par le patient, à toute étape de sa prise en charge.
Les soignants sont à même de rechercher linformation,
mais ladministration ne devra pas être réalisée sans
accord médical [18], au même titre que lorsque le patient
gère seul son traitement.
Les informations pourront être recueillies par plusieurs per-
sonnes, à différents moments de la prise en charge, parfois
par lintermédiaire dun document. La synthèse des don-
nées est une étape indispensable consistant à colliger tou-
tes les informations relatives au traitement médicamenteux
personnel sur un même support et à permettre la vérifica-
tion de ladéquation de ces données avec les thérapeuti-
ques prévues dans la suite de la prise en charge du
patient.
Le recueil réalisé par lanesthésiste sert de référence aux
soignants en cas de doute, mais il est rarement disponible
avant la visite préanesthésique.
Il est important de distinguer recueil de données et valida-
tion : le recueil peut être réalisé par un infirmier, mais une
validation médicale sera indispensable, de manière à
sassurer que les traitements antérieurs peuvent être pour-
suivis sans risque par rapport à la prise en charge prévue,
et à les modifier sil y a lieu. Dans certaines situations, la
suppression de lignes de traitement devra être envisagée
[19]. Ces dernières devraient alors être répertoriées dans
le dossier en tant quantécédent du patient.
Les libellés peuvent être modifiés par le prescripteur ou par
le logiciel de prescription, en faisant apparaître simultané-
ment le nom de spécialité et la dénomination commune
internationale, ce qui a son importance lors de la prépara-
tion des médicaments [20]. Ceci permet de confirmer
lidentité entre princeps et générique et de favoriser lem-
ploi de médicaments provenant de la dotation du service
de soins.
Lors dun transfert interétablissements, linformation nest
que rarement transmise de façon fiable, en supposant
que la prescription ne comporte pas derreur.
Si la demande au patient dapporter ses médicaments en
vue du séjour est fréquente, cela ne signifie pas pour
autant quils vont être utilisés : en effet, elle ne recouvre
souvent quun objectif de vérification. Dans certains éta-
blissements, le personnel a été habitué à vérifier laspect
et la date de péremption des médicaments, ceci quelle que
soit leur origine. Les médicaments apportés sont générale-
ment retirés au patient ; le personnel soignant sen charge,
ce qui permet une prise en compte des éventuelles modifi-
cations pour chaque horaire de prise.
En pratique, la gestion par le personnel soignant de len-
semble du traitement médicamenteux après retrait des
médicaments permet une distribution correspondant à la
prescription la plus récente, et peut laisser espérer une
meilleure observance dans le cas où le patient omettrait
la prise de ses médicaments. Un accord médical doit indi-
quer si des médicaments sont laissés à la disposition du
G. Kuss, et al.
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patient [21]. Pourtant, lautogestion fait généralement
suite à un accord passé avec le personnel soignant suite
à une demande du patient.
Si le patient gère seul son traitement, son observance ne
peut être validée de la même façon quen cas de prise en
charge par le personnel soignant, toutefois la question
mérite de lui être posée.
Un stockage adéquat des médicaments retirés se caracté-
rise par lidentification du patient tout au long du séjour,
par le maintien hors de portée des personnes non autori-
sées et dans des conditions de stockage adaptées (tempé-
rature, lumière, propreté) [21, 22]. Il devrait être situé
dans un local inaccessible aux personnes non autorisées
[21], comme la salle de soins, cependant le manque de
place est signalé. On peut ensuite envisager un rangement
dans larmoire à pharmacie, qui ferme à clé [21], mais il
sera alors important de séparer ces médicaments de la
dotation du service. Pour limiter ce risque de confusion, il
est aussi envisageable dutiliser un rangement dédié en
salle de soins, si possible fermant à clé [21].
Les médicaments apportés sont habituellement rendus,
mais on choisit parfois de ne pas le faire, en cas de phar-
macodépendance ou de péremption dun médicament par
exemple. On peut ainsi faire figurer un item spécifique
dans la liste à contrôler à la sortie du patient. Outre le
rappel, cette solution présente lavantage doffrir une tra-
çabilité en cas de contestation.
Propositions aux e
´tablissements
Sept points à améliorer peuvent donc être dégagés de
façon prioritaire à partir des résultats de cette étude
(tableau 2).
Suite aux constats et commentaires issus de cette analyse
de pratiques, des propositions ont pu être élaborées puis
discutées avec le pharmacien inspecteur régional. Un cer-
tain nombre de conditions devaient être respectées avant
détablir les propositions : respect de la législation exis-
tante [18, 21-23], simplicité des propositions, adaptabi-
lité à des situations variées, si possible sans se
restreindre à la chirurgie, traçabilité des actes et des don-
nées. En outre, une balance des avantages et des inconvé-
nients de chacune des solutions proposées doit avoir été
évaluée. Rappelons quil ny a pas encore de référentiel
national englobant lensemble des critères détude. Les dix
propositions ci-après ont été construites à partir des points
damélioration présentés précédemment (tableau 3).
Disponibilite
´du recueil au moment des consultations
Il serait particulièrement important de disposer dun recueil
complet : identification du patient, noms des médica-
ments, dosages et posologies. La solution proposée aux
établissements consiste à demander au patient un dupli-
cata de lensemble de ses ordonnances récentes, qui
pourra être porté au dossier, à laide dun document din-
formation donné au patient lors de la préadmission.
Le patient est anxieux au moment des consultations en pré-
vision de lintervention, et risque donc de commettre des
erreurs lorsquil décline son traitement. Par ailleurs, le
médecin traitant est la plaque tournante de son parcours
de soins et a connaissance de la prise en charge globale
de son patient. Un recueil faisant intervenir un profession-
nel de santé (médecin traitant ou à lavenir dossier phar-
maceutique) serait donc préférable à un questionnaire à
remplir à domicile ou à une liste rédigée par le patient.
Il est possible de demander au patient dapporter ses
médicaments en consultation, mais le tri prend du temps,
et certaines données peuvent manquer.
Une sensibilisation des médecins traitants à limportance du
rôle quils peuvent jouer dans ce processus semble justifiée.
De plus, ces derniers ont la possibilité, sils sont équipés et
avec laccord du patient, dutiliser le dispositif dhistorique
des remboursements de la sécurité sociale permettant dac-
céder à la liste des médicaments remboursés au cours des
12 derniers mois, et uniquement ceux-ci. Ce dispositif est
accessible grâce à la carte Vitale du patient et à la carte
de professionnel de santé du médecin, de façon sécurisée
[24]. En décembre 2007, 283 officines françaises étaient
Tableau 2. Synthèse des points à améliorer ressortant des résultats de létude.
E
´tape Points a
`ame
´liorer Re
´sultats illustrant ces points a
`ame
´liorer
Informations Pre
´admission Exhaustivite
´des informations recueillies concernant
le traitement me
´dicamenteux personnel
Autome
´dication non recherche
´eparlesinfirmiersdans59%descas
Dosages et posologies non re
´pertorie
´s sur les feuilles d’anesthe
´sie
Me
´dicaments personnels non re
´pertorie
´spare
´crit dans 2 e
´tablissements
Admission Mise a
`jour des donne
´es et synthe
`se De
´lai de prise en charge (entre consultation et admission) de 2 a
`6semainesen
moyenne
Consultations pre
´alables en ville dans 50 % des e
´tablissements (sans lien avec le
dossier patient hospitalier)
Coexistence de plusieurs supports de recueil
Ve
´rification me
´dicale de la compatibilite
´de la
poursuite du traitement avec les the
´rapeutiques
pre
´vues
Aucun praticien responsable de la validation dans 45 % des e
´tablissements
Donne
´es non valide
´es servant de base pour la pre
´paration des me
´dicaments
Sortie Transmission des informations lors du transfert et
trac¸abilite
´des donne
´es
Traitement me
´dicamenteux non pre
´cise
´dans les courriers de sortie dans 14 % des
cas
Feuille de liaison avec retranscription dans 82 % des e
´tablissements
Courrier de sortie arrive tardivement (en ge
´ne
´ral une semaine apre
`slasortie)
Me
´dicaments Admission Origine des me
´dicaments a
`utiliser Me
´dicaments apporte
´s par le patient utilise
´s(«souvent »otoujours ») dans
14 % des e
´tablissements
Conditions de stockage des me
´dicaments Me
´dicaments laisse
´s en chambre sans accord me
´dical dans 60 % des e
´tablissements
Stockage non nominatif dans 5 % des e
´tablissements
Sortie Retour des me
´dicaments apporte
´s par le patient Existence de stocks de de
´pannage issus de me
´dicaments personnels dans 9 % des
e
´tablissements
Traitement personnel et chirurgie programme
´e
J Pharm Clin, vol. 28, n
o
1, janvier-fe
´vrier-mars 2009 43
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