HEPATO GASTRO et Oncologie digestive D ossier thematique doi: 10.1684/hpg.2012.0722 Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 24/05/2017. Anal intraepithelial neoplasia: an underestimated pathology whose incidence increases. How to improve its screening and treatment ? Christophe Piketty ^ pital europeen Georges-Pompidou, Ho service d’immunologie clinique, 20, rue Leblanc, 75015 Paris, France oplasies Les ne pithe liales intra-e de l’anus : une affection e dont sous-estime l’incidence augmente. liorer Comment ame pistage et sa son de prise en charge ? Neoplasies intra- epith eliales de l’anus e-mail : <[email protected]> oplasie & Existe-t-il un lien entre la ne pithe liale et le cancer invasif intra-e de l’anus ? rin, il n’a pas Contrairement au cancer invasif du col ute et e demontre formellement par des etudes prospectives de lien direct entre n eoplasie intra- epith eliale de l’anus (NIA) de haut grade et cancer invasif de l’anus. Cependant, il n’y a pas v eritablement de raisons d’en douter. Dans la population g en erale, le cancer invasif de l’anus est un cancer rare, qui survient pr ef erentiellement chez la femme a partir de 60 ans avec une incidence de l’ordre de 0,5 a 1/100 000. Au cours de l’infection par le virus de l’immunod eficience humaine (VIH), le cancer invasif de l’anus est 100 fois plus fr equent que dans la population generale. Il survient principalement chez les hommes ayant des rapports sexuels avec d’autres hommes (HSH) vers 45 ans avec une incidence evalu ee a 100/100 000 dans certaines etudes. Or, c’est bien chez les HSH infectes par le VIH que l’on trouve les incidences les plus elevees de NIA de haut grade. En effet, dans une etude prospective du groupe de Palefsky, l’incidence de NIA de haut grade chez des HSH infect es par le VIH etait de 50 % apres quatre ans de suivi [1]. Cela est un argument indirect fort pour penser que l’histoire naturelle de l’infection par papillomavirus a haut risque du canal anal, qui conduit a l’apparition de NIA de bas grade, puis de haut grade, puis au cancer anal invasif, est tr es proche la logique de d de celle du col uterin. D’ou evelopper et valuer le d epith eliales anales d’e epistage des lesions intra- et les strat egies de leurs traitements. ‘‘ Au cours de l’infection par le virus ficience humaine (VIH), de l’immunode quent le cancer anal invasif est 100 fois plus fre ne rale que dans la population ge ’’ & Quelles sont les similitudes entre oplasies intra-e pithe liales anales ne et cervicales ? Il existe de grandes similitudes entre NIA anales et cervicales. Ces l esions surviennent toutes deux sur la zone de jonction entre epith elium malpighien et epithelium la muqueuse est plus glandulaire. Il s’agit d’une zone ou fragile, favorisant la p en etration et la persistance des papillomavirus. La distribution des g enotypes de papillomavirus trouv es sur le canal anal peut diff erer de celle trouv ee sur le col mais le g enotype 16 principalement incrimin e dans la survenue de cancer invasif est dans les deux cas le virus le plus fr equemment mis en evidence [2]. L’aspect cytologique et histologique des l esions intra epith eliales du col et du canal anal est tout a fait comparable. On utilise la m^ eme classification pour d ecrire les l esions cytologiques (l esions squameuses de signification ind etermin ee [ASCUS], l esions squameuses intra- epith eliales de bas grade [LSIL], l esions squameuses Pour citer cet article : Piketty C. Les neoplasies intra-epitheliales de l’anus : une affection sous-estimee dont l’incidence augmente. Comment am eliorer son d epistage et sa prise en charge ? Hepato Gastro 2012 ; 19 : 363-366. doi : 10.1684/hpg.2012.0722 HEPATO-GASTRO et Oncologie digestive vol. 19 n8 5, mai 2012 363 HEPATO GASTRO et Oncologie digestive D ossier thematique Neoplasies intra- epith eliales de l’anus Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 24/05/2017. intra-epitheliales de haut grade [HSIL]) et les l esions histologiques (NIA de grade I, II et III, carcinome anal in situ). La plupart des etudes de cytologie anale disponibles concernent des populations d’HSH infect es par le VIH ou non et retrouvent une sensibilit e et une sp ecificit e de la cytologie comparable a celle observee avec la cytologie du col. Il semble que chez les HSH infect es par le VIH, la sensibilite et la sp ecificit e de la cytologie soient meilleures chez les patients ayant un d eficit immunitaire plus important probablement en lien avec des l esions endocanalaires plus etendues. oplasies intra& Pourquoi les ne pithe liales de l’anus sont-elles plus e quentes chez les hommes fre s par le VIH ayant infecte des rapports sexuels avec d’autres hommes ? l’existence d’une De nombreuses etudes ont montre association entre immunod eficience li ee au VIH, infection par papillomavirus et d eveloppement d’une n eoplasie anale. Tous ces travaux ont port e principalement sur des HSH seropositifs pour le VIH compar es a des HSH non infectes par le VIH. Ainsi, il apparaı̂t clairement que NIA et les infections par papillomavirus sont plus fr equentes chez des patients infect es par le VIH. La pr evalence des NIA et des infections par papillomavirus augmente chez les patients ayant un deficit immunitaire s ev ere. La pr evalence de l’infection par papillomavirus et des NIA est d ej a plus elev ee chez les patients ayant un chiffre de lymphocytes T CD4 inferieur a 500/mm3 en comparaison aux patients seronegatifs. On peut consid erer que plus de 95 % des patients HSH infect es par le VIH sont porteurs d’une infection par papillomavirus au niveau du canal anal avec souvent une infection par de multiples g enotypes de papillomavirus alors que les HSH non infect es par le VIH sont porteurs d’une infection par papillomavirus dans 70 % des cas avec souvent un seul g enotype. D’autres etudes ont egalement montr e que l’on pouvait mettre en evidence une infection par papillomavirus au niveau du canal anal chez des patients infect es par le VIH n’ayant jamais de rapports sexuels anaux. Cela sugg ere que le papillomavirus n’est pas seulement un virus sexuellement transmissible, mais il peut egalement se comporter comme un pathogene opportuniste en situation d’immunod epression. Ainsi, chez les patients HSH infect es par le VIH, ces deux facteurs vont expliquer le caract ere quasi constant et persistant de l’infection par papillomavirus anale et son caractere multiple. Autant de facteurs permettant d’expliquer la prevalence et l’incidence elev ees de NIA induites par la persistance d’infections par papillomavirus multiples. 364 ‘‘ Le papillomavirus n’est pas seulement un virus sexuellement transmissible, galement se comporter comme mais il peut e ne opportuniste en situation un pathoge pression d’immunode ’’ risque ? & Y a-t-il d’autres groupes a tudes ont Au cours de l’infection par le VIH, plusieurs e mis en evidence une pr evalence elev ee d’infections par papillomavirus anales et de NIA chez la femme : une infection par papillomavirus peut ^ etre mis en evidence dans 75 % des cas et des NIA dans 25 % des cas. Dans une etude, nous avons compar e la pr evalence de l’infection par papillomavirus et des NIA chez des patients homosexuels infect es par le VIH et des usagers de drogues infect es par le VIH. Il a et e v erifi e au moyen d’un autoquestionnaire que les usagers de drogues n’avaient jamais eu de rapport anal r eceptif. Les r esultats ont mis en evidence une prevalence importante de NIA (36 %) et d’infections par papillomavirus anales (46 %) chez les usagers de drogues infect es par le VIH n’ayant jamais eu de rapport anal r eceptif. L’analyse multivari ee montrait que le risque de NIA chez les patients usagers de drogues est li e au d eficit immunitaire [3]. Cela justifie de proposer un d epistage de NIA au cours de l’infection par le VIH chez tous les HSH mais aussi chez les femmes ayant pr esent e une n eoplasie intra epith eliale cervicale et chez tous les patients non homosexuels ayant pr esent es des condylomes ano-g enitaux. Peu d’ etudes sont disponibles en dehors de l’infection par le VIH et notamment chez les patients greff es. Quelques travaux ont mis en evidence la pr esence de NIA chez des patients greff es r enaux en l’absence de toute exposition sexuelle. De plus, plusieurs etudes de cohorte ont mis en evidence un sur-risque de survenue de cancer anal invasif chez des patients greff es recevant un traitement immunosuppresseur. On peut donc consid erer que toute personne immunod eprim ee, quelle qu’en soit la cause, peut ^ etre a risque de d evelopper une infection par papillomavirus anale et une NIA. & Au cours de l’infection par le VIH, la restauration immunitaire sous troviral est-elle traitement antire associee a une diminution oplasies de l’incidence des ne pithe liales de l’anus ? intra-e La question de l’impact de la restauration immunitaire valence et l’incidence de sous trith erapie sur la pre HEPATO-GASTRO et Oncologie digestive vol. 19 n8 5, mai 2012 D ossier thematique Entretien avec l’expert HEPATO GASTRO et Oncologie digestive Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 24/05/2017. Neoplasies intra- epith eliales de l’anus l’infection par papillomavirus et des dysplasies est aujourd’hui cruciale. Il est possible que la suppression de la r eplication du VIH et la restauration immunitaire globale observee sous trith erapie puissent s’accompagner d’une restauration des reponses immunitaires sp ecifiques vis- a-vis ^ du papillomavirus permettant un controle de l’infection par papillomavirus et une r egression des NIA de haut grade vers des NIA de bas grade ou vers la normale, diminuant ainsi le risque de survenue de cancer invasif du col ou du canal anal. Mais, a l’inverse, si les trith erapies n’ont que peu d’impact sur la regression des NIA de haut grade ou la progression des NIA de bas grade vers des hauts grades, le risque de survenue de cancers invasifs pourrait augmenter du fait de l’augmentation de la survie des patients. Peu de donnees sont actuellement disponibles pour etayer ces hypotheses. Chez la femme, plusieurs etudes ont tent e de repondre a cette question. Dans la plupart de ces etudes, il etait observe une tendance a la diminution de la sev erit e des neoplasies intra- epith eliales du col au cours de la restauration immunitaire sous traitement antir etroviral alors que la prevalence et l’incidence de l’infection par papillomavirus du col ne semblaient pas affect ees. Chez l’homme, peu de r esultats sont actuellement disponibles. Mais, dans la plupart des etudes publi ees, la restauration immunitaire sous traitement antir etroviral ne semble pas s’accompagner d’une diminution de la s ev erit e des NIA voire a l’inverse favorise une aggravation des l esions. Ces r esultats sont assez concordants avec les etudes de cohortes sur l’incidence du cancer invasif du col et du canal anal qui sugg erent une stabilit e, voire une diminution, de l’incidence du cancer invasif du col et une tendance a l’augmentation de l’incidence du cancer invasif du canal anal malgre la gen eralisation des traitements antiretroviraux efficaces [4]. L’ensemble de ces r esultats sugg ere que les HSH infectes par le VIH restent a risque de d evelopper un cancer anal malgr e une restauration immunitaire sous traitement. ‘‘ La restauration immunitaire sous troviral ne semble pas traitement antire ve rite s’accompagner d’une diminution de la se oplasies intra-e pithe liales anales, voire a des ne sions l’inverse favorise une aggravation des le pister & Comment peut-on de oplasies intra-e pithe liales les ne de l’anus ? ’’ gie appliqu Dans l’ideal, la strate ee dans le d epistage des l esions du col devrait s’appliquer. C’est- a-dire : proposer une cytologie anale au moins une fois par an aux HSH infectes par le VIH et, en cas d’anomalies cytologiques, solution a l’aide r ealisation d’une anuscopie de haute re d’un colposcope avec application successive d’acide ac etique et de Lugol sur la muqueuse pour identifier les l esions et guider la biopsie [5]. Cependant, il faut admettre que si cette strat egie de d epistage est valid ee pour le depistage des lesions du col, elle ne l’est pas v eritablement pour les l esions anales. Aujourd’hui, on se heurte en France a un manque evident de forces vives pour organiser le d epistage. La cytologie commence a ^ etre r ealis ee dans les centres prenant en charge les patients s eropositifs, mais la plupart des proctologues ne sont pas equip es et form es a la r ealisation de l’anuscopie haute r esolution et ne sont probablement pas assez nombreux pour r epondre a la demande que l’on pourrait estimer a environ 80 000 patients infect es par le VIH. C’est la raison pour laquelle faute de mieux les recommandations du rapport YENI 2010 proposent de r ealiser un toucher rectal et si possible une anuscopie simple, ce qui permettra essentiellement de d epister un cancer anal invasif debutant. gie Il faut admettre que si la strate pistage est valide e pour le de pistage de de sions du col, elle ne l’est pas ve ritablement des le sions anales pour les le ‘‘ ’’ e & Y a-t-il une prise en charge valide des neoplasies intra-epitheliales de l’anus ? pistage vient aussi du fait que La limite de l’int er^ et du de ^nisation peut une co contrairement a la situation du col ou ^ etre proposee en cas de lesions de haut grade, il n’est evidemment pas possible de proposer un geste chirurgical d elabrant en cas de l esions anales de haut grade. Ainsi, de nombreuses approches th erapeutiques sont propos ees reposant le plus souvent sur l’exp erience des equipes et noter rarement sur des r esultats d’ etudes randomis ees. A cependant quelques essais recemment publies suggerant une efficacit e de l’imiquimod en application endocanalaire sur des NIA de haut grade et sur l’infection par papillomavirus elle-m^ eme [6]. & Y a-t-il une place pour le vaccin anti-papillomavirus dans vention des ne oplasies la pre pithe liales de l’anus chez intra-e s par le VIH ? les patients infecte Les r esultats d’un essai randomis e contre placebo du Gardasil1 chez le garçon entre 16 et 26 ans ont HEPATO-GASTRO et Oncologie digestive vol. 19 n8 5, mai 2012 365 HEPATO GASTRO et Oncologie digestive D ossier thematique Neoplasies intra- epith eliales de l’anus Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 24/05/2017. recemment conduit la FDA a approuver la vaccination des Etats-Unis. Dans cet jeunes garçons par le Gardasil1 aux essai, l’analyse d’un sous-groupe d’environ 600 HSH a demontre l’effet protecteur du vaccin sur la survenue de NIA chez les personnes n’ayant pas d’infection par papillomavirus evolutive au pr ealable [7]. Peu de donn ees sont actuellement disponibles sur l’efficacite des deux vaccins pr eventifs chez les patients immunodeprim es. Chez l’adulte, l’immunog enicit e du et e evalu ee chez une centaine hommes vaccin Gardasil1 a infectes par le VIH. Il a et e observ e une bonne tol erance et une bonne immunog enicit e incitant a evaluer l’efficacit e du vaccin dans ce groupe de patients. Il est clair que le vaccin pr eventif ne peut ^ etre efficace chez des patients ayant une infection par papillomavirus anale evolutive. Cependant, lorsque l’on sait que le genotype 16 des papillomavirus est a l’origine d’environ 70 a 80 % des cancers du canal anal, on pourrait imaginer de cibler les patients n’ayant pas d’infection anale par papillomavirus 16 active d etect ee par PCR, ce qui represente 50 a 60 % des HSH infect es par le VIH. Esperons que des essais th erapeutiques randomis es pourront ^etre menes rapidement dans cette population cible. 366 re ^ts : aucun. Conflits d’inte & fe rences Re 1. Palefsky JM, Holly EA, Efirdc JT, et al. Anal intraepithelial neoplasia in the highly active antiretroviral therapy era among HIV-positive men who have sex with men. AIDS 2005 ; 19 : 1407-14. 2. Abramowitz L, Jacquard AC, Jaroud F, et al. Human papillomavirus genotype distribution in anal cancer in France: The EDiTH V study. Int J Cancer 2011 ; 129 : 433-9. 3. Piketty C, Darragh TM, Da Costa M, et al. 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