HEPATO GASTRO et Oncologie digestive D ossier thematique Neoplasies intra-epitheliales de l‘anus oplasies Les ne pitheliales intra-e de l’anus : que s a faire ! de progre Anal intraepithelial neoplasia. Such progress to be made! Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 24/05/2017. Maximilien Barret Groupe hospitalier Diaconesses-Croix Saint-Simon, service de proctologie medico-interventionnelle, 18, rue du Sergent-Bauchat, 75012 Paris, France e-mail : <[email protected]> Le sur-risque de cancer de l’anus ne concerne pas s par le virus de l’immunoque les patients infecte ficience humaine (VIH) ! de Sunesen KG, Nørgaard M, Thorlacius-Ussing O, et al. Immunosuppressive disorders and risk of anal squamous cell carcinoma: a nationwide cohort study in Denmark, 1978-2005. Int J Cancer 2010 ; 127 : 675-84. ‘‘ Cette grande etude de cohorte a l’echelle d’une population confirme les modifications recentes de l’epidemiologie du carcinome epidermoı̈de anal et son lien avec l’immuno-depression. viations Abre VIH NIA RIS AHR ficience humaine virus de l’immuno-de pithe liale de l’anus neoplasie intra-e rapport d’incidence standardise solution anuscopie de haute re Pour citer cet article : Barret M. Les neoplasies intra-epitheliales de l’anus : que de progres a faire ! Hepato Gastro 2012 ; 19 : 356-362. doi : 10.1684/hpg.2012.0721 356 HEPATO-GASTRO et Oncologie digestive vol. 19 n8 5, mai 2012 doi: 10.1684/hpg.2012.0721 L’infection de l’ epith elium anal par des g enotypes oncogenes de papillomavirus humains est a la fois fortement prevalente (au regard de l’incidence du cancer de l’anus) et transitoire [1]. Le paradigme actuel est que ^te suscite et acc l’immuno-depression de l’ho el ere la transition de l’infection par les papillomavirus vers la NIA, puis le carcinome epidermoı̈de invasif. D’une part, cette hypothese est soutenue par l’incidence accrue de ce cancer chez les malades immuno-d eprim es par une infection par le VIH, une h emopathie maligne, ou un traitement immuno-suppresseur dans les suites d’une transplantation d’organe. D’autre part, la restauration de la fonction immunitaire des malades infect es par le VIH par les traitements antir etroviraux n’a pas diminu e (au contraire) l’incidence de ce cancer [2]. Par ailleurs, nous ne disposons que de peu de donn ees sur l’incidence du cancer de l’anus chez les patients atteints de maladies auto-immunes. L’objectif des auteurs etait donc d’obtenir des donn ees epid emiologiques relatives au carcinome epidermoı̈de de l’anus chez des malades immuno-deprim es. Les patients provenaient d’une grande cohorte nationale danoise suivie durant 27 ans (1978-2005). Chez les 4 448 patients infect es suivis par le VIH, les 21 cas de cancer anal n’int eressaient que les hommes (77 % de l’effectif), correspondant a un RIS (RIS = nombre de cas observ es/nombre de cas attendus compte tenu de l’^ age, du sexe, et de la p eriode) de 81 (IC 95 % : 52-122). L’incidence du cancer de l’anus etait multipli ee par 5,6 enement des (IC 95 % : 1-117) dans la periode de l’av antir etroviraux. Concernant les 5 113 patients transplant es et les 30 165 patients ayant une h emopathie maligne, le RIS etait respectivement de 14,4 (IC 95 % : 7-26,5) et de 2,3 (IC 95 % : 1,1-4). Enfin, sur les 242 114 patients suivis pour maladie auto-immune, le RIS etait de 1,3 (IC 95 % : 1-1,5), avec une grande h et erog en eit e selon les diagnostics (RIS de 3,5 [IC 95 % : 1,5-7] chez les 11 188 patients ayant une maladie de Crohn). D ossier thematique Revue bibliographique HEPATO GASTRO et Oncologie digestive Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 24/05/2017. Neoplasies intra-epitheliales de l‘anus Le risque le plus eleve a ete observe chez les hommes infectes par le VIH depuis plus de dix ans, pris en charge avant le developpement des antiretroviraux et me^me s’ils avaient ensuite beneficie d’une therapie antiretrovirale. Le risque est aussi augmente chez les patients transplantes d’organe, ceux ayant une hemopathie maligne ainsi que ceux ayant une maladie auto-immune, en particulier une maladie de Crohn. Ce sur-risque a ete rattache aux traitements immuno-suppresseurs et, pour la maladie de Crohn, aux lesions ano-perineales chroniques. En definitive, ce travail, sans aller jusqu’a justifier un depistage, incite a garder en memoire dans notre pratique l’incidence accrue du cancer du canal anal chez les patients immuno-deprimes. ’’ Les limites de la restauration immunitaire. . . Crum-Cianflone NF, Hullsiek KH, Marconi VC, et al. Infectious Disease Clinical Research Program HIV Working Group. Anal cancers among HIV-infected persons: HAART is not slowing rising incidence. AIDS 2010 ; 24 : 535-43. La morbi-mortalit e infectieuse a consid erablement diminue chez les patients infect es par le VIH depuis l’avenement des traitements antir etroviraux, permettant l’augmentation de leur esp erance de vie. Cependant, les cancers « classiques » sont a pr esent plus fr equents que les cancers definissant le stade sida de l’infection (sarcome de Kaposi, lymphome non hodgkinien). Parmi ceux-ci, le carcinome epidermoı̈de de l’anus est d’un int er^ et particulier. Son lien avec l’infection par les papillomavirus oncogenes et l’immuno-d epression aurait du se traduire par une diminution de son incidence sous antir etroviraux, or certains chiffres publi es se sont av er es discordants [3, 4]. Le but du travail etait de d eterminer l’incidence du carcinome epidermoı̈de de l’anus et les facteurs associ es au developpement de ce cancer chez des patients infect es par le VIH. Les auteurs ont analys e les donn ees collect ees prospectivement a partir d’une cohorte am ericaine de patients infectes par le VIH suivis de 1985 a 2008. Les malades de statut VIH incertain, diagnostiqu es avant 18 ans ou avant 1985, ayant un ant ec edent de cancer de l’anus, ou encore de sexe f eminin etaient exclus. 4 506 patients ont et e ainsi suivis pendant 23 ans. Dix-neuf patients ont pr esent e un cancer de l’anus, et 73 % des cancers sont survenus apr es 2002. Au moment du diagnostic du cancer, l’^ age m edian etait de 42 ans, le d elai median de survenue du cancer etait de 13 ans, le taux median de lymphocytes T CD4 etait de 432/mm3, et troviraux 88 % des patients avaient reçu des antire pendant une m ediane de 78 mois. L’incidence du cancer a augment e de 11/100 000 patient-ann ees a 55/100 000 patient-ann ees entre la p eriode pr ec edant et la p eriode suivant l’introduction des traitements antir etroviraux (respectivement avant et apr es 1995), et jusqu’ a 128/100 000 patients-ann ees pour la p eriode 2006-2008. Une infection par le VIH ancienne (au-del a de 15 ans) multipliait par 12 le risque de cancer anal par rapport a une infection r ecente (moins de cinq ans) ( p < 0,001). Les facteurs ind ependamment associes au risque de cancer etaient le stade sida et un nadir de lymphocytes T CD4 bas (< 50/mm3). ‘‘ L’incidence elevee et en croissance continue du carcinome epidermoı̈de de l’anus chez les hommes infectes par le VIH, en depit de l’introduction des antiretroviraux retrouvee dans cette etude, vient confirmer les donnees d’etudes precedentes [4-6]. Ce travail permet par ailleurs d’identifier certains facteurs de risque surajoutes tels que l’anciennete de l’infection par le VIH et un antecedent d’immuno-depression severe. Le traitement antiretroviral n’augmente pas en lui-me^me le risque de cancer, mais ne parvient pas a enrayer le processus tumoral entraı̂ne par les papillomavirus au niveau ano-genital. Ainsi, l’incidence de cette tumeur a depasse, dans les groupes a risque des homosexuels masculins et des patients infectes par le VIH, celle du cancer du col de l’uterus chez les femmes avant le depistage par frottis. En attendant des mesures preventives efficaces, la seule option est le depistage et le traitement des NIA chez ces patients. ’’ oplasie intra-e pithe liale au cancer chez De la ne s par le VIH. . . les patients infecte Kreuter A, Potthoff A, Brockmeyer NH, et al. German Competence Network HIV/AIDS. Anal carcinoma in human immunodeficiency virus-positive men: results of a prospective study from Germany. Br J Dermatol 2010 ; 162 : 1269-77. L’incidence et la pr evalence des NIA et des carcinomes epidermoı̈des de l’anus sont largement d ecrites dans les groupes a risque. Par contre, les travaux s’int eressant a la progression de la NIA de haut grade vers le cancer, et aux caract eristiques virologiques, morphologiques et pronostiques des tumeurs qui en r esultent, sont rares. L’objectif principal de cette etude allemande etait HEPATO-GASTRO et Oncologie digestive vol. 19 n8 5, mai 2012 357 HEPATO GASTRO et Oncologie digestive D ossier thematique Neoplasies intra-epitheliales de l‘anus Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 24/05/2017. d’evaluer, dans une cohorte de patients homosexuels masculins et infect es par le VIH, la pr evalence des NIA et des cancers de l’anus. Les objectifs secondaires etaient l’analyse des genotypes de papillomavirus impliqu es dans ces cancers et leur r eponse aux traitements. Les patients etaient inclus de façon prospective et multicentrique, ^mes et leurs ant quels que soient leurs sympto ec edents proctologiques. Un frottis anal avec examen cytologique et une recherche de papillomavirus, suivi d’une AHR avec biopsies des lesions visibles etaient r ealis es a l’inclusion chez chaque malade, puis r ep et es tous les ans, et plus frequemment si des anomalies etaient mises en evidence. Toute NIA prouv ee etait trait ee par electrocoagulation, imiquimod ou acide trichlorac etique. Les cancers de la marge anale etaient r es equ es et les cancers du canal anal traites par radio-chimioth erapie. De 2003 a 2009, 446 homosexuels masculins infect es par le VIH ont ete inclus, d’^ age m edian 41 ans (18-72). Le ^le immuno-virologique de la maladie contro etait globaedian = 470/mm3, lement bon (lymphocytes T CD4 m charge virale m ediane = 53 copies/mL), 28 % des patients etaient au stade sida et 67 % etaient sous antiretroviraux a l’admission. En outre, la moiti e des patients etaient fumeurs. Le suivi moyen etait de 20,5 (067) mois. Les pr evalences des NIA de bas et de haut grade, et des cancers etaient respectivement de 36,5, 35 et 2,5 %. Tous les cancers contenaient des g enotypes de papillomavirus a haut risque, le g enotype 16 dans plus de la moitie des cas, et etaient associ es a une infection par un plus grand nombre de g enotypes. Vingt pour cent des cancers de la marge anale etaient associ es au g enotype 16 versus 83 % des cancers du canal anal. Seuls cinq patients ayant refus e les traitements ont evolu e de la NIA de haut grade au cancer, en une dur ee moyenne de 8,6 mois. ‘‘ Ce travail confirme le caractere oncogene de l’infection par de multiples genotypes de papillomavirus, en particulier le genotype 16 chez les homosexuels masculins infectes par le VIH. Le carcinome epidermoı̈de de la marge anale apparaı̂t de meilleur pronostic et plus faiblement associe au genotype 16 par rapport au carcinome du canal anal. Fait important, la progression de la NIA de haut grade vers le cancer chez ces patients etait rapide, en moins d’un an. Ceci doit nous inciter a traiter au plus vite les NIA de haut grade, d’autant plus dans cette population de patients parfois difficiles a suivre. En conclusion, cet essai constitue la derniere marche avant ^le evaluant le benefice l’essai randomise contro de la prise en charge precoce des NIA sur la morbi-mortalite par cancer de l’anus. ’’ 358 merge e Condylomatose anale : la partie e de l’iceberg ! Schlecht HP, Fugelso DK, Murphy RK, et al. Frequency of occult high-grade squamous intraepithelial neoplasia and invasive cancer within anal condylomata in men who have sex with men. Clin Infect Dis 2010 ; 51 : 107-10. Certains g enotypes de papillomavirus peuvent induire une NIA de haut grade, puis un carcinome epidermoı̈de. D’autres g enotypes, consid er es a faible risque, n’induisent que des condylomes. Dans tous les cas, la s equence est ^te est immuno-d d’autant plus rapide que l’ho eprim e, en particulier par le VIH. En pratique, les diff erents genotypes coexistent dans l’ epith elium anal, chez des malades a la fois souvent immuno-d eprim es et sexuellement actifs. L’objectif des auteurs etait d’ evaluer la pr evalence des NIA de haut grade et des cancers de l’anus occultes chez des homosexuels masculins op er es de condylomes anaux. L’ etude incluait 319 patients dont 159 infect es par le VIH, ^le immunologique satisfaisant mais 50 % avec un contro de persistance d’ARN viral. L’^ age moyen etait de 37 ans ^mes rapport (18-73). Les sympto es etaient une masse palpable (82 %), un saignement (41 %), une douleur (26 %) et un prurit (20 %). En histologie, 63 % des patients avaient une NIA de bas grade, 34 % avaient une NIA de haut grade et 3 % avaient un cancer. En outre, 47 % des patients infect es par le VIH avaient un cancer ou une NIA de haut grade versus 26 % des patients s eron egatifs pour le VIH ( p = 0,002). Sept des huit cancers concernaient des patients infect es par le VIH. Pour finir, les performances de la cytologie anale pour le diagnostic de NIA de haut grade, r ealis ee chez moins de 50 % de l’effectif, etaient les suivantes : sensibilit e = 90 %, sp ecificit e = 33 %, les r esultats etant meilleurs dans le groupe VIH+ que dans le groupe VIH-. ‘‘ Une prevalence, avoisinant les 50 % de NIA de haut grade ou de cancer sur les pieces operatoires de condylomes de patients infectes par le VIH est coherente avec les donnees de la litterature [7]. De me^me, pour la prevalence quasiment doublee par rapport aux patients seronegatifs pour le VIH. En depit du biais de selection evident de cette etude (qui n’a recrute que des patients ayant une condylomatose severe non traitable en consultation), ce travail a pour merite de rappeler l’importance de l’analyse histologique des condylomes chez les homosexuels masculins, en particulier s’ils sont infectes par le VIH. En effet, la forte prevalence de NIA de haut grade et de cancers dans cette situation est susceptible de modifier la prise en charge ulterieure. HEPATO-GASTRO et Oncologie digestive vol. 19 n8 5, mai 2012 D ossier thematique Revue bibliographique HEPATO GASTRO et Oncologie digestive Neoplasies intra-epitheliales de l‘anus Des strategies de surveillance, faisant par exemple appel a la cytologie anale, dont les auteurs nous rappellent la validite, ou a des traitements visant a prevenir les recidives condylomateuses, pourraient trouver leur place chez ces patients. ’’ Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 24/05/2017. oplasies intra-e pithe liales cervicales et anales : Ne ^ me combat ? me Santoso JT, Long M, Crigger M, Wan JY, et al. Anal intraepithelial neoplasia in women with genital intraepithelial neoplasia. Obstet Gynecol 2010 ; 116 : 578-82. L’infection par les papillomavirus oncog enes est responsable de neoplasies intra- epith eliales au niveau du col de l’uterus, du vagin et de la vulve chez les femmes immunocompetentes. L’idee d’une association aux NIA en raison des similitudes anatomiques, histologiques et embryologiques de l’anus et du col de l’ut erus a suscit e cette etude. De plus, les donnees manquent quant a la pr evalence des NIA chez les femmes, les etudes s’ etant jusqu’alors surtout interessees aux homosexuels masculins infect es par le VIH. Par ailleurs, en l’absence de recommandations univoques, un arbitrage doit ^ etre fait pour le diagnostic entre la cytologie anale et l’AHR avec biopsies. Les objectifs de l’etude etaient, d’une part, d’estimer la prevalence des NIA chez des femmes h et erosexuelles ayant un antecedent de n eoplasie intra- epith eliale g enitale, d’autre part, de comparer les performances diagnostiques de la cytologie anale avec celles de l’AHR. Ont ainsi ete incluses 205 patientes cons ecutives, d’^ age moyen 40 ans (14-83), parmi lesquelles 64 % etaient sexuellement actives et 5 % etaient infect ees par le VIH. ecologique, un frottis anal, puis une Apres l’examen gyn AHR avec des biopsies en cas d’anomalie etaient r ealis es. Une NIA a ete diagnostiqu ee chez 25 patientes (12 %), avec une repartition respective des grades I, II et III de NIA de 4, 2,5 et 6 %. Outre les NIA, des condylomes ont et e retrouves chez 5,5 % des patientes. La cytologie anale, anormale chez 6 % des patientes, avait une sensibilit e de 8 %, une specificit e de 94 %, une valeur pr edictive positive de 15 % et une valeur pr edictive n egative de 88 %. Les performances diagnostiques de l’AHR etaient les suivantes : sensibilit e de 100 %, sp ecificit e de 71 %, valeur predictive positive de 32 % et valeur pr edictive n egative de 100 %. Les diff erences entre les deux tests etaient statistiquement significatives. ‘‘ La prevalence de 12 % de NIA, majoritairement de haut grade, chez les femmes atteintes de neoplasies intra-epitheliales genitales de cette etude est comparable a celle de 19 % deja publiee [8]. Elle vient confirmer que l’infection par les papillomavirus est une maladie multifocale de l’epithelium ano-genital chez la femme. Dans le contexte de l’infection par le VIH, la frequence de l’association semble e^tre largement augmentee [9]. Ces neoplasies intra-epitheliales evoluent de plus ensemble vers les cancers correspondants, le risque de cancer de l’anus etant pres de 5 fois plus eleve chez les patientes ayant un antecedent de neoplasie intra-epitheliale cervicale de grade III [10]. Il s’agit donc de depister, au moins a l’echelon individuel, les NIA chez les femmes atteintes de neoplasie genitale. La tres faible sensibilite de la cytologie anale realisee ici par un seul medecin non entraı̂ne, comparee aux taux de 60 a 93 % rapportes chez d’autres groupes a risque [11] a fait preferer aux auteurs l’AHR comme outil de depistage des NIA. En l’absence de consensus sur les modalites de depistage, on peut seulement en conclure que la prise en charge des neoplasies intra-epitheliales genitales n’est plus l’affaire des seuls gynecologues. ’’ Les performances diagnostiques du frottis de l’anus. . . Nathan M, Singh N, Garrett N, et al. Performance of anal cytology in a clinical setting when measured against histology and high-resolution anoscopy findings. AIDS 2010 ; 24 : 373-9. Alors que, gr^ ace aux frottis cervico-vaginaux, l’incidence du cancer du col de l’ut erus a consid erablement d ecru depuis les ann ees 1980, celle du cancer de l’anus n’a cess e d’augmenter, en particulier dans les groupes a haut risque. Or, ces deux cancers se d eveloppent tous les deux sous l’effet de g enotypes oncog enes de papillomavirus, a la jonction entre l’ epith elium malpighien et l’ epithelium glandulaire, en passant par une n eoplasie intra- epitheliale interessant une proportion de plus en plus importante de l’ epith elium. Le standard diagnostique est l’examen histologique de biopsies guid ees par une AHR, mais le ^t de cet examen fait envisager la promotion du frottis cou anal a vis ee cytologique pour d epister les NIA de haut grade. L’objectif des auteurs etait d’ evaluer les performances diagnostiques de la cytologie anale de d epistage. Tous les patients consultant dans une clinique anglaise sp ecialis ee en maladies sexuellement transmissible et ayant b en efici e d’une AHR avec biopsies, pr eced ee e inclus. L’AHR, la cytologie, d’une cytologie anale, ont et ainsi que les analyses cytologiques et histologiques ont et e r ealis ees par des praticiens exp eriment es. HEPATO-GASTRO et Oncologie digestive vol. 19 n8 5, mai 2012 359 HEPATO GASTRO et Oncologie digestive D ossier thematique Neoplasies intra-epitheliales de l‘anus Sur les 395 patients inclus, 584 frottis et 288 biopsies ont ete examines. Il s’agissait de 93 % d’hommes et 54 % etaient infectes par le VIH. La sensibilit e et la sp ecificit e de la cytologie etaient respectivement de 70 (IC 95 % : 64-75) et 67 % (IC 95 % : 38-88). Pour la d etection des NIA de haut grade, la sensibilit e etait de 81 % (IC 95 % : 70-90), et sa valeur pr edictive n egative de 85 % (IC 95 % : 76-92). La sensibilit e etait meilleure quand au moins deux quadrants de l’anus etaient atteints et quand les patients etaient infect es par le VIH. Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 24/05/2017. ‘‘ Les chiffres de sensibilite du frottis de l’anus varient de 69 a 93 % dans la litterature [12]. De plus, le biais de selection de la population dans ce travail n’est pas different de celui des autres travaux sur la question, souvent realises dans des centres tertiaires. L’experience des praticiens est importante. En effet, la realisation du geste par des examinateurs peu entraı̂nes (cf. le travail de Santoso et al. sus-cite) ou par les patients euxme^mes [13] semblent donner des resultats inferieurs. Si le frottis anal ne s’est pas encore diffuse en France (par manque de moyens surtout. . .), il est possible que ses performances diagnostiques ainsi que son co^ut avantageux par comparaison avec l’AHR contribuent a sa diffusion dans les annees a venir. Il faudra alors former les proctologues, les infectiologues, les dermatologues, les anatomo-pathologistes. . . ’’ dical efficace L’imiquimod : un traitement me oplasies intra-e pithe liales de haut des ne grade ? ‘‘ Fox PA, Nathan M, Francis N, et al. A double-blind, randomized controlled trial of the use of imiquimod cream for the treatment of anal canal high-grade anal intraepithelial neoplasia in HIV-positive MSM on HAART, with long-term follow-up data including the use of open-label imiquimod. AIDS 2010 ; 24 : 2331-5.. L’incidence du carcinome epidermoı̈de de l’anus ne cesse de croı̂tre chez les homosexuels masculins infect es par le VIH, avec des incidences proches de 100/100 000 patientannees [14] (contre 1 a 2 pour 100 000 dans la population generale). La prise en charge th erapeutique de leur l esion preneoplasique, la NIA, fait appel a des traitements vari es. Les traitements ablatifs, qu’il s’agisse de la r esection chirurgicale ou de la destruction au bistouri electrique, au laser CO2 ou a la coagulation infrarouge, donnent des taux de succes variant de 62 % de r emission a un an pour la 360 86 % de re mission coagulation infrarouge a a trois ans pour la chirurgie [11]. Mais leur usage n’est pas adapt e a des NIA non seulement multifocales mais r ecidivantes, pour lesquelles on privil egie donc des traitements pharmacologiques. Parmi ceux-ci, l’acide trichlorac etique est largement utilis e, avec 71 % d’efficacit e a un an [15], mais avec l’inconv enient d’applications r ep et ees et de cr eation de l esions cicatricielles. L’imiquimod est un immuno-modulaet teur local, antiviral et antitumoral qui pr esente l’int er^ d’^ etre auto-applicable par le patient. Son usage est valid e dans les n eoplasies intra- epith eliales vulvaires de haut grade et dans le traitement des condylomes anaux extracanalaires. Son b en efice dans le traitement des NIA ^l a et e sugg er e par plusieurs essais non contro es. L’objectif des auteurs etait d’ evaluer l’efficacit e de l’imiquimod dans le traitement des NIA de haut grade par un essai ^l multicentrique, randomis e et contro e en double aveugle et contre un placebo. Les patients inclus etaient des homosexuels masculins infect es par le VIH, sous traitement antir etroviral depuis plus de trois mois et avec un bon ^le immunologique. Apr contro es confirmation de la NIA par AHR, on apprenait aux patients a appliquer la cr eme a raison d’un demi-sachet trois fois par semaine pendant quatre mois. La r eponse etait evalu ee par l’AHR a six mois. Ont et e ainsi inclus 64 patients dont 11 ont ete perdus de vue. Les deux groupes etaient comparables pour l’^ age (42 ans), la proportion de fumeurs, l’anciennet e de l’infection par le VIH (moyenne de plus de dix ans) et le ^le sous traitement antir es un suivi bon contro etroviral. Apr m edian de 36 mois, le taux de disparition de NIA de haut grade etait de 61 % avec un b en efice significatif en faveur de l’imiquimod ( p = 0,003) et peu d’effets secondaires (un seul arr^ et pour intol erance). Il s’agit du premier essai therapeutique de haut niveau de preuve scientifique dans le domaine des NIA. Le taux d’efficacite est comparable a celui de 45 % a 75 % rapporte anterieurement [16-18]. En outre, le suivi particulierement long (jusqu’ a 79 mois) a permis aux auteurs de donner des taux de recidives fiables et de documenter deux cancers. Depister les NIA peut conduire a un diagnostic et donc a une prise en charge du carcinome epidermoı̈de de l’anus a un stade precoce. Mais l’intere^t principal de cette demarche est de traiter la NIA pour prevenir le cancer. L’imiquimod apparaı̂t donc comme une alternative acceptable a des traitements ablatifs mutilants mais, compte tenu de la difficulte diagnostique, de la frequence et de la possibilite de regression spontanee des NIA de bas grade, on ne doit pour l’instant traiter que les NIA de haut grade [11]. ’’ HEPATO-GASTRO et Oncologie digestive vol. 19 n8 5, mai 2012 D ossier thematique Revue bibliographique HEPATO GASTRO et Oncologie digestive Neoplasies intra-epitheliales de l‘anus rapeutique de l’infection Vers un vaccin the par les papillomavirus ? Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 24/05/2017. Anderson JS, Hoy J, Hillman R, et al. A randomized, placebo-controlled, dose-escalation study to determine the safety, tolerability, and immunogenicity of an HPV-16 therapeutic vaccine in HIV-positive participants with oncogenic HPV infection of the anus. J Acquir Immune Defic Syndr 2009 ; 52 : 371-81. rapie visant les ge notypes La piste d’une immunothe oncogenes de papillomavirus et permettant de prendre a la racine la question de la NIA et du cancer anal a fait l’objet de nombreuses publications depuis le d ebut des annees 2000. En effet, la persistance de l’infection par les papillomavirus liee a l’absence de r eponse immunitaire efficace et l’expression de ses prot eines E6 et E7 sont ^le oncog n ecessaires a ce virus pour exercer son ro enique. Une immunotherapie utilisant une fusion de ces deux proteines dans le g enotype 16 a montr e, dans des etudes precliniques, qu’elle pouvant induire une r eponse immunitaire specifique par le biais de lymphocytes T cytotoxiques. Des etudes de phase 1 ont confirm e sa bonne tolerance chez des volontaires sains. L’objectif des auteurs etait d’evaluer l’immunog enicit e et la tol erance de ce vaccin dans sa population cible : les homosexuels masculins infectes par le VIH atteints de pathologies proctologiques liees aux papillomavirus. Les autres crit eres ^le immuno-virologique d’inclusion etaient un bon contro du VIH, et l’absence de perturbation significative des bilans hepatiques, r enaux et de l’h emogramme. Les es entre cinq cohortes, l’une patients etaient randomis recevant un placebo, et les quatre autres trois injections de l’immunotherapie en intramusculaire a des doses differentes, et ceci en aveugle des observateurs. Un frottis anal, une AHR et des pr el evements biologiques etaient r epetes pendant 36 semaines. Les 35 patients inclus avaient un ^ age m edian de 47 ans (35-58), 94 % etaient sous traitement antir etroviral, avec ^le de la maladie, 34 % des AHR un bon contro etaient en faveur d’une NIA et tous les patients etaient infectes par des genotypes oncog enes de papillomavirus. Aucun effet indesirable severe ou toxicit e limitant la dose n’a et e rapporte. Les effets ind esirables ont et e des r eactions au point d’injection et un syndrome pseudo-grippal. Le taux d’anticorps antigenotype 16 a augment e d’un facteur 4 chez 96 % des patients vaccin es, et une augmentation d’un facteur 3 du taux d’interf eron gamma a et e observ ee chez 71 % des patients vaccin es. ‘‘ Aucune etude n’a a ce jour etabli que le traitement des NIA diminuait la mortalite, ni me^me l’incidence du carcinome epidermoı̈de de l’anus. Si l’essentiel de la litterature sur le sujet debat des outils et des modalites optimales du depistage, les traitements des NIA restent pour l’instant insuffisants, du fait de leur faible efficacite ou encore de leurs effets secondaires. La recidive de l’infection par les papillomavirus conduit a des traitements repetes de moins en moins acceptables. La solution pourrait resider dans la prevention de l’infection par les papillomavirus : cela supposerait une vaccination de tous les jeunes hommes contre les genotypes oncogenes de papillomavirus (essentiellement 16 et 18) avant le debut de leur activite sexuelle. Mais cela supposerait de vacciner toute une population pour seulement proteger le sousgroupe des futurs homosexuels masculins infectes par le VIH. Ce travail, d’une methodologie rigoureuse, a demontre la securite et la bonne tolerance a moyen terme d’un vaccin therapeutique antigenotype 16 dans sa population cible. Cependant, le faible nombre de patients inclus ne permettait pas de mesurer un effet sur la regression des NIA. Le developpement du vaccin therapeutique devra encore au moins surmonter les deux problemes majeurs que sont, d’une part, l’immuno-depression parfois profonde des patients concernes (ces malades etaient exclus du present essai), et, d’autre part, l’implication, particulierement verifiee chez les homosexuels masculins infectes par le VIH de multiples genotypes oncogenes de papillomavirus. ’’ ventif du carcinome Vers un vaccin pre pidermoı̈de de l’anus ? e De Vuyst H, Clifford GM, Nascimento MC, et al. Prevalence and type distribution of human papillomavirus in carcinoma and intraepithelial neoplasia of the vulva, vagina and anus: a meta-analysis. Int J Cancer 2009 ; 124 : 1626-36. Les carcinomes epidermoı̈des de l’anus, de la vulve et du vagin, dont l’incidence varie de 1 a 2/100 000, ont vu leur fr equence augmenter dans les pays occidentaux depuis les ann ees 1970. Leurs facteurs de risque sont communs avec le cancer du col de l’ut erus : immuno-d epression, ^le de tabagisme et partenaires sexuels multiples. Le ro certains genotypes de papillomavirus a haut risque tels que le g enotype 16 a et e d emontr e dans la gen ese de ces cancers [19]. Alors que se d eveloppe dans le contexte de la pr evention du cancer du col de l’ut erus des vaccins antipapillomavirus ciblant les g enotypes 16 et 18 ou 16, 18, HEPATO-GASTRO et Oncologie digestive vol. 19 n8 5, mai 2012 361 HEPATO GASTRO et Oncologie digestive D ossier thematique Neoplasies intra-epitheliales de l‘anus Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 24/05/2017. 6, et 11, les auteurs se sont int eress es a la fr equence des differents genotypes de papillomavirus dans les cancers et neoplasies intra- epith eliales vulvaires, vaginales et anales en realisant une m eta-analyse des essais consacr es a ces pathologies. Au total, 93 essais, parmi lesquels 63 essais sur les l esions vulvaires, 14 sur les l esions vaginales et 29 sur les l esions anales, publi es entre janvier 1986 et mars 2008, ont et e analys es. Les crit eres d’eligibilite etaient : une recherche de l’ADN de papillomavirus par PCR chez au moins quatre patients, une description precise des amorces de PCR et de la technique de typage du papillomavirus, et une s eparation des donnees relatives aux n eoplasies intra- epith eliales et aux cancers. La prevalence globale des papillomavirus etait de respectivement 68, 85 et 40,5 % pour les 90 n eoplasies intraepitheliales vulvaires de grade I, les 1 061 n eoplasies intra-epitheliales vulvaires de grade II/III, et les 1 873 carcinomes vulvaires. Elle etait de respectivement 100, 90 et 70 % pour les 107 n eoplasies intra- epith eliales vaginales eoplasies intra- epith eliales vaginales de grade I, les 191 n de grade II/III et les 136 carcinomes vaginaux. Elle etait enfin de respectivement 91,5, 94 et 84,5 % pour les 671 NIA de grade I, les 609 NIA de grade II/III et les 955 cancers de l’anus. Parmi les cancers associ es aux papillomavirus, le g enotype 16 etait pr esent dans plus de 75 % des cas, et le g enotype 18 dans moins de 10 % des cas. Parmi les patients atteints de NIA de haut grade, l’infection par le VIH etait associ ee a une plus haute prevalence de papillomavirus, un plus fort taux d’infection par des genotypes multiples, et une relative sousrepresentation du g enotype 16. ‘‘ Les taux d’infection par les papillomavirus dans les cancers anaux et vaginaux de cette etude sont encore plus eleves que ne le laissait supposer la litterature [19], et approchent ceux decrits pour le cancer du col de l’uterus (environ 87 %), qui ont notamment justifie le developpement d’un vaccin anti-papillomavirus tetravalent chez les femmes jeunes. Les resultats de ce travail nous suggerent quant a eux que 40 % des carcinomes vulvaires, 60 % des carcinomes vaginaux et 80 % des carcinomes anaux pourraient e^tre evites par un vaccin prevenant l’infection par les genotypes 16 et 18. Mais atteindre ce dernier objectif supposerait, connaissant l’epidemiologie du cancer de l’anus, d’arriver a vacciner des homosexuels masculins infectes par le VIH avant le debut de leur activite sexuelle. ’’ 362 re ^ts : aucun. Conflits d’inte & fe rences Re 1. Shvetsov YB, Hernandez BY, McDuffie K, et al. Duration and clearance of anal human papillomavirus (HPV) infection among women: the Hawaii HPV cohort study. Clin Infect Dis 2009 ; 48 : 536-46. 2. Powles T, Robinson D, Stebbing J, et al. Highly active antiretroviral therapy and the incidence of non-AIDS-defining cancers in people with HIV infection. J Clin Oncol 2009 ; 27 : 884-90. 3. Engels EA, Pfeiffer RM, Goedert JJ, et al., for the HIV/AIDS Cancer Match Study. 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