Les cahiers de La Médicale - n° 12
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PROFESSIONNELS DE
SANTÉ : LE NOMBRE
OU LA RÉPARTITION ?
La question du nombre de praticiens
dans une discipline donnée (médecine,
chirurgie-dentaire, soins infirmiers, etc.)
a trop longtemps occulté le véritable
problème. Car enfin, augmenter ou
diminuer de quelques centaines ou
milliers d’unités les effectifs de telle
ou telle discipline ne change rien ou
pas grand-chose. Le problème n’est
pas – ou pas seulement – le nombre
de praticiens d’une discipline donnée
mais leur répartition sur le territoire
national. Aujourd’hui les déserts
médicaux s’accroissent. Et on a toujours
eu tendance à répondre à cette situation
par l’augmentation du numerus clausus
là où il existe ou, plus généralement, par
l’augmentation du nombre d’étudiants
en formation là où le numerus clausus
n’existe pas. La contraction de la
démographie (moins de médecins,
moins de chirurgiens-dentistes…) exige
d’autres pistes de réflexion. Que faire
pour attirer le jeune diplômé là où l’on
a besoin de lui ?
La démographie
des professions de santé :
pour une nouvelle grille de lecture
des déséquilibres et des moyens de les réduire
Il existe des initiatives locales, des
aides diverses décidées par tel ou tel
département ou canton afin d’inciter
ce praticien à s’installer. Il faut saluer
de telles initiatives qui répondent à
l’urgence. Mais la solution ne peut être
que globale. Et surtout se situer dans
un schéma d’incitation et non pas de
coercition. Enfin ne pas fustiger trop
facilement les professionnels de santé
à qui on demanderait, à contre-courant
de tout, d’aller exercer là où plus aucune
structure ne perdure (« dans des champs
de betteraves » selon une récente formule
du docteur Legmann, président de l’Ordre
National des Médecins – Le Quotidien
du Médecin du 7/02/2012).
DEUX LÉGITIMITÉS
INCOMPATIBLES ?
Dans son acception la plus large, la
démographie médicale est aujourd’hui
atteinte d’un virus, celui « de la grande
mutation ». Ce virus se caractérise
notamment par les symptômes suivants :
• des effectifs en régression ou en
stagnation ;
• une population vieillissante de
praticiens ;
• des déséquilibres densitaires
importants. Certaines régions, ou
villes restent richement dotées en
praticiens de toutes spécialités ou
de toutes disciplines tandis que pour
d’autres, « arracher » un rendez-vous
chez un pédiatre, un ophtalmologue,
accéder à un médecin généraliste
peut relever de la gageure…
• …Ceci dans un contexte de
vieillissement de la population
française, avec comme corollaire,
une augmentation de la demande
de soins. On nous parle certes
aujourd’hui d’une natalité dynamique
dans notre pays mais il faudra de
nombreuses années, pour autant que
ce dynamisme perdure, pour
inverser
la tendance.
Un effet «ciseaux»
se produit donc, matérialisé par
une baisse et une répartition
territoriale inégale de l’offre de soins
s’accompagnant d’une demande,
elle, croissante.
A ce stade, une question mérite
d’être posée : ne pouvait-on prévoir
ces phénomènes ? N’a-t-on pas trop
tardé avant de les appréhender et de
commencer à agir ?