TRIBUNE
La Lettre du Rhumatologue - n° 272 - mai 2001
6
’article intitulé “Lombalgies
chroniques : maladies profes-
sionnelles” paru dans La
Lettre du Rhumatologue de
novembre 2000 (1)nous semble,
essentiellement par son titre, en
opposition avec une analyse
rigoureuse des tableaux 97 et
98 des maladies profession-
nelles (tableaux) (2).
La désignation des maladies
(colonne de gauche) ne fait en
aucun cas état des lombalgies chro-
niques mais restreint très clairement
le champ d’application de ces deux
tableaux aux radiculalgies L4, L5 ou
S1, par hernie discale avec concor-
dance radioclinique. La reconnais-
sance de maladie professionnelle
suppose donc que, outre le délai de
prise en charge et l’analyse du poste
de travail, le patient souffre d’une
lomboradiculalgie systématisée sur
le plan clinique et en concordance
avec une hernie discale objectivée
par l’imagerie.
Un patient lombalgique chronique ou
souffrant d’une lomboradiculalgie
non systématisée, d’origine arthro-
sique par exemple, ne pourra pré-
tendre à la reconnaissance de sa
maladie en maladie professionnelle,
en l’état actuel des tableaux 97 et 98,
même si le médecin clinicien admet
fort volontiers l’imputabilité de ces
pathologies, au moins en partie, à un
surmenage professionnel.
Ces deux tableaux représentent une
avancée réelle dans la reconnais-
sance de certaines pathologies rachi-
diennes en maladies profession-
nelles. Ils peuvent être critiqués,
paraître trop restrictifs, mais les
médecins cliniciens se doivent néan-
moins de les analyser de façon
rigoureuse et de ne pas les inter-
préter sans fondement.
Faire croire à nos patients lombal-
giques chroniques, travailleurs de
force, qu’une reconnaissance en
maladie professionnelle peut leur
être attribuée est une erreur condui-
sant à une multiplication de dossiers
qui seront rejetés, et à une désillusion
du patient potentiellement négative
sur le plan psychique.
Outre cette opposition de fond,
quelques remarques de forme peu-
vent être faites. En effet, la déclara-
tion de maladie professionnelle peut
être établie au titre des tableaux 97 et
98, même si les conditions adminis-
tratives (liste limitative notamment),
ne sont pas remplies : c’est alors au
CRRMP (Comité régional de recon-
naissance des maladies profession-
nelles) de se prononcer. Ce comité
composé de trois médecins s’aide,
entre autres, des données de juris-
prudence d’une part, des normes et
recommandations d’autre part, pour
se prononcer sur les exigences “d’ex-
position habituelle” et de “charges
lourdes”.
Le certificat médical, base de la
déclaration de maladie profes-
sionnelle, et que peut rédiger
tout médecin traitant, doit, en
priorité, s’attacher à décrire
une situation médicale rappor-
tée à un risque professionnel,
même si, une fois encore, toutes
les conditions figurant dans les
tableaux ne sont pas réunies.
Sans entrer dans de multiples détails,
souvent complexes, nous pensons
que le médecin clinicien doit rester
simple et objectif dans sa
démarche, en proposant une décla-
ration de maladie professionnelle
lorsqu’il suppose qu’une lomboradi-
culalgie systématisée par hernie dis-
cale (et non une simple lombalgie)
peut être en relation avec une activité
professionnelle sollicitant le rachis
lombaire de façon intensive. Si les
conditions des tableaux 97 et 98 sont
remplies, la CPAM prendra la déci-
sion qui s’impose ; dans le cas
contraire, elle sollicitera le CRRMP,
qui rendra un avis autorisé.
Nous pensions utile d’apporter cette
contradiction pour que le message
soit clair et précis : la lombalgie chro-
nique n’est pas, aujourd’hui et dans
le cadre des tableaux 97 et 98, recon-
nue en maladie professionnelle.
RÉFÉRENCES
BIBLIOGRAPHIQUES
1. Teyssier-Cotte C. Lombalgies chroniques : mala-
dies professionnelles. La Lettre du Rhumatologue
2000 ; 266 : 7-10.
2. Décret N° 99-95 du 15/02/1999 (création des
tableaux 97 et 98 des maladies professionnelles).
Tableaux 97 et 98 :
les lombalgies chroniques
ne sont pas reconnues
maladies professionnelles
P. Bertin
Service de rhumatologie, CHU de Limoges,
membre du CRRMP du Limousin
L
‘