revue
Import nucléaire du matériel génétique du virus
de l’immunodéficience humaine de type 1
G. Jacquot
S. Benichou
Institut Cochin,
Département des maladies infectieuses,
Inserm U567, CNRS UMR8104,
Université Paris 5,
27 rue du Faubourg Saint-Jacques,
75014 Paris
Résumé.L’intégration du matériel génétique des rétrovirus au génome de la
cellule infectée constitue une étape obligatoire à l’établissement d’une infection
productive. Les lentivirus, dont le virus de l’immunodéficience humaine (VIH),
se distinguent des autres rétrovirus par leur capacité à infecter des cellules
quiescentes ou en phase terminale de différenciation. Le VIH a donc développé
des mécanismes actifs assurant le routage intracytoplasmique de l’ADN viral
puis sa translocation à travers l’enveloppe nucléaire. Malgré les résultats contra-
dictoires rapportés dans la littérature concernant les contributions des différents
acteurs viraux et les facteurs cellulaires impliqués, certaines grandes lignes ont
pu récemment se dégager. L’import nucléaire de l’ADN viral est un processus
complexe résultant vraisemblablement des effets coopératifs et synergiques de
différents acteurs viraux et cellulaires. Comme d’autres virus, le VIH semble
exploiter le réseau microtubulaire pour assurer l’accumulation de son matériel
génétique dans la région périnucléaire. Il utilise ensuite la machinerie cellulaire
régulant l’import nucléaire des macromolécules pour permettre la translocation
du génome viral à travers l’enveloppe nucléaire. Notre objectif est de faire le
point de la littérature sur les aspects cellulaires et moléculaires de l’import
nucléaire du matériel génétique du VIH, car ils représentent un axe majeur de
développement de la recherche sur les lentivirus de primates.
Mots clés :VIH, ADN viral, complexe de pré-intégration, routage
intracytoplasmique, translocation nucléaire
Abstract.HIV and other lentiviruses have the ability to replicate in non-dividing
cells, such as macrophages and quiescent T lymphocytes, which represent major
target cells during the course of infection. After virus entry, the viral genomic
RNA is reverse transcribed into a linear double-strand DNA. This viral DNA
associates with viral and host cell proteins into the so-called pre-integration
complex (PIC). In contrast to oncoretroviruses which require nuclear envelope
disintegration during mitosis to integrate their genome into host chromosomes,
lentiviruses, such as HIV, have evolved an active strategy to import their own
genome through the envelope of the interphasic nucleus. In this review, we will
discuss on the most recent developments reported in the literature regarding the
cellular and molecular bases that govern the intra-cytoplasmic routing and the
translocation of the HIV-1 genome into the nuclear compartment, two crucial
steps of the viral life cycle that are still poorly understood.
Key words:HIV, viral DNA, pre-integration complex, intra-cytoplasmic
routing, nuclear translocation
Tirés à part : S. Benichou
Virologie 2006, 10 : 43-53
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Après l’entrée dans la cellule hôte, le cycle réplicatif de
l’ensemble des rétrovirus comporte une étape initiale de
rétrotranscription de l’ARN viral en ADN double brin dont
l’intégration au génome cellulaire représente une étape
obligatoire à la progression du cycle et à l’établissement
d’une infection productive. Les lentivirus, dont les virus de
l’immunodéficience humaine (VIH1 et VIH2) et simienne
(VIS), se distinguent des autres rétrovirus par leur capacité
à infecter de façon productive des cellules quiescentes ou
en stade terminal de différenciation. Il s’agit notamment
des lymphocytes T quiescents, des macrophages et des
cellules dendritiques, qui constituent des cibles majeures
desVIH au cours de l’infection naturelle. L’infection de ces
cellules permet l’établissement précoce de réservoirs vi-
raux persistants et productifs. Cette propriété des lentivirus
de primates a d’ailleurs été mise à profit pour générer des
vecteurs d’expression permettant de transférer de façon
stable un gène d’intérêt à une cellule cible. Les vecteurs
lentiviraux sont en effet utilisés pour transduire efficace-
ment des cellules différenciées, comme des neurones, des
myocytes, des cellules rétiniennes ou des hépatocytes.
Pour accéder au génome d’une cellule non proliférative,
l’ADN viral issu de la rétrotranscription doit être transporté
à travers le cytoplasme puis franchir l’enveloppe nucléaire
afin d’accéder au compartiment nucléaire. Les VIH ont
donc développé des mécanismes actifs assurant l’import
nucléaire de leur matériel génétique indépendamment de la
rupture de l’enveloppe nucléaire survenant au cours de la
mitose. Dans le cas des oncorétrovirus, l’ADN viral n’ac-
cède en effet au génome cellulaire qu’au moment de la
mitose, limitant leur capacité infectieuse à des cellules
prolifératives. Le transport du génome des VIH du cyto-
plasme vers le compartiment nucléaire s’effectue au sein
d’un complexe de nature nucléoprotéique, appelé complexe
de pré-intégration (CPI). Contrairement aux étapes d’en-
trée du virus et d’intégration de l’ADN viral au génome de
la cellule hôte, les bases cellulaires et moléculaires des
étapes intermédiaires de routage intracytoplasmique, de
translocation à travers l’enveloppe nucléaire, puis d’accès
aux sites chromatiniens de la molécule d’ADN viral sont
encore très peu élucidées. Il est cependant acquis que les
lentivirus de primates, comme la plupart des virus dont le
cycle est au moins partiellement nucléaire (herpèsvirus,
hépadnavirus, adénovirus), interagissent avec la machine-
rie cellulaire régulant les échanges nucléocytoplasmiques
de macromolécules.
Même si l’état de la littérature sur le sujet reste très contro-
versé, nous tenterons ici de faire le point des connaissances
accumulées au cours de ces dernières années sur les aspects
cellulaires et moléculaires de l’import nucléaire du CPI du
VIH. Les études étant majoritairement consacrées au VIH
de type 1 plutôt qu’à celui de type 2, nous avons volontai-
rement limité le champ de cette revue aux travaux faisant
référence à la biologie du VIH1, dont l’organisation du
génome est représentée sur la figure 1. La caractérisation
des mécanismes et des déterminants viraux et cellulaires à
l’origine de l’import nucléaire du génome duVIH1 pourrait
en effet démasquer de nouvelles cibles pour le développe-
ment de stratégies thérapeutiques antivirales innovantes.
Elle pourrait également permettre d’améliorer ou de conce-
voir de nouveaux vecteurs lentiviraux adaptés aux techni-
ques thérapeutiques de transfert de gènes.
Description moléculaire du CPI
Après fusion de l’enveloppe virale avec la membrane plas-
mique de la cellule infectée, le corps viral est injecté dans le
cytoplasme où la capside est rapidement désassemblée
pour servir de base à l’architecture d’un complexe ribonu-
cléoprotéique parfois appelé complexe de rétrotranscrip-
tion (CRT). Alors que les modèles classiques suggèrent que
la capside virale se dissout rapidement après fusion mem-
branaire, certains auteurs proposent un autre modèle dans
lequel la capside resterait intacte jusqu’à ce que l’ADN
viral issu de la rétrotranscription parviennent à proximité
de l’enveloppe nucléaire. En plus de l’ARN viral, le CRT
contient certaines protéines virales encapsidées dans la
particule lors de son bourgeonnement à partir des membra-
nes de la cellule productrice. Il s’agit bien sûr de la trans-
criptase inverse (RT) et de l’intégrase, mais ce complexe
semble également contenir les protéines de matrice et de
nucléocapside (NCp7), ainsi que la protéine Vpr [1].
L’étape de rétrotranscription de l’ARN viral en ADN dou-
ble brin se fait vraisemblablement de façon concomitante à
la migration des CRT vers le noyau, et aboutit à la forma-
tion du CPI (figure 2). Il est important de noter que la notion
de CPI a été définie avant tout sur une base fonctionnelle : il
s’agit en effet de l’entité virale présente dans le cytoplasme
d’une cellule nouvellement infectée et capable de conduire
à une intégration efficace in vitro [2].
La structure du CPI et sa composition moléculaire consti-
tuent des éléments difficiles à étudier en raison de la rareté
du matériel viral présent au sein des cellules infectées,
rendant l’utilisation de techniques classiques de biochimie
ou d’imagerie délicates et d’interprétation souvent difficile.
Les principales données concernant la structure du CPI du
VIH1 sont issues d’expériences de fractionnement cellu-
laire réalisées sur des cellules infectées quelques heures
après mise en contact du virus [3-6]. Les résultats obtenus
par ce type d’approches révèlent un complexe de grande
taille, d’environ 56 nm de diamètre et présentant un coeffi-
cient de sédimentation qui varie, selon les travaux, de 80 à
640 S, en fonction du type cellulaire dont il est extrait, mais
également en fonction du mode d’infection utilisé, par du
virus libre ou de cellule à cellule. Outre l’ADN viral, les
CPI isolés par fractionnement contiennent un certain nom-
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bre de protéines virales dont la RT, l’intégrase, Vpr, mais
également des protéines cellulaires, probablement recru-
tées dans le cytoplasme, comme HMGI(Y) [7] ou
LEDGF/p75 [8]. Alors que la majeure partie des protéines
de matrice et de nucléocapside semble perdue dès l’étape
de désassemblage de la capside virale [5], la variabilité
observée dans le coefficient de sédimentation des CPI indi-
que qu’il s’agit d’une entité dont la composition évolue
sûrement, qualitativement et quantitativement, au cours de
sa migration vers le noyau. Cependant, la protéineVpr reste
associée tardivement au CPI, de même que l’intégrase, qui
constitue bien évidemment la protéine la plus stablement
associée à l’ADN viral jusqu’à sa rencontre avec l’ADN
cellulaire au sein duquel il doit s’intégrer [3, 5, 9].
Des travaux sont cependant nécessaires pour préciser les
rapports stoechiométriques entre les différents constituants
viraux et cellulaires, ainsi que leur distribution au sein du
complexe. Il serait également nécessaire de disposer de
techniques d’imagerie permettant de détecter directement
les CPI in vivo, et d’analyser l’évolution de leur composi-
tion du cytoplasme jusqu’au noyau de la cellule infectée.
Routage du CPI
vers l’enveloppe nucléaire
Au cours de son voyage intracytoplasmique vers le noyau,
le CPI du VIH doit faire face à l’importante viscosité du
cytoplasme, au sein duquel le mouvement des macromolé-
cules par simple diffusion est sûrement très limité et ne
permettrait pas un ciblage vers une destination cellulaire
précise. Le routage des CPI vers la région périnucléaire
résulte donc plutôt d’un transport actif le long du réseau
microtubulaire, comparable à celui développé par un cer-
tain nombre de virus, comme le virus herpès simplex ou les
adénovirus. Ces virus semblent en effet utiliser des méca-
nismes de transport rétrograde impliquant le moteur dy-
néine des microtubules pour atteindre le centrosome et ainsi
s’accumuler à proximité de l’enveloppe nucléaire [10].
Alors que le réseau du cytosquelette d’actine sous-
membranaire semble jouer un rôle pour une induction cor-
recte de la rétrotranscription de l’ARN viral [1], l’implica-
tion du réseau microtubulaire dans le routage
intracytoplasmique du CPI est encore très peu documentée,
essentiellement en raison de la rareté du matériel viral
présent dans le cytoplasme de la cellule infectée. Deux
études ont cependant tenté de suivre directement le devenir
du génome viral juste après infection, par des approches
d’hybridation à l’aide d’une sondeADN fluorescente (tech-
nique du FISH) [11, 12], mais ces études sont limitées par la
sensibilité de la méthode utilisée. Elles n’ont pu être mises
en œuvre qu’après infection par de fortes doses de virus
pseudotypés par la protéine G du virus de la stomatite
vésiculaire, dont la voie d’entrée dans la cellule diffère
totalement de celle utilisée par leVIH. Les résultats obtenus
révèlent cependant que l’ADN viral s’accumule en péri-
phérie du noyau avant de pénétrer dans le compartiment
nucléaire quelques heures après infection.
Une étude ultérieure a rassemblé un certain nombre de
résultats montrant que la migration des CPI vers le noyau
implique une association dynamique avec le réseau micro-
tubulaire, dépendante du moteur dynéine [13]. L’équipe de
env
pol
5’ LTR 3’ LTR
NefVif
Vpr
Vpu
Tat
Rev
gag
CA
MA NC p6
*
RT
PR IN
**
*Protéines virales clés pour l’import nucléaire
Figure 1. Représentation schématique du génome du VIH1. En plus des gènes communs aux rétrovirus gag, pol et env, le génome du
VIH1 code pour des protéines régulatrices (Tat, Rev) et pour des protéines dites « accessoires » (Vpr, Vpu, Vif, Nef), spécifiques des
lentivirus. Les protéines virales codées par les gènes indiqués en rouge ont été proposées comme contribuant, de même que le DNA flap
central (figure 4), à l’import nucléaire du matériel génétique du VIH1. L’ensemble des gènes viraux est sous le contrôle d’un promoteur
unique contenu dans une région U3 du 5’LTR.
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A. Particule virale du VIH1
5. Import nucléaire
du CPI
Récepteur CD4
Corécepteur
2. Fusion
1. Liaison aux
récepteurs
3. Décapsidation/
rétrotranscription
CPI
Membrane plasmique
Particule virale du VIH
Complexe du
pore nucléaire
(CPN)
6. Intégration
Enveloppe nucléaire
NOYAU
Provirus
CYTOPLASME
C. Étapes précoces du cycle viral du VIH1
Réseau
microtubulaire
?
?
Réseau d’actine
B. Composition du complexe de pré-
intégration (CPI)
MA
Vpr
IN
RT
DNA
flap ADNc
Protéines
cellulaires
gp120/gp41
Protéine de
matrice (MA)
Capside (CA)
Nucléocapside
(NCp7)
Intégrase (IN)
ARN viral
Transcriptase
inverse (RT)
Vpr
Protéase
Figure 2. A) Structure et composition de la particule virale du VIH1. B) Description du complexe de pré-intégration du VIH-1 (CPI),
constitué de l’ADN viral double brin issu de la rétro-transcription de l’ARN viral (figure 4), comportant en son centre une structure spécifique
aux lentivirus appelée DNA flap et de diverses protéines virales et cellulaires. C) Représentation schématique des événements successifs
intervenant au cours des étapes précoces du cycle viral du VIH1. Après entrée du virus dans une cellule exprimant le récepteur CD4 et
un corécepteur (CCR5 ou CXCR4), le complexe de rétrotranscription évolue en un large complexe nucléoprotéique appelé complexe de
pré-intégration ou CPI. L’import nucléaire du CPI comprend son routage intracytoplasmique, vraisemblablement le long du réseau
microtubulaire, puis sa translocation à travers l’enveloppe nucléaire, dont le mécanisme reste inconnu.
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Tom Hope a suivi le comportement intracellulaire de parti-
cules du VIH1 marquées par une protéine de fusion GFP-
Vpr fluorescente incorporée dans les particules virales par
surexpression en trans dans les cellules productrices. L’uti-
lisation d’une technique particulière d’infection par centri-
fugation a permis d’augmenter le nombre de virions fusion-
nant à la membrane plasmique des cellules cibles, et donc la
quantité de matériel viral présent dans le cytoplasme des
cellules infectées et visualisable par épifluorescence. La
micro-injection de dUTP fluorescents dans les cellules ci-
bles permet d’identifier, après incorporation à l’ADN viral
néosynthétisé, les complexes nucléoprotéiques viraux
compétents pour la rétrotranscription. Même si les expé-
riences ont été réalisées sur des cellules adhérentes de type
HeLa afin de mieux délimiter chacun des compartiments
cellulaires, ces différents procédés ont permis, pour la
première fois, de visualiser des complexes de rétrotrans-
cription fonctionnels et de suivre leur dynamique dans le
cytoplasme de cellules infectées. Les résultats obtenus
montrent que les particules virales marquées migrent le
long des microtubules par un mécanisme dépendant du
moteur microtubulaire dynéine et s’accumulent rapidement
dans une région périnucléaire, située dans la proximité du
centre organisateur des microtubules, ou centrosome. La
vitesse de migration des complexes est évaluée à environ
1lm/s. Les auteurs ont également pu analyser la structure
des complexes durant leur transit vers le noyau, grâce à
l’utilisation d’une technique consistant à aligner les images
obtenues successivement au microscope à fluorescence
puis au microscope électronique. Les particules contenant à
la fois GFP-Vpr et des dUTP fluorescents apparaissent, en
microscopie électronique, sous une forme cylindrique
d’une longueur comprise entre 400 et 700 nm et d’environ
100 nm de diamètre. Ces complexes cylindriques semblent
reliés aux microtubules par une structure similaire à celle
observée entre les microtubules et les capsides du virus
herpès simplex de type 1 [14]. À noter que ces observations
diffèrent considérablement du diamètre des CPI estimé à
56 nm après purification par des approches biochimiques
[6]. Bien que les techniques utilisées dans cette étude
apportent des arguments directs en faveur d’un mécanisme
actif de routage intracytoplasmique du CPI le long du
réseau microtubulaire, comparable à celui décrit pour
d’autres virus, leur optimisation devra confirmer cette hy-
pothèse et essayer de documenter le devenir des complexes
une fois parvenue à proximité de l’enveloppe nucléaire.
Translocation nucléaire du CPI
Une fois parvenu à proximité du noyau, l’ADN viral
contenu au sein du CPI doit traverser une enveloppe nu-
cléaire probablement intacte, même si la présence de Vpr
pourrait y induire des ruptures locales et transitoires [15].
Chez les organismes eucaryotes, les échanges nucléocyto-
plasmiques de macromolécules se font au travers de struc-
tures spécialisées décorant l’enveloppe nucléaire, appelés
complexes du pore nucléaire (CPN). Chez les vertébrés,
leur masse moléculaire est estimée à environ 125 MDa et ils
sont constitués d’environ 30 protéines appelées nucléopo-
rines, chacune présente en multiple de 8, conférant au pore
une symétrie octogonale [16]. Cette structure macromolé-
culaire traverse l’enveloppe nucléaire en définissant un
canal central aqueux d’environ 9 nm de diamètre, laissant
théoriquement diffuser les petites molécules dont la taille
n’excède pas 40 à 60 kDa. Cependant, le canal central peut
autoriser, par un mécanisme actif, le passage de macromo-
lécules et de complexes de tailles beaucoup plus élevées. Ce
transport actif met en jeu un signal de localisation nucléaire
(NLS pour nuclear localization signal) présent sur la sé-
quence primaire du cargo à transporter, et des facteurs
cellulaires, les karyophérines (ou importines), qui forment
une famille de protéines régulant les échanges nucléocyto-
plasmiques (figure 3) [17]. Les importines a(Impa) sont
des molécules adaptatrices capables de reconnaître les sé-
quences de localisation nucléaire présentes sur les protéi-
nes à destination du noyau ; les importines b(Impb) s’asso-
cient au complexe cargo-Impaformé et vont permettre son
transport à travers le CPN par des interactions successives
avec les motifs répétés phénylalanine-glycine (FG) pré-
sents dans la séquence de près de la moitié des nucléopori-
nes constituant le CPN. Une fois dans le noyau, la fixation
de la forme liée au GTP de la petite protéine G Ran
(RanGTP) à l’Impbpermet la dissociation du complexe
ternaire cargo-Impa-Impbet la libération du cargo. Le
complexe RanGTP-Impbest finalement exporté du noyau
vers le cytoplasme où il est dissocié par hydrolyse du GTP
en GDP grâce à la protéine Ran-GAP. Dissociée de l’Impb,
la forme RanGDP regagne rapidement le noyau ou son
GDP est échangé par un GTP grâce au facteur d’échange
RCC1 de localisation exclusivement nucléaire.
La taille du CPI du VIH1 étant relativement importante,
comprise entre 50 et 100 nm selon les auteurs, il est com-
munément admis que le virus exploite la machinerie
d’import nucléaire actif des macromolécules pour permet-
tre la translocation de son matériel génétique vers le com-
partiment nucléaire. Même si la composition exacte du CPI
capable de traverser le CPN n’est pas clairement établie,
l’intégrase, la protéine de matrice etVpr semblent associées
à l’ADN viral et sont donc susceptibles de participer à sa
translocation à travers l’enveloppe nucléaire. Bien que
l’objet d’intenses controverses, de nombreux travaux ont
rapporté l’identification de signaux d’import nucléaire dans
les séquences de ces trois protéines virales, mais ont égale-
ment révélé le rôle d’une structure originale de la molécule
d’ADN viral issue de la rétrotranscription, appelée DNA
flap central, dont l’intégrité semble nécessaire au ciblage
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