des-encuentros, 2014, Vol 11, P 16-29 Du handicap aux pratiques sportives: enjeux et perspectives 16 Du handicap aux pratiques sportives: enjeux et perspectives From disability to sport practices: Challenges and Perspectives Summary: We cannot find a unique definition of the concept of handicap in Europe. Even within individual countries, many approaches are generally observed according to now this term is applied. Handicap is a generic concept which can comprise heterogeneous groups of people. Any international comparison reveals itself to be an arduous task. In fact the groups of people concerned are not the same everywhere and practices vary according to these specific cultural, social and economic backgrounds. Public policies depend on the different representations of the notion of handicap and are influenced by both disabled people themselves as well as by policy makers as well. For example in France from the early 1960s the word ”handicap” was progressively replaced by other nouns such as “infirme” (disabled) or “inadapté” (usted, malad). The shift in meaning of the word “handicapé” seems to be related to the distressing ordeals experienced by some, which have led to somatic and mental weaknesses and to the idea that ways can be found to compensate for handicaps and allowing ways to live as a able-bodied person. Beyond the widely spread social norms and behaviour, the handicapped person faces constraining representations almost stereotypical which a lead to the sense of enclosure. Beeing born triggers or handicapped generates a whole set of psychic disorders provoking an inner and collective moral suffering. The human body can be considered as the prevailing pillar of identity for both handicapped and valid people. A two-fold psychological mechanism seems to be at the root of the handicapped person’s self-acceptance and his/her relationships to others and to social groups. Through a mechanism of objectification the subject rediscovers his/her own and full identity within the world of able-bodied persons. Through the mechanism of appropriation the handicapped person accepts his/her self-experienced own image as he experienced it. The construction of this new identity is internally nurtured and is strengthened by the close personal interactions which certainly contribute playing an important role in the development of our identity. The process is firstly generated among family members and then it is progressively encouraged more widely encouraged by social relations. In this perspective sport will fully impact the process. Some disability specialists and Sport (Marcellini Anne, Gilles Bui Xuan, 1995, p.179-190) offer long, the emergence of a "new sport" by the cancellation of disability and thus to suggest “games with handicap” ("equity" by building and not by measuring the biological body) forms of games that can be found elsewhere, but not at the top level of the regular sport. So that the integration process will be complete only when a person with a disability can take up a sport like any other citizen. Beyond too widely and hurriedly accepted evidences it is highly recommend one should disregard preconception we might have, even those barred or so-called evidence and be prepared to change our area of focus to define the ideal approach. The main goal of this article is to identify the main obstacles the disabled persons face in their willing to practice sport activities. Keywords: Disability, Inclusion, Insertion, Sport practices, Identity. 1 - Joel Gaillard PhD Educational Sciences Faculty of Sport Nancy France LISEC : Laboratoire des Sciences de l'Education et de la Communication (EA 2310) [email protected] 17 des-encuentros, 2014, Vol 11, P 16-29 Joel Gaillard 1 des-encuentros, 2014, Vol 11, P 16-29 Gaillard, J. 18 Parler du handicap et de sa représentation sociale, c'est poser d'emblée la question du regard porté sur la déficience. C’est questionner la marge, ce lieu de questionnement sur ellemême et, singulièrement, sur les raisons d'être et de se développer des deux ensembles qui la conditionnent. Cette misère de la position que nous impose la marge, relative du point de vue de celui qui l’éprouve en s’enfermant dans les limites du microcosme du handicap est vouée à paraître «toute relative», c'est-à-dire tout à fait irréelle, si, prenant le point du vue du macrocosme, on la compare à la grande misère de la condition, cette référence quotidiennement utilisée à des fins de condamnation («tu n’as pas à te plaindre») ou de consolation («il y a bien pire tu sais»). Elle nous interdit d’apercevoir et de comprendre toute une part des souffrances caractéristiques des personnes extraordinaires (nous disent les canadiens) ce qui a sans doute multiplié les champs sociaux et a paradoxalement développé toutes les formes de la petite misère. Ne serait-ce que pour ces raisons, la marge a à voir avec la mémoire. Si la philosophie venait à la rencontre du handicap, il en résulterait une ouverture, elle permettrait d’éviter d’instituer sa mise à l'écart des relations sociales ordinaires d’éviter que la personne atteinte navigue dans les interstices de la structure sociale. Elle permettrait l'avènement d'une société qui substitue un modèle participatif, ambitionnant l'implication des personnes atteintes d'une déficience dans l'édification du corps social. Elle ouvrirait la possibilité que les personnes handicapées, vouées au manque de place, par incompréhension, peur, abandon ou rejet, soient maintenues dans une position indéterminée, un ailleurs, un nulle part, un espace d'errance, une zone où leur acceptation et leur reconnaissance demeurent toujours équivoques. Mais peut-être suis-je encore dans l’utopie qui n’est ni une société idéale théorique, ni une société idéale à réaliser, mais une mentalité différente à adopter dans la vie de tous les jours. Mais il est vrai que Du handicap aux pratiques sportives: enjeux et perspectives l’utopie ne se soucie guère du possible… elle définit simplement un lien entre la spéculation et la réalité. Elle pose un idéal pour les hommes du monde réel commun, elle est une fin à réaliser dans notre monde quotidien, même si ce n’est qu’imparfaitement. Vers une définition de la notion de handicap Donner alors une définition du handicap sur laquelle tout le monde s’accorde relève de la gageure, voire de l’impossible et il me paraît bien difficile de parler du handicap en théorie, autour de concepts, de terminologie à des personnes handicapées, leurs proches ou aux professionnels qui les côtoient au quotidien. Le mot handicap n’est pas très beau et le «H aspiré de son origine anglaise nous impose des sonorités suaves» (Claude Neu, 2007, p.18). Mais sa définition présente l’avantage d’insister sur la cause de celui-ci. Ainsi handicapé se dit «d’une personne diminuée physiquement par suite d’une atteinte sensorielle ou motrice» (Bonnefon, 2010, p. 20). Cette précision laisse entrevoir que si l’atteinte est levée, alors le handicap disparaît. Par contre le mot «déficient», si il est de sonorité latine et donc plus agréable à l’oreille, centre sa définition autour du mot «insuffisance». C'est ainsi la société elle-même qui fait problème puisqu'elle crée des obstacles et des barrières empêchant les personnes handicapées de participer pleinement à la vie sociale et de bénéficier pleinement de l'égalité des chances ainsi «L'une des violations les plus fréquentes des droits de l'homme des personnes handicapées est l'expérience d'une discrimination fondée sur le handicap dans tous les aspects de la vie quotidienne» (Essaoui, 2006). Au-delà des mots se profile un corps, un corps souvent sans nom et sans visage, figure de l’imaginaire social qui alimente dans l’imaginaire du plus grand nombre le fait qu’une personne déficiente ne peut pratiquer une activité physique et sportive. Cette négation peut aller parfois jusqu’à une forme «d’abolition dans l’inconscient collectif, voire un contre investissement participant de l’exclusion» (Gaillard, 2010, p. 30) dont sont victimes les personnes handicapées. La fin du handicap supposerait d’en finir avec une représentation du corps entier comme modèle identitaire de l’être humain même si prétendre à la fin du handicap a peu de sens au regard de la réalité vécue des corps humains. Parler du handicap et de sa représentation sociale, c'est poser d'emblée la question du regard porté sur la déficience. C’est questionner la marge, ce lieu de questionnement sur elle-même et nous interdit d’apercevoir et de comprendre toute une part des souffrances caractéristiques des personnes extraordinaires (nous disent les canadiens). Si la philosophie venait à la rencontre du handicap, il en résulterait une ouverture, elle permettrait d’éviter d’instituer sa mise à l'écart des relations sociales ordinaires et d’éviter que la personne atteinte navigue dans les interstices de la structure sociale. Elle permettrait l'avènement d'une société qui substitue un modèle participatif, ambitionnant l'implication des personnes atteintes d'une déficience dans l'édification du corps social. Elle ouvrirait la possibilité que les personnes handicapées, vouées au manque de place, par incompréhension, peur, abandon ou rejet, soient maintenues dans une position indéterminée, un ailleurs, un nulle part, un espace d'errance, une zone où leur acceptation et leur reconnaissance demeurent toujours équivoques. «Toutes les sociétés fabriquent leurs exclus» […] la «différence réside dans le sort qui leur est réservé» affirme (Xavier Emmanuelli, 1994). Les personnes handicapées sont encore trop souvent confrontées à une discrimination directe ou indirecte dans tous les secteurs de leur vie quotidienne. Les lieux dits «publics» sont totalement inaccessibles aux personnes souffrant d'un handicap physique et ce, en dépit du fait que l'accès soit parfois garanti par la loi. Du handicap aux pratiques sportives: enjeux et perspectives Il est rarement possible, pour les personnes à vision réduite, d'obtenir des textes imprimés dans un format qui leur soit accessible (braille, bande magnétique, par exemple), il est souvent impossible aux sourds d'utiliser leur langue habituelle (langage des signes). Nous pouvons alors affirmer qu’a l’instar du développement humain (figure 1) que : • La situation de handicap n’est pas figée mais évolutive. • Que cette notion est variable en fonction du genre, de l’âge, du contexte et de l’environnement. • Que c’est une situation qui peut être modifiée grâce au développement des aptitudes (action sur les facteurs personnels) ainsi qu’à l’adaptation de l’environnement (action sur les facteurs environnementaux). Modèle du développement humain (RIPPH, 1996) Figure 1: le modèle de développement humain. Une situation de handicap devrait être considérée comme étant le résultat situationnel d’un processus interactif impliquant deux séries de variables causales (figure 2): d’une part, les caractéristiques de la personne (ses déficiences et ses incapacités découlant de la maladie, du traumatisme ou d’un autre trouble) et d’autre part, les caractéristiques physiques ou socioculturelles de son environnement créant des obstacles ou facilitant sa participation sociale dans une situation donnée: vie familiale, 19 des-encuentros, 2014, Vol 11, P 16-29 Gaillard, J. Gaillard, J. Du handicap aux pratiques sportives: enjeux et perspectives emplois, éducation, loisir, etc. Elle est le résultat de l’interaction des déficiences et des incapacités et d’autres caractéristiques personnelles d’une part, et des facilitateurs ou des obstacles environnementaux. Elle se mesure sur une échelle allant de la réalisation complète à la non réalisation des habitudes de vie. Processus de Production du Handicap (RIPPH, 1996) Figure 2: le processus de production du handicap des-encuentros, 2014, Vol 11, P 16-29 Accès aux biens, aux services et aux loisirs 20 «De l'accès aux immeubles à l'accès aux lieux de divertissement, tels que les restaurants, les cafés, autant d'installations quotidiennes dont bénéficient les personnes valides et dont sont exclues les personnes handicapées d'une façon ou d'une autre.» (Commission Européenne, 2006). Les personnes handicapées n'ont souvent pas accès aux biens et services et sont souvent exclues des lieux publics de divertissement et de loisirs soit par parti-pris manifeste, soit parmi les exemples cités par discrimination indirecte, par exemple, des locaux inaccessibles, pas de langage des signes ou de sous-titres pour les sourds ou de description audio pour les personnes à vision réduite. Ainsi que le suggèrent les obligations liées à la loi du 11 Février 2005 en France, la prise en compte de l'accès pour les personnes handicapées au stade de la conception des produits n'occasionne aucun surcoût ou ajoute au plus 2% à 5% au coût total, alors que la création d'une ligne de produits spécifiques est onéreuse. L'accès aux technologies de l'information peut favoriser l'autonomie et l'intégration des personnes handicapées, notamment sur leur lieu de travail, mais une technologie inaccessible peut également créer des barrières. La participation des personnes handicapées aux activités physiques et sportives ne cesse de se développer. Elle ne peut cependant pas s’envisager si les conditions d’accessibilité des personnes handicapées aux lieux de pratiques sportives ne sont pas intégrées aux projets de création ou de rénovation d’équipements sportifs. Deux articles du Décret n° 2006-555 du 17 mai 2006 relatif à l'accessibilité des établissements recevant du public, des installations ouvertes au public et des bâtiments d'habitation et modifiant le code de la construction et de l'habitation sont sans doute des pistes de réflexion: • «Art. R. 111-18. - Les bâtiments d'habitation collectifs et leurs abords doivent être construits et aménagés de façon à être accessibles aux personnes handicapées, quel que soit leur handicap. Au sens de la présente sous-section, est considéré comme un bâtiment d'habitation collectif tout bâtiment dans lequel sont superposés, même partiellement, plus de deux logements distincts desservis par des parties communes bâties. L'obligation d'accessibilité porte notamment sur les circulations communes intérieures et extérieures, une partie des places de stationnement automobile, les logements, les ascenseurs, les locaux collectifs et leurs équipements.» • «Art. R. 111-18-1. - Est considéré comme accessible aux personnes handicapées tout bâtiment d'habitation collectif ou tout aménagement lié à un bâtiment permettant à un habitant ou à un visiteur handicapé, avec la plus grande autonomie possible, de circuler, d'accéder aux locaux et équipements, d'utiliser les équipements, de se repérer et de communiquer. Les conditions d'accès des personnes handicapées doivent être les mêmes que celles des autres publics ou, à défaut, présenter une qualité d'usage équivalente.» L’accessibilité Universelle L’accessibilité universelle vise à éliminer toutes les barrières qui peuvent limiter une personne dans l’accomplissement de ses activités quotidiennes. Cette approche considère non seulement les besoins des personnes qui ont une déficience mais également ceux de toutes personnes pouvant être confrontées à des situations de handicap. En considérant que la déficience (motrice, intellectuelle, visuelle, sensorielle, auditive, liée à la parole ou autres) est reliée directement aux limitations de la personne et que le handicap est quant à lui un obstacle social avec lequel doivent composer quotidiennement les personnes vivant avec des limitations, on pourrait résumer le principe d’accessibilité universelle en disant qu’il repose essentiellement sur la notion visant la réalisation d’environnement sans obstacles. De cette façon, nous pourrions socialement éliminer le handicap et soutenir davantage les personnes vivant avec des déficiences. On ne parlerait donc plus de «personnes handicapées». Il faut comprendre que le concept d’accessibilité universelle ne repose pas uniquement sur la notion d’adaptation des lieux physiques et ce, bien qu’il s’agisse là d’un élément important dont il faut tenir compte. Il repose en fait sur le principe que tout citoyen doit pouvoir avoir accès à l’ensemble des services offerts à la population et ce, au même endroit, de la même façon et avec la même qualité de service. Tous les secteurs d’activités qui composent notre société (et en particulier l’activité physique et sportive) doivent donc être considérés lorsque nous faisons appel au principe d’accessibilité universelle (accueil, Du handicap aux pratiques sportives: enjeux et perspectives informations, communications, transport, logement, aménagement des lieux publics, services, sécurité publique, etc). Nous ne pouvons que penser qu’à terme chaque personne sera satisfaite de pouvoir utiliser les adaptations physiques mises en place pour les personnes ayant des déficiences. Pratiques sportives et Handicaps Y aurait-il alors dans le sport des processus de dé-stigmatisation et d’intégration sociale ? Christian Molaro (2010, p 22-30) nous montre qu’il faut se défier de toute doctrine qui poserait même par défaut la moralisation directe par le sport. La pratique sportive reste un adjuvant indirect. La pratique sportive, la confrontation peuvent faire sortir des représentations, des présupposés, des conflits qui peuvent être facteurs d’exclusion montrant par la même que le sentiment d’appartenance n’est pas livré «clés en mains» avec le seul fait de réussir à prendre une licence ou le seul fait d’intégrer un collectif. Le chemin peut être long et difficile tant on peut avoir le sentiment d’être à côté des autres et non avec et parmi les autres. C’est sans doute là une des difficultés majeures à laquelle nous nous heurtons: la difficulté à penser dans le même mouvement l’accompagnement des personnes et la configuration de l’espace de réception. Confronter l’autre à la différence physique, mentale ou sociale, ne va pas de soi dans une société qui reste peu encline à ajouter des différences. Il nous faut sans doute écrire la relation de la personne en situation de handicap avec la société et l’activité sportive sans s’arrêter sur les relations complexes du réel et du fictionnel, voire de l’imaginaire. Malgré le fait que certains pays aient commencé à formuler un nouveau concept du handicap 21 des-encuentros, 2014, Vol 11, P 16-29 Gaillard, J. des-encuentros, 2014, Vol 11, P 16-29 Gaillard, J. 22 Du handicap aux pratiques sportives: enjeux et perspectives et que malgré des plus étroites entre les personnes handicapées, la conception et la structure de leur environnement et l'attitude de la population en général l’accès aux loisirs et aux pratiques sportives et au sport pour les personnes handicapées reste trop souvent limité à un contexte peu propice aux échanges relationnels et aux expériences de vie en dehors du monde du handicap. Les personnes handicapées, leurs compagnes/compagnons et leur famille souffrent encore trop souvent de discrimination dans tous les aspects de leur vie. Le constat couvre tous les groupes de personnes handicapées, les personnes atteintes de handicaps physiques (y compris les handicaps cachés, comme l'épilepsie), de handicaps sensoriels (par exemple, sourds et malentendants, aveugles et personnes à vision réduite), ou d'incapacité d'apprentissage. les rapports que les individus établissent entre eux. Elles nous permettent de revendiquer un groupe d’appartenance significatif, qui se manifesterait dans les règles, leurs adaptations, leurs combinaisons, et seraient alors une façon de décrire la société dans laquelle on vit. Permettre à tous, valides ou handicapés, l’acquisition de connaissances, de capacités et d’attitudes pour enrichir leurs pouvoirs moteurs et développer des compétences méthodologiques et sociales est l’enjeu essentiel de l’organisation de l’offre sportive aujourd’hui. En définissant des contenus adaptés aux caractéristiques de chacun, en permettant à tous de vivre dans l’action des expériences originales, le sport contribue à l’acquisition, par tous, d’une culture commune. Il est donc important de souligner qu'une approche globale à la politique du handicap est nécessaire, elle ne peut être compartimentée. Y a-t-il une distribution sociale des pratiques? Est-ce que ces pratiques sont accessibles à toutes les personnes en situation de handicap? De façon sous-jacente il y a cette question de l’appartenance sociale. Pourquoi finalement la natation, le tir à l’arc sont-ils privilégiés et pourquoi le tennis de table est-il tant pratiqué? Pourquoi finalement d’autres pratiques sont aussi orphelines? La question de la distribution sociale se pose aussi pour les personnes handicapées. Bien que l’on ne puisse se défaire des aspects narcissiques des activités sportives, leurs façons de définir une appartenance sociale permettent d’exprimer un rapport au monde. Les pratiques sportives seraient alors une modalité sociale dans laquelle on s’inscrit tous, qui par leur intériorisation organisent 2 - Arrêté du 1er Février 2001. La commission Culture et Handicap crée en créée en 20012, est placée sous l’autorité du ministre de la culture et de la communication et du secrétaire d’état à la santé et aux personnes handicapées avait de «faciliter l’accès à la culture des personnes handicapées, quelle que soit la nature de ce handicap, dans le souci de leur permettre de participer pleinement à la vie culturelle». Elle rappelle en outre que la personne qui est handicapée est un citoyen à part entière de la société et que la diversité des personnes qui la compose est facteur d’enrichissement. La connaissance globale de la pratique sportive des personnes en situation de handicap trouve sa source dans la double enquête de l’INSEE (HID) menée en deux vagues à 2 ans d’intervalle, en 1998/1999 puis 2000-2001, le premier volet auprès de 14 600 personnes résidant ou soignées dans des institutions socio-sanitaires ou psychiatriques, le second volet auprès d’un échantillon de 17000 personnes vivant en domicile ordinaire, sélectionnées parmi les Gaillard, J. Du handicap aux pratiques sportives: enjeux et perspectives Figure 3: le processus de production du handicap Cependant la pratique sportive des personnes en situation de handicap est, dans tous les domaines, inférieure à celle du reste de la population (figure 3). Figure 4: pratiques licenciées en 2009, sources FFS La base de données des équipements sportifs (RES) donne une idée relativement précise de la proportion des équipements sportifs accessibles aux personnes en situation de handicap. 60% des aires d’évolution sportives sont accessibles physiquement, mais seulement 25% des sanitaires le sont. Ces valeurs sont issues du recensement des équipements sportifs (RES) et donc des appréciations des enquêteurs. Il est estimé que seuls 6% des équipements sont réellement accessibles aux quatre types de handicaps (physique, auditif, visuel, mental) en prenant en considération les cinq paramètres: parkings, accueil, vestiaires, sanitaires, aires d’évolution. Ces 6% correspondent aux équipements construits après 2006 (4%) et à ceux qui ont été rénovés (2%). Les aménagements requis portent sur les vestiaires, les sanitaires, les pictogrammes, les boutons d’ascenseurs en braille, les bandes podo-tactiles, les bandes d’éveil à la vigilance, ou les nez de marches). L’histoire des pratiques physiques des personnes présentant des déficiences souligne la forte valence médicale et rééducative de leurs débuts. Un processus progressif de sportivisation, marqué par l’organisation associative puis fédérale de ces pratiques est ensuite repérable particulièrement dans les vingt dernières années. La gymnastique médicale, orthopédique, la rééducation fonctionnelle permettant de comprendre l’engagement des personnes en situation de handicap vers les pratiques sportives (figure 5). Dans quelle mesure le club est-il un support privilégié d’intégration sociale par le sport? Le fait de poser la question est un indicateur du 23 des-encuentros, 2014, Vol 11, P 16-29 360000 répondants de l’enquête préliminaire «vie quotidienne et santé» qui accompagnait le recensement de la population de mars 1999. Les résultats des dépouillements de ces enquêtes ont été publiés en 2005. Ils permettent de dresser les constats suivants: Gaillard, J. Du handicap aux pratiques sportives: enjeux et perspectives Figure 5: activités les plus pratiquées par les personnes en situation de handicap. des-encuentros, 2014, Vol 11, P 16-29 processus d’intégration des personnes déficientes dans le monde sportif et plus précisément dans les clubs sportifs. Il s’agit pour les clubs de définir une philosophie de l’intégration, de se doter d’outils et puis de trouver des partenaires pour pérenniser leurs actions. L’intégration ne pourra alors être concrétisée que si l’on place le sportif au centre d’un triptyque (figure 4) qui va prendre sa dimension physique, sa dimension psychologique et sa dimension sociale et les interrelations qui peuvent exister entre-elles. 24 Figure 6: les trois dimensions de l'insertion. Le club sportif peut prendre une place pour maintenir une dynamique de motivation. Il met en place le contexte de l’activité, favorisant la perception de la valeur de l’activité sportive pratiquée, mais également la perception de la valeur de sa propre compétence. De nombreuses recherches ont «confirmé l'importance de la perception du corps dans la construction de l'estime de soi» (Delignères, 2000, p.35). Ces travaux ont mis en évidence que le développement de la valeur physique perçue contribuait au renforcement de l'estime de soi (Biddle et Goudas, 1994) et qu'un certain niveau de confiance en soi était requis pour maintenir l'engagement d'un sujet dans une pratique physique (Roberts, Kleibert et Duda, 1981). L’estime de soi serait alors définie par la valeur et le degré de compétence que nous nous attribuons. Marco Busico, joueur de handi-basket au sein de l’Association Sportive des Handicapés du Hainaut Valenciennois a insisté sur l’importance de faire évoluer les comportements des gens vis-à-vis des personnes handicapées: «ce qui blesse le plus Gaillard, J. Du handicap aux pratiques sportives: enjeux et perspectives 25 Figure 8: principaux obstacles à l'intégration. est le regard des personnes valides. Le handicap fait encore peur de nos jours.» C’est sans doute une des raisons qui invite les clubs à offrir des 3 - Association Sportive des Handicapés du Hainaut Valenciennois. créneaux de pratique spécifiques (figures 7 et 8) même si les joueurs de l’ASHHV3 nous disent: «Les rencontres comme aujourd’hui, avec les des-encuentros, 2014, Vol 11, P 16-29 Figure 7: principaux obstacles à l'intégration du point de vue des handicapés. Gaillard, J. Du handicap aux pratiques sportives: enjeux et perspectives des-encuentros, 2014, Vol 11, P 16-29 Figure 9: éléments favorisant l'intégration. 26 Figure 10: taux de survie des clubs. personnes valides, sont très importantes pour nous. Elles permettent de faire changer le regard sur le handicap quel qu’il soit». Faire un inventaire des nombreuses initiatives individuelles ou collectives qui, prenant la personne en situation de handicap comme sujet, essaient de développer ses désirs et ses motivations risque de faire croire à une «sorte de généralisation de la politique vis-à-vis des personnes handicapées» (Stiker, 2001). Mais affirme Marie Christine Lanfranchi lors du congrès «Sport et handicap, relevons le défi» d’Avril 2013: «le préalable à ces questions suppose que la personne en situation de handicap puisse être en situation de pouvoir imaginer, désirer, dessiner un projet qu’il pourrait faire sien dans le domaine social que sont les APS»4. En proposant aux personnes en situation de handicap des apprentissage qu’il ne sait pas encore maîtriser, mais avec un accompagnement, des aménagements ou des aides adaptées, on s’inscrit dans un «zone Du handicap aux pratiques sportives: enjeux et perspectives proximale de développement», et on contribue à faire avec lui ce qu’il parviendra à faire ensuite tout seul. L’engagement est déterminé à l'aide des problèmes résolus de manière autonome, et les «problèmes pourront être résolus non plus tout seul mais en collaboration» (Vigostky, 1985, p. 270). Les éléments favorisant cette accessibilité sont alors identifiables (figure 7). Suis-je capable de? Le sportif évalue son domaine de compétence en se comparant à d’autres en fonction d’un contexte donné. La motivation est elle-même liée à la valeur de sa contrôlabilité, dans quelle mesure suis-je capable de produire une performance sportive à un terme donné? L’interrogation implique la maîtrise du temps, donc de la faisabilité de la performance dans le temps, qui, elle va renvoyer à la question du choix. Pour pouvoir agir, il s’agira alors de s’interroger sur les dynamiques posées, qui renvoient et qui appellent aux sources de la motivation et qui de l’autre côté renvoient à leurs conséquences. 4 - Lanfranchi Marie Christine, est conseillère Technique Sport/handicap à Direction Régionale de la Jeunesse des Sports et de la Cohésion Sociale, Région Provence Alpes Côte d’Azur. 27 des-encuentros, 2014, Vol 11, P 16-29 Gaillard, J. Gaillard, J. De nombreux clubs sont disposés à accueillir des personnes en situation de handicap, mais ils manquent d’informations pour le faire dans de bonnes conditions ou n’ont pas de contexte favorable (accessibilité, possibilité d’aménager les équipements pour adapter la discipline). En matière de travail bénévole, les difficultés auxquelles doivent faire face les associations œuvrant dans le domaine du handicap sont nombreuses. Même si la volonté d‘engagement n’est pas en cause, le manque de bénévoles ayant des compétences particulières se fait sentir entraînant une forme d’épuisement face aux difficultés à résoudre, ce qui amène nombre d’associations à «jeter l’éponge» au bout de quelques années (figure 8). Et ce quel que soit le type de handicapés accueillis (figure 9). Conclusion des-encuentros, 2014, Vol 11, P 16-29 Une des difficultés majeures à laquelle nous nous heurtons est la difficulté à penser dans le même mouvement l’accompagnement des personnes en situation de handicap et la configuration de l’espace de réception que sont les clubs sportifs. . Confronter l’autre à la différence physique, mentale ou sociale, ne va pas de soi dans une société qui reste peu encline à ajouter des différences. 28 Nous ne pouvons pas conclure sans citer Henry Jacques Sticker «Ici comme dans d’autres domaines nous sommes passés de la passivité à l’activité. Beaucoup de personnes handicapées font la démarche de faire du sport d’elles-mêmes. Des clubs, soit dans le cadre de la Fédération, soit dans celui plus modeste des établissements spécialisés, organisent des rencontres en direction des valides. A côté des exploits olympiques la pratique du sport est Du handicap aux pratiques sportives: enjeux et perspectives devenu devenue habituelle et auto gérée par les groupes de sportifs handicapés. L’envie de vivre, le désir de s’affirmer et d’être reconnu prend à partir de là une dimension nouvelle: la pratique du sport permet d’avoir une visibilité sociale, une visibilité dans le social, ce qu’Hanna Arendt appelle la gloire, la manifestation de soi comme un humain qui a du poids.» (Sticker, 2010, p.39) Bibliographie - BONNEFON Gérard, (2010). Art et lien social, Pratiques artistiques des personnes handicapées, Lyon, Chronique sociale. - DELIGNERES et Al., (2000). L’évaluation de l’estime de soi dans le domaine corporel, Revue S.T.A.P.S., 53, p 35-48. - ESSAOUI Essaïd, (2006). Les droits des personnes handicapées en Algérie, Djazairess, - EMMANUELLI Xavier, (1994). Dernier avis avant la fin du monde, Paris, Albin Michel. - GAILLARD Joël, (2007). (sous la dir. de.), Pratiques sportives et handicaps, Ensemble sportons nous bien, Lyon, Chronique Sociale. - GAILLARD Joël, ANDRIEU Bernard, (sous la dir de.), Vers la fin du handicap ? 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