Points forts
La Lettre du Rhumatologue • No 393 - juin 2013 | 15
»
Le syndrome sec oculaire sévère nécessite une prise en charge ophtalmologique dans un centre spécialisé.
»Le diagnostic de sclérite doit rapidement être évoqué par le rhumatologue dans le cadre du suivi d’un
patient atteint d’une maladie rhumatismale présentant un œil rouge ou douloureux.
»
La polyarthrite rhumatoïde, la maladie de Wegener, la polychondrite atrophiante, la panartérite noueuse
et le lupus érythémateux disséminé peuvent être responsables d’une perforation cornéenne pauci sympto-
matique.
Mots-clés
Kératite
Syndrome sec oculaire
Sclérite
Uvéite
Hydroxychloroquine
Highlights
»
Severe dry eye disease
requires ophthalmologic care
in a specialized center.
»
Rheumatologists have to con-
sider the diagnosis of scleritis
in the follow-up of a patient
with rheumatic disease pre-
senting with a red or painful
eye.
»
Rheumatoid arthritis,
Wegener’s granulomatosis,
relapsing polychondritis, poly-
arteritis nodosa and lupus ery-
thematosus may be responsible
for pauci-symptomatic corneal
perforation.
Keywords
Keratitis
Dry eye disease
Scleritis
Uveitis
Hydroxychloroquine
kératite ponctuée superficielle ou filamenteuse
(figure 1B) ou d’un ulcère cornéen, voire d’une
perforation cornéenne, traduit de manière graduelle
la complication du syndrome sec oculaire. Un bilan
étiologique de SGS est conduit conjointement avec
le rhumatologue au moindre doute (3, 4).
Le traitement du syndrome sec oculaire (y compris
dans le SGS) vise à stabiliser la maladie systémique,
à augmenter ou maintenir la sécrétion lacrymale et
à diminuer l’inflammation de surface (4). Il repose
en premier lieu sur les substituts lacrymaux, en
respectant si possible une marche croissante allant
des larmes artificielles aux gels de carbomère puis
aux acides hyaluroniques. Des produits sans conser-
vateurs, non toxiques pour la surface oculaire,
déjà altérée, sont prescrits en première intention
en traitement chronique (5). Si ces mesures sont
insuffisantes, la mise en place de bouchons méa-
tiques (clous acryliques) peut s’avérer utile. Au
stade suivant, la ciclosporine en collyre pourra être
introduite, soit à une concentration de 0,05 %, soit,
plus classiquement, à 0,5 % (dispensation hospita-
lière). Les sécréta gogues comme la pilocarpine sont
parfois efficaces, mais peuvent causer des difficultés
à la lecture. En cas de persistance du syndrome
sec, des collyres à base de sérum autologue, une
thérapie matricielle, des lentilles SPOT® (verres
Scléraux Perméables à l’Oxygène de Thonon) ou,
dans les cas extrêmes, une tarsorraphie peuvent
être indiqués dans des centres ophtalmologiques
spécialisés (4, 5). Parallèlement à ces traitements,
les patients présentant un syndrome sec oculaire
doivent bénéficier d’une série de conseils permet-
tant d’améliorer la symptomatologie au quotidien
(tableau I).
Ulcération cornéenne périphérique
Dans le cadre des kératites, le rhumatologue peut
aussi avoir à faire face aux ulcérations cornéennes
périphériques (Peripheral Ulcerative Keratitis [PUK])
ou ulcère de pseudo-Mooren. Parfois indolentes,
elles se manifestent toujours par un œil rouge (6).
À la lampe à fente, l’ophtalmologiste observe un
amincissement périphérique, parfois circonférentiel,
de la cornée, qui peut mener à une perforation cor-
néenne (figure 2, p. 16). Les ulcérations cornéennes
périphériques sont l’apanage des connectivites, dont
la polyarthrite rhumatoïde, la maladie de Wegener,
la polychondrite atrophiante, la panartérite noueuse
ou le lupus érythémateux disséminé. La présence
d’un œil rouge chez un patient présentant une de ces
maladies doit faire pratiquer un examen ophtalmo-
logique en urgence afin de permettre une prise en
charge avant la perforation cornéenne (6, 7).
Le traitement repose sur une excellente coordination
entre le rhumatologue et l’ophtalmologue. Le traite-
ment de la maladie systémique doit être commencé
en urgence et comprend toujours au minimum une
corticothérapie systémique. Au niveau oculaire
seront associés des antibiotiques topiques, des col-
lyres cycloplégiques à visée antalgique, de la doxy-
cycline (100 mg/ j) pour ses propriétés d’inhibition
des métallo protéinases, et des larmes artificielles
dispensées de manière extrêmement rapprochée.
En cas de perforation cornéenne, la prise en charge
chirurgicale dépendra de la taille de la perforation ;
en cas de perforation de petite taille, un patch de
colle cyanoacrylate et une lentille de contact seront
mis en place ; en cas de large perforation, une greffe
de cornée sera indiquée (6, 7).
Tableau I. Conseils pratiques à donner aux patients souffrant de xérophtalmie.
À faire À éviter
Boire abondamment, consommer de la caféine Médicaments généraux à éviter : contraceptifs oraux, antihistaminiques,
bêtabloquants, phénothiazines, atropine, antalgiques opiacés
Bien dormir Tabagisme actif ou passif
Limiter la luminosité (lunettes de soleil, stores,etc.) Pollution extérieure (allergènes, poussières, particules fines,etc.)
Avoir une bonne hygiène des mains et du visage Pollution intérieure (air conditionné, cheminée, sèche-cheveux,etc.)
Renforcer la lubrification des yeux
et penser à cligner lors du travail sur écran
Temps venteux, chaud et sec
Fermer les yeux quelques instants dans la journée Lentilles de contact (à discuter…) et chirurgie réfractive