La Lettre du Cardiologue - n° 381 - janvier 2005
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L’étude de la veine cave inférieure présente certaines limites :
elle n’est pas toujours accessible, puisque totalement dépendante
de la faisabilité de la voie sous-costale ; l’index de collapsus n’est
pas utilisable lorsque le patient est en ventilation assistée (18) ;
chez les athlètes de haut niveau (19),il a été décrit des diamètres
de veine cave inférieure importants parfois associés à des index
de collapsus inférieurs à 50 %, pouvant alors faire conclure à tort
à des pressions de remplissage droites augmentées.
Étude du flux veineux sus-hépatique en Doppler pulsé
L’enregistrement du flux veineux sus-hépatique est effectué par
voie sous-costale en Doppler pulsé. Cette approche a été pro-
posée par analogie avec l’étude du flux veineux pulmonaire pour
évaluer les pressions de remplissage ventriculaire gauche. L’ob-
jectif est de calculer une fraction systolique du flux sus-hépa-
tique en rapportant l’ITV de l’onde systolique à l’ITV totale
(onde systolique et onde diastolique) (figure 4). En effet, l’am-
plitude de l’onde S diminue parallèlement à l’élévation de la
POD. Dans l’expérience de Nagueh, la corrélation entre cet index
et la pression auriculaire droite est bonne (r = 0,89), et un index
inférieur à 55 % permet de prédire une POD supérieure à
8mmHg avec une sensibilité de 86 % et une spécificité de 90 %
(20). Dans ce travail, cette approche était plus fiable que celle
obtenue par l’index de collapsus de la veine cave inférieure. Cet
indice semble utilisable chez les patients en ventilation assistée,
mais son utilisation doit être particulièrement prudente dans
d’autres circonstances : fibrillation auriculaire, fuite tricuspide
importante.
Rapport Et/Ea
L’étude du rapport vitesse maximale de l’onde E du flux trans-
tricuspide (Et) sur vitesse maximale de l’onde E du flux annu-
laire tricuspide en Doppler tissulaire (Ea) a également été pro-
posée par analogie avec le cœur gauche. Dans des situations
pathologiques (cardiopathie restrictive, par exemple), on retrouve
à droite la même morphologie de flux restrictif qu’à gauche, avec
Et/At > 2 et temps de décélération de Et < 150 ms (21).
Dans la plupart des cas toutefois, le flux tricuspide seul est inin-
terprétable, et c’est la confrontation entre Et (reflet de la POD et
de la relaxation VD) et Ea (reflet de la relaxation VD) qui va per-
mettre d’approcher les pressions de remplissage VD.
Ea mesurée à l’anneau tricuspide a été évaluée chez le sujet nor-
mal : son amplitude normale varie avec l’âge, elle est de 17,7 ±
2cm avant 40 ans et de 13,2 ± 2,7 cm après 60 ans (22). La repro-
ductibilité de mesure interobservateur est particulièrement
médiocre (± 22 %) et significativement moins bonne que la repro-
ductibilité interobservateur de la mesure de l’onde systolique S
(± 13 %) (23).
Les travaux de la littérature montrent une corrélation satisfaisante
entre la POD et le rapport Et/Ea. Un rapport Et/Ea > 6 prédit une
POD ≥10 mmHg avec une sensibilité de 79 % et une spécificité
de 73 % (24, 25) (figure 5).
Étude du flux de l’insuffisance pulmonaire
Les pressions de remplissage ventriculaires droites peuvent éga-
lement être dérivées de l’étude du flux de l’insuffisance pulmo-
naire. Les différents indices décrits précédemment nous permet-
tent de poser le diagnostic d’élévation des pressions de
remplissage : Et/At > 2 ; temps de décélération court de l’onde
Et (inférieur à 150 ms) ; onde S de faible amplitude moins impor-
tante que l’onde D sur le flux veineux sus-hépatique avec pré-
sence d’une grande onde A ; veine cave inférieure non com-
pliante, etc. Toutefois, ces différentes anomalies, si elles
traduisent une élévation des pressions de remplissage ne per-
mettent pas de poser le diagnostic d’adiastolie, c’est-à-dire la pré-
sence d’un dip-plateau sur la courbe de pression ventriculaire
droite (constriction péricardique, restriction myocardique).
Dans cette optique, l’analyse du flux d’insuffisance pulmonaire,
recueilli en Doppler continu, peut être très utile. Elle va en effet
montrer, spontanément ou en inspiration, la présence d’un flux
dont la pente est raide, avec une annulation ou une quasi-annu-
lation des vitesses très tôt en diastole, avant l’onde P de l’ECG
(26) (figure 6). Cette approche a également montré son intérêt
dans l’infarctus du ventricule droit : ainsi, la présence d’un flux
d’insuffisance pulmonaire associant un temps de demi-pression
≤150 ms, et un rapport entre vitesse minimale et vitesse maxi-
male de fuite pulmonaire ≤0,5, a permis de détecter un infarc-
tus du VD avec une sensibilité de 100 % et une spécificité de
89 % (27). Cet indice a également montré une bonne valeur pro-
nostique durant la phase hospitalière chez des patients présen-
tant un infarctus inférieur.
MISE AU POINT
Figure 4. Fraction systolique du flux veineux sus-hépatique calculée en
mesurant l’intégrale temps-vitesse de l’onde systolique (ITVS) et l’inté-
grale temps de la somme des deux ondes systoliques et diastoliques (ITVS
+ D). Dans cet exemple, le flux est normal.
ITV S ITV D
Fraction systolique du flux
veineux sus-hépatique
ITVS/ITV (S+D)