Thème 3 : Puissances et tensions dans le monde de la fin de la première guerre mondiale
à nos jours
Chapitre 4 : Les chemins de la puissance
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B. Le retour à l’unilatéralisme après 2001
Documents à utiliser : Le choix de l’unilatéralisme (Ph. Golub, Le spectre de la décadence,
Les collections de l’histoire 56, p. 70), document 4 p. 235, les Etats-Unis et le monde au
lendemain du 11 septembre 2001 (cartothèque science-po).
Document 1 : Le choix de l’unilatéralisme
Les attentats ont révélé une vulnérabilité à un défi de type nouveau - le terrorisme
transnational non étatique - et profondément atteint le moral des Américains. Mais ils n'ont
pas modifié la nouvelle donne des relations internationales. Les grands équilibres n'ont pas été
rompus.
Ce qui a modifié la donne, du moins en partie, est la réponse de l'administration Bush aux
attentats du 11-Septembre. Cette dernière a choisi une stratégie de rupture en officialisant une
doctrine de guerre préventive, en abandonnant les institutions multilatérales et le droit
humanitaire international, et en engageant une mobilisation militaire de grande ampleur dont
la finalité n'était pas logiquement liée au terrorisme transnational. L'objectif sous-jacent était
de remodeler les relations internationales. Le 12 octobre 2001, le secrétaire à la Défense
Donald Rumsfeld déclarait dans une interview accordée au New York Times, que les
événements du 11-Septembre représentent « le genre d'opportunités que la Seconde Guerre
mondiale avait offertes de refaçonner une grande partie du monde ».
Source : Ph. Golub, Le spectre de la décadence, Les collections de l’histoire n° 56, p. 69-70
Document 3 :
Questions :
1. Montrez que les Etats-Unis adoptent une position unilatérale après les attentats du 11
septembre 2001 et que l’on revient dans un système de « présidence impériale » qui avait
disparu depuis 1974 et la fin de la Guerre du Vietnam.
L'administration Bush avait clairement formulé une doctrine. La vision de Bush, influencée
par le néoconservatisme, était que les États-Unis devaient combattre une menace mondiale
terrorisme et dictatures hostiles nécessitant l'unilatéralisme marqué par le refus de signer le
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protocole de Kyoto ou le dédain affiché à l'égard des institutions internationales, le droit de se
défendre, y compris préventivement, contre une menace terroriste, et une politique active de «
démocratisation » du Moyen-Orient perçu comme le principal foyer de menace pour la
sécurité des États-Unis. Cette approche, idéologiquement structurée, avait incontestablement
des traits impériaux : l'interventionnisme en Asie centrale, la guerre globale contre le
terrorisme sans limite dans le temps ou l'espace, l'ambition de reconstruire politiquement le
Moyen-Orient, rappelaient les grandes heures de la guerre froide. G. W. Bush va endosser
l'optiondes « néoconservateurs », ces théoriciens d'une politique interventionniste musclée. Il
déclare la guerre au terrorisme, et se découvre une nouvelle mission : apporter la démocratie
au monde et « remodeler » le Proche-Orient, berceau de l'islamisme.
Dans l'esprit de cet unilatéralisme américain, l'ONU est d'abord un obstacle : par l'importance
« excessive » qu'elle donne au droit et aux procédures, par la lourdeur et l'inefficacité de la
bureaucratie et par ses prétentions moralisatrices. Or les États-Unis se considèrent engagés
dans une lutte à mort où l'efficacité doit primer.
Pourtant l'ONU, ou plus précisément le Conseil de sécurité, a montré sa compréhension de
l'anxiété américaine : s le 12 septembre 2001, le Conseil vote, à l'unanimité, la résolution
1368, reconnaissant que l'agression du World Trade Center place les États-Unis en position de
légitime défense et les autorisant à détruire le régime des talibans, qui abrite, en Afghanistan,
Al-Qaida.
De même, les décisions se prennent à l’échelle présidentielle, avec les conseillers proches, le
NSC, la CIA, la NSA, la sécurité intérieure et l’ensemble des agences de renseignement. Le
Congrès est à nouveau peu impliqué dans un certain nombre de décisions.
2. Montrez que depuis 2008 et l’arrivée de Barack Obama, les idées issues du wilsonisme
sont de nouveau à l’ordre du jour, de même que le multilatéralisme.
On ne pouvait parler alors, et on ne peut toujours pas, parler de « doctrine Obama » à propos
de la politique étrangère actuelle des États-Unis. Or on ne trouve pas, depuis 2008, un
ensemble idéologique aussi cohérent que celui de la période G. W. Bush. Il convient plutôt de
parler, dans le cas d'Obama, d'orientations générales qui constituent plus une méthode qu'un
corps idéologique bien repérable : Obama a, dans l'ensemble, apaisé les relations tendues des
États-Unis avec une partie importante du monde, particulièrement le monde musulman, mais
aussi la Russie et la Chine ; et il a remis à l'ordre du jour le multilatéralisme et la coopération
internationale.
Obama a en partage avec Bush une vision morale de la « responsabilité » des États-Unis dans
le monde, héritière de l'idéalisme wilsonien, qu'il a affirmée à plusieurs reprises comme lors
de l'intervention en Libye : « Mettre de côté la responsabilité de leader des États-Unis et plus
profondément notre responsabilité vis-à-vis d'autres êtres humains serait une trahison de ce
que nous sommes.»
C. Une « hyperpuissance » économique depuis les années 1990 ? (CM)
L'avantage économique américain était beaucoup moins marqué, mais les États-Unis étaient
redynamisés par leur avance dans la révolution, encouragée par l'État, des technologies de
l'information. Du fait de l'afflux de capitaux venant s'investir aux États-Unis, ces derniers ont
pu financer leur expansion économique à faible coût.
Leurs principaux concurrents s'étaient simultanément affaiblis. Du fait des coûts de la
réunification allemande, l'Europe devait connaître une décennie de croissance molle. Le
Japon, qui paraissait économiquement triomphant dans les années 1980, était tombé dans une
longue période de stagnation dont l'archipel n'est pas encore vraiment sorti. Au plan des
représentations, le modèle américain semblait triompher, tant dans les modes de
consommation qu'au niveau politique avec la vague de mocratisation en Amérique latine et
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en Asie orientale. En somme, à l'abord de l'an 2000, les États-Unis paraissaient dans le
meilleur des mondes possibles.
La guerre en Irak, et la politique de guerre préventive en général, a eu des coûts exorbitants de
la guerre pour le Trésor américain. Le prix Nobel d'économie Joseph Stiglitz a avancé le
chiffre de 3 000 milliards de dollars si l'on ajoute aux coûts directs de près de 1 000 milliards
les coûts indirects que constituent les intérêts sur la dette, car la guerre a été financée par
l'endettement externe, et les coûts différés de 1 000 milliards pour les soins et les pensions
invalidité des vétérans. A tout cela s'ajoute le coût plus large difficilement chiffrable pour la
société du fait du détournement de ressources qui auraient pu être consacrées à des besoins
internes : éducation, infrastructures, santé, etc. Le prix des aventures impériales est donc très
élevé.
Aujourd'hui, la puissance économique et culturelle américaine diminue. Du point de vue de
l’économie, plutôt que de déclin américain, il est plus pertinent aujourd'hui de parler de
rééquilibrage graduel des relations internationales. Si les États-Unis restent la première
puissance militaire et la première source d'innovation technologique, leur position relative
dans l'économie mondiale décroîtra dans les années à venir.
Au cours des dernières décennies nous avons assisté à l'émergence ou la réémergence, selon
les cas, de régions postcoloniales telles que la Chine, l'Inde, l'Amérique latine, qui désormais
représentent des composantes dynamiques de l'économie mondiale capitaliste.
Structurellement parlant, il s'agit du changement le plus significatif de l'histoire internationale
depuis la révolution industrielle européenne. La mondialisation de la fin du XXe siècle,
impulsée par les États-Unis, a certes intégré la planète, mais elle a aussi conduit à des
nouvelles concentrations de richesse, et donc à terme de puissance, dans des États qui, comme
la Chine, ont su canaliser les flux financiers et commerciaux à des fins de développement
endogènes.
Cette transformation met un terme au cycle pluricentenaire de primauté occidentale. Il y aura
inévitablement redistribution de la puissance et les États-Unis, comme l'Europe, devront s'y
adapter. La Chine devient un « coeur » parmi d'autres, pour reprendre l'expression de Braudel,
dans un monde polycentrique et pluriel. Elle ne deviendra pas le coeur du monde. Il faudra
donc partager le pouvoir. Cela ne sera sans doute pas aisé puisque, comme le disent si bien les
historiens Peter Cain et Anthony Hopkins, « les porte-parole des puissances dirigeantes
n'admettent pas facilement l'idée que la fin de leur période de domination ne soit pas
nécessairement la fin du monde ».
Mais le partage équivaut-il au « déclin » ? Les discours déclinistes masquent les enjeux
globaux contemporains cruciaux que sont l'interdépendance et la coopération ; ils dissimulent
les défis internes tout aussi urgents auxquels fait face la société américaine : les inégalités,
l'éducation, la santé... Ce sont les réponses données à ces problèmes qui détermineront
l'avenir. Le raisonnement vaut tout autant pour la Chine qui connaît des turbulences sociales
et politiques importantes, sans parler de l'Europe qui erre et se déchire.
Conclusion : organigramme p. 243
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