Un piano si magique Pour la venue du jeune et talentueux pianiste, Serhiy Salov, en sol laurentien, les Diffusions Amal’Gamme avaient baptisé ce rendez-vous musical de « Piano magique ». Il y a de l’audace derrière une telle appellation ou, tout au moins, une profonde connaissance de l’artiste invité. Ce pianiste d’origine ukrainienne a tout de même fait ses débuts devant public à l’âge de onze ans avec l’orchestre national de son pays, pour présenter son premier récital solo l’année suivante dans la salle de la Philharmonie de Donetsk. Il y avait déjà là la manifestation d’un talent indéniable. Depuis ce temps, il y a eu des études en Allemagne et en Angleterre. Il a travaillé avec de grands chefs de renom et il s’est produit avec de grands orchestres, allant de Montréal à Tokyo. Sa participation régulière à des festivals les plus prestigieux lui a permis de recevoir plusieurs prix ou distinctions. Ses enregistrements sur cd ont toujours été couronnés de succès et encensés par la critique. Quand le sévère critique Claude Gingras de La Presse reconnaît en vous un grand pianiste qu’on aime avant tout écouter, c’est que vous êtes plus qu’un simple virtuose. Monsieur Salov a même fait pleurer ce critique austère. C’est donc fort de tous ces éléments qu’Amal’Gamme était convaincu que la magie ne pourrait faire qu’opérer dans sa salle de Prévost pour le plus pur bonheur des mélomanes. Le défi était de taille, surtout que les longues pièces au menu n’étaient pas parmi les plus connues de Beethoven, Mozart et Bach. C’est par contre oublier que derrière toute magie, il y a de l’humain et énormément de travail pour arriver certes à de tels résultats. Monsieur Salov a dès le départ le souci de communiquer avec son public pour mettre en contexte l’œuvre qu’il s’apprête à jouer. Dans un très bon français, il s’adresse à nous et sait séduire son auditoire. Toutefois, c’est lorsqu’il s’assoit à son piano que le mot magie prend toute sa signification. Sans aucune partition, il pose ses mains sur le clavier, tantôt avec une extrême douceur, tantôt avec une fougue intense, pour élever l’œuvre à un niveau d’exécution où tout semble si facile. Alors que nous, néophytes, avons souvent peine à nous souvenir de mélodies très connues et plutôt linéaires, monsieur Salov a réussi à intégrer non seulement dans sa tête, mais aussi dans tout son être, des œuvres d’une très grande complexité avec des mouvements et des nuances musicales qui vont du plus doux au plus intense. En tant que spectateur de ces prestations, nous ne pouvons que reconnaître l’immense talent de l’artiste, sa virtuosité, son souffle, sa capacité de faire ressortir toutes les couleurs musicales des œuvres. Sa délicatesse du toucher sur le clavier a de quoi étonner. Oui, le piano était magique en ce premier samedi d’avril à Prévost. S’il l’était, c’est qu’il y avait avant tout un très grand magicien de la musique pour en faire ressortir toute la beauté qui s’y cache. Si monsieur Salov reconnaissait que, très souvent, c’est dans de petites salles comme chez Amal’Gamme que l’émotion de l’artiste est la plus grande, force est pour nous d’apprécier hautement que de si grands artistes acceptent de venir à notre rencontre, non pas pour l’apport financier, mais pour que la magie musicale se vive un peu partout sur notre planète. Sans Amal’Gamme, cette magie n’aurait pu se manifester en sol laurentien, car aucun autre diffuseur ne relève de tels défis. Pierre Lauzon, Dans nos Laurentides.com