INTERROGATION DE PHILOSOPHIE ÉPREUVE ORALE COMMUNE Jean-Pascal Anfray, Laure Blanc-Benon, Céline Denat, Laurent Jaffro, Alice Le Goff, Christelle Veillard Coefficient de l’épreuve : 2 Durée de préparation : 1 heure Durée de passage devant le jury : 30 minutes dont 20 minutes d’exposé au plus et 10 minutes de question Types de sujets proposés : une ou plusieurs notions, question Modalités de tirage de sujet : Tirage au sort d’un ticket comportant deux sujets au choix à lire à haute voix devant le jury. Le candidat/la candidate indique le sujet choisi au début de sa prestation orale. Liste des ouvrages autorisés : dictionnaire de langue française. Aucun autre ouvrage autorisé. Les sujets proposés à l’oral ne portent pas sur le domaine de l’écrit. Les membres du jury s’efforcent de proposer des « couples » ou paires de sujets bien distincts en ce qui concerne le domaine d’objet, en termes de portée mais aussi de difficulté afin que chaque candidat dispose d’un « vrai » choix. Sauf exception, les candidats ont, cette année, joué le jeu de l’épreuve en ce qui concerne l’exposé. Certains ont pu faire des exposés courts mais ils constituent une minorité. Dans la grande majorité des cas, les candidats ont proposé un exposé au format attendu (sur une durée comprise entre 15 et 20 minutes). Très peu de candidats ont rencontré des problèmes en termes de gestion du temps au point d’être interrompus. En revanche, il importe de rappeler que la partie consacrée à l’entretien avec le jury vise à donner l’occasion à chacun/chacune de compléter son propos, de le préciser voire de le corriger. Trop de candidats ont paru paralysés par le stress au point de n’être pas en mesure de saisir les occasions offertes par le jury de revenir sur une compréhension parfois trop étroite du sujet pour l’élargir et la compléter ou de revenir sur certains aspects incohérents ou contradictoires de l’exposé pour amender le traitement du sujet qui avait été proposé. Ces mêmes candidats ont eu tendance à s’enfermer dans une posture défensive comme si l’enjeu était de défendre à tout prix la lecture du sujet qu’ils avaient proposée. Ils n’étaient dès lors pas en mesure de commenter les pistes de réflexion proposées par le jury. A l’inverse, les candidats qui ont su faire preuve d’ouverture à la discussion et qui ont su appréhender l’entretien comme l’occasion de réfléchir ensemble sur le sujet ont pu considérablement enrichir et améliorer leurs prestations. Parmi les problèmes qui se sont plus fréquemment posés cette année, on pourra signaler d’importants déficits en ce qui concerne l’analyse du sujet et le travail de définition des concepts mobilisés. Ce défaut était d’autant plus saillant que le sujet portait sur des notions comme celles de vérité, de croyance, de savoir, de désir, sur lesquelles les candidats sont censés avoir travaillé depuis le lycée. Ainsi il est surprenant qu’on puisse traiter du sujet « Vérité et cohérence » sans être en mesure de discuter plusieurs conceptions possibles de la vérité et de proposer de cette notion une définition minimale autre que « la vérité est le dévoilement de l’être ». Il est également étonnant, sur un sujet comme « Tout désir est-il désir de posséder ? », que ne soit pas proposée une définition distinguant de façon précise désir et besoin, désir et souhait, désir et volonté. Sur des sujets de philosophie pratique, certains candidats ont mobilisé des notions comme celle de vertu sans être à même d’en proposer une définition élaborée. Mais cette absence de travail de définition a été d’autant plus frappante lorsque les candidats choisissaient de traiter des sujets relevant de l’épistémologie ou mobilisant la notion de croyance. Ainsi le jury a-t-il été surpris de voir une partie des candidats peiner à distinguer la croyance et la connaissance (certains allant jusqu’à évoquer la notion de « croyance scientifique ou mathématique » sans être à même d’envisager qu’une distinction puisse être établie entre croire quelque chose et savoir quelque chose) mais aussi à établir des distinctions entre différentes formes de croyance (opinion, conviction, foi par exemple). L’absence de travail de définition a amené certains candidats à construire l’ensemble de l’exposé autour d’une conception trop étroite du sujet et à s’enfermer dans un traitement binaire et schématique de certaines questions. Sur un sujet tel que « Peutil exister une action désintéressée ? », il pouvait certes être pertinent de nier la possibilité même d’une action désintéressée au sens « pur » du terme mais il importait, pour donner une véritable assise au développement proposé, de distinguer plus finement et précisément entre « intérêt à » et « intérêt pour », entre un intérêt strictement personnel voire « égoïste » et un intérêt moins étroit prenant en considération l’intérêt d’autrui… De façon générale, les candidats devraient s’entraîner à produire et élaborer des typologies, en particulier lorsqu’ils se préparent au traitement de sujets portant sur une ou plusieurs notions. Ils pourraient ainsi éviter l’écueil consistant à proposer un traitement essentiellement descriptif voire « psychologisant » de certaines notions comme « La ruse », « La colère », « L’ennui »…De même ils pourraient éviter l’écueil consistant à opposer de façon binaire à une conception négative de la notion, une conception plus positive au risque parfois d’en gommer les ambivalences. Un autre écueil massif a consisté à plaquer des connaissances, pas toujours bien maîtrisées, sur certains sujets au point d’en produire une lecture partielle. Si l’on attend certes de chaque candidat qu’il ou elle soit en mesure de défendre une thèse, un argument sur le sujet proposé, on attend surtout qu’il ou elle soit capable de poser de bonnes questions. Ainsi sur un sujet tel que « la légitimité démocratique », on pouvait attendre du candidat/ de la candidate, une distinction fine entre plusieurs formes de démocratie mais surtout la mise en relief de questions à certains égards assez « élémentaires » : en quoi une décision prise sur la base de procédure démocratique peut-elle être plus légitime que des décisions prises sur la base de principes aristocratiques ou monarchiques ? La légitimité démocratique repose-t-elle sur le fait qu’une décision prise par le plus grand nombre a plus de chances d’être « pertinente » voire plus « intelligente » qu’une décision prise par un petit groupe d’individus ? Ou repose-t-elle exclusivement sur un critère de justice liée au fait que chacun à l’occasion de s’exprimer ? Pourquoi puis-je, dans un contexte démocratique, considérer qu’une décision collective à laquelle je me suis opposé voire contre laquelle j’ai milité, est néanmoins légitime ? Au lieu de chercher d’emblée à plaquer des connaissances sur un sujet, les candidats/candidates devraient d’abord s’efforcer de faire un inventaire des questions qu’évoque la notion ou la question posée. De ce point de vue, il faut rappeler aux candidats qu’il est important de toujours partir du sens le plus « évident » ou commun du sujet pour ensuite le compliquer, au lieu d’en proposer une élaboration d’emblée si abstraite qu’elle semble détachée de tout ancrage empirique. Il était certes possible de proposer un traitement métaphysique de la question « peut-on ne pas être de son temps ? » mais à condition d’envisager les usages les plus communs de l’expression en s’interrogeant sur la notion d’époque ou sur la problématique du rapport entre les générations. Il était également possible d’envisager un traitement métaphysique du sujet « Vivre au présent » mais à condition d’envisager aussi le sens le plus ordinaire et le plus pratique de l’expression. On rappellera ainsi aux candidats qu’il est important de toujours envisager, dans le cadre de l’analyse du sujet et de la construction de la problématique, des exemples concrets sur lesquels s’appuyer. Ainsi sur un sujet tel que « s’engager », il ne suffisait pas d’évoquer brièvement l’engagement dans l’armée, l’engagement que représente le mariage ou l’engagement politique. Il fallait également analyser ces différentes figures de l’engagement en s’appuyant sur des exemples afin, notamment, d’être en mesure d’interroger le lien entre engagement et contrat, le lien entre engagement et publicité ainsi que les ressorts de l’engagement. S’il est judicieux de partir du sens le plus « commun » du sujet pour l’analyser et le questionner, il convient aussi de ne jamais s’en tenir à « l’évidence » de certains constats. Certains candidats postulent très souvent des positions fortes sur des questions comme celle de la liberté et du libre-arbitre (à titre d’exemple) sans être à même de les justifier de façon argumentative. Ainsi tel candidat a pu insister sur la nécessité et la positivité de « l’imprévisible » en ce que ce dernier serait la manifestation d’une liberté humaine à sauvegarder. Mais il n’a pas été en mesure d’argumenter cette position en discutant l’objection selon laquelle l’imprévisible pourrait être lié non à la manifestation d’une volonté libre mais à l’entrecroisement de plusieurs chaînes et de plusieurs formes de détermination. Sur ce point précis, le déterminisme est souvent réduit au déterminisme naturel ou physique sans que la pluralité des formes de déterminisme soit envisagée. Il est un écueil dans lequel on « tombe » et qu’il s’agit absolument d’éviter et ne semble jamais pouvoir correspondre à une position susceptible d’être étayée et donc aussi discutée de façon sérieuse. Certains candidats/certaines candidates semblent aussi considérer comme allant de soi que le savoir scientifique est nécessairement insatisfaisant et forcément inférieur au savoir rendu accessible par l’art, sans être à même, là encore, d’argumenter cette position … Enfin, il faut rappeler, en ce qui concerne le développement de l’exposé, qu’il n’y a pas de référence « attendue » : le jury a pu apprécier des prestations qui se sont appuyées avant tout sur des exemples historiques pour traiter certains sujets (comme « L’ennemi intérieur » par exemple). Néanmoins sur certaines notions (savoir, croyance, vérité, vertu, morale, devoir, passions, désir..), un « bagage » philosophique minimal est attendu et, sur ce point, si des références en philosophie contemporaine sont tout à fait bienvenues et valorisées, un travail préalable sur des textes classiques en histoire de la philosophie peut aussi être d’une aide précieuse pour traiter d’un grand nombre de sujets. En outre dès lors qu’une référence est convoquée, on s’attend à ce que cette référence soit maîtrisée et connue, et non pas appréhendée de manière caricaturale (cela est parfois le cas lorsque sont confrontées et opposées deux écoles de pensée, comme par exemple les épicuriens et les stoïciens). Un usage approximatif des références semble toujours témoigner de l’absence de lecture « de première main ». Il est dès lors toujours judicieux de s’en tenir à des références à des textes réellement lus et travaillés. Les meilleures prestations sont d’ailleurs celles qui se sont appuyées sur une problématisation rigoureuse, un effort d’argumentation, une analyse informée et fine de textes précis, articulée à un bon choix d’exemples. Un tel résultat ne peut être atteint, cela avait déjà été rappelé dans le précédent rapport, que par un effort de lecture régulier tout au long de l’année d’au moins deux à trois philosophes de prédilection et par un travail ciblé sur des textes permettant de nourrir la réflexion sur des notions centrales en philosophie (on en a déjà évoqué certaines dans le cadre de ce rapport). Seuls un tel effort et un tel travail permettent de se réapproprier de façon à la fois précise et personnelle des références et de les mobiliser de façon pertinente. Sujets choisis par les candidats - Commission 1 Commémorer Conflit et liberté Connaître ses origines Etre raisonnable, est-ce accepter la réalité telle qu'elle est ? Faut-il aimer son prochain ? Faut-il désespérer de l'humanité ? Faut-il protéger la dignité humaine ? L’attention La colère La croyance religieuse se distingue-t-elle des autres formes de croyance ? La fonction des exemples La légitimité démocratique La précaution La réciprocité La ruse La spontanéité L’embarras du choix L’ennemi intérieur L’ennui Le bonheur est-il affaire privée ? Le cas de conscience Le dogmatisme Le donné Le doute peut-il être méthodique? Le droit peut-il être flexible ? Le lieu commun Le mépris Le mot juste Le rêve et la réalité Le temps est-il notre ennemi ? L’hospitalité L’imprévisible L'infini L’ivresse N’avons-nous de devoir qu’envers autrui? Notre ignorance nous excuse-t-elle ? N’y a-t-il d’amitié qu’entre égaux ? Optimisme et pessimisme Percevoir, est-ce savoir ? Peut-il exister une action désintéressée ? Peut-on ne croire en rien ? Peut-on tout dire ? Peut-on ne pas être de son temps ? Peut-on ne pas savoir ce que l’on fait ? Pourquoi être raisonnable ? Pourquoi la curiosité est-elle un vilain défaut ? Qu’est-ce qu’un chef ? Qu’est-ce qu’une contrainte ? Qu'est-ce qu'une conviction ? Qu’est-ce qu’un enfant ? Qu’est-ce qu’une preuve ? Qu'est-ce qu'une science humaine ? Savoir est-ce se libérer ? S’engager Société et communauté Tout ce qui est excessif est-il insignifiant ? Tout désir est-il désir de posséder ? Tout peut-il s’expliquer ? Tous les conflits peuvent-ils être résolus par le dialogue ? Vérité et cohérence Vivre au présent Sujets choisis par les candidats - Commission 2 A quoi bon raconter des histoires ? Croire et savoir Croit-on comme on veut ? Eduquer et instruire Essence et existence Est-ce seulement l’intention qui compte ? Identité et changement L’au-delà L’art du mensonge L’amour et l’amitié La colère La confiance La désobéissance La force de la loi La guerre La honte La philosophie peut-elle être populaire ? La réalité du possible La sympathie L’écriture et la pensée L’idée de langue universelle L’idole L’induction L’intériorité L’insensibilité L’invention La métaphore La notion de nature humaine a-t-elle un sens ? La pitié La raison a-t-elle des limites ? La réalité du passé La reconnaissance La santé La métaphysique est-elle une science ? Le citoyen Le divertissement Le droit du plus fort Légalité et causalité Le loisir Le philosophe s’écarte-t-il du réel ? Le temps s’écoule-t-il ? Les passions ont-elles une place en politique ? L’histoire a-t-elle un sens ? L’homme libre est-il un homme seul ? Peut-on douter de tout ? Peut-on penser sans signes ? Peut-on se duper soi-même ? Peut-on se fier à son intuition ? Pourquoi punir ? Prévoir Prouver Dieu Que signifient les mots ? Qu’est-ce qu’une révolution ? Qu’est-ce qu’être sceptique ? Tout est-il à vendre ? Traduction, Trahison Tradition et vérité Un jeu peut-il être sérieux ? Y a-t-il de bons préjugés ? Y a-t-il des illusions nécessaires ? Sujets choisis par les candidats - Commission 3 Comment distinguer désirs et besoins ? Comment être naturel ? Comment mesurer ? Comment mesurer une sensation ? Comment percevons-nous l’espace ? Description et explication Devons-nous tenir certaines connaissances pour acquises ? Dire l’individuel Est-ce à la fin que le sens apparaît ? Est-il toujours avantageux de promouvoir son propre intérêt ? Est-il toujours meilleur d’avoir le choix ? Faire douter Faut-il perdre son temps ? Faut-il regretter l’équivocité du langage ? Faut-il s’efforcer d’être moins personnel ? Faut-il se fier à ce que l’on ressent ? La connaissance et la morale La connaissance peut-elle être pratique ? La décision a-t-elle besoin de raisons ? La deuxième chance La disposition La dissimulation La diversité des langues est-elle une diversité des pensées ? La nature a-t-elle une histoire ? La ou les vertus ? La perfection La pitié La preuve expérimentale La promesse La protection sociale La rationalité des émotions La tentation Laisser mourir, est-ce tuer ? L’économie est-elle une science ? L’énigme L’épreuve L’État doit-il être neutre ? L’histoire a-t-elle un sens ? L’inconnu L’indignation Le passé a-t-il un intérêt ? Le plaisir d’avoir mal Le pourquoi et le comment Le probable Le sens de la vie Le sérieux Le silence signifie-t-il toujours l’échec du langage ? Les animaux ont-ils des droits ? Les excuses Les mathématiques consistent-elles seulement en des opérations de l’esprit ? Les méchants peuvent-ils être amis ? Les raisons de croire Mesure et démesure Perdre le contrôle Pourquoi voyager ? Pourquoi y a-t-il des conflits insolubles ? Prendre ses désirs pour des réalités Quelle est la valeur du témoignage ? Qu’est-ce qu’un code ? Qu’est-ce qu’un plaisir pur ? Un contrat peut-il être injuste ?