théorique comprenant deux facteurs d’ordre supérieur, lar-
gement indépendants l’un de l’autre (faiblement corrélés
entre eux) et réfléchissant l’affect positif (les émotions
positives et la dimension extraversion) et l’affect négatif
(les émotions négatives et la dimension névrosisme). Initia-
lement développé comme un modèle descriptif des états
affectifs non pathologiques, ce schéma conceptuel est
reconnu comme pertinent pour l’amélioration de la com-
préhension des troubles de l’humeur et des troubles
anxieux.
Dans cette perspective, Clark et Watson [5], Marshall et
al. [23], Watson et al. [32] ont proposé un modèle à trois
facteurs dans lequel le facteur d’éveil ou d’excitation phy-
siologique permet d’améliorer la différenciation entre les
manifestations anxieuses et dépressives. Barlow et al. [4]
présentent un modèle similaire à trois facteurs. Ces modè-
les avec un triptyque ou une tripartition des facteurs suggè-
rent que les symptômes caractéristiques de l’anxiété et de la
dépression forment trois domaines distincts. Le premier
d’entre eux représente l’ensemble des symptômes com-
muns aux deux états affectifs. Il s’agit des manifestations
associées à la dimension de l’affectivité négative (tristesse,
colère, peur, anxiété, culpabilité, manque de confiance en
soi-même, pessimisme, honte, désespoir et impuissance,
attitudes soucieuses et tendues, hypersensibilité et hypervi-
gilance). Le deuxième domaine est constitué par des symp-
tômes typiques de l’anxiété et liés à l’excitation physiolo-
gique (nausées, maux d’estomac, sensation de boule dans
la gorge, bouche sèche, sensations de vertige, palpitations,
fréquent besoin d’uriner) [23]. Quant au troisième
domaine, il regroupe les signes caractéristiques de la
dépression : les manifestations associées à un score faible
de la dimension affectivité positive et décrites par les
aspects comme l’évitement des stimulations sociales et
sensorielles, l’isolement social, le peu d’expression de joie
ou d’enthousiasme et d’énergie vitale, l’allure somnolente,
la léthargie, la nonchalance apathique, et en particulier
l’anhédonisme.
Watson et al. [32] proposent un modèle hiérarchique
pour la taxonomie des troubles anxieux et de l’humeur
fondé sur une tripartition des facteurs. Ce modèle définit un
facteur général de détresse (general distress factor) subsu-
mant à la fois l’humeur dépressive et anxieuse. Ce facteur
de détresse générale correspond au concept de démoralisa-
tion utilisé par Tellegen [29, 30] pour la restructuration des
échelles cliniques du MMPI2. Pour Tellegen [30], le
concept de démoralisation correspond à un facteur général
d’ordre supérieur responsable de l’élévation excessive des
corrélations entre les diverses mesures des inventaires cli-
niques de l’expression psychopathologique. En quelque
sorte, ce facteur qui traverse les diverses échelles d’évalua-
tion de l’expression des plaintes et symptômes brouille leur
capacité différentielle dans le domaine du diagnostic. Il agit
comme un bruit de fond empêchant d’identifier les diffé-
rents sons du spectre. En isolant la variance attribuable à la
démoralisation, Tellegen [30] développe des échelles clini-
ques restructurées qui améliorent les évaluations de syn-
dromes et de traits pertinents pour le diagnostic et la com-
préhension de l’expérience psychologique des individus.
Ainsi, l’échelle de démoralisation (RCd-dem-
demoralization) a pour ambition de saisir une variable
émotionnelle, la détresse affective générale représentée à
un quelconque degré dans chacune des échelles cliniques
du MMPI2 et qui subséquemment sous-tend la variance
commune aux échelles cliniques.
Sans nous étendre plus avant dans ce domaine psycho-
métrique, nous mentionnerons toutefois le nom des nouvel-
les échelles RC2 et RC7 en soulignant l’impact des recher-
ches en taxonomie statistique sur leur appellation : RC2
(low positive emotions ou IPE) et RC7 (dysfunctional
negative emotions ou DNE). Les échelles RC2 et RC7
correspondent aux échelles dépression (2) et psychasthénie
(7) du MMPI. Tellegen et al. [30] postulent un facteur
général de démoralisation ou de détresse composé essen-
tiellement d’affects négatifs. Selon la conception de Wat-
son et Tellegen [31], l’affect négatif est une dimension de
second ordre qui s’exprime avec les descriptifs comme la
tristesse, la colère, le dégoût, la peur, la honte, la culpabilité
et le mépris. Tellegen [21] affirme que les échelles 2 (D) et
7 (Pt) du MMPI2 capturent le mieux la démoralisation.
Pour Tellegen [30], il est évident que ce qui distingue la
dépression est l’anhédonie ou l’absence d’expérience émo-
tionnelle positive. Cette conceptualisation se traduit dans le
choix des items de l’échelle RC2. Quant à l’échelle RC7,
elle est construite comme une mesure discriminante d’une
variété d’émotions négatives dysfonctionnelles comme la
colère, l’anxiété et les peurs.
Concept de démoralisation
et son intérêt pour l’approche
psychodiagnostique
L’étude de l’échantillon liégeois soulignait l’allure
polymorphe et non spécifique des syndromes anxiodépres-
sifs présentant des comorbidités élevées avec les somatisa-
tions. L’analyse des profils MMPI2 mettait en évidence
une majorité de profils de type P marqués par des notes
élevées sur la plupart (moyenne de six échelles avec un
écart type de 2) des échelles cliniques [18]. Ces profils
traduisaient le polymorphisme de l’expression syndromi-
que d’une organisation de personnalité décompensée. Les
indicateurs de l’inventaire de personnalité étaient caracté-
ristiques d’une intensification d’un malaise général et dif-
fus ainsi que de nombreuses plaintes somatiques, psycho-
logiques et sociales. Au plan clinique, nous avons rapporté
ce type de profil à l’expression d’un macrosyndrome anxio-
dépressif de nature non psychotique [3].
Par ailleurs et d’un point de vue psychologique, les
profils MMPI2 observés peuvent être interprétés en termes
Taxonomie et troubles anxiodépressifs
L’INFORMATION PSYCHIATRIQUE VOL. 83, N° 6 - JUIN-JUILLET 2007 463
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