dossier marketing stratégique

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dossier marketing stratégique
sommaire
01 I Le diagnostic marketing [p.36]
[p.36] Le défi du numérique : redonner sa place à la
fonction documentaire. Jean-Michel Salaün
[p.40] Analyser les besoins d’un public cible… Oui, mais
comment ? Florence Muet
[p.43] Conduire une enquête de besoins par entretiens
semi-directifs. Florence Muet
02 I Le positionnement stratégique [p.44]
[p.44] De la nécessité d'un [re]positionnement
stratégique des services info-documentaires. Jean Michel
[p.46] Quels positionnements pour les services
documentations au CNRS ? Agnès Magron
[p.49] « Donner du sens à la fonction collective de
partage de l’information ». Sylvie Roussel Gaucherand
[p.50] « L’innovation est un lieu de fertilisation croisée où
nous avons un vrai rôle à jouer ». Christine de Gouttes
03 I L’adéquation entre offre et besoins [p.52]
[p.52] Comment définir et mettre en œuvre une stratégie
d’offre. Florence Muet
[ introduction ]
[p.54] « Écouter, accompagner et former les étudiants
en vue de l’acquisition d’une culture informationnelle ».
Martine Allègre
[p.57] « Le médiateur culturel n’est pas là pour relayer le
marché mais plutôt le compléter, le réguler, voire parfois
s’y opposer ». Jean-Yves de Lépinay
[p.58] Trois questions à Sandrine Chomel-Isaac
[p.60] Le marketing relationnel pour les services
documentation : l’approche scandinave. Rajesh Singh
04 I La politique de communication [p.64]
[p.64] Stratégie marketing et politique de communication :
quelles complémentarités ? Martine Vila-Raimondi
[p.67] La communication des services documentation : à
la rencontre des publics. Martine Vila-Raimondi
[p.69] Les techniques de communication utiles aux
services documentations. Marie-Madeleine Salmon
Sources et ressources [p.70] Quelques références
pour aller plus loin. Ingrid Fernando-Torrès • Mots clés.
Florence Muet
la technique et aujourd’hui de la technologie peut, sans que l’on s’en rende
vraiment compte, pousser à oublier de
partir de la logique du besoin et des
pratiques pour concevoir les systèmes
documentaires, alors qu’ils ne valent
que par l’utilisation qui en est faite.
La conception de tout dispositif documentaire suppose une étape préalable
de réflexion fonctionnelle : il faut définir le « pourquoi » avant de déterminer le « comment » ! C’est une des raisons
de l’intérêt du marketing.
L’objectif de ce dossier est de proposer des pistes pour appliquer la dimension stratégique du marketing aux services d’information
documentaire2, dimension qui facilite la réflexion sur leur nécessaire articulation avec l’environnement dans lequel ils évoluent.
Voyons d’abord comment se l’approprier.
Pourquoi s’emparer des outils du marketing
stratégique lorsque l’on est professionnel de l’information documentaire ? En montrant les avantages d’une méthodologie globale qui permet de définir le cadre d’intervention de la fonction
documentaire et valorise la coproduction avec l’utilisateur, Florence
Muet explique les fondements de ce dossier.
Quel marketing pour
la fonction documentaire ?
l
Le marketing documentaire est d’abord la posture
de l’orientation utilisateur : la raison d’être de toute
fonction documentaire réside dans la recherche permanente de l’adaptation aux besoins d’information
d’une communauté 1 et des individus qui la composent. Cette adaptation se réalise par la conception de
modes de mise en relation avec l’information utile,
en fonction des activités et des objectifs de cette
communauté.
On pourra objecter que cette posture relève du
bon sens. Dans les faits, l’approche est facile à énoncer… moins évidente à réaliser. La prégnance, dans
nos compétences et notre culture professionnelles, de
34 IDocumentaliste - Sciences de l’information I 2008, vol. 45, n°1
Produit ou service ?
D’abord, il s’agit d’être au clair sur le type de marketing que
nous retenons comme pertinent pour nos activités. De façon
pragmatique, le marketing a déployé ses méthodologies et ses
grilles d’analyse en fonction du contexte auquel il s’attachait :
d’abord l’achat de biens de consommation courante, puis les
biens industriels, puis la vente de services et enfin les activités
non commerciales – tous secteurs dont les particularités
obligent à énoncer d’autres principes d’action. Et il
évolue encore : dans une société plus individualisée
que jamais et face à des clients de plus en plus exigeants, on s’oriente vers la valorisation d’une relation
commerciale fondée sur l’échange et la confiance : on
trouvera d’ailleurs dans ce dossier une analyse de
son application possible au secteur informationdocumentation.
Lequel de ces marketings retenir
comme pertinent pour la fonction
documentaire ? En fait, on se trouve
en présence de deux tendances. L’une,
plutôt anglo-saxonne, s’approprie le
modèle classique du marketing-mix :
l’offre faite à l’utilisateur est régie par
un ensemble de variables (les fameux
quatre P : produit, prix, place et promotion) définies
et contrôlées par le service d’information documentaire. L’autre, plutôt européenne, considère comme
fondamentale et structurante la dimension de service
de l’activité documentaire. La philosophie de
l’orientation utilisateur est présente dans les deux
cas, mais la différence de fond concerne la perception
de la place de l’utilisateur dans le système documentaire. Dans une logique de marketing-mix, l’utilisateur
est un « consommateur » d’information en puissance
qu’il faut attirer et séduire par une offre « packagée »
en fonction des besoins exprimés. Dans l’approche
service, l’utilisateur est vu comme un participant à
part entière du dispositif.
La référence dominante de ce dossier est clairement dans la deuxième approche. Elle amène alors
à centrer la réflexion marketing sur la définition du
résultat que le système doit produire pour l’utilisateur,
sur les conditions de sa « coproduction » par cet utilisateur et sur la nature des relations du système avec
son public.
Aide à la décision stratégique
Il faut aussi déterminer à quel niveau de conception nous intégrons la préoccupation marketing.
En tant que consommateurs, notre contact avec le
marketing se fait via sa dimension opérationnelle, par
exemple la publicité. En tant que concepteurs et gestionnaires de dispositifs documentaires, nous devons
raisonner autrement. Le marketing est avant tout une
méthode d’aide à la décision stratégique pour identifier l’offre de services pertinente et porteuse face aux
besoins et définir ainsi le cadre d’intervention du dispositif. Cette dimension dicte les étapes de la méthode.
La définition de la stratégie marketing s’appuie sur un
diagnostic préalable dont on ne peut faire l’économie :
1 De façon générale, ce dossier fait référence à des contextes
d’intervention documentaire professionnels (entreprises, recherche,
enseignement supérieur, administrations) qui supposent une approche
« utilitaire » de l’information et des savoirs.
2 On entend ici le terme « service d’information documentaire » dans
un sens générique fonctionnel et non structurel, incluant tout type de
configuration d’un dispositif documentaire, centralisé ou non, sur place,
uniquement à distance ou hybride, etc.
évaluer les « forces et faiblesses » du service pour déterminer
sa marge de manœuvre ; et mesurer « les opportunités et les
menaces » dans son environnement, autrement dit la nature et
l’ampleur des besoins et des enjeux liés à l’information.
Individus et communauté
La prise en compte de la spécificité de la fonction documentaire
pousse même à aller plus loin. Il ne faut surtout pas oublier
qu’un service documentation est d’abord au service de sa communauté (l’institution ou la collectivité dont il dépend) puisque
c’est elle qui, directement ou indirectement, le finance. Cela
signifie que la logique de « prestation » incluse dans l’approche
marketing (définir des services adaptés aux besoins des publics)
doit s’articuler à une logique de
« contribution » aux objectifs et aux
enjeux de la collectivité. C’est la notion
Florence Muet est professeur au sein du dépard’« alignement stratégique » proposée
tement Information
par Jean Michel dans l’article qui figure
documentaire de la Haute
dans ce dossier.
École de gestion de
La conséquence est immédiate sur
Genève, après avoir été
le diagnostic : on s’intéressera autant à
pendant quinze ans
identifier les besoins des utilisateurs
maître de conférences
potentiels qu’à repérer les orientations
associée et consultante
et les contraintes de son organisme…
indépendante. Son
et sur la stratégie : la décision markedomaine de compétence
ting centrale de couples « cible/offre »
concerne la définition et le
(quel service pour quel utilisateur)
pilotage des stratégies de
développement des serdépend des choix faits sur le positionvices d’information. Elle
nement du service, sur sa place et son
mène actuellement une
identité au sein de sa communauté.
recherche sur la définition
d’indicateurs stratégiques
Étapes et méthode
pour les bibliothèques
Pour conclure, trois réflexions de
académiques.
méthode proviennent d’un regard
[email protected]
transversal sur l’ensemble des témoignages proposés dans ce dossier.
D’abord, un des avantages de la démarche de marketing stratégique est qu’elle se veut complète, pour parvenir à définir le
cadre d’une fonction documentaire dans un environnement
donné. Gérer son service par une succession de microdécisions
sur des aspects particuliers de son fonctionnement, c’est risquer
de perdre la cohérence nécessaire. L’approche globale offre à
l’inverse l’opportunité de fixer des orientations d’ensemble dans
lesquelles l’activité pourra ensuite évoluer au quotidien.
L’innovation et la créativité sont aussi de mise. Il n’existe pas
de formule pertinente a priori puisque la logique est de s’adapter
à un contexte aux contours chaque fois spécifiques ! Il faut donc
se méfier des modèles tout faits. L’intérêt du marketing est qu’il
nous propose un cadre méthodologique pour déployer notre
imagination professionnelle.
Enfin, l’évolution générale montre que la construction de
l’offre de service doit se faire le plus possible en associant les
décideurs et les utilisateurs. Chacun peut aujourd’hui être autonome dans sa maîtrise de l’information. Les professionnels de
la documentation suivent le mouvement : ils ne sont plus uniquement (et dans certains cas plus du tout) fournisseurs mais
se situent comme partenaires. L’interaction avec ceux que l’on
a à servir s’épaissit, se densifie et se diversifie. N’est-ce pas une
opportunité considérable pour engager une nouvelle étape dans
l’histoire de notre fonction ? •
2008, vol. 45, n°1 I Documentaliste - Sciences de l’informationI 35
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