Hoquet - Un phénomène complexe parfois sévère

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Hoquet
Un phénomène complexe parfois sévère
Le plus souvent, le hoquet cède spontanément. Lorsqu’il persiste, il peut devenir invalidant. Sa résolution passe alors par le
traitement de la cause, principalement digestive mais souvent
masquée. En cas d’échec de toute thérapeutique, le recours à
des consultations antihoquet peut être utile.
C
ouramment répandu, le hoquet est en fait un
spasme du diaphragme suivi, quelque 35 millisecondes plus tard, de la fermeture incomplète
de la glotte. Celle-ci, qui normalement reste fermée jusqu’à la fin de la contraction (pouvant parfois durer jusqu’à une seconde), demeure ouverte
et provoque le bruit caractéristique. Cependant,
plusieurs autres centres sont en jeu : au niveau
du tronc cérébral (près des centres respiratoires),
au niveau cervical (avec le nerf phrénique), mais
aussi dans la région du bas œsophage. Ce phénomène est en fait un réflexe de défense, protégeant
d’un éventuel reflux gastrique. Il existe pendant
le sommeil, mais se modifie.
Physiologique chez l’embryon, le hoquet est
présent in utero, persiste souvent en postnatal,
notamment chez l’enfant prématuré. Fréquent
chez le nourrisson, il n’a pas alors de signification pathologique, sauf s’il est associé à un reflux accompagné de rejets alimentaires tardifs.
On doit, en ce cas, rechercher une incontinence
du cardia qui, en demeurant béant lors des
contractions stomacales, laisse refluer les aliments jusqu’à la bouche.
Pathologiquement, le déclenchement d’un hoquet peut suivre un repas trop abondant ou trop
alcoolisé. Il peut aussi être dû à une consommation abondante de tabac ou faire suite à un
stress important. Il peut également être lié à
l’absorption trop rapide ou trop importante de
boissons gazeuses ou d’aliments successivement
chauds et froids.
Le hoquet peut survenir au décours d’explorations médicales. La modification des doses d’anesthésiques ou l’introduction de certains autres médicaments peut alors rapidement rétablir l’ordre.
En cas d’échec, l’inhalation d’éther ou la stimulation de la partie postérieure du pharynx, à l’aide
d’un cathéter nasal, permet de faire cesser le
symptôme. Le plus souvent, avec une fréquence
variant de 10 à 60 secousses par minute, et après
des manœuvres simples, le hoquet cesse. Cependant, dans un certain nombre de cas, la crise persiste. Ces véritables crises peuvent parfois durer
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plus de 48 heures, en continu ou par phases.
Dans ce cas, l’épuisement résultant de cet état
et de l’anorexie liée à l’insomnie peut conduire
à une profonde dépression. « Lorsque le patient
vient à notre consultation spécialisée, il a parfois
effectué un véritable parcours du combattant, affirme le Dr Jean-Louis Bizec, de l’hôpital SaintJoseph à Paris. Avec nombre de médecins, il a
essayé beaucoup de traitements. Trop d’échecs ont
parsemé son parcours médical, beaucoup de praticiens ou de gourous en tous genres lui ont promis
des résultats, mais ont finalement échoué, le laissant avec sa gêne. Cette gêne devenant vite un handicap très ennuyeux. »
Causes digestives hautes
Si reconnaître un hoquet persistant est aisé, il importe d’en rechercher l’étiologie. Une cause digestive doit être suspectée en premier. L’examen
médical suit un interrogatoire quasi policier, qui
précisera tout signe d’appel : une toux persistante, déclive, nocturne, une brûlure rétrosternale, un pyrosis ou une dysphagie, voire des
maux de gorge réguliers sans signe infectieux ou
des angines à répétition. Avec moins d’évidence,
ce peut être une succession d’épisodes rhinopharyngés ou bronchiques, pathognomoniques
lorsque le patient, après un repas, en se baissant
pour enfiler ses chaussures, ressent une gêne thoracique, voire une brûlure rétrosternale, associée
à une remontée acide buccale ou laryngée. Devant un tel signe, il importe de rechercher, isolées
ou associées, une hernie hiatale, une œsophagite,
une gastrite, avec un reflux gastro-œsophagien (RGO) ou non. Lorsque la clinique est insuffisante, la fibroscopie peut confirmer l’atteinte
œsophagienne ou gastrique, détecter même la
présence d’Helicobacter pylori, germe retrouvé
dans l’ulcère de l’estomac, mais aussi dans le
lymphome gastrique. Un traitement aux inhibiteurs de la pompe à protons associé à deux antibiotiques permet, en éradiquant ce germe, de
traiter les affections qu’il peut causer. Parfois,
seule la manométrie ou la PHmétrie permet d’af-
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firmer un reflux peu évident. En dehors de toute
pathologie sous-jacente, ces examens aident parfois à diagnostiquer une hyperkinésie pouvant
entraîner à elle seule un hoquet, sans autre substratum anatomique.
Causes digestives basses
Une origine digestive basse a pour responsables
les colopathies, les colites en tous genres avec
leur symptomatologie riche de douleurs abdominales, de météorismes et de troubles du transit.
Exceptionnellement en cause, une infection
sous-diaphragmatique peut pourtant se révéler
(abcès ou péritonite chronique). Les signes biologiques et radiologiques permettent alors de détecter cette infection latente. La cause digestive
identifiée, le traitement étiologique fera, la plupart du temps, cesser ce hoquet. Sont utilisés les
modificateurs de la digestion, comme le métoclopramide, liés, en cas de hernie et de RGO, aux
anti-acides, aux anti-H2, ou aux inhibiteurs de la
pompe à protons, en fonction de l’importance
des lésions. Conjointement, les conseils hygiénodiététiques sont indispensables à rappeler ou à
énoncer : suppression du tabac, des graisses, du
chocolat, du café, des épices (modificateurs du
sphincter œsophagien). Parfois, lorsque le reflux
est très important, que la fibroscopie a trouvé
une œsophagite importante et résistant aux traitements classiques médicamenteux, la chirurgie
peut alors être indiquée. Actuellement, la chirurgie sous cœlioscopie ou sous laparoscopie
semble avoir les faveurs, le risque principal étant,
pour cette technique, de léser le nerf phrénique.
En cas de colopathie, l’arsenal thérapeutique est
vaste et apprécié par le médecin, en fonction de
son patient. Il peut être utile de s’aider d’examens
complémentaires pour éliminer une lésion organique intestinale. En l’absence de tumeurs bénignes ou malignes décelées seront alors utilisés
les modificateurs des contractions coliques : des
antispasmodiques ou des accélérateurs du transit, voire des “calmants” à impact intestinal ou
des anxiolytiques plus généraux. Enfin, un abcès
sous-diaphragmatique, une péritonite chronique
ne doivent pas être méconnus.
Causes non digestives
Quand il n’existe pas de causes digestives, il
convient d’éliminer en premier la prise régulière
de médicaments (benzodiazépines, corticoïdes,
barbituriques). En l’absence de pathologie digestive, de prise médicamenteuse, et en présence de
signes neurologiques, il faut envisager une cause
cérébrale. Vertiges, céphalées, troubles mnésiques
ou du comportement doivent faire craindre un
problème encéphalique. Le scanner diagnostique
une tumeur cérébrale (plus souvent voisine du
tronc) ou repère un problème vasculaire : de
l’anévrisme cérébral jusqu’à la maladie d’Alzheimer. Si les examens radiologiques ne suffisent
pas, une étude des potentiels auditifs évoqués
peut révéler une tumeur du tronc cérébral ou du
cervelet. La résolution du hoquet passe alors par
le traitement de l’affection causale. Enfin, et plus
rarement, le hoquet peut accompagner une pathologie urologique ou postopératoire abdominale ou pelvienne : une lithiase urinaire comme
une bride postopératoire. Le hoquet peut souvent
aggraver un syndrome tumoral ou immunodéficitaire acquis : il fait partie des syndromes paranéoplasiques, comme signe non pas révélateur, mais
aggravant. Enfin, les patients atteints de cancer
présentent souvent, en fin d’évolution de la maladie, un hoquet responsable d’une gêne supplémentaire. Son traitement, encore trop souvent négligé, les soulage pourtant.
L’efficacité de tous les médicaments qui ont pu être
essayés contre le hoquet n’est pas garantie. Cependant, plusieurs règles sont à respecter : si un traitement correctement suivi pendant un mois ne provoque aucune amélioration, il est alors inutile de le
poursuivre. En revanche, si l’amélioration peut
être immédiate, elle est le plus souvent progressive. Le médicament ayant apporté les meilleurs
résultats, en dehors du traitement étiologique,
semble être le baclofène (Lioresal®), un traitement
dont les effets secondaires ne sont pas rares (fatigue, somnolence ou nausées).
J.B.
Lorsque rien ne marche, consultations anti-hoquet à Paris :
– hôpital Saint-Antoine : 01 49 28 23 87 ;
– hôpital de la Salpêtrière : 01 42 17 66 84 ;
– hôpital Saint-Joseph : 01 44 12 33 87 ;
– SOS hoquet : 01 42 17 67 77.
RÉFÉRENCES
B I B L I O G R A P H I Q U E S
1. Bizec JL, Launois S, Bolgert F et al. Le hoquet de l’adulte. Rev Mal
Resp 1995 ; 12 : 219-29.
2. Bizec JL, Cabane J, Derenne JP et al. Hoquet de l’adulte. EMC Paris
25-498-A-10.
3. Cabane J, Desmet V. Derenne JP et al. Le hoquet chronique. Rev
Med Interne 1992 ; 13 : 72-7.
4. Nouveau dictionnaire de médecine et chirurgie et de l’art vétérinaire. Paris 1772 ; 5 : 159.
5. Hippocrate. Les aphorismes. Les épidémies. Librairie de l’Académie
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6. Cabane J, Derenne JP. Le hoquet. Conc Med 1988 ; 110 : 2829-32.
7. Lance JW, Bassil GT. Familial intractable hicup relieved by baclofen.
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