Chapitre 7, le temps des dominations coloniales

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Thème 4 : Colonisation et décolonisation
Chapitre 7 : Le temps des dominations coloniales
Document amorce : texte 1 p. 246 (attention, ce n’est pas un document historique)
Le monde connaît la colonisation depuis l’Antiquité. Il s’agit du processus d’expansion d’une
puissance (métropole) vers d’autres territoires (colonies) exploités économiquement et mis sous tutelle
politique et culturelle. Au milieu du XIXe siècle, tous les continents sont touchés par la colonisation.
L’Afrique connaît un destin particulier car c’est le seul continent qui a connu une « course aux
colonies » entre les puissances. L’apogée colonial est atteint pendant l’entre-deux-guerres, période
pendant laquelle les empires britannique et français se distinguent des autres, par leur taille et leur
présence sur tous les continents. L’Empire français connaît sa plus grande acceptation dans l’opinion
publique française en 1931, lors de l’exposition coloniale, exposition qui met en avant les
représentations que les français se font de l’Empire, mais non ses réalités, ni les contestations qui lui
sont opposées.
Comment les puissances européennes se partagent-elles l’Afrique à la fin du XIXème siècle ? Quelles
sont les représentations, les réalités et les contestations de la domination coloniale française dans
l'entre-deux-guerres ?
I. Le partage colonial de l’Afrique à la fin du XIXème siècle :
A. Conquêtes et résistances.
Documents à utiliser : document 1 p. 248, document 2 p. 249 et carte p. 254-255 (aidez-vous de la
page de cours du livre p. 248), Supplément illustré du petit journal, 21 février 1904.
Document : La résistance des Hereros contre l’Allemagne, le petit journal, 21 février 1904.
1. Les territoires conquis par les Européens en Afrique en 1880 sont-ils nombreux ?
À l’exception de l’Algérie dont la conquête s’opère depuis 1830, les implantations européennes en
Afrique sont ponctuelles et limitées vers 1865. L’intérieur du continent, à la différence des régions
littorales, n’est pas entièrement connu des Européens bien que de nombreuses missions d’exploration
(Brazza, 1852-1905) ont eu lieu dans le courant du XIXe siècle.
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Chapitre 7 : Le temps des dominations coloniales
2. La situation des puissances européennes en Afrique en 1914 a-t-elle évoluée ?
La pénétration européenne s’est considérablement intensifiée en 1914 et de nouveaux protagonistes,
comme l’Allemagne et l’Italie, se sont implantés sur le continent. Ainsi, dans les premières années du
XXe siècle, l’Afrique est presque entièrement conquise par quelques puissances européennes. Les
nations colonisatrices, qui possédaient 11 % du continent africain en 1875, en contrôlent 90 % en
1902. Il ne reste en 1914 que deux États indépendants : le Liberia et l’Abyssinie (grâce à la victoire du
négus à Adoua sur les Italiens en 1896).
3. Présentez la caricature (document 1 p. 248). En dehors de la conquête militaire, quels sont les autres
moyens pour contrôler pleinement un territoire ?
Cette caricature est l’œuvre du dessinateur Edward Linley Sambourne, et elle est intitulée « Le colosse
de Rhodes ». Elle a été publiée dans Punch, un journal satirique anti-establishment britannique, le 10
décembre 1892. Cette caricature du colonisateur britannique Cecil Rhodes le présente, tel le « colosse
de Rhodes », reliant le Caire au Cap (les deux extrémités de l’Afrique) par le télégraphe et le chemin
de fer. Ainsi, les progrès techniques contribuent-ils à la conquête coloniale.
4. Les colonisateurs européens, contrairement à ce que les textes de l’époque veulent faire croire,
sont-ils arrivés sur des terres vierges de toute civilisation ?
De puissants royaumes d’Afrique sont présents sur le continent africain bien avant l’arrivée des
colonisateurs. Au moment de la conquête de l’Afrique, les Français partent à la conquête de l’Empire
de Samory Touré, les Anglais du royaume Ashanti. De plus, un grand nombre de tribus peuplent
l’Afrique. Les Européens s’y heurtent de manière violente face à des peuples qui résistent : les Anglais
se heurtent aux zoulous en 1869, les Allemands aux Hereros en 1904.
Les exemples de résistance sont en effet légions : résistance des Wolof au Sénégal de 1864 à 1886,
résistance du roi Béhanzin au Dahomey en 1890 puis en 1892-1894, guerres qui opposent les Ashantis
et les Zoulous aux Britanniques.
5. Comment les Européens présentent-ils les peuples qui leur résistent ? Est-ce le reflet de la réalité ?
Le document illustre la résistance des Hereros, en Afrique du Sud-ouest (actuelle Namibie) qui se
révoltent en 1904 contre la domination allemande. L’illustration du Petit Journal représente
l’affrontement entre l’armée allemande, obéissant aux ordres de l’officier debout au second plan, et les
guerriers Hereros, dirigés par leurs chefs, reconnaissables à leur coiffe et costume rouge vif. On
mesure ici l’infériorité technologique des Hereros qui, comme souvent dans ces guerres coloniales,
condamne les insurgés à l’échec. Les Allemands utilisent l’arme à feu, avancent en rang serré,
devancés par des tirs d’artillerie ; leur action est coordonnée tandis que l’assaut des guerriers hereros
semble désordonné. S’il est vrai que l’armement des populations africaines est inférieure à celle des
populations européennes, leurs techniques de guerre sont souvent efficaces comme le montre la défaite
des Britanniques à la bataille d’Isandhlwana en 1869, bataille où 20 000 zoulous battent les 4000
hommes de l’armée britannique mal préparés.
La conquête des territoires africains revêt des formes diverses : mise sous dépendance à partir
de questions financières comme en Tunisie ou en Égypte ou encore au Maroc, traités de protectorat,
souvent ambigus en Afrique intertropicale, mais aussi conquête militaire et même véritables guerres
coloniales, là où les Africains n’acceptent pas la perte de leur indépendance.
B. Partage de l’Afrique et rivalités coloniales
1) La conférence de Berlin (1884-1885) : une tentative de régulation de la conquête de
l’Afrique :
Documents à utiliser : le préambule de la conférence de Berlin (1885), document 2 p. 250.
Document 1 : Préambule de la conférence de Berlin (1885)
Voulant régler, dans un esprit de bonne entente mutuelle, les conditions les plus favorables au
développement du commerce et de la civilisation dans certaines régions d'Afrique, et assurer à tous les
peuples les avantages de la libre navigation sur les deux principaux fleuves africains qui se déversent
dans l'océan Atlantique; désireux d'autre part, de prévenir les malentendus et les contestations que
pourraient soulever à l'avenir les prises de possession nouvelles sur les côtes de l'Afrique, et
préoccupés, en même temps, des moyens d'accroître le bien-être moral et matériel des populations
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Thème 4 : Colonisation et décolonisation
Chapitre 7 : Le temps des dominations coloniales
indigènes, ont résolu, sur invitation qui leur a été adressée par le gouvernement impérial d'Allemagne,
d'accord avec le gouvernement de la République française, de réunir à cette fin une Conférence à
Berlin. […]
Questions :
1. Quelles sont les raisons qui ont amené les puissances européennes à se réunir à Berlin en
1884-1885 ? Quelles sont les règles qui ont été mises en place lors de cette conférence ?
Ces textes sont des extraits de l’acte final de la conférence de Berlin (préambule et articles),
tenue de novembre 1884 à février 1885 à l’initiative de l’Allemagne et de la France. Trois questions
majeures sont envisagées : celle du commerce, pour éviter conflits et monopoles et la nécessité de
permettre une libre navigation sur les deux grands fleuves africains (Congo et Niger), permettant ainsi
aux pays sans façade maritime un libre accès à l’océan Atlantique. La question des frontières est
posée, en vue des prochaines conquêtes, de façon à éviter les litiges. Enfin, les puissances européennes
s’engagent solennellement à pourvoir au bien-être des populations colonisées. Ainsi la conférence
s’engage-t-elle à assurer la fin de l’esclavage et de la traite.
2. La conférence de Berlin procède-t-elle au partage de l’Afrique ? En vous appuyant sur la photo 2 p.
245 et la carte 4 p. 251, peut-on dire que les règles fixées par la conférence ont été respectées ?
La conférence de Berlin ne procède donc pas au partage de l’Afrique, comme l’affirme la caricature du
début du chapitre. À travers ce texte est esquissée une ligne de conduite pour les Européens en
Afrique. Elle a été peu respectée, tant du point de vue du sort réservé aux indigènes que de la question
des frontières, comme l’attestent les différents litiges opposant les puissances coloniales jusqu’en
1914. Cette conférence est néanmoins représentative d’un esprit nouveau de concertation
internationale qui se développe dans les années 1880.
2) Des rivalités persistantes entre les puissances coloniales : l’exemple de Fachoda (1898) :
Documents à utiliser : La couverture du petit journal (1898), document 4 p. 251 :
Le petit journal, 20 novembre 1898.
Le lobby colonial français, qui a mal accepté l’installation des Britanniques en Égypte et leurs
ambitions sur le Soudan, a tout mis en œuvre pour contrecarrer cette avancée. Les routes des deux
empires se croisent en effet : celle des Britanniques cherchant à constituer un axe Nord/Sud, celle des
Français un axe Atlantique/Mer rouge. En 1895, le capitaine Jean-Baptiste Marchand se voit confier la
mission de remonter le Congo et l’Oubangui pour atteindre le Nil blanc à Fachoda, sans tenir compte
des protestations du Foreign Office qui stipule que toute expédition française vers le Nil sera
considérée comme un « acte inamical ». Partie en 1896, l’expédition est confrontée à des actes de
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rébellion anti-français que le capitaine réprime durement. Le 10 juillet 1898, la mission atteint
Fachoda. Au début de l’année 1898, le général anglais Kitchener commence sa remontée du Nil à la
tête d’une imposante armée anglo-égyptienne avec laquelle il arrive aux portes de Fachoda le 19
septembre. Un combat serait très inégal, la mission Marchand comptant 150 hommes là où celle de
Kitchener en réunit 20000, et le gouvernement français ne tient pas à s’engager dans une guerre
coloniale contre le Royaume-Uni. Le 3 novembre 1898, le gouvernement français prend la décision
d’évacuer Fachoda.
Le document présente la situation extrêmement tendue entre les deux pays qui sont au bord de la
guerre. De chaque côté, le parti colonial, soit le groupe de pression regroupant les hommes politiques
favorables à la colonisation quelle que soit leur obédience politique, pousse à de nouvelles conquête.
L’Angleterre est représentée sous la forme du loup dans le petit chaperon rouge, un pays qui
fonctionne donc par la ruse. Le bouclier porte le nom d’Albion, nom très péjoratif donné à
l’Angleterre depuis la période de la guerre de Cent Ans (XIVème-XVème siècle) – l’adjectif perfide est
parfois ajouté. La caricature critique la volonté expansionniste de l’Angleterre au Soudan mais aussi
en Egypte – Fachoda est au Soudan mais son contrôle permet de faire la connexion entre le Soudan et
l’Egypte. Or, cette mainmise sur le Soudan et l’Egypte est critiquée.
D’autres querelles opposent les puissances coloniales : ainsi la France et l’Allemagne en 1905 et 1911
sont aux prises à deux reprises pour le contrôle du Maroc.
C. Des motivations qui font débat
Documents à utiliser : discours de Jules Ferry sur la question coloniale (28 juillet 1885), discours de
Georges Clémenceau répondant au discours de Jules Ferry (30 juillet 1885).
Document 1 : Discours de Jules Ferry, le 28 juillet 1885
« Vous nous citez toujours comme exemple, comme type de la politique coloniale que vous aimez et
que vous rêvez, l’expédition de M. de Brazza. C’est très bien, messieurs, je sais parfaitement que
M. de Brazza a pu jusqu’à présent accomplir son œuvre civilisatrice sans recourir à la force ; c’est un
apôtre ; il paie de sa personne, il marche vers un but placé très haut et très loin ; il a conquis sur ces
populations de l’ Afrique équatoriale une influence personnelle à nulle autre pareille ; mais qui peut
dire qu’un jour, dans les établissements qu’il a formés, qui viennent d’être consacrés par l’aréopage
européen et qui sont désormais le domaine de la France, qui peut dire qu’à un moment donné les
populations noires, parfois corrompues, perverties par des aventuriers, par d’autres voyageurs, par
d’autres explorateurs moins scrupuleux, moins paternels, moins épris des moyens de persuasion que
notre illustre Brazza, qui peut dire qu’à un moment donné les populations n’attaqueront pas nos
établissements ? Que ferez-v alors ? Vous ferez ce que font tous les peuples civilisés et vous n’en
serez pas moins civilisés pour cela ; vous résisterez par la force et vous serez contraints d’imposer,
pour votre sécurité, votre protectorat à ces peuplades rebelles. Messieurs, il faut parler plus haut et plus
vrai ! Il faut dire ouvertement qu’en effet les races supérieures ont un droit vis-à-vis des races
inférieures ... (Rumeurs sur plusieurs bancs à l’extrême gauche.)
« Je répète qu’il y a pour les races supérieures un droit, parce qu’il y a un devoir pour elles. Elles ont
le devoir de civiliser les races inférieures... (Marques d’approbation sur les mêmes bancs à gauche,
nouvelles interruptions à l’extrême gauche et à droite.) La vraie question, messieurs, la question qu’il
faut poser, et poser dans des termes clairs, c’est celle-ci : est-ce que le recueillement qui s’impose aux
nations éprouvées par de grands malheurs doit se résoudre en abdication ? [...] Est-ce que, absorbés
par la contemplation de cette blessure qui saignera toujours, ils laisseront tout faire autour d’eux ; estce qu’ils laisseront aller les choses ; est-ce qu’ils laisseront d’autres que nous s’établir en Tunisie,
d’autres que nous faire la police à l’embouchure du fleuve Rouge et accomplir les clauses du traité de
1874, que nous nous sommes engagés à faire respecter dans l’intérêt des nations européennes ? Est-ce
qu’ils laisseront d’autres se disputer les régions de l’Afrique équatoriale ? Laisseront-ils aussi régler
par d’autres les affaires égyptiennes qui, par tant de côtés, sont des affaires vraiment françaises ? (Vifs
applaudissements à gauche et au centre. Interruptions.)
« Je dis que la politique coloniale de la France, que la politique d’expansion coloniale, celle qui nous a
fait aller, sous l’Empire, à Saigon, en Cochinchine, celle qui nous a conduits en Tunisie, celle qui nous
a amenés à Madagascar, je dis que cette politique d’expansion coloniale s’est inspirée d’une vérité sur
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Thème 4 : Colonisation et décolonisation
Chapitre 7 : Le temps des dominations coloniales
laquelle il faut pourtant appeler un instant votre attention : à savoir qu’une marine comme la nôtre ne
peut pas se passer, sur la surface des mers, d’abris solides, de défenses, de centres de ravitaillement.
("Très bien ! Très bien !" Nombreux applaudissements à gauche et au centre.) L’ignorez-vous,
messieurs ? Regardez la carte du monde... et dites-moi si ces étapes de l’Indochine, de Madagascar, de
la Tunisie ne sont pas des étapes nécessaires pour la sécurité de notre navigation ? (Nouvelles marques
d’assentiment à gauche et au centre.)[...] « Rayonner sans agir, sans se mêler aux affaires du monde,
en se tenant à l’écart de toutes les combinaisons européennes, en regardant comme un piège, comme
une aventure toute expansion vers l’Afrique ou vers l’Orient, vivre de cette sorte, pour une grande
nation, croyez-le bien, c’est abdiquer, et dans un temps plus court que vous ne pouvez le croire ; c’est
descendre du premier rang au troisième et au quatrième. (Nouvelles interruptions sur les mêmes bancs.
"Très bien ! Très bien !" au centre.) »
Document 2 : Réponse de Georges Clemenceau, le 30 juillet 1885
« Je passe maintenant à la critique de votre politique de conquêtes au point de vue humanitaire. [...]
Nous avons des droits sur les races inférieures. Les races supérieures ont sur les races inférieures un
droit qu’elles exercent et ce droit, par une transformation particulière, est en même temps un devoir de
civilisation. Voilà, en propres termes, la thèse de M. Ferry et l’on voit le gouvernement français
exerçant son droit sur les races inférieures en allant guerroyer contre elles et les convertissant de force
aux bienfaits de la civilisation. Races supérieures ! Races inférieures ! C’est bientôt dit. Pour ma part,
j’en rabats singulièrement depuis que j’ai vu des savants allemands démontrer scientifiquement que la
France devait être vaincue dans la guerre franco-allemande, parce que le Français est d’une race
inférieure à l’Allemand. Depuis ce temps, je l’avoue, j’y regarde à deux fois avant de me retourner
vers un homme et vers une civilisation et de prononcer : homme ou civilisation inférieure ! [...]
Je ne veux pas juger au fond la thèse qui a été apportée ici et qui n’est autre chose que la proclamation
de la puissance de la force sur le Droit. L’histoire de France depuis la Révolution est une vivante
protestation contre cette unique prétention. C’est le génie même de la race française que d’avoir
généralisé la théorie du droit et de la justice, d’avoir compris que le problème de la civilisation était
d’éliminer la violence des rapports des hommes entre eux dans une même société et de tendre à
éliminer la violence, pour un avenir que nous ne connaissons pas, des rapports des nations entre elles.
[...] Regardez l’histoire de la conquête de ces peuples que vous dites barbares et vous y verrez la
violence, tous les crimes déchaînés, l’oppression, le sang coulant à flots, le faible opprimé, tyrannisé
par le vainqueur ! Voilà l’histoire de votre civilisation ! [...] Combien de crimes atroces, effroyables
ont été commis au nom de la justice et de la civilisation. Je ne dis rien des vices que l’Européen
apporte avec lui : de l’alcool, de l’opium qu’il répand, qu’il impose s’il lui plaît. Et c’est un pareil
système que vous essayez de justifier en France dans la patrie des droits de l’homme !
Je ne comprends pas que nous n’ayons pas été unanimes ici à nous lever d’un seul bond pour protester
violemment contre vos paroles. Non, il n’y a pas de droit des nations dites supérieures contre les
nations inférieures. Il y a la lutte pour la vie qui est une nécessité fatale, qu’à mesure que nous nous
élevons dans la civilisation nous devons contenir dans les limites de la justice et du droit. Mais
n’essayons pas de revêtir la violence du nom hypocrite de civilisation. Ne parlons pas de droit, de
devoir. La conquête que vous préconisez, c’est l’abus pur et simple de la force que donne la
civilisation scientifique sur les civilisations rudimentaires pour s’approprier l’homme, le torturer, en
extraire toute la force qui est en lui au profit du prétendu civilisateur. Ce n’est pas le droit, c’en est la
négation. Parler à ce propos de civilisation, c’est joindre à la violence, l’hypocrisie. »
Questions : Après avoir présenté ces auteurs et le contexte du débat qui les oppose, expliquez sur quels
points ces hommes politiques s’opposent, et quelles raisons de la colonisation sont données
a posteriori. Ces raisons font-elles l’unanimité en France ?
Les deux documents suivants proviennent du « grand débat » de 1885, alors que la prise de
possession de l’Annam et du Tonkin et l’extension de sa domination au Congo et à Madagascar, la
France connaît une inflexion très sensible de la politique coloniale. Jules Ferry est tombé le 30 mars
1885 sur la question du désastre de Lang Son et atteint des sommets d’impopularité (« Ferry
Tonkin »). Dans ce discours du 28 juillet devant la Chambre des députés, « remarquable de logique et
de clarté » (Denise Bouche), il tente une justification a posteriori de sa politique, organisant les
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Thème 4 : Colonisation et décolonisation
Chapitre 7 : Le temps des dominations coloniales
thèmes épars présentés depuis des années en un discours colonial cohérent, n’hésitant pas à utiliser à la
fois l’argument économique et l’argument politique et moral, c’est-à-dire réunir les trois aspects de
l’idée coloniale. Clemenceau, député de la Seine, violemment hostile à la politique des opportunistes,
répond point par point à l’argumentation de Ferry lors du même débat.
Rayonner ou abdiquer ?
« On peut rattacher le système (d’expansion coloniale) à trois ordres d’idées : à des idées
économiques, à des idées de civilisation, à des idées d’ordre politique et patriotique » (Raoul
Girardet) :
- économique : l’expansion coloniale doit permettre de trouver pour l’industrie française les
débouchés qu’exige son développement et que menace la concurrence des autres puissances
manufacturières, un argument qui prend d’autant plus de relief que le renversement du cycle
économique (phase B de Kondratiev depuis 1873) prend dans les années 1880 l’allure d’une
véritable dépression et se traduit par un retour au protectionnisme (tarif de 1881).
- Humanitaire : l’action colonisatrice est fondamentalement définie comme une œuvre
d’émancipation. « Par elle se poursuit la lutte entreprise depuis plus d’un siècle au nom de
l’esprit des Lumières contre l’injustice, l’esclavage, la soumission aux ténèbres »
(Raoul Girardet). Patrie du droit et de la justice, la France a un devoir civilisateur : elle doit
répandre les bienfaits de la Science, de la Raison et de la Liberté.
- Politique et patriotique : la colonisation est une nécessité pour rester une nation de premier
plan. Ferry se défend d’avoir cherché dans l’expansion un palliatif à la décadence de la
France ; en revanche, pour lui, « rayonner sans agir (…) c’est abdiquer ».
La force ou le droit ?
Clemenceau répond point par point à l’argumentation de Ferry dans son discours du 31 juillet 1885.
- économique ? Clemenceau assure que la colonisation gaspille « l’or et le sang de la France »,
expression de l’économiste libéral et député de gauche Frédéric Passy. La colonisation
n’apporte aucun profit et dilapide les ressources du pays, les frais de pacification puis
d’administration étant énormes.
- Politique et patriotique ? C’est en fortifiant la France de l’intérieur qu’on pourra la faire
rayonner à l’extérieur. Clemenceau considère que l’expansion coloniale isole
diplomatiquement la France, le tout avec la complicité machiavélique de Bismarck, heureux
de voir se dresser contre elle l’Italie (Tunisie) ou le Royaume-Uni (Egypte).
- Humanitaire ? La partie la plus mal reçue du discours de Ferry concernait les races supérieures
et inférieures. « Vous osez dire cela dans le pays où ont été proclamés les droits de
l’homme ! » crie un député radical. Et Clemenceau – son opinion à propos des races est
remarquable à une époque où les préjugés racistes sont unanimement partagés – d’ajouter :
« Races supérieures, races supérieures, c’est bientôt dit ! Pour ma part, j’en rabats
singulièrement depuis que j’ai vu des savants allemands démontrer scientifiquement que la
France devait être vaincue dans la guerre franco-allemande parce que les Français est d’une
race inférieure à l’Allemand. »
L’apogée colonial en France est concomitant de l’affirmation d’un nationalisme « indigène ». La
contestation se développe d’abord en Indochine, en Afrique du Nord, en Syrie et au Liban, elle reste
limitée en Afrique noire où l’opposition au colonialisme se structure différemment. Les revendications
des élites portent principalement sur les réformes à mettre en œuvre et sur la justice sociale. En France,
la contestation intellectuelle « noire », inspirée par des Antillais et de jeunes Africains prend corps.
Des revues vont y donner naissance à une prise de conscience nationaliste et identitaire de la diaspora
noire. Dans le prolongement, Aimé Césaire et Léopold Sédar Senghor font émerger le thème de la
« négritude ». De plus, dans les autres parties de l’Empire, des partis nationalistes incarnent la
contestation de la colonisation. Celle-ci s’incarne dans des personnages comme Nguyên Ai Quôc,
futur Hô Chi Minh, fondateur du parti communiste indochinois en février 1930, dans des mouvements
comme l’Etoile nord-africaine de Messali Hadj (1926) ou le Néo-Destour (1934) et dans des troubles
comme ceux qui ont lieu au Tonkin en 1931.
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Thème 4 : Colonisation et décolonisation
Chapitre 7 : Le temps des dominations coloniales
II. L’Empire français au moment de l’exposition coloniale de 1931 :
A. L’exposition coloniale de 1931 : célébration de l’Empire et illusion coloniale :
Documents à utiliser : ensemble documentaire p. 258-259 :
Questions :
1. A quoi l’exposition coloniale invite les visiteurs ?
L’Exposition est présentée comme une invitation au voyage dans le monde colonial : on propose aux
visiteurs de « venir faire le tour du monde en un jour ». L’affiche de l’exposition coloniale présente les
stéréotypes facilement reconnaissables des différents habitants « indigènes » de l’Empire. On peut
remarquer de gauche à droite des habitants de l’Afrique (colonie occidentale et orientale), du
Maghreb, de l’Asie (notamment l’Indochine).
2. Que tente de promouvoir l’exposition coloniale à Vincennes ?
L’Exposition de Vincennes tente de promouvoir l’image d’une France impériale à l’apogée de sa
puissance. Afin de développer l’intérêt des Français pour leurs colonies et de renforcer l’adhésion de
la population française à l’entreprise coloniale, elle est conçue en partie comme une manifestation
exotique et artistique. On multiplie les spectacles : cérémonies religieuses dans la pagode du Laos,
reconstitution du cortège du roi Béhanzin, musiciens africains et malgaches, danseurs de tous les
continents. Chaque soir ont lieu des spectacles son et lumière au théâtre d’eau, embrasant le lac
Daumesnil. On organise même des courses de chameaux, des promenades en pirogues. On invite les
visiteurs à déguster des spécialités locales, à visiter des expositions d’objets d’art « primitifs », le parc
zoologique. Les reconstitutions architecturales, ici le long de l’avenue des colonies, visent à
transporter le visiteur dans le monde colonial. On peut le voir notamment avec la reconstitution temple
d’Angkor Vat (document 5), reconstitution qui constitue le clou de l’exposition avec une surface de
5000 m² et 55 m de haut et souligne l’action de la France pour la réhabilitation d’une grande
civilisation disparue.
3. Comment sont mis en scène les « indigènes » ?
À l’Exposition de Vincennes, les populations d’outre-mer semblent quitter le monde de la sauvagerie
pour être instrumentalisés comme acteurs de l’entreprise coloniale. On fait venir de tout l’empire des «
figurants » : artisans, musiciens, danseurs, piroguiers, chameliers, soldats « indigènes ».
Comparativement aux exhibitions d’indigènes de la fin du XIXe siècle, l’Exposition coloniale de 1931
témoigne d’une transformation dans la mise en scène des colonisés. À l’exhibition statique des
indigènes exposés aux regards des visiteurs a succédé une mise en scène qui les présente en action et
met en valeur leurs capacités artistiques, sous les deux formes de l’art appliqué et de la danse. L’accent
est mis sur le caractère pacifique de leurs activités sous le contrôle bienveillant de la France.
4. Quelle est la volonté de l’Etat dans la réalisation de cette exposition coloniale (document 2 p.
258) ?
Paul Reynaud, le ministre des colonies, expose à ses concitoyens tout l’intérêt de cette exposition et de
leur empire. Il y souligne l’intérêt économique des colonies qui servent de débouchés pour l’industrie
comme celle des tissus de coton. Si, jusqu’à la Première Guerre mondiale, la part des colonies dans le
commerce extérieur des métropoles reste modeste, elle augmente sensiblement dans le contexte des
difficultés économiques des années 1930. Ces dernières amènent les Européens à se replier sur leurs
empires pour écouler les produits fabriqués (ex : huile d’arachide, sucres raffinés, tissus de coton,
ciment, machines et mécaniques, automobiles) et ainsi absorber la production nationale. Les colonies
sont alors surtout vouées à la production de matières premières pour la métropole (riz, café, cacao,
oléagineux, caoutchouc), ce qui en fait des espaces économiquement dépendants. Pour l’essentiel des
productions aucune transformation n’a lieu sur place, les seules industries concernent surtout les
produits alimentaires (vinification, rhumerie, huileries et conserveries).
Paul Reynaud insiste aussi sur l’intérêt financier des colonies. Elles constituent un terrain
d’investissement pour les capitaux de la métropole qui peuvent y trouver « une merveilleuse fécondité
», c’est-à-dire des profits. Le ministre des Colonies souligne aussi l’idéal qui sous-tend l’action de la
France dans les colonies : apporter plus de civilisation et de richesse à un plus grand nombre
d’hommes.
Pour Paul Reynaud, l’Exposition est un succès : 33 millions de tickets vendus et 8 millions de
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Thème 4 : Colonisation et décolonisation
Chapitre 7 : Le temps des dominations coloniales
visiteurs. Pour lui, l’objectif est atteint : l’esprit colonial a pénétré les masses populaires, le Français a
découvert son empire.
5. Cette exposition est-elle acceptée par tous ?
L’Exposition coloniale est aussi l’occasion pour les anticolonialistes de se manifester : à l’initiative
d’Aragon et du groupe des surréalistes, proches du PCF, des tracts hostiles à la manifestation sont
distribués et une « contre-exposition », intitulée La Vérité sur les colonies est organisée. Mais le petit
nombre de visiteurs (5000 en 6 mois) témoigne du caractère alors minoritaire de l’anticolonialisme.
B. Les réalités de l'empire
1) Un empire d'exploitation : l’exemple de l’Indochine
La France exploite ses colonies, à l’exemple de l’Indochine qui est une colonie d’exploitation.
Les flux d’investissements métropolitains convergent essentiellement vers les mines, les
plantations d’hévéas, de thé et de café. Délaissées par les Français dans un premier temps, la
production et les exportations de riz s’accroissent considérablement, passant de 130 000 tonnes en
1870 à 1 million en 1933, plaçant l’Indochine au 2e rang des exportateurs mondiaux et représentant
60% des revenus du commerce extérieur. Quant aux plantations d’hévéas, qui s’étendent en 1908 sur
200 hectares, elles en couvrent 120000 en 1940. L’extraction du charbon et des métaux non ferreux
connaît la même ascension : en 1939, l’Indochine occupe le 2e rang des exportateurs asiatiques de
charbon, 1716000 tonnes sur 2615000 produites.
Le développement économique de l’Indochine s’est opéré essentiellement sur le littoral.
L’importante façade favorise en effet les relations commerciales maritimes et dans les innombrables
arroyos des deltas, les communications fluviales. Les conditions de relief et de sol rendent au contraire
difficile l’aménagement des voies terrestres. Ainsi, le Cambodge et le Laos, quoi que n’étant pas
dépourvus de richesses, notamment minières et forestières, restent en marge. Le développement des
infrastructures de transport joue donc sur la mise en valeur des territoires. La construction des lignes
de chemin de fer est relativement tardive. En 1939, à l’exception de la liaison Phnom Penh-Saigon, le
programme ferroviaire initié en 1898 est achevé. Deux grands ports, Haiphong et Saigon assurent les
relations lointaines.
Le commerce indochinois est caractérisé par des exportations de matières premières et
l’importation de produits manufacturés, auxquels s’ajoutent le pétrole et le blé en provenance des
Etats-Unis. L’économie indochinoise est ainsi coloniale au sens où elle produit des matières premières
destinées à l’exportation. Ces dernières ne sont cependant pas réservées exclusivement à la France. En
effet, le Japon et la Chine demeurent les principaux acheteurs de charbon et de riz ; tandis que le
caoutchouc est acheminé également vers les Etats-Unis. Avec la crise des années 1930, les échanges
avec la métropole prennent le dessus sur les échanges régionaux.
2) Un empire de peuplement : Algérie
De manière différente, l’Algérie est une colonie de peuplement. Elle est ainsi peuplée non
seulement d’autochtones (Algériens musulmans), mais aussi d’Européens (venus de métropole ou
d’Europe du Sud). Il existe ainsi d’importantes disparités entre les deux parties de la société.
Algériens musulmans
Européens
5588314
86,37%
881584
13,63%
Population en 1931
Propriété agricole en 1934
75,00%
25,00%
Pourcentage des terres
17
109
Taille
moyenne
des
exploitations (en ha)
Salaire quotidien au 1er juillet 1934 à Sétif
12 à 14 f
24 f
Tailleur de vigne
8 à 12 f
16 à 18 f
Jardinier
Scolarisation de la population (année scolaire 1919-1920)
41144
26,30%
115308
73,70%
Enseignement primaire
500
02,57%
18965
97,43%
Enseignement secondaire
17
01,10%
1534
98,90%
Enseignement supérieur
Colonie
6469898
100%
100%
1 à 1,7-2
1 à 1,5-2,25
156452
19465
1551
100%
100%
100%
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Thème 4 : Colonisation et décolonisation
Chapitre 7 : Le temps des dominations coloniales
3) La transformation des territoires : Alger
Fondée au Xe siècle, la ville prend le nom d’al-Djaza’ir (« les îles ») en raison des îlots qui
bordent sa baie. Alger est une ville composite, à la fois musulmane et européenne. En 1930, les
Européens y sont majoritaires : 220 000 sur 337 000 habitants. À côté de la ville ancienne, la Casbah,
une ville européenne a été édifiée par des colons soucieux de conserver le confort et l’équipement de
la métropole et d’affirmer leur puissance et leur domination. Les bâtisseurs du nouvel Alger ont
appliqué d’abord les principes de l’urbanisme métropolitain ; le style haussmannien s’est imposé entre
1860 et 1900. On a tracé de larges avenues qui essaient de se couper à angle droit chaque fois que le
permet la disposition du lieu étagé vers la mer.
4) Des modes de gouvernement pragmatique : l’exemple du protectorat de Lyautey
L’administration coloniale de la France se fait de manière empirique, sans plan préconçu, à
l’image de l’action du maréchal Lyautey au Maroc.
À la nouvelle de la création du protectorat, le Maroc se soulève ; il reste alors aux Français à le
conquérir. Lyautey est nommé Résident général du Maroc, le 28 avril 1912. Il entreprend alors
d’organiser le protectorat en même temps qu’il fait la conquête du territoire par l’emploi combiné de
l’action politique et de la force militaire. Il encourage les Français à faire bénéficier les Marocains
d’une assistance médicale et à privilégier les achats sur place pour « faire bénéficier les populations de
notre présence et associer leurs intérêts aux nôtres ». On voit dans ce texte qu’il entend s’appuyer sur
la « coopération des autorités indigènes ». En effet, à l’administration directe, Lyautey opposait sa
conception du protectorat « qui est celui d’un pays gardant ses institutions, son gouvernement et
s’administrant lui-même avec ses organes propres sous le contrôle d’une puissance européenne ».
Ainsi, l’empire colonial français est un empire exploité économiquement, mais qui n’a pas peut-être
pas fait gagner beaucoup d’argent à la métropole, un empire peuplé par des Européens, mais dans une
société très inégalitaire, un territoire transformé par les Européens, qui ont tenté différentes formes
d’administration. Face à cela, l’ordre colonial a été contesté tant en métropole que dans les colonies.
C. Les contestations de l'ordre colonial
1) Les contestations dans les métropoles
La colonisation est un phénomène qui ne va pas de soi dans la
métropole. Elle n’est soutenue que par le « parti colonial » qui unit des
intérêts très divergents quant à la question coloniale : militaires,
nationalistes de puissance, négociants, médecins…
En métropole, les libéraux, les chrétiens, l’extrême-gauche sont
opposés à la colonisation par nature. Mais dans l’entre-deux-guerres,
l’importance de l’empire, son rôle économique et son acceptation par
l’opinion publique, font que peu de personnes s’opposent vraiment à
l’idée coloniale, si ce n’est l’extrême-gauche inspirée par le marxismeléninisme (l’impérialisme, dernier degré du capitalisme). Le PCF et la
CGT s’opposent ainsi à la domination coloniale, notamment par ce
genre d’affiche. Mais ils ne rencontrent que peu d’échos, si ce n’est
dans les élites des peuples colonisés.
2) La naissance du nationalisme algérien : doc. 4 p. 257
Messali Hadj est le fils d’un artisan de Tlemcen. Il participe à la Première Guerre mondiale,
reste en France comme ouvrier et fonde, à l’instigation de l’Internationale communiste, l’Étoile nordafricaine, en 1926. Mais le parti s’émancipe rapidement de la tutelle du PCF. Le discours de Messali
Hadj, en 1927, à Bruxelles dénonce l’impérialisme français et l’exploitation que subissent les
Algériens : expropriations foncières et paupérisation des petits paysans, exode vers les villes, «
oppression systématique et brutale » qui se manifeste notamment par le Code de l’indigénat. Il y
dénonce les limites de l’assimilation avec un système électoral qui assure la prépondérance des
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Thème 4 : Colonisation et décolonisation
Chapitre 7 : Le temps des dominations coloniales
Français. Face à cela, la revendication essentielle de l’Étoile nord-africaine est clairement devenue
celle de l’indépendance.
Hô Chi Minh (1890-1969) et Léopold Sédar Senghor (1906-2001) ont connu des parcours
similaires dans leurs pays (Indochine et Sénégal) et ont développé les nationalismes indigènes.
Conclusion :
La domination coloniale est née de la seconde industrialisation et de la volonté des puissances
industrielles européennes de trouver de nouveaux débouchés à leur industrie. C’est ainsi que l’Afrique
a été l’objet d’une « course aux colonies ». Malgré des résistances, parfois héroïques, l’essentiel du
continent est conquis dans le dernier quart du XIXe siècle, est partagé entre grandes puissances,
suivant de grandes conférences ou des accords entre Etats. Mais ce partage suit des motivations
(économiques, géopolitiques, de civilisation) différentes selon les interlocuteurs, qui suscitent des
débats au sein des métropoles comme la France. Cette dernière développe en effet le second empire
colonial (après celui des Britanniques) qui connaît sa plus grande acceptation dans l’opinion publique
pendant l’entre-deux-guerres. Cela est dû notamment à l’exposition coloniale de 1931, reflet des
représentations coloniales. Mais la réalité est loin de l’exotisme affiché : c’est un empire exploité,
coûteux et dans lequel la société est très inégalitaire. Du coup, les élites indigènes développent un
nationalisme anti-français, utilisant les armes offertes par la République.
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