QUESTIONS DE SPORT
Douleur postérieure lors de l’armé du bras
chez un handballeur
●P. Le Goux*, X. Chevalier**
* Rhumatologue, médecin de la FFT, consultant de l’INSEP, attaché à
l’hôpital Ambroise-Paré, Boulogne.
** Chef du service de rhumatologie, hôpital Henri-Mondor, Créteil.
Un handballeur de 25 ans, bon joueur amateur de club, ressent
une douleur à la partie postérieure de l’épaule lorsqu’il amène
son bras en arrière en position d’armé pour shooter au but.
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Comment en faire cliniquement le diagnostic ?
Le diagnostic de conflit glénoïdien postéro-supérieur concerne des
adultes jeunes, entre 15 et 40 ans, aussi bien des sportifs de lancer
de compétition de haut niveau que des amateurs de bon niveau,
comme c’est le cas ici pour ce handballeur qui possède un geste
d’armé suffisamment puissant lors des shoots pour provoquer des
lésions.
Cliniquement, la douleur est située de façon précise à la face
postérieure de l’épaule, et reproduite par la position d’armé.
Elle peut irradier dans le bras, mais cela est plus classique dans
un conflit antéro-supérieur ou une tendinopathie du supra-épi-
neux ou du long biceps. Un examen complet de la coiffe (test de
Jobe,palm-uptest,lift of test,test de rotation externe isométrique)
est nécessaire, ainsi que la recherche des signes de conflit sous-
acromial (tests de Neer, Hawkins et Yocum), dans la mesure où
ces pathologies peuvent s’associer ou s’imbriquer. Les tests de
coiffe peuvent être positifs selon le degré de conflit du bourrelet
postéro-supérieur avec la partie profonde de la coiffe (supra-épineux
et infra-épineux), mais l’important est de palper le point douloureux
à la partie postérieure de la glène en position d’armé, pour affirmer
le conflit postéro-supérieur.
Devant une douleur de la face postérieure de l’épaule, il faut
éliminer chez un sportif de lancer une pathologie neurologique
microtraumatique et apprécier, en particulier, la force musculaire
du plan postérieur de la scapula (force musculaire en abduction et
en rotation externe pour le nerf sus-scapulaire, et test des pompes
pour le nerf grand dentelé). Un EMG peut être demandé.
Par ailleurs, lors de l’examen des amplitudes articulaires, il n’est pas
rare de constater une épaule hyperlaxe avec rotation externe aug-
mentée du côté dominant, dans un sport qui met en jeu l’armé. Sur
un plan dynamique, cette douleur du conflit postéro-supérieur
à l’armé peut être soulagée par le “relocation test”,test majeur
dans la pathologie du bourrelet glénoïdien et dans les épaules dou-
loureuses avec instabilité antérieure. Le relocation test est pratiqué
sur le sujet installé en décubitus dorsal, en partant d’une position
douloureuse de stress, bras en abduction et rotation externe forcée
qui reproduit la douleur, soit dans le cadre d’une instabilité anté-
rieure, soit dans un conflit postérieur. La pression antérieure sur la
tête humérale, en réduisant la subluxation antérieure de celle-ci
ou en la subluxant en arrière, permet alors de supprimer le conflit
La Lettre du Rhumatologue - n° 315 - octobre 2005
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Relocation test.
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Vous suspectez un conflit glénoïdien postéro-supérieur.
À quoi correspond ce conflit ?
Chronologiquement, ce conflit
a fait l’objet d’un démembre-
ment après le classique conflit
sous-acromial décrit par Neer
en 1972. À l’origine, il a été
mis en évidence en 1977 par
Lombardo, qui a observé des
lésions postérieures de la glène
chez des joueurs profession-
nels de base-ball subissant une
intervention chirurgicale en
raison d’une gêne douloureuse située au niveau de l’épaule lors de
leur activité sportive. En 1985,Andrews rapportait des lésions de
rupture partielle de la face profonde du tendon supra-épineux, situées
sur le versant articulaire de la coiffe, et attribuait ces lésions à des
sollicitations excessives et répétées lors des mouvements de lancer.
Walch, en 1991, a introduit le concept de conflit postéro-supérieur,
intra-articulaire, par opposition au conflit sous-acromial, extra-
articulaire. Ainsi,ce conflit glénoïdien postéro-supérieur se pro-
duit entre la face profonde des tendons de la coiffe (supra-épineux,
infra-épineux) et le bord postérieur de la glène, lorsque le bras est
en position d’armé en abduction et rotation externe. Il doit être
considéré, en premier lieu, comme un contact physiologique qui
devient pathogène (conflit entre l’insertion trochitérienne du supra-
épineux et le rebord glénoïdien postéro-supérieur) et peut être
source de lésions du fait de mouvements d’armé répétitifs et vio-
lents ; il doit être connu comme une cause possible d’épaule doulou-
reuse chronique dans tout sport de lancer (javelot, volley, tennis,
handball, etc.).
Conflit postéro-supérieur.