par ce virus [1]. Cet effet protecteur des IFN est impression-
nant puisqu’il peut rendre asymptomatique, ou presque,
une infection qui s’avérerait mortelle en l’absence d’inter-
féron. Les travaux pionniers de Otto Haller et Jean Linden-
mann ont révélé que la résistance des souris au virus de la
grippe, induite par l’interféron, était due à l’activation
d’une famille de gènes appelés Mx [2]. Les gènes Mx ne
sont pas les seuls gènes induits par les interférons. Il en
existe plus de 200. Ces gènes codent pour des protéines
impliquées dans la résistance aux infections virales, le
contrôle de la réponse immunitaire acquise, le cycle cellu-
laire et de multiples autres fonctions dont beaucoup restent
à découvrir.
Les IFN peuvent être classés en trois catégories selon le
récepteur qu’ils contactent à la surface cellulaire et les
effets qui en découlent : les IFN de types I, II et III.
– Type I (IFNa/b) : Les IFN de type I constituent une vaste
famille regroupant les IFNa, IFNb, IFNx, IFNe/s, IFNj,et
la limitine (ou IFNf) [3]. Ils jouent un rôle tout à fait
primordial dans la défense de l’organisme contre les infec-
tions virales. Ils possèdent également des activités antipro-
lifératives et immunomodulatrices. De plus, il semble que
certains de ces IFN pourraient jouer un rôle plus spécifique
dans l’immunité de tissus comme la peau (IFNj)oule
placenta (IFNsdes ruminants) [3].
– Type II (IFNc) : L’unique représentant du sous-groupe
des IFN de type II est l’IFNc. Il est plus spécifiquement
produit par les cellules du système immunitaire comme les
macrophages ou les cellules NK. Bien que sa découverte
soit également liée à l’activité antivirale qu’il exerce, la
fonction majeure de l’IFNcest d’activer et de moduler la
réponse immunitaire naturelle et acquise. L’IFNcne sera
pas abordé dans cette revue.
–
Type III (IFNk) : Les IFN de type III (ou IFNk) ont été
découverts très récemment et correspondent aux interleuki-
nes (IL) IL28 et IL29 [4, 5]
. Ces cytokines présentent moins
de 20 % d’identité de séquence avec les IFN de type I et
utilisent un récepteur différent. Néanmoins, les IFN de
types I et III semblent activer des voies de transduction du
signal comparables et exercer des activités antivirale et
antiproliférative étonnamment similaires [6].
Cette revue est focalisée sur les IFN de type I (IFNa/b)
considérés dans la suite du texte comme les « interférons »
(IFN). Le schéma de base de la réponse interféron, illustré
àlafigure 1, est le suivant. Une cellule peut percevoir, grâce
à des senseurs cytoplasmiques et membranaires, la pré-
sence d’un virus dans son propre cytoplasme ou dans l’es-
pace intercellulaire. Suite à la détection d’une infection
virale, la cellule produit et sécrète les IFN qui peuvent
alerter les cellules voisines en se fixant sur un récepteur de
surface. Dans ces cellules, la transcription d’une série de
gènes est induite et conduit à l’expression de protéines dont
certaines préparent la cellule à réagir de façon très rapide à
l’infection par un virus.
Nous aborderons tour à tour les différentes étapes mises en
œuvre dans la production et l’activité des IFN. Nous évo-
querons aussi la réaction des virus qui ont développé une
série de stratégies pour contrecarrer la réponse IFN de
l’hôte.
Évolution et diversité des gènes
d’interféron
Au cours de l’évolution (figure 2), les gènes d’IFN sem-
blent être apparus chez le poisson. Dans le génome du
poisson, il existerait un gène codant pour l’IFNcet une à
deux copies de gènes codant pour les IFN proches des IFN
de type I ou III. Ceux-ci comportent 5 exons et 4 introns.
Chez les mammifères, les gènes d’IFN de type I sont
dépourvus d’introns, à l’exception du gène de l’IFNjqui en
possède un [3].
Chez l’homme comme chez la souris, il existe plus d’une
quinzaine de gènes codant pour différents sous-types d’IFN
de type I apparentés. Ils codent pour les IFNa,b,e/s,j,x
(homme) et la limitine (souris). Ils sont regroupés sur le
chromosome 9 humain ou sur le chromosome 4 de la souris.
Les gènes d’IFN semblent avoir évolué sous l’influence de
deux pressions évolutives distinctes : d’une part, une évo-
lution verticale classique qui a permis la diversification des
IFN (a,b,j,...) au cours de l’évolution des espèces, d’autre
part, une évolution interne à chaque espèce conduisant à
l’apparition de familles de gènes multiples apparentés
(IFNaou limitine). Par exemple, les gènes d’IFNade
souris présentent plus d’identité entre eux qu’ils n’en pré-
sentent par rapport à leurs orthologues présents chez
l’homme ou même chez le rat. Cela indique qu’ils pour-
raient s’être rediversifiés, au sein de chaque espèce, par une
série d’événements de délétions et de duplications [7].
Les gènes d’IFN codent pour des précurseurs protéiques de
187 à 203 acides aminés, comportant une séquence signal
N-terminale nécessaire à leur sécrétion. Les IFN matures
sécrétés par les cellules comptent environ 165 à 180 acides
aminés et ont un poids moléculaire théorique proche de
19 kDa. Certains IFN sont glycosylés. Bien que les séquen-
ces de différents IFN divergent considérablement (par ex. il
n’existe que 25 à 30 % d’identité de séquence entre IFNa,
IFNbou IFNjau sein d’une même espèce), l’ensemble des
IFN de type I semblent avoir une structure tridimension-
nelle remarquablement conservée, comme en témoignent
les données de cristallographie ou de RMN obtenues pour
4 IFN distincts : IFNa2etIFNbhumains, IFNbmurin et
IFNsovin [8]. Les IFN de type I partagent un récepteur
commun, formé de deux sous-unités appelées IFNAR1 et
IFNAR2c.
revue
Virologie, Vol. 10, n° 3, mai-juin 2006
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