DOSSIER PÉDAGOGIQUE L’ENCLOS DE L’ÉLÉPHANT THÉÂTRE CRÉATION Créé au Festival TransAmériques les 4, 5, 6, 7, 8 JUIN 2011 En reprise du 23 août au 10 septembre 2011 Au Théâtre Espace Libre, à Montréal THÉÂTRE DU GRAND JOUR MONTRÉAL Renseignements pour les groupes scolaires Capucine Voituriez 514-521-3288 p.2 [email protected] www.espacelibre.qc.ca L’ENCLOS DE L’ÉLÉPHANT « Grandiose, fascinant, c’est du grand jeu d’acteur, texte brillant, l’écriture est superbe, la mise en scène est formidable. Allez voir ça ! » ‐ Radio‐Canada Sur scène, un homme, confortablement installé chez lui, consent à laisser entrer un inconnu, le temps d’une averse. Mais ce dernier parle. Il parle tant que ses mots envahissent tout. Plus il parle, moins on comprend ce qu’il veut. Ce qui a toujours été clair devient tortueux, et, lentement, la parole fait couler dans l’oreille de l’hôte un venin étrange et hypnotique. Dans ce spectacle inspiré du système carcéral du panoptique, chaque spectateur est isolé dans une cabine le temps de la représentation. Entre la scène et la salle, s’entrechoquent l’insécurité des temps présents et la dérisoire obsession de la surveillance. Bienvenue dans un microcosme : celui où vous êtes seul face aux terreurs sourdes qui sous-tendent votre quotidien. Responsabilité individuelle et insécurité, voilà les deux paramètres de cette collaboration du Théâtre du Grand Jour avec l’auteur Étienne Lepage. Ce dernier a l’habitude de propulser sur scène des personnages ne laissant entrevoir qu’une partie d’eux-mêmes, des personnages qui ne disent pas tout, mais qui se trahissent, ouvrant les portes de gouffres terrifiants. PRODUCTION THÉÂTRE DU GRAND JOUR COPRODUCTION FESTIVAL TRANSAMÉRIQUES TEXTE ÉTIENNE LEPAGE MISE EN SCÈNE SYLVAIN BÉLANGER DISTRIBUTION DENIS GRAVEREAUX + PAUL AHMARANI SCÉNOGRAPHIE ET COSTUMES ROMAIN FABRE ASSISTANCE À LA MISE EN SCÈNE ET RÉGIE JEAN GAUDREAU CONCEPTION SONORE LARSEN LUPIN ÉCLAIRAGES ANDRÉ RIOUX COLLABORATEURS HUY PHONG DOAN ET CAROLINE LAURIN-BEAUCAGE DIRECTION DE PRODUCTION MARIE-HÉLÈNE DUFORT DIRECTION TECHNIQUE LOUIS HÉON ENTRETIEN AVEC SYLVAIN BÉLANGER Comment le projet de L’enclos de l’éléphant s’inscrit-il dans l’évolution du Théâtre du Grand Jour ? Le Théâtre du Grand Jour explore depuis plusieurs années l’idée de responsabilité et de façon plus serrée depuis Les grands responsables en 2006 : alors que l’économie de marché est présentée comme un phénomène « naturel », que les individus se considèrent comme des consommateurs et non comme des citoyens, que l’espace politique est phagocyté par l’instrumentalisation commerciale, comment utiliser le théâtre pour repenser concrètement la responsabilité de l’individu face à la collectivité ? En fait, ce qui intéresse le Théâtre du Grand Jour, c’est de créer un théâtre qui, par ses conventions mêmes, fait en sorte que le spectateur ne peut pas échapper à une forme de responsabilisation. En même temps, en lien avec notre production de Terrorisme des frères Presnyakov, nous nous intéressions à la question de l’insécurité, que nous avons fini par définir par : ne pas savoir. Responsabilité individuelle et insécurité, voilà les deux paramètres de cette collaboration avec l’auteur Étienne Lepage, qui a l’habitude de propulser sur scène des personnages ne laissant entrevoir qu’une partie d’euxmêmes, des personnages dont on ne sait d’où ils viennent, croqués sur le vif d’une apparition, d’un trouble, des personnages qui ne disent pas tout, mais qui se trahissent, ouvrant les portes de gouffres terrifiants, de questions insolubles. Je lui avais donné deux contraintes : deux comédiens au centre d’un cercle, et un texte écrit pour un seul spectateur. Cette idée me venait de divers travaux de l’artiste visuelle Janet Cardiff, où le regardeur doit se positionner physiquement dans l’œuvre, ce qui l’entraîne à se positionner par rapport aux sens qui s’en dégagent. S’est d’abord manifestée la voix d’un intrus qui fait irruption chez quelqu’un. Puis Étienne Lepage a amené l’idée de panoptique que Michel Foucault développe dans son essai Surveiller et punir. Le panoptique est un dispositif architectural, créé pour les prisons, qui permet à un seul individu de surveiller tous les prisonniers, enfermés dans des cellules individuelles, sans que ceux-ci ne puissent savoir s’ils sont observés. Ne sachant pas s’il est observé ou non – nous retrouvons ici notre idée d’insécurité –, le prisonnier se surveille lui-même. Dans L’enclos de l’éléphant, l’idée s’est transformée en un enchevêtrement de trois réseaux de « ne pas savoir » : entre les deux personnages, entre les personnages et les spectateurs, et entre les spectateurs eux-mêmes. En même temps, Étienne n’a pas intégré le panoptique aux indications scéniques de son texte. Le panoptique se pose tel un filtre, un instrument, qui mène le spectateur à lire par lui-même les tentatives de rapprochement, la nature du lien mystérieux et la quête de comprendre qui unit les deux personnages. Comment la scénographie interprète-t-elle le principe du panoptique et comment infléchit-elle le sens du texte ? Romain Fabre a créé 80 petits théâtres constitués chacun d’un siège muni de caches latérales, qui agissent comme des œillères. La lecture de mes spectacles se fait à travers une multitude de petits signes qui ont « apparence » de simplicité. Le spectateur, en les captant, se retrouve — qu’il le veuille ou non — à prendre en charge la représentation. Je m’applique à tracer pour le spectateur une succession de signes parallèles au récit ; son travail consiste à découvrir, consciemment ou inconsciemment, les signes déterminants qui semblent échapper aux personnages, mais qui ont néanmoins été « joués » par les acteurs. Dans cet esprit, le panoptique n’est pas une finalité, c’est un point de départ pour déployer un mécanisme de dialogue entre la scène et la salle qui engage sans détours le spectateur dans la représentation. On se sent insécurisé quand on a l’impression qu’on nous cache quelque chose ou qu’on nous manipule. Avec L’enclos de l’éléphant, je veux questionner cette réaction presque animale souvent provoquée par soi-même mais qu’on attribue à l’autre, lui prêtant malgré nous des intentions. Je cherche à redonner la responsabilité de ce sentiment à l’individu lui-même. Quelles réflexions animent les recherches formelles au Théâtre du Grand Jour ? Plutôt que regarder un spectacle, je souhaite que le spectateur vive une expérience et dans ce cas-ci, une expérience ludique et performative. Cela veut dire créer un théâtre où les conventions ne peuvent pas être tenues pour acquises. Et les conventions qui régissent notre art sont innombrables. Par exemple, l’éclairage baisse dans la salle : c’est signe que la représentation va commencer... Il faut tuer les attentes, les réflexes, créer des ouvertures. L’inattendu doit être déplacé, renouvelé. Propos recueillis et mis en forme par Paul Lefebvre Photos : Yanick Macdonald « …Paul Ahmarani est brillant. Denis Gravereaux, son répondant, ne l'est pas moins. » - Voir « L'enclos de l'éléphant, qui est défendu par deux solides acteurs, trouve sa pertinence dans sa manière de jouer avec la mécanique de l'insécurité et comment elle peut servir à imposer des idées. » ‐ La Presse «... un jeu de manipulation qui ne laisse ni l’un ni l’hôte, ni même le spectateur, sauf. Bélanger… signe un duo‐duel précis, acéré, ouvert. Virtuose de ce presque‐monologue, Paul Ahmarani est excellent d’ambiguïté, de perversité, de vulnérabilité. Quant à Denis Gravereaux, il a une présence, une qualité d’écoute et de réactivité extraordinaires.» ‐ L'Actualité BIOGRAPHIES DES CRÉATEURS ÉTIENNE LEPAGE & SYLVAIN BÉLANGER LA POURSUITE D’UNE COLLABORATION Étienne Lepage sort de l’École nationale de théâtre du Canada en 2007. En 2008, sa pièce Le Mariage de Francis Camélias qui avait été mise en scène par Sylvain Bélanger l’année précédente à l’École, remporte l’Aide à la création du Centre National du Théâtre, à Paris. Sa traduction de Blackbird, de David Harrower, mise en scène par Téo Spychalski, a été de la programmation 2009 du Théâtre Prospero. À l’automne 2010, le texte collectif Éclats et autres libertés, écrit avec Mathieu Gosselin, Jean-Frédéric Messier et Marie-Josée Bastien, a été créé par Benoît Vermeulen et le Théâtre Le Clou. Sa pièce Rouge Gueule a été produite à l’automne 2009 à L’Espace GO dans une mise en scène de Claude Poissant. Un autre de ses récents textes Kick, développée en complicité avec Sylvain Bélanger lors d’un atelier du CEAD en avril 2009, a été présentée aux Théâtre Aux Écuries à l’hiver 2010 dans une production du Théâtre de la Marée Haute. Sylvain Bélanger est l’un des membres fondateurs du Théâtre du Grand Jour et le directeur artistique de la compagnie depuis sa création en 1998. Sa mise en scène de Cette fille-là présenté plus d’une centaine de fois, lui a valu une nomination comme révélation à la Soirée des Masques en 2005. La pièce a été présentée à Paris au printemps 2008. Également pour le Théâtre du Grand Jour, il a mis en scène Moi chien créole créé en Martinique et diffusé à Toulouse, Montréal, Ottawa ainsi qu’à la Comédie-Française de Paris. Pour La Manufacture, il a signé les mises en scène des pièces Félicité d’Olivier Choinière, qui a été reprise au printemps 2010 à L’Espace GO et de Yellow moon, présentée en novembre dernier à Espace GO également. En janvier dernier, il signait la mise en scène du spectacle Les Mutants, une production du Théâtre de la Banquette Arrière. PRÉSENTATION DU THÉÂTRE DU GRAND JOUR Le Théâtre du Grand Jour a été fondé en 1999 pour développer une tribune théâtrale axée sur la responsabilité sociale. La compagnie croit que le théâtre est un outil de réflexion sociale important et que les artistes, tout comme le public, ont un rôle déterminant à jouer dans la « prise en charge » de la représentation. L’œuvre théâtrale, l’échange, devient alors la responsabilité de tous... Au fil des projets, le Grand Jour raconte une histoire en posant sur son chemin des questions qui visent à déjouer les généralités, les faux-semblants et les étiquettes qu’on attribue malgré nous aux questions identitaires, collectives et politiques d’un Québec en constante mutation. C’est en ce sens que le Grand Jour tente de percer le mystère de l’époque actuelle, de capter l’air du temps pour mieux l’éclairer. Depuis 1999, les projets du Grand Jour se relaient avec une théâtralité propre à chacun d’entre eux et développée sans compromis. Ces histoires soufflent à la direction artistique des occasions de débattre de questions souvent inconfortables et révélatrices: La révolte est-elle encore possible? (Autodafé, 1999); En quoi notre civilisation affranchie est-elle libre? (Mai 02, 2002); Puis-je sauver quelqu’un? (Cette fille-là, 2004); L’itinérance est-elle si marginale? (Road Movie, 2000 et Moi chien créole, 2007); De quoi suis-je responsable? (Les Grands responsables, 2006); et Qui terrorise qui? (Terrorisme, 2009). Le Grand Jour jalonne son histoire de ces questions qui s’enchaînent et se relaient. Et avec les années qui passent, une recherche s’impose, persiste et évolue : cet accès au social par l’intime, cette préoccupation de l’utilité du citoyen dans la communauté, cette mesure de la portée de ses gestes et finalement, cette part de responsabilité qui nous regarde tous, noble, exigeante et salvatrice. Le Grand Jour aura douze ans ce printemps. Douze ans donc sur une recherche théâtrale au cœur des territoires intimes et sociaux. Des années heureuses et investies d’un esprit de recherche qui s’est développé au fil des projets : celui d’impliquer le spectateur au cœur de cette recherche en lui proposant un miroir : celui de la conscience sociale. Au fil des productions (Autodafé, Cette fille-là, Venise-en-Québec, Moi chien créole, Terrorisme) le Grand Jour a proposé à ce spectateur un rôle particulier et original. Ce fût plus spécialement (et physiquement) le cas lors des présentations de Mai 02 Liberté à la carte (2002) et des Grands Responsables (2006). Mai 02 proposait à ce spectateur de se retrouver seul avec chauffeur personnel, transporté dans une suite ininterrompue de visites qui le menait de stations en stations à l’intérieur desquelles une action avait été expressément préparée pour lui. Il a été ensuite invité lors des Grands Responsables, à réunir à domicile un petit groupe de huit personnes pour accueillir un service théâtral qui lui garantissait d’être responsable en une heure seulement. En modifiant son rôle habituel, le spectateur prenait évidemment conscience qu’il était davantage responsable de la représentation et qu’il ne pouvait échapper à la fiction et aux questions de l’artiste. Ces spectacles, en modifiant certaines conventions théâtrales, permettaient de faire évoluer notre rapport à la citoyenneté. Ils impliquaient de manière conviviale et déstabilisante le spectateur à l’intérieur même du propos et du concept. Ce sont des expériences vécues. On entend régulièrement des gens dirent : « j’ai fait tel service de l’événement » ou bien « j’ai fait tel trajet de Mai 02 », et non « j’ai vu... ». En effet, ces expériences agissent sur le long terme, une période pendant laquelle les répercussions du spectacle se révèlent, après-coup. Car au cœur du moment, artistes comme spectateurs sont réunis à l’intérieur d’un concept séduisant qui permettra ensuite au propos d’agir. Les témoignages recueillis, que ce soit lors des commentaires reçus par lettres, sur le site web de la compagnie, lors de discussions entre personnes ayant partagés ensemble la soirée ou enfin lors de visites dans les groupes scolaires ayant participé à l’événement, parlent tous de cet effet d’après-coup, de traces laissées, agissantes. Ces témoignages, très éclairants et diversifiés ont toujours permis au comité artistique et à l’équipe du Grand Jour d’entrevoir une suite... OEUVRES PRÉCÉDENTES : L’enclos de l’éléphant, 2011 Terrorisme, 2009 (-10) Moi chien créole, 2007 Venise-en Québec, 2006 Les Grands Responsables, 2006 Cette fille-là, 2004 (-08) 2025, L’année du Serpent, 2003 Mai 02, 2002 Le long de la Principale, 2001 Road Movie, 2000 Autodafé, 1999 BIOGRAPHIES DES ARTISTES PAUL AHMARANI Paul Ahmarani est diplomé du Conservatoire d’art Dramatique de Montréal en interprétation. Il a reçu différents prix, notamment, le Jutra comme meilleur acteur dans Congorama en 2007, le prix du festival international de Baie-Comeau comme meilleure interprétation masculine dans Le marais en 2003, et le Jutra comme meilleur acteur dans La moitié gauche du frigo en 2001. CINÉMA MARS ET AVRIL, Martin Villeneuve, 2009 CAPITALISME SENTIMENTAL, Olivier Asselin, 2007 CONGORAMA, Philippe Falardeau, 2005 LA VIE AVEC MON PÈRE, Sébastien Rose, 2004 COMMENT MA MÈRE ACCOUCHA DE MOI PENDANT SA MÉNOPAUSE, Sébastien Rose, 2002 LE MARAIS, Kim Nguyen, 2002 LA MOITIÉ GAUCHE DU FRIGO, Philippe Falardeau, 1999 TÉLÉVISION TOUTE LA VÉRITÉ, Brigitte Couture, 2010 (premier rôle : Jean Jacques) TRAUMA 2, Francois Gingras, 2010 (premier rôle : Steve Mc Ginnis) LA JOB, André St-Pierre, 2006 (rôle principal en continuité : Stéphane Bisaillon) THÉÀTRE LA NOCE, Peter Batakliev, 2011 (premier rôle : L’ami) MANHATTAN MÉDÉA, Denise Guibault, 2011 (premier rôle : Vélasquez) ÉXÉCUTEUR 14, Peter Batakliev, 2010 (rôle solo) CŒUR DE CHIEN, Gregory Hlady, 2009 (rôle principal : le chien Bouboule) WOYSECK, Brigitte Haentjens, 2009 (premier rôle: Le docteur) BLASTÉ, Brigitte Haentjens, 2008 (premier rôle : Le soldat) LA TEMPÊTE, Denise Guilbault, 2005-2008, (Caliban et Ariel) Source : agence artistique Duchesne DENIS GRAVEREAUX Denis Gravereaux reçoit une formation de Jean-Louis Martin-Barbaz à l'école du Théâtre national de Strasbourg. Puis travaille sous la direction de différents metteurs en scène et réalisateurs. CINÉMA COTEAU ROUGE, Marc-André Forcier, joueur de pétanque, 2010 100 MILLIARDS DE NEURONES, Michel Monty, préfet collège, 2009 MARS ET AVRIL, Martin Villeneuve, auditeur, 2009 ANDRÉ MATHIEU, Luc Dionne, beauvilliers, 2009 C'EST PAS MOI, JE LE JURE! Philippe Falardeau, M. Pouchonnaud, 2007 LE PIÈGE AMÉRICAIN, Charles Binamé, Michel V. Mertz, 2007 DUO Richard Ciupka, Mr. Léger, 2005 MATRONI ET MOI, Jean-Philippe Duval, homme de main LA FEMME QUI BOIT, Bernard Emond, joueur de poker MARIAGE, Catherine Martin, le curé DU PIQUE AU CŒUR, Céline Baril, Mr. Demers LITTORAL, Wajdi Mouawad, thanatologue GISÈLE, Céline Baril, commissaire LES DERNIERS JOURS DE PARIS, Olivier Asselin, commissaire THÉÂTRE LA NOCE, Gregory Hlady / Prospero, Le père, 2011 COEUR DE CHIEN, Gregory Hlady / Prospero, Professeur transfigouratov, 2009 TENTATIVES, Jérémie Niel / Théâtre Pétrus / La Chapelle, André, 2009 (SOLO) : BASHIR LAZHAR, Daniel Brière / Théâtre d'Aujourd'hui et en tournée Bashir Iazhar, 2006 à 2009 LES JUSTES, André Melançon / Théâtre Denise-Pelletier Skouratov, 2007 OTHELLO, Denis Marleau / UBU cie. de création, Montano / Brabantio, 2007 (SOLO) : QUELQUES CONSEILS UTILES AUX ÉLÈVES HUISSIERS, Jean-Marie Papapietro / Théâtre De Fortune / La Petite Licorne et Prospero M. Échinard, 2005 ŒDIPE À COLONNE, Jean-Pierre Ronfard / Espace Go et Le Trident, Choreute, 2003 OPORTET, Pascal Contamine / La Chapelle, Carrefour de Québec, Hasard, 2002 FIVE WOLF DEAVTOV CIRCUS, Pascal Contamine / La Chapelle, Sigmund, 2001 LORENZACCIO, Claude Poissant / Théâtre Denise-Pelletier, L'orfèvre, 1999 LE PROCÈS, Élisabeth Albahaca / Prospero, Avocat, 1997WILLY PROTAGORAS ENFERMÉ DANS LES TOILETTES, Wajdi Mouawad / Théâtre D’Aujourd’hui, Assab Protagoras ÉLECTRE, Brigitte Haentjens / Espace Go MALINA, Brigitte Haentjens / Espace Go, Festival de Théâtre des Amériques, Malina LITTORAL, Wajdi Mouawad / La Licorne, Tournée en France et au Liban, Le père AU BOUT DU FIL, Daniel Brière / Théâtre de Quat’sous, Soupir ÉDEN CINÉMA, Brigitte Haentjens / Festival de Théâtre des Amériques, C.N.A, Caporal ABEL ET BÉLA, Jean-Marie Papapiétro / Fred-Barry, C.N.A, Carrefour de Québec, Béla TRANS-ATLANTIQUE, Téo Spychalski / Prospero, Grombrowicz Source : denisgravereaux.unblog.fr INFORMATIONS PÉDAGOGIQUES Le Grand Jour propose : • • • • visites rencontres avec les artistes et l’équipe de création représentations scolaires en soirée voici questions et problématiques sociales à observer lors d’ateliers éventuels des enseignants, suite à leur visite, en lien avec la mission artistique et sociale du Théâtre du Grand Jour: -Vous venez d’assistez à une représentation théâtrale tout à fait originale qui vous isolait des autres au moyen d’une cabine ouverte à la vue de tous et qui vous reliait aux acteurs au moyen de petits haut-parleurs. Quelles ont été votre réaction suite à cette mise en situation physique du spectateur? Étiez-vous plus tendu? Plus impliqué dans l’action? Et comment at-elle évoluée au long de la représentation? -Quelle a été, selon vous, le parallèle entre votre relation face aux autres spectateurs, et ce qui était vécu sur scène? -Et qu’est-ce que ces deux questions disent de vous, personnellement et socialement? Estce que ces réponses vous éclairent sur vos habitudes de relations avec les autres? -Le personnage de Paul, qui fait intrusion chez Alexis, vous a-t-il semblé menaçant, intriguant, sympathique? L’auriez-vous laisser entrer chez vous? -Quelle est votre attitude lorsqu’un étranger vous aborde sur la rue ou sonne à votre porte? Vous sentez-vous menacé? Avez-vous de l’intérêt pour lui? Êtes-vous sincère avec lui? Et surtout, pourquoi? -Peut-on, selon vous avoir du pouvoir sur quelqu’un? Si oui, qu’apporte-t-il de réel? -Le personnage de Paul dit : « Il est impossible de connaître qui que ce soit, de toute façon. On ne se connaît même pas soi-même. » Vous êtes vous reconnu dans ces mots? -Que dit, selon vous le dénouement entre les deux personnages? -Selon vous, est-ce possible de vivre au quotidien son idéal social? En d’autres mots, appliquez-vous avec les autres ce en quoi vous croyez et estimez juste? Et pourquoi? COMPLÉMENT DE RECHERCHE : LES SOURCES DU PANOPTISME Pour L’enclos de l’éléphant, les créateurs du spectacle se sont inspirés librement de l’architecture du panoptique, élaboré par Jeremy Bentham. Le panoptique est un type d'architecture carcérale imaginée par le philosophe utilitariste Jeremy Bentham à la fin du xviiie siècle. L'objectif de la structure panoptique est de permettre à un individu, logé dans une tour centrale, d'observer tous les prisonniers, enfermés dans des cellules individuelles autour de la tour, sans que ceux-ci ne puissent savoir s'ils sont observés. Ce dispositif devait ainsi créer un « sentiment d'omniscience invisible » chez les détenus. Le philosophe et historien Michel Foucault a particulièrement attiré l'attention dessus dans Surveiller et punir (1975) en en faisant le modèle abstrait d'une société disciplinaire, inaugurant une longue série d'études sur le dispositif panoptique. MICHEL FOUCAULT « SURVEILLER ET PUNIR », GALLIMARD - 1975 (extraits), « Le Panopticon de Bentham est la figure architecturale de cette composition. On en connaît le principe : à la périphérie un bâtiment en anneau; au centre, une tour; celle-ci est percée de larges fenêtres qui ouvrent sur la face intérieure de l'anneau ; le bâtiment périphérique est divisé en cellules, dont chacune traverse toute l'épaisseur du bâtiment ; elles ont deux fenêtres, l'une vers l'intérieur, correspondant aux fenêtres de la tour; l'autre, donnant sur l'extérieur, permet à la lumière de traverser la cellule de part en part. Il suffit alors de placer un surveillant dans la tour centrale, et dans chaque cellule d'enfermer un fou, un malade, un condamné, un ouvrier ou un écolier. Par l'effet du contre-jour, on peut saisir de la tour, se découpant exactement sur la lumière, les petites silhouettes captives dans les cellules de la périphérie. (Images de prison construites sous le modèle du panoptique) Autant de cages, autant de petits théâtres, où chaque acteur est seul, parfaitement individualisé et constamment visible. Le dispositif panoptique aménage des unités spatiales qui permettent de voir sans arrêt et de reconnaître aussitôt. En somme, on inverse le principe du cachot; ou plutôt de ses trois fonctions — enfermer, priver de lumière et cacher — on ne garde que la première et on supprime les deux autres. La pleine lumière et le regard d'un surveillant captent mieux que l'ombre, qui finalement protégeait. La visibilité est un piège. De là, l'effet majeur du Panoptique : induire chez le détenu un état conscient et permanent de visibilité qui assure le fonctionnement automatique du pouvoir. Plus nombreux sont ces observateurs anonymes et passagers, plus augmentent pour le détenu le risque d'être surpris et la conscience inquiète d'être observé. Le Panoptique est une machine merveilleuse qui, à partir des désirs les plus différents, fabrique des effets homogènes de pouvoir. Un assujettissement réel naît mécaniquement d'une relation fictive. De sorte qu'il n'est pas nécessaire d'avoir recours à des moyens de force pour contraindre le condamné à la bonne conduite, le fou au calme, l'ouvrier au travail, l'écolier à l'application, le malade à l'observation des ordonnances. Bentham s'émerveillait que les institutions panoptiques puissent être si légères : plus de grilles, plus de chaînes, plus de serrures pesantes ; il suffît que les séparations soient nettes et les ouvertures bien disposées. Le Panopticon est une ménagerie royale; l'animal est remplacé par l'homme, par le groupement spécifique la distribution individuelle et le roi par la machinerie d'un pouvoir furtif. A ceci près, le Panopticon, lui aussi, fait œuvre de naturaliste. Il permet d'établir les différences. Côté laboratoire, le Panopticon peut être utilisé comme machine à faire des expériences, à modifier le comportement, à dresser ou redresser les individus. Il est polyvalent dans ses applications; il sert à amender les prisonniers, mais aussi à soigner les malades, à instruire les écoliers, à garder les fous, à surveiller les ouvriers, à faire travailler les mendiants et les oisifs. C'est un type d'implantation des corps dans l'espace, de distribution des individus les uns par rapport aux autres, d'organisation hiérarchique, de disposition des centres et des canaux de pouvoir, de définition de ses instruments et de ses modes d'intervention, qu'on peut mettre en œuvre dans les hôpitaux, les ateliers, les écoles, les prisons. Chaque fois qu'on aura affaire à une multiplicité d'individus auxquels il faudra imposer une tâche ou une conduite, le schéma panoptique pourra être utilisé. Il est — sous réserve des modifications nécessaires — applicable « à tous les établissements où, dans les limites d'un espace qui n'est pas trop étendu, il faut maintenir sous surveillance un certain nombre de personnes». Sa force est de ne jamais intervenir, de s'exercer spontanément et sans bruit, de constituer un mécanisme dont les effets s'enchaînent les uns aux autres. Parce que sans autre instrument physique qu'une architecture et une géométrie, il agit directement sur les individus; il « donne à l'esprit du pouvoir sur l'esprit». Le schéma panoptique, sans s'effacer ni perdre aucune de ses propriétés, est destiné à se diffuser dans le corps social; il a pour vocation d'y devenir une fonction généralisée.Dans la fameuse cage transparente et circulaire, avec sa haute tour, puissante et savante, il est peut-être question pour Bentham de projeter une institution disciplinaire parfaite; mais il s'agit aussi de montrer comment on peut « désenfermer » les disciplines et les faire fonctionner de façon diffuse, multiple, polyvalente dans le corps social tout entier.L'agencement panoptique donne la formule de cette généralisation. Il programme, au niveau d'un mécanisme élémentaire et facilement transférable, le fonctionnement de base d'une société toute traversée et pénétrée de mécanismes disciplinaires. La multiplication des institutions de discipline en témoigne, avec leur réseau qui commence à couvrir une surface de plus en plus large, et à occuper surtout une place de moins en moins marginale. Elle moralise toujours les conduites mais de plus en plus elle finalise les comportements, et fait entrer les corps dans une machinerie, les forces dans une économie. Les disciplines fonctionnent de plus en plus comme des techniques fabriquant des individus utiles. Et pour s'exercer, ce pouvoir doit se donner l'instrument ne surveillance permanente, exhaustive, omniprésente, capable de tout rendre visible, mais à la condition de se rendre elle-même invisible. Elle doit être comme un regard sans visage qui transforme tout le corps social en un champ de perception. Peu d'années après Bentham, Julius rédigeait le certificat de naissance de cette société. Parlant du principe panoptique, il disait qu'il y avait là bien plus qu'une ingéniosité architecturale : un événement dans « l'histoire de l'esprit humain ». En apparence, ce n'est que la solution d'un problème technique ; mais à travers elle, tout un type de société se dessine. L'Antiquité avait été une civilisation du spectacle. « Rendre accessible à une multitude d'hommes l'inspection d'un petit nombre d'objets » : à ce problème répondait l'architecture des temples, des théâtres et des cirques. Avec le spectacle prédominaient la vie publique, l'intensité des fêtes, la proximité sensuelle. Dans ces rituels où coulait le sang, la société retrouvait vigueur et formait un instant comme un grand corps unique. L'âge moderne pose le problème inverse : « Procurer à un petit nombre, ou même à un seul la vue instantanée d'une grande multitude. » Dans une société où les éléments principaux ne sont plus la communauté et la vie publique, mais les individus privés d'une part, et l'État de l'autre, les rapports ne peuvent se régler que dans une forme exactement inverse du spectacle : « C'est au temps moderne, à l'influence toujours croissante de l'État, à son intervention de jour en jour plus profonde dans tous les détails et toutes les relations de la vie sociale, qu'il était réservé d'en augmenter et d'en perfectionner les garanties, en utilisant et en dirigeant vers ce grand but la construction et la distribution d'édifices destinés à surveiller en même temps une grande multitude d'hommes. » Julius lisait comme un processus historique accompli ce que Bentham avait décrit comme un programme technique. Notre société n'est pas celle du spectacle, mais de la surveillance; sous la surface des images, on investit les corps en profondeur; derrière la grande abstraction de l'échange, se poursuit le dressage minutieux et concret des forces utiles; les circuits de la communication sont les supports d'un cumul et d'une centralisation du savoir; Nous ne sommes ni sur les gradins ni sur la scène, mais dans la machine panoptique, investis par ses effets de pouvoir que nous reconduisons nous-mêmes puisque nous en sommes un rouage. Si le décollage économique de l'Occident a commencé avec les procédés qui ont permis l'accumulation du capital, on peut dire, peut-être, que les méthodes pour gérer l'accumulation des hommes ont permis un décollage politique par rapport à des formes de pouvoir traditionnelles, rituelles, coûteuses, violentes, et qui, bientôt tombées en désuétude, ont été relayées par toute une technologie fine et calculée de l'assujettissement. Mais il faut le reconnaître : (...) le panoptisme a été peu célébré. On ne reconnaît guère en lui qu'une bizarre petite utopie, le rêve d'une méchanceté — un peu comme si Bentham avait été le Fourier d'une société policière, dont le Phalanstère aurait eu la forme du Panopticon. Et pourtant, on avait là la formule abstraite d'une technologie bien réelle, celle des individus. Qu'on ait eu pour elle peu de louanges, il y a à cela bien des raisons; la plus évidente, c'est que les discours auxquels elle a donné lieu ont rarement acquis, sauf pour les classifications académiques, le statut de sciences; mais la plus réelle est sans doute que le pouvoir qu'elle met en œuvre et qu'elle permet de majorer est un pouvoir direct et physique que les hommes exercent les uns sur les autres. Pour un point d'arrivée sans gloire, une origine difficile à avouer. Ce qui désormais s'impose à la justice pénale comme son point d'application, son objet « utile », ce ne sera plus le corps du coupable dressé contre le corps du roi; ce ne sera pas non plus le sujet de droit d'un contrat idéal ; mais bien l'individu disciplinaire. Le point extrême de la justice pénale sous l'Ancien Régime, c'était la découpe infinie du corps du régicide : manifestation du pouvoir le plus fort sur le corps du plus grand criminel dont la destruction totale fait éclater le crime dans sa vérité. Le point idéal de la pénalité aujourd'hui serait la discipline indéfinie : un interrogatoire qui n'aurait pas de terme, une enquête qui se prolongerait sans limite dans une observation minutieuse et toujours plus analytique, un jugement qui serait en même temps la constitution d'un dossier jamais clos, la douceur calculée d'une peine qui serait entrelacée à la curiosité acharnée d'un examen, une procédure qui serait à la fois la mesure permanente d'un écart par rapport à une norme inaccessible et le mouvement asymptotique qui contraint à la rejoindre à l'infini. Le supplice achève logiquement une procédure commandée par l'Inquisition. La mise en « observation » prolonge naturellement une justice envahie par les méthodes disciplinaires et les procédures d'examen. Que la prison cellulaire, avec ses chronologies scandées, son travail obligatoire, ses instances de surveillance et de notation, avec ses maîtres en normalité, qui relaient et multiplient les fonctions du juge, soit devenue l'instrument moderne de la pénalité, quoi d'étonnant? Quoi d'étonnant si la prison ressemble aux usines, aux écoles, aux casernes, aux hôpitaux, qui tous ressemblent aux prisons. »