
Objectifs cliniques
Les objectifs cliniques de la vaccination thérapeutique
sont multiples. Ils visent à retarder la progression de
l’infection VIH ou l’initiation du traitement antirétroviral
(notamment dans les pays à faibles ressources économi-
ques) ; améliorer l’efficacité du traitement antirétroviral et
permettre une interruption thérapeutique. Le but ultime est
l’arrêt définitif du traitement antirétroviral. Ceci permet-
trait une réduction des coûts, de la toxicité et le repos des
patients [18-20].
Obstacles au développement d’un vaccin anti-VIH
De nombreux obstacles techniques et biologiques compli-
quent la mise au point du vaccin thérapeutique (tableau 1)
[7, 8]. Les épitopes cibles des anticorps neutralisants des
souches de virus sauvages sont des épitopes conforma-
tionnels qui sont très peu immunogènes et qui sont mas-
qués [21]. De plus, la boucle V3 de la glycoprotéine de
surface gp120, considérée comme contenant l’épitope
majeure de neutralisation, est d’une variabilité extrême.
Par ailleurs, il n’est pas exclu que la vaccination puisse
induire des anticorps pouvant exacerber l’infectiosité. Il a
été suggéré que des anticorps facilitants pouvaient favori-
ser la pénétration du virus dans une cellule cible ou même
permettre son accès à des cellules dépourvues de récep-
teurs spécifiques du virus [8, 22].
En ce qui concerne les réponses cellulaires, les lymphocy-
tes T ne reconnaissent l’antigène que sous la forme de
peptides apprêtés, présentés en association avec la molé-
cule du complexe d’histocompatibilité (CMH). Vu la
grande diversité des haplotypes des antigènes du CMH au
sein de la population humaine, le vaccin doit contenir un
large répertoire d’épitopes T pour induire une réponse
efficace chez tous les vaccinés [21].
Enfin, les quelques modèles animaux disponibles, très
onéreux et éloignés du modèle humain ne permettent de
réaliser des essais que sur un petit nombre d’animaux
avant de passer à des essais humains. Le meilleur modèle
est celui du macaque infecté par un virus hybride SHIV
(simian-human imunodeficiency virus) qui présente une
maladie proche du sida [7, 8].
Les antigènes vaccinaux
Les protéines d’enveloppe synthétisées par la région env
sont des inducteurs importants d’anticorps neutralisants
anti-VIH. L’hypervariabilité de la boucle V3 de la gp120
explique le faible pouvoir neutralisant des anticorps. Les
protéines Gag (p17, p24), relativement conservées, sont
une cible préférentielle de la réponse CTL
(cytotoxic T lymphocytes) mais l’échappement immuni-
taire est possible. Les protéines des gènes régulateurs (nef,
tat,rev essentiellement) semblent être d’excellents immu-
nogènes. Elles sont de plus en plus utilisées [5, 8, 20]. La
protéine Tat est essentielle pour le cycle viral du VIH-1.
Elle est exprimée très tôt après l’entrée du virus dans la
cellule. Une réponse humorale et cellulaire vis-à-vis de
Tat serait liée à une lente progression de la maladie chez
l’homme et le singe [7].
Le vaccin idéal
Le vaccin idéal doit permettre de déclencher une réponse à
la fois humorale et cellulaire (tableau 2) [8]. Les anticorps
sont actifs contre les virus libres et pourraient inhiber les
protéines toxiques secrétées durant la maladie (Nef, Tat)
[20, 23]. Les réponses des lymphocytes T CD8+ cytotoxi-
ques (CTL) sont très souhaitées car elles peuvent réduire
la production virale en éliminant les cellules infectées. Les
lymphocytes T CD8+ exercent ce contrôle de la réplica-
tion du VIH via une activité cytotoxique et/ou la produc-
tion de cytokines et chimiokines ayant un effet suppres-
seur de la réplication virale [11]. Les lymphocytes CD4+
T auxiliaires type 1 (Th1) sont essentiels pour une activité
CTL (voir illustration dans [24]). Actuellement, en raison
des difficultés à générer des anticorps capables de neutra-
liser les isolats primaires, l’accent a été mis sur les répon-
ses cellulaires [8, 19, 20]. Il n’est pas exclu que des anti-
corps, pouvant exacerber l’infectiosité, puissent
apparaître.
Méthodes d’évaluation
de l’immunogénicité des vaccins
L’immunogénicité vaccinale est mesurée par une variété
de paramètres immunologiques qui tentent d’évaluer les
réponses anticorps neutralisantes et cytotoxiques. On peut
citer le test de lyse des cellules infectées, la technique des
tétramères HLA, le test ELISpot interféron gamma (quan-
tification des lymphocytes T spécifiques d’un antigène par
la mesure de la production de l’interféron gamma), l’étude
de la prolifération des lymphocytes T CD4+ en présence
d’un antigène, la détection des anticorps neutralisants...
[3, 7, 18].
Ces différents tests ne donnent qu’une image partielle de
la réponse immune. Des tests complémentaires devront
être utilisés après validation et standardisation, notamment
Tableau 1. Obstacles au développement d’un vaccin anti-VIH.
- Atteinte précoce du système immunitaire
- Infection chronique latente échappant à la réponse immune
- Variabilité extrême du virus
- Médiocre immunogénicité des antigènes conservés
- Résistance à la séroneutralisation des isolats primaires
- Méconnaissance des marqueurs de protection
- Insuffisance des modèles animaux
revue générale
Ann Biol Clin, vol. 63, n° 6, novembre-décembre 2005584
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