Service de radiodiagnostic Unité d'Echographie Le contrôle de TIPS par échographie Anne-France Humbert-Droz TRM / Juillet 2010 TABLE DES MATIÈRES Page Introduction 3 La vascularisation du foie 4 L’hypertension portale 6 Le TIPS : mais qu’est-ce-que c’est ?! 8 La mise en place d’un TIPS 9 Technique échographique : le protocole CHUV 11 Astuces et pièges à éviter 16 Quelques cas d’étude 17 Synthèse 28 Remerciements 28 Appendice I : anatomie et fonction du foie 29 Appendice II : lexique 32 Bibliographie et références 33 2 INTRODUCTION La mise en place de shunt porto-systémique intra hépatique par voie transjugulaire (TIPS) est décrite depuis un peu plus de 10ans et est considérée de nos jours comme un traitement de choix contre certaines conséquences de l’hypertension portale. Le contrôle de TIPS par échographie est un examen extrêmement intéressant à réaliser, mais il pose parfois des difficultés considérables au sonographeur. Ceci est dû en partie au fait que les informations de la position exacte du TIPS* et des vaisseaux qu’il engage ne lui sont pas toujours fournies. D’autre part, comme pour tout examen comportant une étude Doppler, le fait que le patient parvienne ou non à effectuer des apnées satisfaisantes de façon répétée est déterminant pour la qualité des images obtenues. Et enfin, sans une bonne connaissance de l’anatomie et de la vascularisation du foie, la complexité de cet examen est doublée. Vous trouverez donc dans ce dossier, en plus du protocole d’examen du CHUV, des généralités et rappels divers ainsi que deux chapitres consacrés au TIPS. * Tous les termes ci-après suivis d’un astérisque sont expliqués dans le lexique 3 LA VASCULARISATION DU FOIE La vascularisation du foie peut être considérée en termes de circulation artérielle et de circulation veineuse, ou en termes de vascularisation afférente et efférente. L’irrigation du foie en sang oxygéné est assurée par l’artère hépatique propre. Celle-ci est issue de l’artère hépatique commune, qui est elle-même une des branches du tronc cœliaque. La vascularisation afférente du foie comprend l’artère hépatique propre et la veine porte, qui ramène au foie le sang du tube digestif riche en nutriments en phase postprandiale, ainsi que le sang riche en métabolites de l’hémoglobine provenant de la rate. Le sang de ces deux vaisseaux se mélange dans les sinusoïdes du foie, cheminant entre les travées d’hépatocytes, où il sera « traité » avant de rejoindre les veines centrolobulaires. En effet, c’est à cet endroit que les substances absorbées dans le sang lors de la digestion vont être en partie emmagasinées par le foie, en partie transformées avant de les laisser repartir dans la circulation générale (c.f. appendice I). La vascularisation efférente est constituée de ces veines centrolobulaires qui se regroupent en veines sus-hépatiques pour se jeter ensuite dans la veine cave inférieure, avant d’arriver à l’oreillette droite du cœur. 4 L’ensemble des vaisseaux afférents et efférents détermine la segmentation fonctionnelle hépatique selon Couinaud (segmentation chirurgicale), qui est communément utilisée par le corps médical plutôt que la segmentation anatomique classique. Cette systématique est utilisée tant pour situer les lésions détectées que lorsqu’une hépatectomie est nécessaire. En effet, selon Couinaud, la répartition des ramifications du réseau porte et sushépatique permet de partager le foie en huit segments possédant chacun son propre système de vascularisation et de drainage biliaire. Ceci est particulièrement intéressant dans la mesure où il est alors possible d’enlever un ou plusieurs segments concernés par une pathologie sans léser les segments sains limitrophes. Cette représentation des segments du foie est toutefois schématique. B A En réalité, les segments sont bien moins réguliers… B A 5 L’HYPERTENSION PORTALE L’hypertension portale ( HTP ) est définie par une pression portale supérieure à 15mmHG (normal 8 – 10 mmHG) et /ou un gradient de pression porto-cave au-delà de 5mmHG (normal <4mmHG). On compte trois types principaux d’HTP, en fonction de la localisation de l’obstacle à la circulation porto-hépatique : On parle de bloc sous-hépatique lorsque la veine porte est concernée Le bloc intra-hépatique est quant à lui le siège le plus fréquent, où le foie est à l’origine du problème Le bloc sus-hépatique, lui, engage les veines sus-hépatiques et la veine cave inférieure. Une forme plus particulière d’HTP est causée par la thrombose de la veine splénique ou de la veine mésentérique supérieure. Elle est particulière dans le sens où elle est très localisée (on parle d’hypertension portale segmentaire pré-hépatique). La cause la plus fréquente d’HTP est la cirrhose hépatique. En-dehors de cela, les principales causes de bloc intra-hépatique sont la schistosomiase* hépatique et l’HTP idiopathique*. La principale cause de bloc sous-hépatique est la thrombose de la veine porte, alors que le bloc sus-hépatique est le plus souvent causé par la thrombose des veines hépatiques (syndrome de Budd-Chiari). A mesure que la pression augmente dans la veine porte, une circulation collatérale vers le système cave se forme. Toutefois, quand celle-ci ne suffit pas pour diminuer la pression, les veines se dilatent, formant ainsi de fragiles varices. L’HTP peut également conduire à une inversion de flux dans le système porte (c’est-à-dire hépatofuge*), ce qui crée une intoxication métabolique, puisque le sang ne passe pas par le foie où il serait normalement purifié des toxines et métabolisé avant de circuler dans le reste du corps. Les principaux signes cliniques de l’HTP sont le développement d’une circulation collatérale sous-cutanée au niveau de l’abdomen, la splénomégalie et la présence de 6 varices gastriques ou oesophagiennes. Egalement, l’HTP favorisera la formation d’ascite. Il y a plusieurs méthodes d’exploration du système porte, dont la tomodensitométrie (CT), la résonance magnétique (IRM) et l’angiographie, mais seul l’ultrason Doppler permet d’évaluer les vitesses du sang circulant dans le foie en plus d’affirmer la perméabilité des vaisseaux. Il présente en outre l’avantage de ne pas être invasif et de ne pas utiliser de produit de contraste pour l’imagerie. L’évolution de l’HTP conduit à l’émergence des complications associées , à savoir : Ascite Hypersplénisme, thrombopénie Evolution vers la rupture des varices gastriques et/ou oesophagiennes Syndrome hépato-rénal caractérisé par une insuffisance rénale avec une fonction tubulaire normale Encéphalopathie hépatique * Syndrome hépato-pulmonaire tel que dilatations vasculaires et communications artério-veineuses pulmonaires provoquant une hypoxémie sévère (rare) Hypertension pulmonaire (rare) Le traitement de ces complications se fait à plusieurs niveaux : En prophylaxie primaire, des bêtas-bloquants non sélectifs seront administrés afin de diminuer le risque d’hémorragie sur varices En prophylaxie secondaire sera réalisée la ligature des varices par voie endoscopique Traitement de l’encéphalopathie hépatique Mise en place d’un TIPS 7 TIPS : mais qu’est-ce-que c’est ?! C’est l’acronyme anglais de « Transjugular Intrahepatic Porto-systemic Shunt ». En français, ça donne « anastomose porto-cave transhépatique par voie jugulaire ». Concrètement, c’est la création sous contrôle radiologique d’un trajet intraparenchymateux hépatique entre une veine sus-hépatique (en général, la droite) et une branche portale (également la droite, le plus souvent). Une prothèse métallique expansive (stent) sera mise en place dans ce trajet, le maintenant ainsi perméable, formant une anastomose. Si la veine sus-hépatique droite a un calibre trop faible ou si son trajet est horizontal par rapport à la veine cave, le cathétérisme veineux peut être rendu difficile. De ce fait, l’opérateur pourra choisir de réaliser l’anastomose à partir de la veine sushépatique médiane ou gauche et avec la branche porte droite ou gauche. Cet acte interventionnel radiologique est actuellement considéré comme un moyen thérapeutique des complications de l’hypertension portale. Par son action de diminuer le gradient de pression de la veine porte, le shunt permet d’une part de rétablir une circulation portale normale (flux hépatopète) et d’autre part de diminuer la pression dans les varices, diminuant ainsi le risque hémorragique. Une autre indication au TIPS est la maladie véno-occlusive*, ou le syndrome de Budd-Chiari. Malgré le pourcentage élevé de succès de pose de TIPS (90%), il existe des cas de complications post procédurales incluant la thrombose ou la sténose du shunt et la sténose de la veine sus-hépatique où s’abouche le TIPS. Le risque de récidive d’hémorragie variqueuse est directement lié à l’efficacité du shunt, dont les signes et symptômes de dysfonction peuvent être subtils jusqu’à l’émergence d’un problème sérieux, raison pour laquelle l’accessibilité de l’ultrason pour le suivi des patients en fait un outil précieux. 8 LA MISE EN PLACE D’UN TIPS Cette intervention est bien évidemment réalisée dans des conditions stériles et sous anesthésie générale en raison de la durée potentielle de l’intervention. Le patient est équipé d’un ECG, d’un saturomètre et d’un brassard à pression, permettant ainsi le contrôle de ses paramètres vitaux pendant toute l’intervention. Le patient est installé en décubitus dorsal, les bras le long du corps et la tête tournée légèrement de côté, donnant ainsi accès à la veine jugulaire droite. Après désinfection large, des champs stériles sont mis en place, recouvrant le patient à l’exception du point d’entrée à la face latérale du cou. Sous contrôle échographique par voie percutanée, l’opérateur ponctionne la veine jugulaire interne droite, puis descend un guide métallique jusque dans les cavités cardiaques sous contrôle radioscopique. Après dilatation du trajet cutané, un introducteur est mis en place pour le temps de l’intervention. Par l’intermédiaire de l’introducteur et sous contrôle radioscopique, un cathéter est descendu à travers la veine cave supérieure, l’oreillette droite puis la veine cave inférieure jusqu’à la veine sus-hépatique droite, depuis laquelle l’opérateur réalise une opacification rétrograde du système porte intra-hépatique. Le trajet intra hépatique est réalisé à l’aide d’une aiguille courbe qui est avancée à travers le parenchyme hépatique. L’aiguille perce la veine sus-hépatique à environ 2 centimètres de son ostium, puis est avancée vers le bas et en avant jusqu’à rejoindre le système porte qui est ponctionné le plus près possible de la bifurcation, au niveau de la branche porte droite. La confirmation que l’on a atteint le système porte s’obtient en aspirant de façon répétée au moyen de l’aiguille jusqu’à obtenir du sang. Plusieurs passages sont parfois nécessaires. Ce guide permettra d’amener un ballon d’angioplastie afin de dilater le trajet parenchymateux. Il doit donc couvrir le trajet entier, de la veine sus-hépatique à la branche porte. Une dilatation progressive est réalisée et souvent, un stent est mis en place, mais parfois plusieurs stents sont emboîtés les uns dans les autres. 9 La première échographie après la création du shunt sert d’examen de référence pour les contrôles à venir. Plusieurs cas de figure existent, selon la postion et le diamètre final du ou des stents. Situation 1 : Le shunt est placé entre la VSH droite et la branche porte droite. Il y a un flux hépatopète dans le tronc porte et un flux hépatopète est conservé dans les deux branches portes. Présence d’un flux hépatofuge dans le TIPS et les 3 veines sus-hépatiques. Lors de la portographie de contrôle post pose de TIPS, un tel résultat (opacification des branche portes) mène systématiquement à une dilatation du TIPS, de sorte qu’il draine mieux le foie. Si la portographie est normale (situations 2 ou 3), et que ce résultat est obtenu à la 1ère échographie, il faut suspecter une sténose du TIPS. Situation 2 : Le shunt est placé entre la VSH droite et la branche porte droite. Il y a un flux hépatopète dans le tronc porte et la branche porte droite et un flux hépatofuge dans la porte gauche. Présence d’un flux hépatofuge dans le TIPS et les 3 veines sus-hépatiques Situation 3 : Le shunt est placé entre la VSH droite et la branche porte droite. Il y a un flux hépatopète dans le tronc porte et un flux hépatofuge dans les deux branches portes. Présence d’un flux hépatofuge dans le TIPS et les 3 veines sus-hépatiques 10 TECHNIQUE ÉCHOGRAPHIQUE : LE PROTOCOLE CHUV Le patient doit être strictement à jeûn ! L’échographie est essentielle pour l’évaluation du shunt porto-systémique et des changements hémodynamiques associés car c’est un examen non-invasif et nonionisant qui permet d’obtenir l’imagerie à la fois du parenchyme hépatique en mode B et de la vascularisation, grâce au mode Doppler. Un bilan Doppler réalisé immédiatement après la pose de TIPS sert à la fois d’examen de base pour l’évaluation de la fonction du shunt et de contrôle à la recherche de complications associées à l’intervention. Des examens échographiques de suivi seront ensuite effectués à des intervalles réguliers après la procédure. Ceux-ci permettront d’évaluer le bon fonctionnement du TIPS, grâce aux vitesses mesurées en mode Doppler pulsé, ainsi que de vérifier l’absence de complications à distance. Le protocole d’examen commence avec l’imagerie en mode B du foie que vous trouverez sous l’annexe II, puis on aborde l’imagerie Doppler que je vous détaille cidessous. En résumé, on fait un Doppler hépatique complet (veines sus-hépatiques, veine porte et artère hépatique) et on rajoute les images spécifiques au TIPS. Rappel : Dans la mesure où la mesure qui nous intéresse est la vitesse systolique de circulation du sang (et vitesse moyenne pour la veine porte), il est capital d’ajuster correctement la taille du vecteur de mesure au calibre du vaisseau concerné : il doit correspondre au diamètre du vaisseau afin de tenir compte à la fois de la vitesse supérieure au centre du vaisseau et de celles légèrement inférieures en marge des parois. D’autre part, l’angle du vecteur de mesure doit correspondre à la direction du vaisseau et être inférieur à 60 degrés. En effet, à partir de 60°, la mesure de vitesse (dépendante du cosinus de l’angle de mesure) est de moins en moins fiable et est nulle à 90°. 11 Les images du Doppler hépatique Imagerie des veines sus-hépatiques par approche latérale droite, en sagittal-oblique. Le plus fréquemment, toutefois, la VSH G sera imagée par l’approche sous-sternale, en transverse. Veuillez noter qu’il s’agit ici d’un patient non porteur de TIPS, raison pour laquelle le spectre de la veine sus-hépatique droite est réalisé un peu à distance de la veine cave. Avec un TIPS présent, il devra être réalisé entre la VCI et le TIPS. Par l’approche latérale droite en sagittal, imagerie du tronc porte et de l’artère hépatique propre 12 Par l’approche latérale droite en sagittal, imagerie de la branche porte droite et de l’artère hépatique droite Par l’approche para-sternale droite en sagittal, imagerie de la branche porte gauche et de l’artère hépatique gauche A noter qu’en présence d’un TIPS, la réalisation du doppler est plus difficile, car les veines sus-hépatiques et les branches portes sont en général moins bien visibles, puisque le stent draine la majeure partie du sang et que le parenchyme hépatique est atteint. 13 Les images du TIPS Imagerie en mode B du shunt En sagittal, au niveau du lobe droit du foie avec la VCI, on peut voir le shunt entre la Veine sus-hépatique et la Veine porte. Les parois apparaissent comme deux lignes parallèles échogènes, le centre est anéchogène Imagerie couleur du shunt Même position que ci-dessus, la lumière du TIPS est entièrement remplie par la couleur Analyse spectrale du shunt A l’extrémité proximale (portale) du shunt, mesure des vitesses. La fenêtre couleur est bien ajustée, la taille et l’angle du vecteur également. Attention toutefois, car l’angle ici est à 56 degrés ! Il est donc à la limite de ce qui est considéré encore fiable. Analyse spectrale du shunt A la portion moyenne du shunt, mesure des vitesses. La fenêtre couleur est bien ajustée, la taille et l’angle du vecteur également. Attention toutefois, car l’angle ici est à 56 degrés ! Il est donc à la limite de ce qui est considéré encore fiable. 14 Analyse spectrale du shunt A l’extrémité distale (sus-hépatique) du shunt, mesure des vitesses. Le gain couleur est bien ajusté et met bien en évidence le TIPS, mais à nouveau, l’angle du vecteur est à 54°, ce qui est à la limite du fiable. Il est toutefois bien ajusté à la direction du vaisseau. L’artéfact couleur est très probablement dû aux mouvements du cœur qui est tout proche. Avec un TIPS fonctionnant normalement, on devrait obtenir les mesures suivantes : • Les veines sus-hépatiques sont perméables • Le flux dans le tronc porte est hépatopète • Le flux dans les branches portes est variable et à documenter lors du 1er examen • La vitesse moyenne dans le tronc porte est de 25 à 40 cm/s • La vitesse maximale à l’extrémité proximale du stent est d’environ 95 cm/s • La vitesse moyenne dans le stent est supérieure à 50 cm/s • La vitesse maximale dans le stent est aux alentours de 120 cm/s Les valeurs mesurées sont toujours comparées à celles de l’examen précédent et il faudra particulièrement porter attention à trois critères : • En présence de bon réglages (cf. chapitre *astuces*), une absence de flux signifie une thrombose du stent • Si la vitesse moyenne dans le stent est inférieure à 50 cm/s, il faut suspecter une sténose du stent • Si la vitesse dans le TIPS se modifie de +/- 50 cm/s par rapport à l’examen précédent, il faut suspecter une sténose du stent 15 ASTUCES ET PIÈGES À ÉVITER En mode B, l’imagerie partielle de la paroi du shunt peut provoquer des échogénicités dans la lumière du shunt qui pourraient laisser penser à une sténose. Ceci arrive en particulier si la trajectoire du stent est courbe. Changez la fenêtre et éventuellement l’orientation de la sonde. Attention à l’emplacement de la focale. En mode couleur, un défaut de remplissage de la lumière du shunt peut laisser suspecter un thrombus. Il peut aussi être dû à un angle défavorable du faisceau Doppler avec le vaisseau, une cadence image trop rapide, ou une incapacité du faisceau Doppler à pénétrer le shunt métallique. Un ajustement des paramètres peut résoudre la question. La présence d’une grande quantité d’ascite peut être gênante pour l’analyse Doppler dû à l’augmentation de taille du patient et la profondeur accrue du stent. L’utilisation d’une sonde à basse fréquence est de rigueur et le changement de position du patient peut aider à relocaliser l’ascite à un endroit moins gênant. Si aucun flux n’est détecté dans la lumière du shunt, essayez de réduire au maximum la fréquence de répétition du pulse (PRF) et augmentez le gain couleur. En cas de flux très faible, un examen avec injection de microbulles peut améliorer la sensibilité au flux. Ceci n’est toutefois pas réalisé de routine à l’heure actuelle. Pour les mesures de vitesse, augmentez la taille du vecteur de mesure de sorte qu’il inclue presque tout le diamètre de la lumière du shunt. L’artéfact de spectre en miroir (symétrie en-dessus et en-dessous de la ligne de base) est en général dû au fait que le faisceau Doppler est perpendiculaire au vaisseau examiné. Changez la position du transducteur de sorte à avoir un angle maximal entre 45 et 60° entre le faisceau et le vaisseau. Selon l’implantation du shunt dans la veine porte, en mesurant trop à l’extrémité du stent, les vitesses pourraient refléter plutôt la vitesse portale que celle du shunt. Cette vitesse abaissée pourrait suggérer une occlusion. Essayez de refaire une mesure un peu plus à distance. 16 QUELQUES CAS D’ÉTUDE 1er cas : Monsieur I. âgé de 53 ans, souffre d’une hypertension portale sur cirrhose d’origine virale, accompagnée de la présence d’ascite mal contrôlable. Un précédent status de néphropathie hypertensive est à l’origine d’une greffe rénale 11 ans auparavant. Un TIPS est posé en janvier 2008 entre la VSH D et la veine porte D. Il s’agit en fait de deux stents l’un dans l’autre, le stent externe est de 40 mm et le stent interne est de 60 mm afin de maintenir ouverts les orifices portal et sushépatique. Un bilan initial échographique de référence est réalisé le lendemain, lors duquel est confirmé la perméabilité du shunt. Les vitesses sont mesurées à 110-120 cm/s sur toute la longueur du shunt, mais le flux des branches portes n’est pas totalement inversé. Il est noté la persistance de quelques lames d’ascite. 17 Le patient subi plusieurs ultrasons de contrôle suite à des douleurs de l’hypochondre droit et une choléstase en progression. Il persiste une faible quantité d’ascite périhépatique. En janvier 2009, soit un an après la mise en place du TIPS, un contrôle échographique est à nouveau effectué. Les vitesses mesurées dans le shunt sont de 60 à 70 cm/s, ce qui représente un examen dans les limites de la norme compte tenu de la variation maximale admise pour les vitesses de+/- 50 cm/s. Un nouveau contrôle est effectué en Août 2009. Celui-ci révèle un flux hépatofuge dans le shunt (image de gauche), mais avec des vitesses nettement abaissées, de l’ordre de 20 cm/s et un flux hépatopète dans la branche porte gauche (image de droite). Tout ceci signe un dysfonctionnement du TIPS. Le patient subira un nouveau cathétérisme en octobre. Celui-ci démontre un rétrécissement important intra-stent à l’extrémité proximale du shunt. Le stent est dilaté 18 Puis un nouveau TIPS est déployé, diminuant ainsi la pression portale de 18 à 11 mm de mercure. On fait un nouveau contrôle échographique en décembre. Elle révèle un shunt perméable avec des vitesses mesurées à 53 cm/s et des branches portes ayant un flux hépatofuge. 2ème cas : Monsieur L. âgé de 62 ans, souffre d’ascite réfractaire et de cirrhose d’origine éthylique. Un TIPS est mis en place en Juillet 2009 entre la VSH D et la veine porte D. 19 Lors de la procédure est mis en évidence un important réseau de varices gastriques. Le TIPS est confectionné avec plusieurs stents et le gradient transhépatique* passe de 13 à 9 mm de mercure. L’échographie est réalisée 2 jours plus tard. Elle révèle un TIPS perméable dont le flux turbulent est modulé par la respiration. Les vitesses mesurées oscillent entre 150 et 240 cm/s. Une minime quantité d’ascite est décelée. Un contrôle à un mois est effectué chez ce patient qui a présenté plusieurs épisodes d’encéphalopathie hépatique. 20 Il met en évidence un shunt perméable dont les flux turbulents ont une vitesse mesurée à 80 cm/s en moyenne (image de gauche) et un flux porte hépatopète de 40 cm/s (image de droite). Le flux dans la branche porte gauche est très dépendant de la respiration et s’inverse parfois. En moyenne, il a un flux hépatopète de 20 cm/s. Ceci signale un hyperdébit du TIPS et une réduction de calibre du shunt est proposée au patient. La réduction du TIPS est réalisée en septembre, par 4 stents grillagés apposés les uns sur les autres pour réduire le calibre du shunt, puis la mise en place d’un dernier stent couvert au centre. La portographie montre un flux au sein du TIPS et un flux porte physiologique dans les branches portes droite et gauche. Un nouveau contrôle échographique est effectué en décembre. Il démontre des flux turbulents au sein du TIPS avec des vitesses de 80 à 120 cm/s. Dans la branche porte droite, le flux est physiologique, alors qu’il est inversé à gauche, mais avec des vitesses très lentes. Les veines sus-hépatiques sont perméables et il est noté l’absence d’ascite. 21 Un nouveau contrôle est recommandé à un an. 3ème cas : Monsieur P. âgé de 58 ans, souffre de cirrhose d’origine alcoolique et post virale et présente d’importantes hémorragies sur varices gastro-oesophagiennes récidivantes malgré traitement endoscopique. Un TIPS est mis en place en Avril 2004 entre la VSH D et la veine porte D. Lors de la procédure est mise en évidence une volumineuse veine gastrique qui alimente les varices. Elle sera embolisée, puis contrôlée avec une injection de contraste qui révèle une occlusion proximale de cette veine gastrique gauche. Après mise en place du TIPS, la portographie montre un flux partant entièrement dans le shunt et n’alimentant plus les branches portes. Un contrôle échographique est réalisé le lendemain aux soins intensifs, raison pour laquelle les images ne sont pas à notre disposition. Des contrôles échographiques réguliers pendant un an démontrent la stabilité du TIPS, puis un contrôle est effectué un mois plus tard. 22 On identifie une sténose de la veine sus-hépatique droite. Un contrôle angiographique est réalisé en mai 2005. Un stent est déployé à l’extrémité distale du shunt et jusque dans la veine sushépatique droite sans atteindre la veine cave inférieure. Un contrôle échographique intermédiaire est normal, puis en septembre 2005, le Doppler de contrôle est anormal. Il révèle une veine porte perméable, mais avec un flux hépatopète dans la branche porte gauche. 23 Une augmentation des vitesses à l’extrémité distale du shunt suggère une sténose de celui-ci, juste en amont de la veine cave inférieure. Monsieur L. est repris en salle de cathétérisme pour dilatation de la portion distale du shunt, la phlébographie ayant confirmé une hyperplasie dans le stent non couvert. Nouveau contrôle échographique en janvier 2006 : le TIPS est perméable, mais présente des vitesses diminuées de l’ordre de 70 à 90 cm/s. Une surveillance à 3 mois est recommandée. En avril 2006, le contrôle effectué révèle un shunt perméable mais dont les vitesses sont de l’ordre de 30 cm/s. Cette variation de plus de 50cm/s par rapport au dernier contrôle suggère un dysfonctionnement associé à une inversion des flux des branches portes droite et gauche. Une révision de TIPS est recommandée. Le patient subi une nouvelle dilatation de l’extrémité distale du stent sténosé quelques jours plus tard. Après plusieurs épisodes de dysfonctionnement du TIPS associés à une récurrence de l’ascite et reprise en salle de cathétérisme à plusieurs reprises, un contrôle échographique est réalisé en septembre 2007. 24 Celui-ci démontre un flux hépatopète dans le tronc porte dont les vitesses sont de 10 cm/s ainsi qu’une inversion de flux dans les branche portes droite et gauche avec des vitesses de l’ordre de 3 à 5 cm/s. Dans le TIPS, un flux hépatofuge dont les vitesses sont de 25 cm/s est décelé. Une gastroscopie révèle une augmentation de la taille des varices gastriques et le patient est adressé aux interventionnistes pour une embolisation. Le TIPS présente une obstruction complète et il sera recanalisé, puis la portographie réalisée démontre la présence d’un thrombus occupant environ 80% de la lumière du tronc porte et entourant complètement l’extrémité proximale du TIPS. Malgré la dilatation réalisée au sein du TIPS, la phlébographie de contrôle démontre un échec de reperméabilisation du shunt. Un CT-scan est recommandé afin de juger de l’étendue du thrombus et est réalisé le jour suivant. 25 Il démontre une obstruction du TIPS et un thrombus de la veine porte, du confluent spléno-mésentérique et sur 3cm, de la veine splénique. Un ultrason de contrôle est effectué 5 jours plus tard. Il démontre toujours une thrombose du TIPS associée à une thrombose de la veine sushépatique droite ainsi qu’une thrombose partielle du tronc porte. 26 Un flux hépatopète est toutefois identifié antérieurement au thrombus, avec une vitesse moyenne de 8 cm/s et le flux des branches portes droite et gauche est également hépatopète. Les veines sushépatiques identifiées (moyenne et gauche) ont-elles, par contre, un flux hépatofuge. Le patient est placé sous anti-coagulation et des scanners de contrôle sont effectués en janvier (à 1 mois) et en mars (à 3 mois), mais ne démontrent pas une évolution favorable, puisque le thrombus ne régresse pas et l’ascite récidive. Quelques jours plus tard, les interventionnistes font une nouvelle tentative de recanalisation qui sera finalement fructueuse, mais la reperméabilisation veineuse est un échec en raison de la thrombose de la veine porte. 27 SYNTHÈSE Le contrôle de TIPS par ultrason est à la fois un examen intéressant et difficile. Du fait que les vitesses sont comparées d’un examen à l’autre, il est très important d’être le plus reproductible possible, comme pour tout examen radiologique, mais particulièrement pour les examens Doppler, une attention toute particulière devrait être portée aux ajustements de gain, de taille de vecteur et d’angle de mesure. En effet, si une variation subtile est recherchée, et que l’angle est mal ajusté, elle pourrait passer inaperçue. La pose de TIPS n’est pas un traitement de l’insuffisance hépatique, mais traite les complications de l’hypertension portale. Le patient reste en attente d’une greffe hépatique. La pose de TIPS a elle aussi des conséquences et complications possibles, les plus fréquentes étant le risque d’encéphalopathie hépatique, de sténose des vaisseaux intéressés ou du stent, voire même de thrombus. REMERCIEMENTS A mon collègue Pierre Frossard, pour nos discussions intéressantes. Au Docteur Bize, Au Professeur Meuwly, Et au Professeur Denys, Qui ont consacré de leur temps pour lire et corriger ce travail. 28 APPENDICE I : ANATOMIE ET FONCTION DU FOIE Le foie est le plus gros organe interne du corps humain, ainsi que la glande la plus lourde, avec ses 1,5 Kg chez un adulte moyen. Situé sous le diaphragme, il occupe la majeure partie de l’hypochondre droit ainsi qu’une partie de l’épigastre. Cet organe ayant la consistance d’une éponge humide se modèle aisément à son environnement. Le foie est divisé en 2 lobes principaux, droit et gauche, séparés par le ligament falciforme. Le lobe droit comprend deux lobes secondaires, soit le lobe carré et le lobe caudé. Les lobes se subdivisent en lobules, qui sont formés par les hépatocytes disposés en plaques irrégulières ramifiées entre lesquels cheminent des espaces tapissés de tissu endothélial et formant des sinusoïdes à travers lesquels passe le sang. Ces sinusoïdes sont également partiellement tapissés de cellules réticuloendothéliales, les cellules de Kupffer. Ces cellules ont pour rôle de détruire les globules blancs et rouges endommagés ainsi que les substances toxiques et les bactéries. 29 La bile que sécrètent les hépatocytes pénètre dans les canalicules biliaires qui se déversent dans des petits canaux biliaires (voies biliaires intra-hépatiques) qui s’unissent en canaux hépatiques gauche et droit. Ces derniers fusionnent et sortent du foie en canal hépatique commun. Le foie remplit un grand nombre de fonctions vitales dont bon nombre sont liées au métabolisme. Ainsi, il intervient dans : Le métabolisme des glucides. Le foie maintient une glycémie normale en convertissant le glucose en glycogène (glycogenèse) lorsque le taux de glucose dans le sang est élevé et l’inverse (glycogénolyse) lorsque ce dernier est bas. Lorsque le taux de glucose est bas, le foie peut même convertir certains acides aminés et l’acide lactique en glucose (néoglucogenèse). Il peut aussi transformer d’autres sucres tel que le fructose ou le galactose, en glucose, ainsi que convertir le glucose en triglycérides. Le métabolisme des lipides. Le foie emmagasine certains triglycérides, transforme les acides gras en acétyl-coenzyme A et l’excédent de ce dernier en corps cétoniques. Le foie synthétise les lipoprotéines qui transportent les acides gras, les triglycérides et le cholestérol provenant et à destination des cellules du corps. Les hépatocytes synthétisent le cholestérol et l’utilisent pour fabriquer des sels biliaires. Le métabolisme des protéines. Le foie enlève le groupe amine des acides aminés pour qu’ils puissent être utilisés pour la production d’adénosine-triphosphate (ATP) ou être convertis en glucides ou en graisses. Il converti l’ammoniaque toxique résultant de la désamination en urée nettement moins toxique pour qu’elle soit excrétée dans l’urine. Si cette fonction n’est plus remplie par le foie, la mort survient en quelques jours. L’élimination des médicaments et des hormones. Le foie peut excréter dans la bile certains médicaments tels que la pénicilline*, l’érythromycine* et les sulfamides*. Il peut également modifier chimiquement ou excréter les hormones thyroïdiennes et les hormones stéroïdes. 30 L’excrétion de la bile. La bilirubine issue de l’hème des globules rouges usés est absorbée par le foie à partir du sang et excrétée dans la bile. La majorité de la bilirubine est métabolisée dans les intestins par des bactéries, puis éliminée dans les excréments. La synthèse des sels biliaires. Les sels biliaires sont utilisés dans l’intestin grêle pour l’émulsification et l’absorption des graisses, du cholestérol, des phospholipides et des lipoprotéines. L’emmagasinage. Le foie emmagasine le glycogène, comme vu précédemment, mais également des vitamines ( A, B12, D, E, K) et des minéraux (fer et cuivre). Les cellules hépatiques renferment l’apoferritine, protéine qui s’associe au fer pour former la ferritine, forme sous laquelle de fer est emmagasiné dans le foie. Le fer sera libéré par le foie quand il sera nécessaire ailleurs dans l’organisme. La phagocytose. Les cellules de Kupffer du foie phagocytent les globules rouges et blancs usés ainsi que certaines bactéries. L’activation de la vitamine D. La peau contient le précurseur de la vitamine D, qui est synthétisée lors d’une exposition aux rayons ultraviolets. La molécule est ensuite transformée par des enzymes du foie et des reins, en calcitriol, forme la plus active de la vitamine D qui participe à l’homéostasie des liquides corporels en stimulant l’absorption du calcium contenu dans les aliments. 31 APPENDICE II : LEXIQUE Encéphalopathie hépatique : Syndrome neuropsychiatrique complexe caractérisé par des modifications de l’état de conscience et du comportement, des changements de personnalité, des signes neurologiques et des changements à l’électroencéphalogramme (EEG). Il peut être aigu et réversible, comme par exemple dans le cas de l’insuffisance hépatique aigüe, ou chronique et irréversible. Gradient de pression transhépatique : Différence de pression entre la veine porte et la veine sus-hépatique Hépatofuge : Qui circule en s’éloignant du foie Hépatopète : Qui circule en direction du foie HTP idiopathique: HyperTension Portale dont on ne connaît pas l’origine Maladie véno-occlusive : C’est l’occlusion des veinules hépatiques par du tissu conjonctif et du collagène. Elle se rencontre par exemple chez des patients ayant subi une greffe de moelle osseuse, ou à la suite de chimiothérapie ou radiothérapie. 32 BIBLIOGRAPHIE ET RÉFÉRENCES Principes d’anatomie et de physiologie Tortora-Grabowski _ Ed. De Boeck université Clinical Doppler Ultrasound Paul L. Allan, Paul A. Dubbins, Myron A. Pozniak, W. Norman McDicken _ Ed. Churchill Livingstone Portal Hypertension in the 21st Century R. J. Groszmann, J. Bosch _ Kluwer Academic Publishers Clinical Hepatology: principles and practise of hepatobiliary diseases _ Volume 2 Henryk Dancygier _ Springer Color Doppler sonography of transjugular intrahepatic portosystemic shunts (TIPS) MC Foshager, H Ferral, DE Finlay, WR Castaneda-Zuniga and JG Letourneau http://www.ajronline.org/cgi/content/abstract/163/1/105 Ultrasound Evaluation Of TIPS Placement Jessica M. Smith, Linda A. Cox, Bruce W. Long http://findarticles.com/p/articles/mi_hb3387/is_4_71/ai_n28768295/ AMVF _ Le TIPS PR. Dominique VALLA http://amvfespacemembre.free.fr/article.php3?id_article=63 Doppler evaluation of transjugular intrahepatic portosystemic shunts Middleton WD, Teefey SA, Darcy MD http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/12973091 Haemodynamic adaptation two months after transjugular intrahepatic portosystemic shunt (TIPS) in cirrhotic patients. 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