La maladie de Parkinson - chu

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Cahier de
formation
n° 86
DOSSIER
La maladie
de Parkinson
Réponses du quiz :
Quiz
1. En nombre de patients touchés, en
France, la maladie de Parkinson (MP) est:
a. la plus fréquente des maladies
neurodégénératives;
b. la deuxième après la maladie
d’Alzheimer.
2. La MP peut se traduire par:
a. un tremblement de repos;
b. une rigidité dans les mouvements;
c. des troubles de la respiration.
3. Le traitement essentiel de la gêne
fonctionnelle liée à la MP repose sur:
a. la prescription de lévodopa;
b. la prescription de dopamine;
c. la prescription de décontracturants.
4. La lévodopa:
a. franchit la barrière
hémato-encéphalique;
b. est toujours associée
à un inhibiteur enzymatique;
c. est transformée en dopamine
dans l’organisme.
5. Le traitement dopaminergique expose
à un risque iatrogène:
a. de troubles digestifs;
b. de troubles tensionnels;
c. d’apparition d’une dépendance au jeu.
1- b ; 2- a et b ; 3- a ; 4- a, b et c ; 5- a, b et c
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Quiz
Sommaire
Savoir
La maladie de Parkinson est une affection neurologique
fréquente, se traduisant essentiellement par
la dégénérescence progressive des neurones
dopaminergiques impliqués dans la motricité. Elle ne
se guérit pas mais se soigne. Son traitement nécessite
la coopération des professionnels de santé et du patient.
Savoir faire
Surveiller complications et effets secondaires
L’Idel intervient généralement à un stade avancé de
la maladie, quand le patient est âgé et/ou dépendant,
notamment pour administrer les médicaments,
surveiller leurs effets et effectuer des soins d’hygiène.
Accompagner dans la vie quotidienne
L’Idel peut proposer des solutions pragmatiques visant
à préserver l’autonomie du patient, repérer ses besoins
et ceux de ses proches, et prévenir les chutes.
Savoir plus
CAHIER RÉDIGÉ PAR CORINNE DRAULT ET DENIS RICHARD, PHARMACIEN,
CHEF DE SERVICE AU CENTRE HOSPITALIER HENRI-LABORIT (POITIERS),
AVEC L’AIMABLE PARTICIPATION DE CÉLINE ARCARI, IDE D’ETP (ETPARK),
CENTRE EXPERT PARKINSON, CHU DE TOULOUSE (HAUTE-GARONNE)
Les auteurs déclarent ne pas avoir de lien d’intérêts.
LE POINT SUR
PHARMACOLOGIE L’homéopathie en principe . . . . . . . . . . . p.50
URGENCE DIGESTIVE L’occlusion intestinale . . . . . . . . . . . . p.52
JANVIER 2016 - N° 321 - L’INFIRMIÈRE LIBÉRALE MAGAZINE
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Cahier de
formation n° 86
Savoir
Affection neurodégénérative aussi fréquente que sévère, la maladie de Parkinson associe
typiquement tremblement de repos, bradykinésie et rigidité musculaire. Elle répond
favorablement, mais temporairement, à un traitement personnalisé correctement suivi.
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Le chirurgien anglais James Parkinson (1755-1828) s’intéressa à la maladie
de Parkinson (MP) en 1817. Le neurologue français Jean-Martin Charcot
(1825-1893) décrivit les symptômes
de cette « paralysie trépidante ».
Épidémiologie (1)
➲ Prévalence : en France, 150 000 à
200000 patients. C’est l’affection neurologique dégénérative la plus fréquente après la maladie d’Alzheimer.
➲ Incidence : environ 15 pour
100 000 personnes et par an.
➲ Âge moyen de début : entre 55 et
65 ans. 15 % des patients débutent
la maladie avant 40 ans.
➲ La MP affecte 3 % des sujets âgés
de plus de 75 ans.
➲ Sex-ratio : 1.
Physiopathologie
La MP est une affection neurodégénérative chronique, lentement évolutive, entraînant un dysfonctionnement des circuits neuronaux qui, dans
le cerveau, permettent le contrôle des
mouvements, plus particulièrement
des mouvements automatiques.
n Une dégénérescence
minergiques est localisée dans des
noyaux du système nerveux formant
ce que l’on appelle la substance noire
(ou locus niger), dont les neurones
projettent leurs axones vers une
autre structure nerveuse sous-corticale (le striatum), par une voie
directe, favorisant le mouvement,
et une voie indirecte, inhibant le
mouvement. Environ 60 à 80 % des
neurones dopaminergiques de ces
voies ont déjà disparu au moment
où apparaissent les premiers signes
cliniques moteurs.
➲ Atteinte des neurones non dopaminergiques. La MP affecte aussi
des neurones qui échangent entre
eux des informations grâce à des
neuromédiateurs, la noradrénaline,
la sérotonine et l’acétylcholine : ces
dégradations expliquent la sévérité
de l’expression de la maladie évoluée
et la disparité de ses symptômes
moteurs et non moteurs.
n Une étiologie discutée
Certains spécialistes ont jadis considéré la MP comme un vieillissement
physiologique accéléré. Pour autant,
les troubles moteurs du sujet âgé
ne sont pas améliorés par l’administration de lévodopa (un traitement
de référence) et la topographie des
pertes neuronales n’est pas superposable dans les deux cas, ce qui
limite évidemment la pertinence de
cette approche.
En regard, deux approches, qui ne
se contredisent pas forcément, méritent, parmi d’autres, d’être évoquées.
Cerveau et lésions parkinsoniennes
Cortex
Thalamus
Striatum
neuronale globale
Les signes cliniques de la MP sont
avant tout liés à une altération des
neurones dopaminergiques même
si cette population de neurones n’est
pas la seule affectée.
➲ Neurones dopaminergiques. La
dégénérescence des neurones dopa-
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Substance noire
(locus niger)
L’INFIRMIÈRE LIBÉRALE MAGAZINE - N° 321 - JANVIER 2016
Dégénérescence des neurones dopaminergiques du locus niger
Hyperactivité cholinergique corticale
© Maïtena Teknetzian (d’après Neuropsychologie de la maladie de Parkinson et des syndromes apparentés, Masson, 2007)
DÉFINITION
Historique
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La maladie de Parkinson
➲ Étiologie toxique. Il est connu
depuis plus de trente ans que l’intoxication par un dérivé de la tétrahydropyridine apparenté à certains
pesticides détermine un syndrome
analogue à la MP. L’épidémiologie
montre que la prévalence de la MP
est plus élevée chez les sujets exposés
aux métaux lourds et chez les agriculteurs manipulant régulièrement
des pesticides. S’il est probable qu’une
origine toxique explique la survenue
de certains cas de MP (un décret du
4 mai 2012 valide sa reconnaissance
comme maladie professionnelle provoquée par les produits phytosanitaires), il est probable qu’un facteur
de susceptibilité génétique soit requis
pour la voir s’exprimer cliniquement.
➲ Étiologie génétique. Une participation génétique à certaines formes
familiales de MP est démontrée par
études de jumeaux et par l’existence
de MP à transmission autosomale
dominante (l’autosome est un chromosome non sexuel).
➲ En fait, il s’agit avant tout d’une
affection idiopathique (sans cause
connue). De plus, quelle que soit
l’étiologie de la MP, le mécanisme
expliquant l’auto-destruction (apoptose) des neurones reste inconnu.
MANIFESTATIONS
CLINIQUES
Demeurant purement clinique, ce diagnostic est souvent délicat, notamment
à la phase initiale de la maladie: la
symptomatologie reste discrète. L’avis
d’un neurologue est recommandé sitôt
que des signes suggèrent une éventuelle altération dopaminergique.
Triade clinique significative
Le diagnostic de la MP repose sur
sur l’apparition d’un, de deux ou de
trois signes, comme le souligne
Céline Arcari, infirmière en éducation thérapeutique (programme
ETPark) du Centre expert Parkinson,
CHU de Toulouse (Haute-Garonne).
Question de proche
La maladie de Parkinson aurait-elle une “odeur”?
C’est ce que laisse entendre le témoignage, relayé fin octobre dans la
presse, d’une proche qui aurait noté auprès de son mari malade une odeur
corporelle spécifique. L’information est à prendre avec des pincettes,
sous peine de stigmatiser les patients. L’Université de Manchester va
tenter de la confirmer ou non, en extrayant les composés à l’origine
de cette odeur (si elle existe) et ainsi trouver une méthode de diagnostic
olfactif précoce. La seule chose sûre, pour le moment, c’est que la MP
peut susciter une hypersudation et une perte d’odorat du patient...
Sources : fondation Parkinson UK (lien : bit.ly/1Ht5jvt) et en France, notamment, Le Figaro du 23octobre (bit.ly/1XoCFVl).
Ils ont pour origine la carence dopaminergique dans la substance noire :
➲ le tremblement de repos,
➲ l’akinésie (difficulté à initier un
mouvement) et/ou la bradykinésie
(ralentissement dans l’exécution d’un
mouvement), avec amimie ou perte
de la mobilité et de l’expression
faciale, micrographie (écriture
minuscule et illisible), perte du “ballant du bras”, trouble de la marche,
➲ la rigidité (augmentation du tonus
musculaire, crampes, dystonies ou
contractures musculaires, douleurs...).
Ces symptômes sont variables d’une
personne à l’autre, et de plus en plus
marqués avec l’évolution de l’affection. Exemple: 20 à 30% des malades
ne trembleront jamais. Ces symptômes, souvent asymétriques, cèdent
plus ou moins à l’administration de
lévodopa – un test diagnostique.
D’autres signes orientent parfois le
diagnostic, moteurs comme des
troubles de l’élocution ou une instabilité posturale, ou non moteurs, à
l’image d’une dépression (parfois
précoce), d’une hypotension
orthostatique, d’une douleur, de
troubles du sommeil, cognitifs, urinaires, sexuels...
Il se dessine en outre des signes prémoteurs, “avant-coureurs”, comme la
constipation, des troubles du sommeil
ou l’anosmie (perte d’odorat), qui
posent de nombreux problèmes au
patient et son entourage.
Éventuels examens
complémentaires
Des examens complémentaires lèvent
un doute éventuel sur le diagnostic et
notamment l’IRM (qui permet d’identifier syndromes tumoraux, maladie
de Parkinson du sujet jeune ou d’origine vasculaire, maladie de Wilson,
maladies neurodégénératives diverses)
ou des examens biologiques (maladie
de Wilson). Dans quelques situations
diagnostiques difficiles, du ressort du
spécialiste, une scintigraphie au DATscan (2) démontre une réduction asymétrique de l’activité du striatum. Elle
apporte des éléments pour le diagnostic mais ne permet pas la différenciation entre la maladie de Parkinson
et les autres syndromes parkinsoniens.
L’évolution clinique de la maladie et
du handicap associé est suivie à l’aide
d’échelles (lire l’encadré page suivante).
ÉVOLUTION
La MP reste aujourd’hui une affection
chronique, lentement évolutive, mais
de moins en moins fatale. Son traitement corrige efficacement les symptômes mais n’empêche pas sa progression. Il est désormais classique
de distinguer quatre temps essentiels
dans l’histoire de la maladie.
Diagnostic
L’apparition des premiers symptômes
de l’affection est particulièrement
anxiogène: cette maladie chronique,
JANVIER 2016 - N° 321 - L’INFIRMIÈRE LIBÉRALE MAGAZINE
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Cahier de
formation n° 86
que l’on sait évolutive, implique une
importante remise en question existentielle. Le traitement pharmacologique peut être instauré dès l’annonce
du diagnostic car il contribue à ralentir
l’évolution de la maladie.
Rémission thérapeutique
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Cette phase témoigne de l’efficacité
des traitements dopaminergiques
prescrits par le neurologue : elle est
couramment qualifiée de “lune de
miel”. S’il est nécessaire d’ajuster
régulièrement le traitement, celui-ci
n’engendre pas encore de complications motrices iatrogènes et constitue une “substitution” équilibrée au
déficit pathologique en dopamine.
Complications motrices
Le traitement par lévodopa (lire Savoir
faire, p.41) est à l’origine de complications motrices iatrogènes qui se
conjuguent avec celles induites par
l’affection au cours de son évolution
progressive. L’incidence de ces complications est limitée par un ajustement rigoureux des doses et des
horaires de prises. Cependant, elles
ne peuvent être totalement évitées et
deviennent de plus en plus présentes.
Phase d’envahissement
À ce stade, chutes, perte d’équilibre,
troubles de la déglutition, etc.,
deviennent très présents. S’y asso-
cient des troubles végétatifs également handicapants. Leur conjonction limite de façon croissante l’autonomie du patient : c’est le temps
où il importe de mettre en place
des stratégies d’adaptation de la
vie quotidienne.
TRAITEMENT DE LA MP
Le traitement par médicament(s) ne
guérit pas l’affection, mais la soigne,
constituant une réponse à son évolution. Ses objectifs essentiels :
➲ amélioration des symptômes
moteurs (rigidité, tremblements,
etc.) et parfois des autres symptômes
(dépression, troubles du sommeil,
douleurs, troubles cognitifs, etc.) ;
➲ amélioration du vécu de la maladie
pour le patient et pour ses proches ;
➲ optimisation du maintien de la vie
sociale et professionnelle;
➲ optimisation, dans les formes évoluées, du maintien à domicile;
➲ prévention des complications liées
au traitement pro-dopaminergique ;
➲ recherche du meilleur rapport efficacité/effets indésirables.
Traitement
symptomatique
Le traitement antiparkinsonien,
purement symptomatique, vise à
restaurer le tonus dopaminergique
par l’administration de lévodopa,
un précurseur de la dopamine (dont
L’échelle UPDRS
L’UPDRS (pour Unified Parkinson’s Disease Rating
Scale) constitue une échelle
simple d’emploi explorant
toutes les conséquences de
la MP dans des sections utilisables séparément.
➜ Section I: état mental,
comportemental et thymique (4 items).
34
➜ Section II: activités de la
vie quotidienne (13 items:
parole, salivation, déglutition, écriture, alimentation,
habillage, hygiène, se retourner dans son lit, chutes, piétinement, marche, tremblement, douleurs).
➜ Section III : examen
moteur (14 items).
L’INFIRMIÈRE LIBÉRALE MAGAZINE - N° 321 - JANVIER 2016
il s’agit idéalement de lisser l’apport
et de le rendre constant comme il
le serait sans la maladie), et/ou par
celle d’un agoniste dopaminergique.
Il s’agit d’une prescription purement
palliative, qui ne fait que retarder
la progression de la dégénérescence
neuronale. Divers inhibiteurs du
métabolisme dopaminergique
contribuent à renforcer la puissance
de ces médicaments. La prescription
est strictement adaptée au patient,
à son âge, à l’évolution de la maladie, et les effets secondaires doivent
être particulièrement surveillés (lire
Savoir faire, p.41).
n Les stratégies thérapeutiques
La prescription du traitement antiparkinsonien vise à trouver un
compromis entre des effets bénéfiques et indésirables, dans un
contexte que l’évolution propre et
continue de la maladie rend
constamment mouvant. Rigoureusement adapté à chaque situation
thérapeutique, à l’âge du patient,
à son état clinique et à l’importance
de la gêne fonctionnelle, le traitement voit se succéder diverses stratégies visant à constamment renforcer un tonus dopaminergique
de plus en plus défaillant – jusqu’à
la disparition des neurones dopaminergiques sur lesquels les médicaments administrés peuvent agir,
➜ Section IV : complications du traitement dans la
semaine précédant l’examen (11 items).
➜ Section V : stades de
Hoehn et Yahr permettant
de classer les patients en
8 niveaux selon la sévérité
de la maladie (stade 0 =
absence de signe parkinsonien à stade 6 = perte totale
d’autonomie).
➜ Section VI: activités quo-
tidiennes (de 100% pour
le patient totalement indépendant à 0 % pour le
patient alité).
Il existe une version modifiée
plus précise, validée en 2008,
qui remplace progressivement l’ancienne: la MDSUPDRS (Movement Disorder
Society-Unified Parkinson’s
Disease Rating Scale).
La maladie de Parkinson
➜ Limites de la dopathérapie
Question de patient
Un tremblement est-il forcément imputable à une maladie
de Parkinson?
Non. Il peut s’agir d’un tremblement dit “essentiel”. Le seul signe
alors observé est un tremblement omniprésent, qui ne disparaît pas dans
l’exécution volontaire d’un mouvement (tandis que le tremblement
de la MP, de repos, diminue en cas de mouvement), progresse
lentement mais n’entraîne que rarement un handicap. Cette pathologie
du mouvement, souvent familiale, est bien plus fréquente que la MP et
affecte au moins 300000 personnes en France. Elle est même la cause
la plus courante de tremblements. Elle augmente progressivement avec
l’âge et atteint jusqu’à 14% des sujets de plus de 65 ans.
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Source : Association des personnes concernées par le tremblement, 2015 (www.aptes.org).
qui signe l’épuisement des recours
pharmacologiques.
◗ Retentissement clinique
mineur
Le recours à la dopathérapie est
retardé autant que possible : on privilégie en monothérapie la prescription d’un agoniste dopaminergique,
d’un inhibiteur enzymatique actif
sur les monoamines oxydases, ou,
rarement, celle d’un anticholinergique chez un patient jeune, gêné
par les tremblements.
◗ Handicap moteur invalidant
On introduit progressivement un traitement reposant sur la prescription:
➲ de lévodopa ou L-Dopa (avec un
inhibiteur périphérique toujours
associé dans le médicament). Rapidement efficace à une posologie
moyenne comprise entre 150 et
450 mg/j, la lévodopa est privilégiée
chez les patients les plus âgés en
première intention en raison d’une
tolérance satisfaisante ;
➲ d’un agoniste dopaminergique.
Prescrit à dose progressive sur deux
à trois mois, ce produit qui imite l’action de la dopamine a une efficacité
moindre que celle de la lévodopa,
mais il permet de retarder le passage
à la dopathérapie et donc l’apparition
des fluctuations motrices. En association avec la L-Dopa, il permet une
augmentation plus lente des doses
de médicaments. Son administration
peut s’accompagner de divers effets
indésirables dont la confusion mentale,
notamment chez le sujet âgé, ce qui
fait privilégier ce type de médicament
chez un patient plus jeune (moins de
70 ans), sauf intolérance ou insuffisance de la réponse thérapeutique.
n Les médicaments utilisés
◗ Anticholinergiques
Les médicaments anticholinergiques
(trihexyphénidyle : Artane, Parkinane ; bipéridène : Akinéton) réduisent l’hyperactivité cholinergique
elle-même induite par l’hypoactivité
dopaminergique. Ils sont efficaces
sur les seules formes trémulantes
(tremblantes) de la MP. Leur prescription est devenue rare en raison
de leurs effets indésirables (constipation, sécheresse buccale et oculaire, rétention urinaire, troubles de
l’accommodation visuelle, troubles
de la mémoire, confusion mentale)
limitant leur emploi pendant une
longue durée et chez le patient âgé.
◗ Dopathérapie
L’administration directe de dopamine
est impossible car elle ne traverse
pas la barrière hémato-encéphalique
et n’agit pas sur le cerveau. On administre donc son précurseur biologique, la lévodopa, qui, lui, franchit
la barrière hémato-encéphalique.
➲ La lévodopa se transforme partiellement en dopamine dans le réseau
sanguin périphérique (extérieur à la
barrière hémato-encéphalique) sous
l’action d’enzymes présentes dans le
sang. Cette dopamine induit alors
des effets indésirables digestifs (nausées, vomissements) par stimulation
des récepteurs dopaminergiques du
tube digestif et du centre bulbaire
du vomissement (ces effets sont
réduits par l’administration d’un antagoniste dopaminergique digestif, la
dompéridone, lire l’encadré p.39) et
des effets indésirables cardiovasculaires (à dose faible : hypotension
artérielle ; à dose plus forte : hypertension et/ou troubles du rythme).
➲ Les variations brutales des taux
de dopamine dans le cerveau, rythmées par les prises de médicament,
entraînent des fluctuations motrices
et des effets indésirables affectant
le psychisme, la fonction ventilatoire
ou l’hémodynamique sanguine.
➲ La dopathérapie ne doit pas être
interrompue brutalement : un syndrome de sevrage analogue au syndrome malin des neuroleptiques
(fièvre élevée, malaise général, etc.)
peut survenir.
➜ Optimisation de la dopathérapie
Des artifices sont mis en œuvre pour
remédier, au moins partiellement,
aux problèmes de la dopathérapie :
son association à des produits qui
limitent la transformation périphérique de la lévodopa en dopamine
(inhibiteurs du métabolisme enzymatique de la lévodopa), ou des
modifications dans la présentation
galénique de la lévodopa.
- Association aux inhibiteurs
enzymatiques périphériques
La lévodopa est métabolisée en
dopamine par deux enzymes : la
dopa-décarboxylase et la catécholO-méthyltransférase (COMT). L’inhibition de ces enzymes par des médicaments a deux avantages :
JANVIER 2016 - N° 321 - L’INFIRMIÈRE LIBÉRALE MAGAZINE
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Cahier de
formation n° 86
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➲ elle augmente l’efficacité de la lévodopa en limitant sa transformation
physiologique en dopamine : une
plus grande quantité est disponible
pour entrer dans le cerveau tout en
réduisant la dose totale administrée ;
➲ elle réduit les effets indésirables
induits par la formation périphérique de dopamine (notamment les
effets digestifs et cardiaques évoqués précédemment).
Concrètement, par rapport à ces
deux types d’enzymes :
➲ un inhibiteur de la dopa-décarboxylase est donc désormais systématiquement associé à la lévodopa
(bensérazide dans le Modopar ; carbidopa dans le Sinemet) ;
➲ deux inhibiteurs de la COMT
(ICOMT) sont commercialisés: d’une
part l’entacapone (Comtan, ICOMT
seul, et Stalevo, ICOMT et lévodopa;
ses effets indésirables se traduisent
notamment par des douleurs abdominales, des troubles du transit et
une coloration brune de l’urine) et
d’autre part la tolcapone (Tasmar,
prescrit en deuxième ligne en association avec d’autres médicaments,
uniquement par un neurologue, sous
stricte surveillance en raison d’une
mauvaise tolérance hépatique).
- Modifications galéniques
Les présentations de lévodopa à libération prolongée (LP) (tout comme
celle d’autres médicaments, y compris
les agonistes dopaminergiques évoqués plus bas) réduisent l’incidence
des troubles moteurs, du moins temporairement, en stabilisant les taux
sanguins de dopamine et en régularisant donc son action dans le cerveau.
Mais l’effet du médicament est plus
retardé (entre une heure et une heure
et demie), ce qui peut expliquer le choix
d’associer (parfois avec un léger différé)
une forme d’action retard à une forme
d’action immédiate, notamment le
matin. De plus, l’action des formes
retard est plus réduite, d’où la nécessité
d’augmenter la posologie de lévodopa
administrée (de 20% lors de la substitution, de 25 à 50% ensuite par rapport
à une forme à libération immédiate).
◗ Inhibiteurs des monoamines
oxydases (IMAO)
La dopamine formée dans le cerveau
à partir de la lévodopa y est méta-
Maladie de Parkinson
et syndrome parkinsonien
Il ne faut pas confondre la
MP idiopathique, objet de
ce dossier, avec l’un ou l’autre des divers syndromes
parkinsoniens (rappelons
qu’un syndrome fédère
divers symptômes réputés
avoir une origine unique).
La MP idiopathique représente environ 80% des cas
observés. Mais il existe plusieurs syndromes parkinsoniens. En voici quelques
autres exemples:
➜ atrophie multisystématisée (AMS) : il est dif-
36
ficile de porter un diagnostic
différentiel entre une MP
débutante et une AMS, une
maladie neurodégénérative
rare. Cette dernière associe
à des signes parkinsoniens
typiques des troubles de
l’équilibre, de la coordination et de nombreux troubles végétatifs (variations
tensionnelles, troubles urinaires et sexuels). L’AMS a
une évolution très rapide,
de moins de dix ans;
➜ paralysie supranucléaire progressive: ce syn-
L’INFIRMIÈRE LIBÉRALE MAGAZINE - N° 321 - JANVIER 2016
bolisée par des enzymes appelées
“monoamines oxydases” (MAO) :
l’administration d’inhibiteurs de ces
enzymes augmente donc sa durée
d’action. C’est la logique de la prescription de la sélégiline (Déprényl)
et de la rasagiline (Azilect). Prescrits
en monothérapie lorsque la gêne
fonctionnelle reste minime, ils peuvent être associés ensuite à la dopathérapie pour en réduire la dose ou
en optimiser l’effet.
◗ Agonistes dopaminergiques
centraux
Les agonistes dopaminergiques sont
des médicaments qui passent dans le
cerveau et agissent comme le ferait la
dopamine, sur ses propres récepteurs:
bromocriptine (Parlodel), piribédil (Trivastal), ropinirole (Requip), pramipexole (Sifrol), rotigotine (Neupro) et
apomorphine (Apokinon).
Ils bénéficient d’une demi-vie beaucoup plus longue que celle de la lévodopa (excepté l’apomorphine qui a
une demi-vie de 34 minutes), d’où
une stimulation dopaminergique plus
régulière et moins de fluctuations
motrices. Ils peuvent être prescrits
drome parkinsonien se traduit notamment par une
paralysie oculaire, avec un
regard constamment
dirigé vers le bas. Le tremblement est extrêmement
rare mais les chutes précoces fréquentes. L’évolution est rapide ;
➜ démence à corps de
Lewy : ce syndrome se
caractérise, en plus de
symptômes moteurs
observés dans la MP, par
des hallucinations ainsi
que par une dégradation
intellectuelle précoce ;
➜ syndrome (pseudo)
parkinsonien induit par
neuroleptiques: les neuroleptiques indiqués
essentiellement dans le
traitement des psychoses
peuvent entraîner un syndrome parkinsonien iatrogène réversible car ils
inhibent la transmission
dopaminergique. Il est prévenu ou traité par administration d’anticholinergiques
(Lepticur essentiellement):
l’usage d’antiparkinsoniens
dopaminergiques est
impossible puisqu’il y a
antagonisme pharmacologique avec les neuroleptiques qui sont, eux, antidopaminergiques.
La maladie de Parkinson
Question de patient
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Comment gérer mon traitement par patch transdermique
de Neupro?
Le patch s’applique une fois par jour, approximativement à la même
heure chaque jour. Il reste en place pendant 24 heures puis est
remplacé par un dispositif neuf. En cas d’oubli de l’heure, ou si le patch
se décolle, appliquez-en un nouveau pour le reste de la journée.
Le patch est appliqué sur une peau propre, sèche, intacte et saine,
sur l’abdomen, la cuisse, la hanche, le flanc, l’épaule ou le bras.
Il faut éviter de répéter l’application au même endroit au cours
des quatorze jours qui suivent. Ne pas appliquer sur une peau rouge,
irritée ou lésée. Ne pas découper le patch.
en monothérapie de première intention, chez un patient jeune, pour différer le recours à la lévodopa. Puis,
la maladie évoluant, ils sont associés
à la lévodopa lorsque son effet commence à s’épuiser. La lévodopa est
alors introduite mais à des doses très
lentement progressives pour éviter
la survenue des fluctuations motrices,
en particulier les dyskinésies (mouvements involontaires) de pic de dose
(résultant d’une stimulation dopaminergique excessive). Les effets indésirables principaux sont de la somnolence parfois très importante, voire
des accès soudains de sommeil (prudence en cas de conduite automobile),
des troubles du comportement ou
des hallucinations, des œdèmes des
membres inférieurs, de l’hypotension,
des troubles digestifs en début de
traitement (traiter par la dompéridone,
qui ne franchit pas la barrière hématoencéphalique), une sécheresse buccale
et de la constipation.
n L’évolution des effets
du traitement
◗ Aggravation des troubles
et stabilisation
L’expression clinique de la MP finit
par s’aggraver en raison des troubles
moteurs dopa-induits et de l’évolution
de l’affection, avec apparition de
signes de dopa-résistance (fluctuations motrices, dyskinésies, instabilité
posturale), au terme de la “lune de
miel” souvent prolongée plusieurs
années sous dopathérapie. À ce
moment, les artifices galéniques et
les associations de plusieurs médicaments concourent à mieux stabiliser les apports de dopamine et son
action dans le cerveau. La prescription d’agonistes dopaminergiques
ou de combinaisons d’inhibiteurs
enzymatiques permet de réduire les
apports en lévodopa en cas de survenue de dyskinésies.
◗ Jusqu’à la perte
de contrôle thérapeutique
Vient un temps où les traitements
ne peuvent plus agir puisque l’ensemble des neurones cibles des
médicaments a été détruit… Le traitement privilégie alors le nursing et
vise à suppléer aux difficultés à s’alimenter ou à prévenir les complications du décubitus (lire Savoir faire,
p.46). L’absence de régulation physiologique de la transformation de
la lévodopa en dopamine et la disparition progressive des neurones
producteurs de dopamine expliquent
que la concentration en dopamine
dans le cerveau finisse par ne plus
dépendre que de ses concentrations
plasmatiques et donc des apports
médicamenteux. L’apparition des
complications motrices iatrogènes
traduit une perte de contrôle thérapeutique de la maladie. Le traitement
ne devient efficace que de façon discontinue, d’où des variations de l’état
physique et psychique du patient,
voyant alterner des phases dites on
où le patient est équilibré et des
phases dites off, d’akinésie, où des
symptômes réapparaissent. Cet effet
on-off témoigne donc d’une sensibilité exacerbée des récepteurs dopaminergiques, qui répondent alors
par une loi du “tout ou rien” aux
variations rapides et incontrôlables
des taux en dopamine suivant les
prises de médicaments. Parmi ces
complications, il importe de distinguer les fluctuations (motrices et non
motrices) et les dyskinésies.
➜ Fluctuations motrices
Certaines fluctuations, prévisibles,
se traduisent par des phases de réapparition transitoire de signes de MP
(tremblement, ralentissement du
mouvement). Elles s’observent chez
plus de 85 % des patients après une
période de rémission entre cinq à
dix ans (période de “lune de miel”
d’autant plus courte que le malade
est jeune). L’intensité, très variable,
peut aller jusqu’à un blocage complet
de tout mouvement.
➲ Les fluctuations dites de “fin de
dose” reflètent la diminution de l’effet
des traitements. Elle se traduit
notamment la nuit, à distance de la
dernière prise de médicaments, par
des difficultés à se mouvoir au lit ou
à se lever. Le matin, au réveil, on
observe des spasmes musculaires
(dystonies) provoquant des postures
anormales prédominant aux pieds,
qui disparaissent après la première
prise de traitement en même temps
que les symptômes parkinsoniens.
➲ Les fluctuations on-off se traduisent
par une résurgence des symptômes
à des moments variables, indépendants de la prise des antiparkinsoniens: elles sont donc imprévisibles
et, de ce fait, très handicapantes. Elles
apparaissent très rapidement, parfois
en quelques secondes, pour dispa-
JANVIER 2016 - N° 321 - L’INFIRMIÈRE LIBÉRALE MAGAZINE
nnn
37
Cahier de
formation n° 86
raître aussi vite et sont plus rares que
les fluctuations de fin de dose.
➜ Fluctuations non motrices
Les fluctuations neurovégétatives
peuvent s’ajouter aux fluctuations
motrices : variations tensionnelles,
hypersudation et hypersialorrhée
(hypersalivation), pollakiurie et mictions impérieuses, troubles du transit
intestinal, douleurs musculaires,
paresthésies. On observe, de même,
des fluctuations psychiques avec
variations brutales dans l’humeur, la
vigilance, l’anxiété, les performances
cognitives, voire des hallucinations.
Ces variations du comportement sont
difficiles à vivre pour le malade et
son entourage.
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➜ Dyskinésies
Ces mouvements anormaux involontaires traduisent une stimulation
dopaminergique un peu trop importante. On distingue des dyskinésies :
➲ de milieu de dose, les plus fréquentes, survenant lors de l’effet
maximal du traitement. Elles s’observent au repos et s’intensifient lors
d’un mouvement volontaire ;
➲ de début et de fin de dose, souvent
associées aux symptômes parkinsoniens, lors du début ou de la fin
de l’effet d’une prise de médicament
antiparkinsonien.
Traitement
des troubles “satellites”
La prescription du traitement antiparkinsonien ne répond pas à toutes
les conséquences de la dégénérescence neuronale. Avec l’évolution
de la maladie, il est nécessaire de
lui associer plus ou moins rapidement d’autres types de traitement
visant à corriger – ou, du moins, à
réduire en sévérité – divers troubles
induits par la MP elle-même ou par
le traitement pro-dopaminergique.
n Les troubles dysautonomiques
Dominés par les complications urinaires, ils justifient l’administration
38
Le recours à l’apomorphine
L’apomorphine (Apokinon) est un agoniste dopaminergique. Administrée
par voie sous-cutanée (pompe à injection ou stylo injecteur utilisé par le
patient), elle permet une correction rapide de la symptomatologie. Elle est
administrée dans le traitement des fluctuations motrices sévères (périodes
de blocage impromptues de type on-off, dyskinésies invalidantes, akinésie
matinale prolongée), après échec des autres traitements. Son administration
expose notamment à des troubles digestifs imposant l’association à la
dompéridone. La dose utile varie de 0,2 à 5 mg et détermine la durée
d’action, comprise entre cinq-dix minutes et une heure. Les administrations
peuvent être réitérées dans la journée. L’impact de ce médicament finit
toutefois par s’épuiser en raison de l’évolution de la maladie.
Pour en savoir plus : (re)lire l’article sur la manipulation et les effets secondaires de la pompe à apomorphine dans notre
numéro 314 de mai 2015, p.44.
de médicaments anticholinergiques
atropiniques efficaces contre l’hyperactivité vésicale. La desmopressine
(Minirinmelt) est utile dans le traitement de la pollakiurie nocturne. Les
alpha-2 bloquants (indiqués normalement dans le traitement de l’hypertrophie bénigne de la prostate)
sont éventuellement prescrits, en
veillant au risque d’hypotension
orthostatique.
n Les troubles tensionnels
L’hypotension orthostatique est un
symptôme non moteur de la maladie
et peut être aggravée par les traitements. Des mesures simples en limitent les manifestations : port de bas
de compression, augmentation des
apports sodés, etc. Si besoin, il est
possible d’administrer des médicaments spécifiques dont notamment
la midodrine (Gutron), dont l’efficacité est avérée, ou des sympathomimétiques divers (heptaminol, etc.)
dont l’activité reste insuffisamment
documentée.
n Le syndrome algique
Des douleurs neuropathiques accompagnent tous les stades de la maladie:
leur traitement médicamenteux
demeure délicat (antidépresseurs
tricycliques, anticonvulsivants antalgiques, voire toxine botulique).
L’INFIRMIÈRE LIBÉRALE MAGAZINE - N° 321 - JANVIER 2016
n Les troubles digestifs
Les troubles digestifs (nausées, vomissements) observés notamment en
début de traitement antiparkinsonien
(et liés à un relatif excès de dopamine
périphérique, venant stimuler le centre
du vomissement de l’area postrema)
sont prévenus ou traités par la prescription d’un antihistaminique ou de
dompéridone (Motilium). D’autres
troubles digestifs, tels que la constipation, le reflux gastroœsophagien,
le ralentissement de la vidange gastrique, sont dus à la maladie. Ils peuvent
réduire l’absorption des médicaments.
n Les troubles du sommeil
Liés à la maladie par modification de
la structure du sommeil, compliqués
par la gêne induite par les symptômes
moteurs, ils relèvent d’interventions
sur l’hygiène de vie (restauration d’un
rythme circadien convenable) et d’une
adaptation du schéma d’administration
de la dopathérapie – et non de la prescription d’hypnotiques. Un antidépresseur sédatif (amitriptyline, miansérine, mirtazapine) peut être utile. On
constate assez souvent des troubles
du sommeil paradoxal, se manifestant
par des rêves agités, à signaler.
n Les signes d’allure psychotique
Également appelés “psychose dopaminergique”. La survenue d’hallu-
La maladie de Parkinson
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cinations (auditives, visuelles, tactiles)
et celle de troubles du comportement
à type paranoïaque d’origine iatrogène (hyperdopaminergie) n’est pas
exceptionnelle : elle relève d’une
adaptation posologique et non de la
prescription d’antipsychotiques
(ceux-ci sont en effet tous des antidopaminergiques qui aggravent
donc la MP: seule la clozapine, Léponex, fait exception, mais son usage
est limité en raison de sa toxicité
hématologique avec risque d’agranulocytose, et elle ne peut être prescrite que par un spécialiste: psychiatre, neurologue ou gériatre, sous
surveillance particulière).
n Les troubles de l’humeur
Observé chez au moins 50 % des
patients, un trouble de l’humeur à type
de dépression sera traité de façon
conventionnelle. Les troubles anxieux
et l’hyperémotivité sont aussi fréquemment retrouvés et peuvent nécessiter
une prise en charge spécifique (psychologue ou séances de thérapies
comportementales et cognitives).
n La démence
Les patients parkinsoniens et déments
(notamment dans l’association Parkinson et Alzheimer) posent des problèmes thérapeutiques délicats: les
agonistes dopaminergiques comme
les anticholinergiques aggravent les
signes de confusion mentale.
Traitements non
pharmacologiques (3)
Je cote à la
nomenclature
Prise en charge
de Parkinson
n La neurostimulation
intracérébrale
Également appelée “stimulation cérébrale profonde”, la neurostimulation
agit sans léser la zone cérébrale concernée. Elle est désormais couramment
pratiquée dans des centres spécialisés,
où elle bénéficie d’un recul d’une trentaine d’années. Cette technique ne
guérit pas la maladie mais permet de
réduire la dose des médicaments. Toutefois, elle ne concerne qu’un nombre
limité de patients du fait de ses
contraintes: elle est proposée aux cas
difficiles à traiter par médicaments,
sensibles à la dopathérapie mais avec
des fluctuations motrices sévères et
sans signes axiaux (instabilité posturale,
troubles de l’élocution, etc.) trop prégnants, chez les sujets âgés de moins
de 70 ans, sans troubles cognitifs ou
psychiatriques ni affection évolutive
sévère associée. La stimulation améliore les troubles moteurs et supprime
les fluctuations. En revanche, elle reste
peu efficace sur les signes axiaux et
n’empêche pas la maladie d’évoluer.
L’opération, qui dure environ six heures,
consiste à implanter symétriquement
par deux orifices percés au sommet
Question de patient
Pourquoi est-il impossible de traiter les nausées par du Primpéran?
Nausées et vomissements ne sont pas traités par des antagonistes
dopaminergiques actifs au niveau du cerveau comme
le métoclopramide (Primpéran) car ils exposent à un risque
d’interaction pharmacologique: leur action est l’inverse de celle
des médicaments antiparkinsoniens. Il est donc préférable
de recourir à la dompéridone (Motilium) qui, quant à elle, ne franchit
que peu la barrière hémato-encéphalique et n’agit donc pas dans
le cerveau: il n’y a donc pas risque d’interaction pharmacologique.
Mais après avoir pesé le pour et le contre: attention aux effets
indésirables cardiaques graves, la dompéridone faisant l’objet
d’une surveillance renforcée des autorités (lien: bit.ly/1ArdwCi ).
Parmi les actes infirmiers qui peuvent
intervenir dans la prise en charge
de Parkinson, citons la pompe à
apomorphine, considérée comme
une perfusion :
➲ pose de la pompe et surveillance
sur la journée (forfait AMI 14),
➲ retrait de la pompe (forfait AMI 5),
➲ intervention dans la journée de façon
exceptionnelle, pour “acte
intermédiaire à la demande du patient”
(forfait AMI 4,1 ; il est conseillé alors de
télétransmettre en pièce jointe de
l’acte une note manuscrite le justifiant).
du crâne deux électrodes dans la zone
malade, de chaque côté du cerveau.
Les électrodes sont reliées à un stimulateur inséré sous la peau. Les effets
indésirables faisant suite à l’intervention
(hémorragies, infections) restent rares.
Des réglages ultérieurs sont nécessaires
pour s’adapter à la progression de la
maladie; de plus, une intervention est
nécessaire pour changer la pile (tous
les cinq à sept ans environ). La
recherche vise désormais à stimuler
d’autres régions du cerveau.
n Les thérapies en voie
d’expérimentation
Sont testées des thérapeutiques
reposant sur de nouveaux concepts,
comme des greffes intracérébrales
de cellules fœtales ou l’administration de facteurs neurotrophiques.
La thérapie génique, qui reproduit
les effets inhibiteurs d’une stimulation intracérébrale et utilise comme
vecteur un adénovirus, a été testée
avec succès. <
(1) Parmi nos sources, l’Institut des neurosciences cliniques de
Rennes, 2015.
(2) DAT-scan: imagerie cérébrale fonctionnelle proche de la tomoscintigraphie, utilisée pour différencier un tremblement essentiel
d’un tremblement rentrant dans le cadre d’un syndrome parkinsonien
(maladie de Parkinson, atrophie multisystématisée et atrophie
multisystématisée progressive).
(3) Sur la prise en charge non médicamenteuse, et notamment
l’accompagnement du patient dans sa vie quotidienne, lire aussi
le deuxième item du Savoir faire, p.46.
JANVIER 2016 - N° 321 - L’INFIRMIÈRE LIBÉRALE MAGAZINE
39
Cahier de
formation n° 86
Savoir faire
L’Idel intervient généralement à un stade avancé de la maladie, quand le patient est âgé
et/ou dépendant, notamment pour administrer les médicaments et surveiller leurs effets,
effectuer des soins d’hygiène, mais aussi trouver des solutions pragmatiques visant
à préserver l’autonomie du patient, repérer ses besoins et ceux de ses proches.
Surveiller complications
et effets secondaires
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Mme D., 76 ans, est traitée
par agoniste dopaminergique
et L-Dopa. Son époux lui donne
ses médicaments. Au cours
de votre dernière visite pour
des soins d’hygiène, vous avez
observé un comportement étrange
de la part de Mme D. Elle range
et collectionne de façon
obsessionnelle des taille-crayons.
Son époux vous demande si ce
comportement est dû à la maladie.
Si ces troubles sont sans gravité,
ils ne doivent pas être pris à la légère.
Il pourrait s’agir d’effets indésirables
du traitement, en particulier si
ces comportements n’existaient pas
avant ou s’ils se sont aggravés.
Certes, ce comportement ne
s’apparente pas à de graves effets
secondaires comme des achats
incontrôlés ou une addiction
aux jeux, connus mais tabous, et aux
conséquences potentiellement
graves… Mais il suggère néanmoins
un problème de traitement, qu’il
convient de signaler au médecin
et au neurologue lors de la prochaine
consultation, pour réévaluer
ou modifier si nécessaire les doses
ou changer de médicament.
RESTER VIGILANT
Le malade parkinsonien est atteint,
d’une part, par les signes propres à
la maladie, évolutive, avec des troubles
40
cognitifs ou de l’humeur (dépression)
qui lui sont associés, et, d’autre part,
par les complications motrices liées
à la dopathérapie. L’Idel, en première
ligne, est attentive à ces signes qu’elle
pourra observer ou qui lui seront rapportés par le patient ou ses proches.
➲ avec des aliments protidiques (œuf
battu, gruyère râpé, lait en poudre) ;
➲ avec des aliments riches en graisse
(beurre, crème fraîche, huile, mascarpone, chantilly) ;
➲ avec des féculents (pâtes à potage,
purée... mais pas de riz ni de semoule
en cas de trouble de déglutition) ;
➲ avec des produits sucrés (sucre,
miel, crème de marron, confiture,
gelée...), sauf si le patient a tendance
à être somnolent ou hypotendu.
Prévenir la perte de poids
Éviter la constipation
(troubles de la déglutition) La constipation touche six à sept perLe poids peut évoluer au cours de la
maladie. Une perte de poids est possible notamment en raison d’une
baisse de la consommation alimentaire du patient (difficulté à avaler,
fatigabilité à la mastication, modification du goût, de l’odorat, de l’appétit, troubles digestifs...) ou de l’augmentation des dépenses énergétiques
liées à la maladie.
Dans le cas d’une perte de poids,
deux solutions sont envisageables.
La première est de fractionner les
prises :
➲ en respectant les trois repas avec
plats cuisinés et en décalant les desserts
dans les deux heures qui suivent;
➲ en instaurant des collations légères
(laitages, fruits, compotes) à 10, 16
et 22 heures ;
➲ en mangeant dès que la faim ou
l’envie se fait sentir.
La deuxième solution est d’enrichir
systématiquement les plats :
L’INFIRMIÈRE LIBÉRALE MAGAZINE - N° 321 - JANVIER 2016
sonnes atteintes de la maladie de
Parkinson sur dix (contre deux à trois
sur dix dans la population générale).
Des conseils peuvent aider le patient:
➲ boire au moins 1 litre ou 1,5 litre
de liquide par jour (si possible des
eaux riches en magnésium) ;
➲ consommer des fibres tous les jours
(fruits et légumes cuits et crus,
légumes secs, fruits secs, fruits oléagineux, pains et céréales complets
ou semi-complets, son d’avoine à raison d’une cuillère à soupe par repas);
➲ conserver une activité physique
régulière ;
➲ pratiquer tous les jours un automassage abdominal dans le sens du
transit intestinal, c’est-à-dire dans
le sens d’une aiguille d’une montre.
Il est possible de le réaliser lors de
séances de kinésithérapie ;
➲ conserver un rituel: choisir chaque
jour un moment calme de la journée
pour aller aux toilettes.
La maladie de Parkinson
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Surveiller
certains paramètres
➲ La douleur (1) est spontanément peu
évoquée par les malades et peu prise
en charge. Pourtant, 70% des malades
parkinsoniens souffrent de douleurs
chroniques. À cause de la maladie de
Parkinson, toutes les douleurs sont
perçues de façon plus intense, qu’elles
soient liées ou non à la maladie. De
plus, les douleurs neuropathiques
sont très fréquentes (30 %) et font
partie des symptômes de la maladie.
➲ La somnolence est fréquente, elle
est due à plusieurs facteurs: à la maladie, qui induit des troubles du sommeil et des symptômes moteurs
gênant la mobilité, et à une mauvaise
hygiène de vie. Elle est aggravée par
les agonistes dopaminergiques. Facteur de risque d’accidents en conduite
automobile ou de la vie courante
(chutes), elle doit être signalée au
médecin traitant.
➲ Les complications motrices sont
des fluctuations de la motricité liées à
la pulsatilité dopaminergique qu’entraîne la prise fractionnée de lévodopa,
souvent au moins quatre prises. Ces
complications se manifestent d’abord
par un retour des symptômes en fin
de dose, soit environ quatre à cinq
Point de vue
« Une prise de poids fréquente »
Corinne Belmudes, déléguée du Comité France Parkinson,
(Haute-Garonne), malade depuis seize ans
« On en parle peu, mais de nombreux cas de prise de poids sont rapportés
chez le patient jeune traité par agoniste dopaminergique, médicament
qui peut provoquer des effets secondaires de type addictions alimentaires.
Souvent, le grignotage compulsif est accentué par une “faim émotionnelle”
ou par une faim “physiologique” associée à une alimentation irrégulière
et insuffisante lors des principaux repas. Généralement enclin à mal dormir,
le patient peut être amené à grignoter lorsqu’il se lève la nuit: dans ce cas,
si le sommeil ne peut pas facilement être équilibré, il peut lui être conseillé
de prévoir à l’avance des en-cas sains pour la nuit. Toutes les stratégies
diététiques et psychologiques permettant de perdre du poids doivent être
envisagées. Il faut insister sur la nécessité absolue de pratiquer une activité
physique régulière en complément et attirer l’attention du patient sur
l’impact nocif de la prise de poids à terme sur la mobilité. »
heures après la prise, ainsi que des
akinésies (difficultés à effectuer certains
mouvements) matinales liées au
manque de traitement au réveil. Puis
les fluctuations d’effet de la dopathérapie se multiplient avec l’augmentation
du nombre de prises de traitement, et
se compliquent de dyskinésies (mouvements involontaires imputables à
un surdosage), au début peu gênantes
mais devenant invalidantes avec l’évo-
Témoignage
« Ça devient noir et je tombe »
Un journaliste qui a connu Cavanna témoigne de la maladie
dont souffrait l’écrivain, décédé en 2014 à l’âge de 90 ans
« Son écriture s’en ressent. Elle est tellement minuscule par endroits
qu’elle est indéchiffrable. (…) Cavanna multiplie les pépins, à la suite de
chutes liées à Parkinson. “Par moments, c’est comme une panne de courant.
Ça devient noir et je tombe.” Il aligne les séjours à l’hôpital, puis en maison
de repos. 2012 et 2013 seront une longue litanie de rendez-vous ratés et
de fractures du col du fémur. Lui, le marcheur, souffre. (…) Cavanna a une
nouvelle panne de secteur au moment de donner à manger à son chien.
“Je vois tout en noir et je tombe.” Il est tombé, s’est fracassé le nez, le fémur
et le crâne. (...) Il l’a écrit dans une de ses dernières chroniques dans
Charlie. Son visage est bleui. Il ne veut pas que je le filme dans cet état. »
Extraits de Mohicans, de Denis Robert, Julliard, 2015 (lire aussi la chronique de ce livre p.66).
lution de la maladie. Enfin, on peut
retrouver des effets on-off, fluctuations
brutales sans rapport avec la prise de
traitement, signe de la dénervation
dopaminergique (lire p.37).
À noter : le rôle du patient, de l’entourage et de l’Idel sont très importants à tous les stades, en décrivant
précisément les variations d’état du
patient et leurs horaires de survenue,
pour faciliter l’adaptation du traitement par le neurologue. Pour cela, il
est nécessaire de savoir différencier
tous les symptômes de la maladie.
➲ Les médicaments pro-dopaminergiques (lévodopa, agonistes) exposent
à des troubles graves du comportement avec survenue possible de compulsions et de répétitions (dépendance
aux jeux, comportements répétitifs,
achats compulsifs, hypersexualité)
favorisés par des doses élevées et l’association de plusieurs d’entre eux. Ces
troubles sont généralement réversibles
après la diminution des doses ou l’arrêt
du traitement dopaminergique (2). Les
troubles psychocognitifs liés aux traitements antiparkinsoniens peuvent
aussi se traduire par des hallucinations
(visuelles, auditives, tactiles) et une
JANVIER 2016 - N° 321 - L’INFIRMIÈRE LIBÉRALE MAGAZINE
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41
Cahier de
formation n° 86
confusion mentale. En fréquentant le
domicile, l’Idel peut identifier ces troubles, les évoquer avec le patient et ses
proches et les signaler rapidement aux
autres professionnels du soin. Attention, les patients ont tendance à masquer leurs troubles compulsifs.
Point de vue
« La mauvaise observance,
un problème d’environnement »
Céline Arcari, IDE en ETP (ETPark), Centre expert Parkinson,
CHU de Toulouse (Haute-Garonne)
« Tout patient est censé respecter les horaires de prise de médicaments
prescrits par le médecin. L’éducation thérapeutique du patient et de son
entourage sur cet aspect est très importante. Si le patient vit seul, on peut
mettre en place un dispositif d’alarme pour lui indiquer l’heure des prises.
Il faut aussi tout faire pour que les médicaments soient à sa portée.
Qu’il puisse y avoir accès s’il est bloqué, par exemple. Sans parler de
la ponctualité des Idels, qui est fondamentale. Cela peut paraître ridicule
de le rappeler, mais nous savons que les traitements sont souvent donnés
avec retard, parfois même en milieu hospitalier ou dans les Ehpad. »
CONTRIBUER À
LA BONNE OBSERVANCE
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➲ La plupart des patients suivis à domicile sont sous traitement par L-Dopa
et agonistes dopaminergiques. L’administration de la L-Dopa se traduit
par des fluctuations de l’état moteur
du patient dues à sa demi-vie très courte
et aux variations de concentration dans
le cerveau. D’où l’importance de bien
respecter les doses et les horaires
d’administration prescrits et les augmentations progressives lors de la mise
en place du traitement pour éviter
notamment les fluctuations motrices.
« L’Idel joue un rôle déterminant dans
l’éducation thérapeutique en expliquant
au patient et à son entourage pourquoi
il est essentiel de bien respecter les
horaires des prises, rapporte Corinne
Belmudes, déléguée du comité France
Parkinson Haute-Garonne, elle-même
atteinte de la maladie depuis seize ans.
Elle vérifie la bonne observance du traitement et peut éventuellement proposer
des systèmes d’alarme – par téléphone,
pilulier électronique... – pour aider le
patient à ne pas oublier son traitement. »
➲ Si le patient présente des nausées
ou des vomissements, il est préférable
de prendre les antiparkinsoniens (agonistes et L-Dopa) pendant le repas ou
de les associer à une collation. Sinon,
c’est l’heure de prescription qui prime
car elle est en lien avec les symptômes.
➲ Les formes LP ne doivent être ni
ouvertes ni écrasées. Ce point est à
vérifier auprès des patients qui ont
des problèmes de déglutition ou qui
voudraient couper en deux ou écraser
leur médicament pour mieux l’avaler.
➲ Les traitements antiparkinsoniens
Question de patient
Le médecin m’a conseillé de tenir un carnet de surveillance.
N’est-ce pas contraignant?
Lorsque la maladie évolue, il faut tenir un carnet de surveillance afin
d’informer précisément le neurologue de l’action du traitement mis
en place. En effet, les complications causées par les médicaments
imposent de respecter l’horaire de prise des traitements: c’est à ce prix
que la mobilité demeure optimisée. Ce suivi requiert une certaine
“discipline” et des horaires réguliers fixés par le neurologue. Celui-ci
vous conseille mieux si vous décrivez très précisément vos journées,
vos symptômes et vos souhaits. Le carnet permet de faire un compte
rendu précis de la situation au regard des prises de médicaments.
Le suivi des traitements peut aussi être facilité par un pilulier sonneur,
par une application ou un rappel programmé sur le téléphone mobile.
42
L’INFIRMIÈRE LIBÉRALE MAGAZINE - N° 321 - JANVIER 2016
ne doivent jamais être stoppés,
encore moins brutalement. Le syndrome de sevrage susceptible de survenir est similaire au syndrome malin
des neuroleptiques (fièvre inexpliquée,
sueurs, pâleur, rigidité musculaire,
détresse respiratoire...). Il peut nécessiter une hospitalisation en urgence.
➲ Le patient doit respecter la fréquence des consultations chez le
médecin (au minimum tous les trois
mois chez le médecin traitant en l’absence de complications, et tous les six
mois chez le neurologue). Il doit noter
précisément les symptômes gênants
et leur heure de survenue pour que
le neurologue puisse adapter au mieux
le traitement. L’Idel peut l’y aider.
➲ Il convient aussi d’éduquer le
patient et son entourage à consulter
en cas de comportements inhabituels (troubles addictifs donc, mais
aussi somnolence diurne, troubles
de l’équilibre, hypotension orthostatiques et chutes). <
(1) Il existe deux grands types de douleurs en rapport avec la maladie
de Parkinson: des douleurs mécaniques périphériques et des douleurs
neuropathiques centrales. Les symptômes moteurs de la maladie
seraient directement à l’origine des douleurs périphériques, qui résulteraient d’un excès de nociception. Les douleurs neuropathiques
centrales seraient liées à des modifications fonctionnelles des mécanismes de transmission de la nociception secondaire aux lésions de
la maladie. Les douleurs liées à la maladie sont volontiers intermittentes,
à type de crampes, de contractures ou de brûlures, souvent liées
aux fluctuations de dopamine en début et surtout en fin de dose.
(2) Point d’information de l’ANSM sur les “Troubles du comportement observés avec des médicaments dopaminergiques indiqués
essentiellement dans la maladie de Parkinson ou le syndrome
des jambes sans repos”, juillet 2009 (lien : bit.ly/1lnrO0x).
La maladie de Parkinson
Médicaments antiparkinsoniens
Dénomination
commune
Présentations
et dosages
Spécialité
Posologie moyenne
d’entretien
À retenir pour l’administration et la surveillance
ANTICHOLINERGIQUE
bipéridène
Akineton
●
Comprimé LP 4 mg
4 à 8 mg/j
➜ Prise matinale unique, en dehors des repas.
➜ Éviter toute interruption brutale du traitement.
➜ Prudence en cas de conduite automobile: risque
de somnolence et de troubles de l’accommodation.
trihexyphénidyle Artane
●
Comprimé 2 mg
Comprimé 5 mg
● Soluté buvable 0,4%
●
●
Soluté injectable
IM 10 mg
Parkinane LP
●
●
Gélule LP 2 mg
Gélule LP 5 mg
4 à 10 mg/j
➜ Éviter toute interruption brutale du traitement.
➜ Prudence en cas de conduite automobile: risque
de somnolence et de troubles de l’accommodation.
5 à 30 mg/j
4 à 20 mg/j
➜ Éviter toute interruption brutale du traitement.
➜ Prudence en cas de conduite automobile: risque
de somnolence et de troubles de l’accommodation.
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DOPATHÉRAPIE: LÉVODOPA + INHIBITEUR(S) ENZYMATIQUE(S)
lévodopa
+ bensérazide
Modopar
●
lévodopa
+ carbidopa
Sinemet
●
Duodopa
●
Stalevo
●
lévodopa
+ carbidopa
+ entacapone
Gélule 50/12,5 mg
Posologie
strictement
Gélule 100/25 mg
● Gélule 200/50 mg
individuelle
● Comprimé dispersible
100/25 mg
● Gélule LP 100/25 mg
●
Comprimé sécable
100/10 mg
● Comprimé sécable
250/25 mg
● Comprimé LP
100/25 mg
● Comprimé LP
200/50 mg
Gel intestinal
Sachet 100 ml
20/5 mg/ml
●
Comprimé
50/12,5/200 mg
● Comprimé
75/18,75/200 mg
● Comprimé
100/25/200 mg
● Comprimé
125/31,25/200 mg
● Comprimé
150/37,5/200 mg
● Comprimé
175/43,5/200 mg
● Comprimé
200/50/200 mg
3 à 8 cp/j
de Sinemet 250 mg
ou
2 à 3 cp/j
de Sinemet LP
➜ La forme dispersible facilite l’observance pour les
patients ayant des troubles de la déglutition: elle
raccourcit, prise à jeun, le délai de déblocage par rapport
à la forme standard.
➜ Suspension buvable: à consommer dans la demi-heure
suivant sa préparation.
➜ Les régimes hypoprotidiques favorisent l’absorption
digestive de la lévodopa.
➜ Ne pas ouvrir ni croquer les gélules.
➜ Administrer au moins une demi-heure avant ou
une heure après les repas.
➜ Prudence en cas de conduite automobile: risque
de vertiges et d’accès soudains de sommeil.
➜ Veiller à avaler les comprimés sans les mâcher
ni les écraser.
➜ Les régimes hypoprotidiques favorisent l’absorption
digestive de la lévodopa.
➜ Administrer à la fin des repas, ou, au moins, avec
un peu de nourriture.
➜ Prudence en cas de conduite automobile: risque
de vertiges et d’accès soudains de sommeil.
2 à 6 ml/h mais
➜ Usage avec la seule pompe à Duodopa CADD-legacy
posologie strictement (CE 0473).
individualisée
➜ Cassettes à usage unique ne devant pas être utilisées
plus d’une seule journée (seize heures au maximum).
➜ Ne jamais réutiliser une cassette ouverte.
➜ Restituer les cassettes vides ou non utilisées
à la pharmacie hospitalière pour destruction.
1 à 10 cp/j,
avec possibilité
de combiner
les dosages
➜ Les régimes hypoprotidiques favorisent l’absorption
digestive de la lévodopa.
➜ Ne pas fractionner les comprimés.
➜ Ne prendre qu’un seul comprimé de Stalevo par prise.
➜ Prudence en cas de conduite automobile: risque
de vertiges et d’accès soudains de sommeil.
➜ Coloration de l’urine en brun-rouge (entacapone).
nnn
JANVIER 2016 - N° 321 - L’INFIRMIÈRE LIBÉRALE MAGAZINE
43
Cahier de
formation n° 86
DC
Présentations
et dosages
Spécialités
Posologie moyenne
d’entretien
À retenir pour l’administration et la surveillance
INHIBITEURS ENZYMATIQUES: INHIBITEURS DES MONOAMINES OXYDASES (IMAO)
rasagiline
Azilect
●
Comprimé 1 mg
1 mg/j
➜ Une prise quotidienne, pendant ou en dehors des repas.
➜ Prudence en cas de conduite, bien que l’effet de la
rasagiline sur l’aptitude à la conduite n’ait pas été étudiée.
© Espaceinfirmier.fr, Initiatives Santé 2016
sélégiline
Déprenyl
●
5 à 10 mg/j
Otrasel
●
1,25 mg/j
Comprimé sécable
5 mg
Lyophilisat oral
1,25 mg
➜ Administration en une prise matinale ou en deux prises,
au petit-déjeuner et au déjeuner.
➜ Prudence en cas de conduite: risque d’étourdissements.
➜ Laisser dissoudre sur la langue la matin, cinq minutes
au moins avant le petit-déjeuner.
➜ Ne pas manger, boire ou se rincer la bouche pendant
cinq minutes après la prise du médicament.
➜ Ne pas pousser le lyoc à travers le blister, mais soulever
le film d’aluminium pour retirer le lyoc avec soin.
➜ Les comprimés non utilisés doivent être éliminés
trois mois après l’ouverture du sachet.
➜ Prudence en cas de conduite automobile:
risque d’étourdissements.
INHIBITEURS ENZYMATIQUES: INHIBITEURS DE LA CATÉCHOL-O-MÉTHYLTRANSFÉRASE (ICOMT)
entacapone
Comtan
●
Comprimé 200 mg
200 mg avec chaque
dose de dopathérapie,
sans excéder 2 g/j
tolcapone
Tasmar
●
Comprimé 100 mg
100 mg trois fois
par jour, toujours
en association
à la dopathérapie;
exceptionnellement
200 mg trois fois
par jour
➜ Prise indépendante de la réplétion gastrique.
➜ Prudence en cas de conduite automobile.
➜ Coloration de l’urine en brun-rouge.
➜ Prescription réservée aux spécialistes en neurologie;
médicament nécessitant une surveillance particulière
pendant le traitement (toxicité hépatique).
➜ Traitement de seconde intention.
➜ Prise indépendante de la réplétion gastrique.
➜ Première prise quotidienne associée à la première prise
de lévodopa; prises suivantes environ six puis douze heures
après cette première prise.
➜ Avaler les comprimés entiers (saveur très amère).
➜ Coloration de l’urine en jaune intense.
AGONISTE DOPAMINERGIQUE (VOIE INJECTABLE)
apomorphine
Apokinon
●
Stylo injecteur
1 mg/j puis plus si
prérempli 30 mg/3 ml besoin en fonction de
● Solution injectable SC
la symptomatologie
50 mg/5 ml
● Solution injectable SC
10 mg/5 ml
➜ L’administration ponctuelle d’apomorphine n’impose pas
de modifications du traitement de fond antiparkinsonien;
une perfusion sous-cutanée impose en revanche
une adaptation posologique générale.
➜ Veiller à l’entretien du stylo, et à ce qu’une personne
de l’entourage du patient soit capable de s’en servir.
➜ Modifier chaque jour le site de perfusion sous-cutanée.
➜ Risque important d’altération de la vigilance ou
de somnolence brutale.
➜ Pour la pompe, lire aussi notre n° 314 de mai, p. 44.
AGONISTES DOPAMINERGIQUES (VOIE ORALE)
44
amantadine
Mantadix
●
bromocriptine
Parlodel
●
Capsule 100 mg
Comprimé sécable
2,5 mg
● Gélule 5 mg
● Gélule 10 mg
L’INFIRMIÈRE LIBÉRALE MAGAZINE - N° 321 - JANVIER 2016
100 à 400 mg/j selon ➜ Prudence en cas de conduite: risque de nervosité
le stade de la maladie et de somnolence.
et l’association à
d’autres
antiparkinsoniens
10 à 30 mg/j
(monothérapie)
10 à 25 mg/j
(association à la
dopathérapie)
➜ Tolérance du traitement réduite par la consommation
d’alcool.
➜ Prudence en cas de conduite automobile:
risque de vertiges et d’accès soudains de sommeil.
La maladie de Parkinson
DC
Présentations
et dosages
Spécialités
Posologie moyenne
d’entretien
À retenir pour l’administration et la surveillance
AGONISTES DOPAMINERGIQUES (VOIE ORALE) (SUITE)
piribédil
Trivastal
●
pramipexole
Sifrol
●
●
●
Comprimé 20 mg
Comprimé LP 50 mg
150 à 250 mg/j
(monothérapie)
80 à 140 mg/j
(association
à la dopathérapie)
Comprimé 0,18 mg
Comprimé 0,70 mg
0,264 mg/j
à 3,3 mg/j
(forme base) en trois
prises quotidiennes
égales
●
Comprimé LP 0,26 mg
Comprimé LP 0,52 mg
● Comprimé LP 1,05 mg
● Comprimé LP 2,10 mg
Posologie identique en
une prise administrée
tous les jours
à la même heure
●
3 à 24 mg/j
●
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ropinirole
Requip
Requip LP
rotigotine
Neupro
Comprimé 0,25 mg
Comprimé 0,50 mg
● Comprimé 1 mg
● Comprimé 2 mg
● Comprimé 5 mg
●
●
Comprimé 2 mg
Comprimé 4 mg
● Comprimé 8 mg
●
●
Dispositif transdermique
2 mg/j
● Dispositif transdermique
4 mg/j
● Dispositif transdermique
6 mg/j
● Dispositif transdermique
8 mg/j
➜ Avaler les comprimés avec un demi-verre d’eau,
sans les croquer, en fin de repas.
➜ Possibilité d’endormissement soudain: prudence
en cas de conduite automobile.
➜ Prise avec de l’eau, au cours ou en dehors des repas.
➜ Passage possible immédiatement de la forme
à libération immédiate à la forme LP.
➜ Possibilité d’endormissement soudain: prudence
en cas de conduite automobile.
➜ Trois prises par jour, au cours de chacun des repas.
➜ Possibilité d’endormissement soudain: prudence
en cas de conduite automobile.
➜ Si le traitement est interrompu pendant un jour ou
plus, l’instaurer à nouveau selon le schéma d’initiation
décrit dans la notice.
Posologie identique
en une prise
administrée tous
les jours à la même
heure
➜ Prise avec ou hors des repas.
➜ Avaler les comprimés entiers, sans les mâcher,
les écraser ou les diviser.
➜ Passage possible immédiatement de la forme
à libération immédiate à la forme LP.
➜ Possibilité d’endormissement soudain: prudence
en cas de conduite automobile.
➜ Si le traitement est interrompu pendant un jour ou
plus, l’instaurer à nouveau selon le schéma d’initiation
décrit dans la notice.
Instaurée
➜ Changer le patch chaque jour à heure fixe.
progressivement
➜ Varier le site d’application à chaque fois.
(paliers de
➜ Ne pas utiliser un même site plus d’une fois toutes
2 mg/j/semaine).
les deux semaines.
Adaptée à chaque
➜ Veiller à ôter le patch préalablement à tout examen
patient sans excéder
par IRM ou à toute cardioversion (support à base
8 mg/j (monothérapie) d’aluminium).
à 16 mg/j (association
à la dopathérapie).
Sources : dictionnaire Vidal, édition 2015 (versions papier et électronique), documents des laboratoires.
Liste non exhaustive.
nnn
JANVIER 2016 - N° 321 - L’INFIRMIÈRE LIBÉRALE MAGAZINE
45
Cahier de
formation n° 86
Accompagner dans
la vie quotidienne
© Espaceinfirmier.fr, Initiatives Santé 2016
M. P. souffre de troubles moteurs
particulièrement violents: son
corps se balance de gauche à
droite, avec des mouvements
brusques et de grande amplitude.
Il s’est cassé dernièrement le bras
lors d’une chute en traversant le
long couloir de sa maison. En dépit
de la dangerosité de ses troubles
moteurs qui ont beaucoup évolué
ces derniers mois, il souhaite
demeurer le plus longtemps
possible à son domicile. De même,
son épouse n’envisage pas une
mise en institution de son mari.
Vous vous rapprochez de
sa kinésithérapeute qui continue
à le suivre pour améliorer la
coordination de ses mouvements
et de son équilibre. Ensemble,
en concertation avec votre patient
et son épouse, vous recherchez
des solutions pour préserver
son autonomie et le protéger
de nouveaux accidents.
Vous lui proposez d’utiliser
des genouillères et des coudières.
Depuis, il se sent plus rassuré
et retrouve un peu de confiance.
STIMULER LE PATIENT
POUR PRÉSERVER
SON AUTONOMIE
Les difficultés motrices qu’éprouve
le patient parkinsonien peuvent perturber l’accompagnant qui, souvent,
ne sait pas comment l’aider. Par exemple, l’impossibilité pour un proche
d’aider un patient à entrer dans la
cabine de douche en raison de la
lourdeur de sa jambe peut avoir des
conséquences en termes d’hygiène.
Il est aussi nécessaire de choisir le
moment où le patient se sent le mieux
possible sur le plan moteur pour effectuer certaines activités qui en seront
facilitées et donc plus agréables pour
46
tous, à l’image de la toilette, de la
kinésithérapie ou d’une promenade.
Initiation du mouvement
Certaines astuces peuvent débloquer
les phases off. Ainsi, l’Idel peut
conseiller au patient de lever haut le
genou au seuil d’une porte ou sur la
voie publique, quand il s’apprête à
traverser un passage piétons. « Pour
aider les patients à entrer dans les
cabines de douche, je leur demande
d’aller ouvrir le robinet d’eau chaude.
L’initiative du mouvement est ainsi
augmentée. L’objectif n’est plus centré
sur la jambe à soulever », explique
Joëlle Garnier, infirmière libérale à
Toulouse (Haute-Garonne).
Rééducation
Une rééducation fonctionnelle par
la kinésithérapie est, à un stade plus
avancé, capitale : elle permet d’assouplir les articulations et de traiter
les troubles ostéo-articulaires, de
solliciter la motricité volontaire (la
motricité automatique étant altérée),
de combattre les troubles trophiques
liés à l’akinésie et à la rigidité, de
développer les mouvements fins des
doigts comme le boutonnage, de travailler la marche, les transferts et la
gestion de l’inconfort physique
(exemple : changements de position
et lever/coucher dans le lit), l’équilibre, la posture et les risques de
chutes, et au final d’optimiser les
possibilités résiduelles d’autonomie.
Si nécessaire, le kinésithérapeute
travaille sur l’amélioration des capacités respiratoires. Des aides techniques (canne et déambulateur) relevant
d’une
évaluation
du
kinésithérapeute et du médecin peuvent être proposées. Elles sont prises
en charge sur prescription médicale.
L’INFIRMIÈRE LIBÉRALE MAGAZINE - N° 321 - JANVIER 2016
Activité physique
Au stade initial, seule puis éventuellement en complément de la kinésithérapie, la pratique d’une activité
physique ou d’exercices adaptés
(danse, yoga, qi gong, assouplissements, étirements, respiration, équilibre...) permet d’entretenir sa forme
physique et d’améliorer sa motricité.
« L’activité physique d’endurance très
régulière est très utile car elle est le
seul moyen de libérer naturellement
de la dopamine », rapporte Céline
Arcari, IDE en ETP auprès de patients
souffrant de Parkinson. Chez des
malades pratiquant régulièrement
une activité sportive, une plus grande
maîtrise de l’équilibre, une marche
facilitée et une diminution du nombre
de chutes ont été constatées.
CHOISIR DES
VÊTEMENTS ADAPTÉS
➲ Préférer des vêtements amples,
faciles à enfiler, si le patient se trouve
à un stade très avancé de la MP.
➲ Ne plus recourir aux chemises
et/ou pantalons avec boutonnière.
➲ Privilégier les gilets aux pull-overs.
➲ Choisir des chaussures à scratchs.
PRÉVENIR
ET DÉDRAMATISER
LES CHUTES
Aborder le sujet des chutes avec le
patient âgé permet de rendre moins
honteuse cette question qui peut
s’avérer taboue et particulièrement
angoissante. C’est ainsi le sens des
ateliers mis en place pour les patients
par les Idels de l’association Ailba,
et récompensés par le Trophée Idel
2015 (1). L’Idel peut aussi informer et
s’informer auprès du kinésithérapeute
et des ergothérapeutes, dans une
prise en charge pluridisciplinaire.
Faire appel
au kinésithérapeute
Son intervention a pour but de limiter, retarder ou éviter le risque de
La maladie de Parkinson
chute. Si le malade ne voit pas ce
professionnel, l’Idel en fait part au
médecin. Le kinésithérapeute peut
enseigner au patient comment se
relever, afin de limiter le traumatisme
d’une mise au sol prolongée, mais
aussi de réduire les éventuelles récidives. C’est très important pour
dédramatiser. Son rôle est aussi d’enseigner au patient des réactions
“parachutes” qui lui permettront de
se rattraper ou de se faire moins mal
en tombant.
Point de vue
« Contre le stress, donner de son temps »
Céline Arcari, IDE en ETP (ETPark), Centre expert Parkinson,
CHU de Toulouse (Haute-Garonne)
« Pour aider un patient gêné dans ses mouvements, les aidants comme
l’Idel doivent faire preuve de disponibilité, d’écoute, de douceur. Aux stades
évolués de la maladie en particulier, lorsqu’il se voit bloqué dans ses gestes,
le patient ressent une immense angoisse. S’il sent l’infirmière impatiente,
il peut se bloquer encore plus, paralysé par la peur de l’échec. L’anxiété
est un symptôme non moteur très fréquent de la MP et il faut faire attention
aux effets on-off, des variations brutales de l’état moteur, très fréquentes
aux stades avancés de la maladie (lire aussi Savoir, p.37). »
© Espaceinfirmier.fr, Initiatives Santé 2016
Aménager le domicile
Pour réaménager l’intérieur du domicile et sécuriser son environnement,
un ergothérapeute peut intervenir.
« Cette prestation est parfois proposée
gratuitement à l’hôpital, rapporte Céline
Arcari. Le patient peut également faire
appel à un spécialiste en ville, mais il
faut compter entre 150 et 200 euros. »
Globalement, certaines règles doivent
être respectées pour éviter les risques
de chute. L’agencement du mobilier
doit favoriser l’espace, des fauteuils à
assise haute et avec accoudoirs doivent
être privilégiés pour faciliter le relèvement des malades. Au sol, des revêtements type moquette sont préférables
pour éviter les glissades. Dans les
chambres (de préférence au rez-dechaussée), les descentes de lit sont à
proscrire, de même que les fils électriques qui traînent. Dans la salle de
bain, il convient de privilégier la douche
plutôt que la baignoire, prévoir des
tapis antiglisse et des barres d’appui.
De plus, choisir des chaussures ne
compliquant pas la marche.
NE PAS SOUS-ESTIMER
LES TROUBLES
DE LA DÉGLUTITION
En comprendre les causes
Dans la MP, les mouvements automatiques de la mastication sont ralentis.
Les aliments sont mal mastiqués et
peuvent être avalés “tout rond”. Si les
morceaux sont trop durs, trop gros
ou trop secs, ils risquent de se coincer
dans la gorge et bloquer la respiration.
Faire appel
à l’orthophoniste
Un orthophoniste (ou logopède) peut
être sollicité pour améliorer l’action
Question de patient
Mon mari a pour habitude de faire sa toilette dès son réveil. Dans la
pratique, c’est devenu très difficile: il est encore tout endormi, il n’arrive
pas à bouger, d’autant qu’il n’a pas encore pris ses médicaments.
Ne faudrait-il pas faire la toilette après la prise des médicaments?
Effectivement, il faut essayer de caler l’heure de la toilette au moment
de la journée où votre mari se sent le mieux. C’est vrai pour la toilette
mais aussi pour les repas et les rendez-vous chez le kinésithérapeute ou
les autres professionnels. On conseille d’organiser les rendez-vous et
les horaires de repas au moment où il se sent le mieux, souvent environ
une heure trente à deux heures après la prise des médicaments.
de déglutir, et aussi, par ailleurs, dans
les formes évoluées, pour favoriser
le contrôle volontaire du langage (le
contrôle involontaire étant défaillant)
et améliorer la respiration (des techniques spécifiques respiratoires et
laryngées sont proposées, comme la
méthode de LSVT, pour Lee Silverman Voice Treatment, du nom de la
première patiente Lee Silverman,
focalisée sur la seule phonation).
Améliorer la déglutition (2)
n En favorisant les conditions
de repas
➲ Fractionner les repas si fatigue.
➲ Favoriser la concentration (ne pas
regarder la télévision pendant le repas).
➲ Adopter une posture assise avec
la tête légèrement fléchie en avant.
➲ Utiliser des couverts plus ergonomiques, qui facilitent la prise et
le maintien dans la main (une fourchette tordue peut s’avérer utile...).
n En modifiant la texture
des aliments
Quand les difficultés de mastication
deviennent importantes, la texture
alimentaire doit être adaptée: détailler
les aliments, les hacher, les amalgamer
dans une sauce onctueuse. Éviter les
textures émiettées, non liées avec une
sauce. En cas de fausse route en ingérant des liquides, avec toux systéma-
JANVIER 2016 - N° 321 - L’INFIRMIÈRE LIBÉRALE MAGAZINE
nnn
47
Cahier de
formation n° 86
© Espaceinfirmier.fr, Initiatives Santé 2016
tique, l’eau gazeuse froide est très
pratique. Si les fausses routes persistent, l’eau épaissie faiblement sera
nécessaire. On trouve des poudres
épaississantes en pharmacie. Pour
s’hydrater, le patient peut aussi boire
des jus de fruits épais, type smoothie,
du yaourt liquide, mais aussi des
potages. L’eau gélifiée est utile quand
l’eau veloutée n’arrête pas les fausses
routes. Elle peut être préparée avec
des épaississants de cuisine, comme
le manioc, la maïzena, des feuilles de
gélatine, bien moins chers. « Les médicaments peuvent être donnés avec de
la compote fraîche. Mais il ne faut
jamais donner ceux contenant de la
L-Dopa avec des yaourts, les laitages
diminuant l’effet de la dopamine »,
avertit Céline Arcari.
n En utilisant des aides
Point de vue
« Trouver des solutions très concrètes »
Joëlle Garnier, infirmière libérale, Toulouse (Haute-Garonne)
« Il y a trente ans que je suis des patients parkinsoniens
à domicile. Lorsque la famille ou le patient me contacte, j’interviens
souvent au départ juste pour des soins d’hygiène, en général, deux
à trois fois par semaine. À ce stade, le malade est encore relativement
autonome. La maladie peut ainsi se stabiliser quatre à cinq ans, mais
il arrive un moment où elle franchit un palier et finit par évoluer.
Les troubles moteurs sont devenus importants et le patient est moins
autonome. La maladie devient alors trop lourde à gérer pour l’entourage.
À ce stade, j’interviens tous les jours, matin et soir, pour des soins
corporels et d’accompagnement. À cette occasion, je dois alors faire
preuve d’imagination pour trouver des solutions très concrètes afin
d’améliorer la vie au quotidien du patient. C’est au cas par cas que cela
se passe. Il n’y a jamais deux situations identiques. Pour accompagner
les malades, un seul secret: il faut les aimer, faire preuve de psychologie,
d’humanité. Soutenir l’entourage aussi. Les malades et leur famille
n’ont pas besoin d’une technicienne mais d’une personne qui les aide. »
techniques
La paille limite le volume du liquide
pris dans la bouche. Le verre échancré ou à large bord permet au nez
de rentrer dans le verre et évite ainsi
de lever la tête.
n En effectuant des exercices
de rééducation
Les exercices de mobilisation de la
langue, à partir de mouvements lin-
guaux, d’articulation de mots, en
variant rapidité et vélocité d’exécution, entretiennent la motricité
et améliorent les performances de
certains patients. L’utilisation de la
méthode LSVT peut aussi voir une
influence. Cette méthode de rééducation phonatoire demande une
production vocale à forte intensité.
Par la puissance de la voix sollicitée,
le patient souffrant de Parkinson
apprend à mieux contrôler ses muscles phonatoires. Une à trois
séances par semaine amélioreraient
les mouvements spontanés de la
langue et le temps de passage dans
le pharynx. <
(1) Pour en savoir plus sur ces ateliers de prévention des chutes,
lire notre numéro 317 de septembre, p.15, ou consulter la vidéo
sur le site saloninfirmier.fr (lien raccourci : bit.ly/1IzzZAV).
(2) Sur les troubles de la déglutition du sujet âgé, (re)lire aussi
notre article paru dans le numéro 313 d’avril 2015, p.46.
Centres experts et Maia: l’Idel au cœur des réseaux
L’exigeante prise en charge
thérapeutique de la MP
a conduit à la désignation,
en 2012, de Centres
experts régionaux,
dont le Plan maladies
neurodégénératives
2014-2019 vise à renforcer
la dynamique (lien :
bit.ly/1qSqfnm). Implantés
en CHU, ces pôles
regroupent neurologues,
IDE, orthophonistes,
psychologues… « Au-delà
48
des consultations, nous
organisons des programmes
de formation pour
les libéraux, rapporte
Céline Arcari, IDE en ETP
au Centre expert à Toulouse
(Haute-Garonne).
Nous comptons aussi nous
rapprocher des infirmières
libérales, alliées de choix
pour repérer de nouveaux
symptômes et surveiller
l’apparition d’effets
secondaires. »
L’INFIRMIÈRE LIBÉRALE MAGAZINE - N° 321 - JANVIER 2016
Encore mal connues,
les quelque 200 Maia
se doivent, elles, d’intégrer
les services d’aide et
de soins et d’optimiser les
actions des professionnels
et des aidants, dans le
champ de l’autonomie
(cf. www.cnsa.fr/
parcours-de-vie/maia).
Leurs “gestionnaires de cas”,
suivent les situations
“complexes” en trouvant
des solutions pour
un maintien à domicile
aussi durable et
“confortable” que
possible. Et ce, en lien
avec l’ensemble des
professionnels déjà en
place, dont les Idels, qui
repèrent toute situation
dont le maintien à domicile
est compromis en raison
d’un isolement, d’un
épuisement de l’aidant
ou de l’insuffisance
des aides ou des soins.
La maladie de Parkinson
• Pour retrouver
toutes nos informations
• Pour venir
discuter sur nos forums
Savoir plus
➲ Guides de la Haute Autorité
de santé (HAS)
“Maladie de Parkinson”, Guide du parcours
de soins (juin 2014); “Syndrome parkinsonien
dégénératif ou secondaire non réversible”,
Guide ALD n°16 (avril 2007); “La maladie
de Parkinson: critères diagnostiques
et thérapeutiques” (mars 2000).
www.has-sante.fr (raccourci Internet:
bit.ly/1LYypn5).
© Espaceinfirmier.fr, Initiatives Santé 2016
LIVRES
➲ La maladie de Parkinson
Cet ouvrage rend compte des avancées
des dernières années, en abordant tous
les aspects de cette pathologie. De nouveaux
chapitres dédiés aux troubles psychiatriques
et du comportement,
à l’éducation thérapeutique,
aux biothérapies,
à la reconnaissance comme
maladie professionnelle,
complètent cette
monographie. Il présente
les diverses stratégies
thérapeutiques actuelles
(médicamenteuses, chirurgicales,
rééducatives et orthophoniques).
Luc Defebvre, Marc Vérin, Elsevier-Masson,
240 pages, 3e édition, 2015.
➲ Traiter le Parkinson. Prise en
charge globale et multidisciplinaire
du patient parkinsonien
Les complications de
la maladie de Parkinson
justifient une prise en charge
individuelle, globale et
multidisciplinaire. Abordant
en détail les divers angles
de la maladie, ce guide très
exhaustif est destiné à
toutes les professions concernées: médecins,
infirmières, kinésithérapeutes, logopèdes,
ergothérapeutes, nutritionnistes,
psychologues, assistants sociaux,
pharmaciens, etc. Il intéressera les patients
et leur entourage par les nombreuses
suggestions permettant d’améliorer
leur quotidien.
Jean-Émile Vanderheyden, Dominique-Jean
Bouilliez, De Boeck, 458 pages, 2e édition, 2010.
cliquez
ASSOCIATIONS
➲ France Parkinson
Créée en 1984,
cette association a
pour but de favoriser
la recherche, soutenir
les malades et les
aidants au quotidien,
sensibiliser les pouvoirs
publics à la réalité de
la maladie, la faire connaître
du grand public. Sa boutique
(lien: bit.ly/1NRWWeW) propose
aussi des brochures et DVD grand public
qui peuvent servir aux professionnels de santé
(“Je découvre Parkinson”; “Guide des 10 clés
pour mieux comprendre”; “Orthophonie
(Parler, écrire, avaler). Exercices de rééducation
à pratiquer à domicile”; “Rééducation
et maladie de Parkinson”) ou encore
des témoignages (“Les oiseaux chantent
dans les buissons”; “Comment j’ai vécu
“ma” Parkinson”).
www.franceparkinson.fr, tél. 01 45 20 22 20.
➲ Fédérations
Certaines structures fédèrent plusieurs
associations. Elles peuvent orienter vers
les associations locales tout en livrant
des informations sur la maladie.
Les fédérations les plus importantes
sont la Fédération française des
groupements de Parkinsoniens (FFGP)
(www.parkinson.ffgp.net) et le Comité
d’entente et de coordination des
associations de parkinsoniens (Cecap).
Le Collectif Parkinson, qui regroupe France
Parkinson, l’association des groupements
de Parkinsoniens de la Loire, la Fédération
française des groupements de parkinsoniens,
le Cecap, Franche-Comté Parkinson
et Parkinsonia, met à disposition des malades
et de leurs proches un “kit” du nouveau
diagnostiqué (lien: bit.ly/1OdDZ6P).
www.espaceinfirmier.fr
COMITÉ
SCIENTIFIQUE
➲Geneviève Bridier,
infirmière libérale
à Villejuif (94)
➲Ève-Marie Cabaret,
infirmière libérale
à Ligny-Le-Ribault (45)
➲Marie-Claude Daydé,
infirmière libérale
à Colomiers (31)
➲Catherine Diamantidis,
infirmière libérale
à Pierre-Bénite (69)
➲Dominique Jakovenko,
infirmier libéral à SaintChristoph-les-Alès (30)
➲Christine Julien,
pharmacienne
et journaliste
➲Brigitte Lecointre,
infirmière libérale
à Nice (06)
➲Geneviève Beltran,
avocate au barreau des
Hauts-de-Seine (92)
comité scientifique
DOCUMENTS
➲ Chaque dossier de formation
est coordonné par Mathieu
Hautemulle, rédacteur en chef,
édité et monté par Julie Verdure
et Laure Cartigny, validé
systématiquement par un
spécialiste du thème choisi et relu
avant parution par l’un des
membres du comité scientifique.
✓Envoyez vos suggestions à
redaction-infirmiereliberale@
initiativessante.fr
JANVIER 2016 - N° 321 - L’INFIRMIÈRE LIBÉRALE MAGAZINE
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