Un rapport E/Vp ≤1,7 avait une sensibilité de 80 %
(intervalles de confiance : 56-94 %) et une spécificité de
100 % (intervalles de confiance : 59-100 %) pour prédire
des pressions de remplissage VG basses [25]. En utilisant
la même valeur seuil de 1,7, Bouhemad et al. [33] prédi-
saient une PAPO invasive ≥13 mmHg chez des patients
ventilés en postopératoire, mais avec une sensibilité net-
tement inférieure à celle observée chez nos patients [25].
Nous n’avons pas observé une meilleure précision
diagnostique avec l’utilisation d’indices Doppler combi-
nés (E/E’ latéral et E/Vp) comparés aux simples paramètres
Doppler pulsé. Ces résultats sont probablement liés au fait
que seulement 20 % de nos patients avaient une dysfonc-
tion diastolique VG identifiée par une vitesse maximale de
l’onde E’ à l’anneau mitral < 8 cm/s [37]. Ainsi, l’in-
fluence d’une anomalie de relaxation VG sur la vitesse
maximale de l’onde E est dans ce cas minime et réduit le
bénéfice diagnostique potentiel de combiner cette mesure
Doppler pulsé avec E’ ou Vp [14, 38, 39]. Cette hypothèse
a également été émise dans une étude concernant des
volontaires sains où la relation entre la vitesse maximale
de l’onde E mitrale et la PAPO invasive était la plus étroite
parmi tous les paramètres Doppler mesurés, y compris les
indices combinés E/E’ et E/Vp [39]. À l’inverse, ces indices
combinés semblent très utiles pour prédire les pressions de
remplissage VG en présence de cardiopathie sous-jacente
[40]. En effet, en raison des mécanismes physiopathologi-
ques complexes qui sous-tendent la relation entre les
variables Doppler et les pressions de remplissage VG,
aucun indice isolé ne permet d’évaluer de manière fiable
la PAPO chez tous les patients.
Applications cliniques
L’évaluation non invasive des pressions de remplis-
sage VG est indispensable dans toutes les circonstances
cliniques où une congestion veineuse pulmonaire est sus-
pectée à l’origine d’une insuffisance respiratoire aiguë ou
d’un échec de sevrage du respirateur.
Œdème aigu du poumon
Le diagnostic d’œdème pulmonaire cardiogénique re-
pose sur l’existence d’une élévation des pressions de
remplissage VG dans un contexte clinique évocateur et
non sur la présence d’une dysfonction systolique du VG
[6]. En effet, la fonction systolique VG peut être préservée,
voire augmentée, en présence d’un œdème pulmonaire
cardiogénique (par exemple, insuffisance mitrale aiguë
volumineuse). De même, une dysfonction systolique VG
peut être précocement observée chez un patient ventilé
pour un SDRA (par exemple, choc septique). Un algo-
rithme diagnostique applicable chez un patient ventilé
pour hypoxémie avec infiltrat pulmonaire bilatéral peut
être proposé (figure 1).
L’échocardiographie permet de quantifier une dys-
fonction systolique du VG et de la rapporter à une éven-
tuelle cardiopathie sous-jacente. Dans cette situation, la
pertinence clinique des anomalies identifiées doit être
soigneusement évaluée afin de déterminer leur imputabi-
lité dans l’œdème pulmonaire observé (par exemple, val-
vulopathie chronique). Par ailleurs, les dysfonctions sys-
tolique VG transitoires, même majeures, sont fréquentes
en réanimation [41, 42], notamment dans le choc septique
[43, 44]. Il faut en connaître l’existence et en déterminer la
pertinence pour l’indication clinique qui indique l’exa-
men échocardiographique.
Lorsque la fonction systolique VG est conservée et les
pressions de remplissage sont élevées, une insuffisance
cardiaque aiguë à haut débit doit être éliminée (figure 1),
en particulier une surcharge volémique iatrogène ou une
régurgitation valvulaire aiguë sévère [45]. L’absence de
dilatation des cavités cardiaques gauches constatée en
échocardiographie plaide en faveur d’une surcharge volé-
mique aiguë. Le niveau d’hypertension artérielle pulmo-
naire qui est évalué en Doppler continu à partir de l’insuf-
fisance tricuspide excède rarement 60 mmHg de
systolique car le ventricule droit ne peut pas générer des
pressions plus élevées en situation aiguë. Enfin, l’échocar-
diographie peut directement identifier la cause de la sur-
charge volémique aiguë du VG (par exemple, endocar-
dite, rupture de muscles papillaires ou de cordage mitral)
et en confirme la sévérité [6].
Lorsqu’une insuffisance cardiaque congestive ou à
haut débit ont été éliminées, le diagnostic d’exclusion face
à un œdème pulmonaire est la dysfonction diastolique
pure et sévère du VG (figure 1). Sa fréquence peut attein-
dre 38 % des patients hospitalisés pour insuffisance car-
diaque aiguë [46]. Cette situation clinique est générale-
ment rencontrée chez des patients âgés et hypertendus
admis en œdème pulmonaire suraigu dans un contexte de
poussée hypertensive [45]. Des critères diagnostiques
standardisés de dysfonction diastolique du VG ont été
récemment proposés [47]. Pour un rendement diagnosti-
que maximal, l’échocardiographie-Doppler doit être réa-
lisée le plus précocement possible, au mieux lorsque les
symptômes sont encore présents [6], car les pressions de
remplissage VG peuvent varier rapidement en réponse
aux variations de conditions de charge induites par le
traitement (diurétiques, dérivés nitrés, ventilation mécani-
que...) (figure 2). Dans ce contexte d’œdème pulmonaire
hypertensif à fonction systolique conservée, l’existence
d’un facteur déclenchant tel qu’un accès de fibrillation
auriculaire ou un remplissage vasculaire même minime
suggèrent l’existence d’une dysfonction diastolique VG
sévère [47]. L’éventualité d’une dysfonction systolique du
VG transitoire ou d’une insuffisance mitrale transitoire est
faible dans ce contexte clinique [48].
Échec de sevrage du respirateur
Le sevrage de la ventilation mécanique entraîne une
modification des conditions de charge du VG qui sont
mt cardio, vol. 3, n° 5, septembre-octobre 2007 391
Revue
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