97-103-DUFRESNE 19/11/07 11:15 Page 97 Vélocimétrie par images de particules dans un bassin d’orage ■ M. DUFRESNE1, J. VAZQUEZ2, A. TERFOUS3, A. GHENAIM4, J.-B. POULET5 Mots-clés : bassin d’orage, champ de vitesse tridimensionnel, vélocimétrie par images de particules (PIV). Key words: storm-water tank, three-dimensional velocity field, particle image velocimetry (PIV). 1. Introduction La directive européenne 2000/60/CE du 23 octobre 2000 impose la réduction des rejets polluants dans le milieu naturel. Les rejets urbains par temps de pluie (RUTP), qui représentent des débits d’eaux polluées très importants, doivent être traités pour respecter cet objectif réglementaire. Un bassin d’orage exploite le caractère essentiellement particulaire des RUTP [ASHLEY et al., 2004] en faisant décanter les matières solides transportées dans le réseau d’assainissement : les rejets polluants sont ainsi limités et le milieu naturel protégé. Cependant, le dimensionnement d’un tel bassin ou la réhabilitation d’un bassin de stockage en bassin de dépollution posent encore la difficulté de l’évaluation de l’efficacité de dépollution. Quelle quantité de particules sera décantée à l’intérieur du bassin pour un débit d’entrée donné ? Comment maximiser cette quantité ? Obtenir des réponses à ces questions est rendu malaisé par le caractère tridimensionnel de l’écoulement dans un bassin [STOVIN et SAUL, 1994]. L’utilisation de logiciels de « computational fluid dynamics » (CFD) apparaît comme un moyen très 1 Institut national des sciences appliquées de Strasbourg, 24 boulevard de la Victoire 67084 Strasbourg, France. Mél. : [email protected] 2 École nationale du génie de l’eau et de l’environnement de Strasbourg, 1 quai Koch BP 1039F 67070 Strasbourg, France. Mél. : [email protected] 3 Institut national des sciences appliquées de Strasbourg, 24 boulevard de la Victoire 67084 Strasbourg, France. Mél. : [email protected] 4 Institut national des sciences appliquées de Strasbourg, 24 boulevard de la Victoire 67084 Strasbourg, France. Mél. : [email protected] 5 Institut national des sciences appliquées de Strasbourg, 24 boulevard de la Victoire 67084 Strasbourg, France. Mél. : [email protected] utile de tester différentes géométries de bassin avant même sa construction et ainsi de choisir celle qui est la plus adaptée à la dépollution [ADAMSSON et al., 2005]. Le transport solide n’influençant pas l’écoulement en assainissement en raison de sa faible concentration [ASHLEY et al., 2004], la démarche est la suivante : la première étape est de simuler le champ de vitesse tridimensionnel à l’intérieur du bassin ; la seconde est d’utiliser ce champ de vitesse pour étudier le transport solide par une approche lagrangienne [STOVIN et SAUL, 1996]. La connaissance précise du champ de vitesse tridimensionnel à l’intérieur du bassin est ainsi le prérequis nécessaire à l’étude du transport solide. Afin de valider l’utilisation de la CFD pour obtenir le champ de vitesse tridimensionnel dans un bassin et ce, pour des conditions hydrauliques variées, une technique de vélocimétrie a été mise en place : il s’agit de la stereo-PIV (particle image velocimetry) [DANTEC, 2004]. Cette technique permet d’obtenir le champ de vitesse tridimensionnel dans des plans de l’écoulement. Cet article présente la mise en place et l’utilisation de la stereo-PIV dans le cas d’un pilote expérimental de bassin d’orage. 2. Dispositif expérimental 2.1. Description du pilote Le pilote expérimental est constitué d’un bassin rectangulaire de 1,80 m de long, de 0,76 m de largeur. Il est équipé d’un trop plein limitant la hauteur d’eau dans le bassin à 0,40 m. L’alimentation se fait par une pompe débitant entre 1 l/s et 7 l/s. Un débitmètre placé en entrée permet la mesure du débit total. Deux bacs de récupération, équipés chacun d’un capteur de hauteur d’eau à ultrasons, permettent le calcul des TSM numéro 10 - 2007 - 102e année Article disponible sur le site http://tsm.astee.org ou http://dx.doi.org/10.1051/tsm/200710097 97 97-103-DUFRESNE 19/11/07 11:15 Page 98 Étude Figure 1. Schéma de la boucle hydraulique débits déversés et conservés par une loi de seuil : la répartition du débit entre les deux sorties est ainsi connue. Un injecteur-mélangeur a également été installé ; il permettra l’injection et l’homogénéisation de la concentration en particules lorsque des mesures de transport solide seront effectuées dans le bassin. La figure 1 représente un schéma de la boucle hydraulique. La figure 2 présente une photographie du bassin d’orage. Dans le cas présenté, un déversement a lieu par le trop-plein du bassin. Figure 2. Photographie du bassin d’orage 2.2. Le dispositif PIV La vélocimétrie par images de particules (PIV) est une technique optique non intrusive de mesure de la vitesse. L’écoulement est ensemencé par des microparticules dont le comportement hydrodynamique 98 est supposé identique à celui du fluide. Le déplacement des particules est utilisé pour calculer la vitesse de l’écoulement. Si l’eau utilisée contient déjà des microparticules (c’est généralement le cas de l’eau potable), il n’est pas nécessaire de l’ensemencer. Plusieurs autres techniques de vélocimétrie existent, dont la plus répandue en bassin est la vélocimétrie Doppler [IMAM et al., 1983 ; McCORQUODALE et al., 1988 ; LYN et al., 1990 ; STOVIN et SAUL, 1994]. Cette technique permet la mesure des trois composantes de la vitesse à une fréquence élevée : les intensités turbulentes sont ainsi accessibles [LYN et al., 1990]. La PIV permet elle aussi de mesurer des vitesses instantanées, mais de façon discontinue. En effet, il faut attendre une durée de l’ordre de la seconde entre chaque mesure de vitesse instantanée. Cependant, le grand avantage de la PIV est de permettre l’obtention de la vitesse 3D dans un plan alors que la vélocimétrie Doppler ne permet que l’obtention de la vitesse en un seul point de l’écoulement [SONTEK, 2001]. De plus, ce « point » correspond en fait à un petit volume (de l’ordre du cm3) qu’il est parfois difficile de localiser exactement. La PIV apparaît donc comme une technique de vélocimétrie adaptée à la cartographie du champ de vitesse moyen dans un bassin. Un dispositif PIV nécessite une source laser plane et une caméra (deux pour la stéréo-PIV ou PIV 3D). La source laser éclaire un plan de l’écoulement à deux instants t et t+Δt. A chacun de ces instants, une image est acquise (figure 3). TSM numéro 10 - 2007 - 102e année 97-103-DUFRESNE 19/11/07 11:15 Page 99 Vélocimétrie par images de particules dans un bassin d’orage Figure 3. Exemple d’images acquises aux instants t et t+Δt Le déplacement des particules est déterminé par inter-corrélation entre les niveaux de gris de ces deux images. La vitesse locale bidimensionnelle de l’écoulement (figure 4) s’obtient alors par le rapport déplacement sur durée : La démarche présentée figure 4 est suivie pour chacune des deux caméras. Le champ de vitesse tridimensionnel est alors obtenu par combinaison entre les résultats bidimensionnels de chacune des deux caméras selon la figure 5. où M est le grandissement de la prise de vue. Cette grandeur est déterminée lors de la phase d’étalonnage qui consiste, en prenant une image d’une mire depuis chaque caméra, à calculer l’échelle de conversion entre l’écoulement et son image. Figure 5. La stéréovision de la PIV Figure 4. Exemple de champ de vecteurs vitesses obtenus après inter-corrélation entre les deux instants (dans cet exemple, des vecteurs jugés anormaux ont été corrigés en bleu) Les axes des caméras et le plan de l’écoulement étudié n’étant pas orthogonaux, des problèmes de netteté d’images peuvent être rencontrés. Afin d’assurer la netteté sur l’ensemble des images, on décale l’axe de chacune des caméras par rapport à celui de sa lentille jusqu’à ce que les images soient nettes ; il s’agit de la condition de Scheimpflug. C’est une condition mathématique angulaire, mais il est plus rapide de procéder empiriquement en modifiant l’angle entre la caméra et sa lentille et en observant le résultat à l’image. TSM numéro 10 - 2007 - 102e année 99 97-103-DUFRESNE 19/11/07 11:15 Page 100 Étude Figure 6. Observation d’une boucle de recirculation avec la PIV 3. Résultats La PIV a été utilisée pour retrouver qualitativement le comportement hydrodynamique à l’intérieur du bassin dans deux situations : un cas où un déversement par le trop-plein a lieu et un cas pour lequel tout le débit est évacué par la conduite de sortie. Dans les deux situations, le débit vaut 3 l/s. Dans le premier cas, aucun déversement n’a lieu par le trop-plein ; la hauteur d’eau est de l’ordre de 15 cm. Un test à la fluorescéine a permis de constater que l’écoulement est dominé par une boucle de recirculation asymétrique (horaire ou anti-horaire selon l’expérience) ; le sens de l’écoulement est présenté sur la figure 6. Ce comportement est semblable à celui qui a été observé par [STOVIN et SAUL, 1994] dans un bassin de dimensions voisines. La zone d’observation pour la PIV est un plan de 20*20 cm2, situé à 30 cm de l’entrée du bassin ; il est présenté en bleu sur la figure 6. La figure 7 présente le champ de vitesse tridimensionnel dans le plan d’observation. Les résultats de la PIV mettent en évidence deux courants de sens opposés séparés par une zone où la vitesse orthogonale est pratiquement nulle (en bleu clair). Ces résultats sont donc conformes avec les tests à la fluorescéine ainsi que les travaux présentés par [STOVIN et SAUL, 1994]. Dans le deuxième cas, le débit vaut également 3 l/s et un déversement a lieu par le trop-plein (hauteur d’eau supérieure à 40 cm). L’écoulement présente 100 Figure 7. Champ de vitesse obtenu sans déversement. Le bleu-violet correspond à des vitesses négatives (dans la direction perpendiculaire au plan) ; le rouge jusqu’au vert à des vitesses positives alors une forme symétrique : deux boucles de recirculation sont constituées par un jet central et deux jets de retour sur les côtés du bassin (tests à la fluorescéine). Les résultats obtenus par PIV sont présentés sur la figure 8 : le jet central est très clairement identifiable par un pic de vitesse en bleu-violet. Ces résultats sont cohérents avec ceux de [ADAMSSON et al., 2005] obtenus dans un grand bassin. 4. Conclusions et perspectives L’utilisation de la stéréo-PIV dans un pilote de bassin d’orage a été présentée. Cette technique de vélocimé- TSM numéro 10 - 2007 - 102e année 97-103-DUFRESNE 19/11/07 11:15 Page 101 Vélocimétrie par images de particules dans un bassin d’orage de la PIV avec un vélocimètre Doppler pourra permettre de justifier ou pas l’emploi de cette technique dans un bassin d’orage. Figure 8. Champ de vitesse tridimensionnel obtenu dans le plan d’observation lorsqu’un déversement a lieu par le trop-plein trie 3D a permis d’observer deux configurations d’écoulement pour un même débit de 3 l/s : une boucle de recirculation asymétrique dans le cas où aucun déversement n’a lieu et un jet central dans le cas contraire. Ces résultats sont conformes aux tests effectués avec de la fluorescéine. De plus, la PIV n’a pour l’instant été utilisée que sur une zone restreinte de l’écoulement (mire de dimensions 20*20 cm2). Afin de pouvoir cartographier le champ de vitesse dans l’ensemble du bassin, nous projetons d’utiliser une mire de mêmes dimensions que la section du bassin (75*45 cm2). Le déplacement du plan laser et des caméras longitudinalement dans le bassin permettra de cartographier des plans transversaux de l’écoulement ; la réunion des données des différents plans permettra d’aboutir au champ de vitesse tridimensionnel dans tout le bassin. L’étape suivante de cette étude est d’utiliser la PIV pour corroborer les résultats numériques obtenus par CFD afin, par la suite, d’étudier le transport solide en bassin d’orage. Remerciements Nous remercions le GEMCEA pour sa participation financière à ce projet de recherche. Les résultats actuels permettent de dire que la PIV est un moyen prometteur pour obtenir une cartographie précise du champ de vitesse tridimensionnelle dans un bassin. Cependant, ces résultats doivent être vérifiés quantitativement. La comparaison des résultats Nous remercions également Yoann André et Benjamin Frugier qui ont effectué leur travail de fin d’études (INSA de Strasbourg) sur la construction du bassin expérimental ainsi que sur la mise en place du dispositif de PIV. Bibliographie LYN D.A., RODI W., 1990. « Turbulence measurements in model settling tank ». Journal of Hydraulic Engineering 116, 1, 3-21. McCORQUODALE J.A., MOURSI A.M., EL-SEBAKHY I.S., 1988. « Experimental study of flow in settling tanks ». Journal of Environmental Engineering 114, 5, 1160-1174. SONTEK, 2001. « SonTek ADVField Acoustic Doppler Velocimeter: technical documentation ». SonTek. STOVIN V.R., SAUL A.J., 1994. « Sedimentation in storage tank structures ». Water Science and Technology 29, 1-2, 363-372. STOVIN V.R., SAUL A.J., 1996. « Efficiency prediction for storage chambers using computational fluid dynamics ». Water Science and Technology 33, 9, 163-170. ADAMSSON A., BERGDHAL L., LYNGFELT S., 2005. « Measurement and three-dimensional simulation of flow in a rectangular detention tank ». Urban Water Journal 2, 4, 277-287. ASHLEY R.M., BERTRAND-KRAJEWSKI J.-L., HVITEDJACOBSEN T., VERBANCK M., 2004. « Solids in sewers ». IWA Publishing, Scientific and technical report n°14. DANTEC, 2004. « FLOWMAP 3D-PIV System, Installation & User’s guide ». Dantec Dynamics. IMAM E., McCORQUODALE J.A., BREWTA J.K., 1983. « Numerical modelling of sedimentation tanks ». Journal of Hydraulic Engineering 109, 12, 1740-1754. TSM numéro 10 - 2007 - 102e année 101 97-103-DUFRESNE 19/11/07 11:16 Page 103 Vélocimétrie par images de particules dans un bassin d’orage Résumé Summary M. DUFRESNE, J. VAZQUEZ, A. TERFOUS, A. GHENAIM, J.-B. POULET. Vélocimétrie par images de particules dans un bassin d’orage L’utilisation de la vélocimétrie par images de particules dans un bassin d’orage est présentée. Cette technique permet de cartographier le champ de vitesse tridimensionnel dans des plans de l’écoulement. Deux configurations d’écoulement ont été observées avec la PIV : une boucle de recirculation et un jet central. Les résultats de ces observations montrent que dans le cas où aucun déversement n’a lieu par le trop-plein, l’écoulement est dominé par une boucle de recirculation asymétrique. Dans le cas d’un déversement par le tropplein, l’écoulement présente alors une forme symétrique : deux boucles de recirculation sont constituées par un jet central et deux jets de retour sur les côtés du bassin. M. DUFRESNE, J. VAZQUEZ, A. TERFOUS, A. GHENAIM, J.-B. POULET. Particle image velocimetry (PIV) in a storm-water tank Particle image velocimetry is used in a stormwater tank. With this technology, it is possible to obtain 3D velocities charts in the plan of the studied flow. Two different flows have been observed in the basin: an asymmetric circulation and a central jet. When no overflow occurs, an asymmetric circulation dominates the flow. When an overflow occurs, there are two symmetrical circulations in the basin and a central jet dominates. Equipements et solutions pour le traitement des eaux DÉGRILLAGE BROYAGE POMPAGE Une gamme complète pour tous les besoins de traitement des eaux dédiée aux stations d’épuration urbaines ou industrielles 87 rue des Poiriers - 78370 Plaisir Tél : 01 30 68 41 41 - Fax : 01 30 68 41 00 TSM numéro 10 - 2007 - 102e année www.axflow.fr E-mail : [email protected] 103