Vélocimétrie par images de particules dans un bassin d`orage

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Vélocimétrie par images de particules
dans un bassin d’orage
■ M. DUFRESNE1, J. VAZQUEZ2, A. TERFOUS3, A. GHENAIM4, J.-B. POULET5
Mots-clés : bassin d’orage, champ de vitesse tridimensionnel, vélocimétrie par images de particules (PIV).
Key words: storm-water tank, three-dimensional velocity field, particle image velocimetry (PIV).
1. Introduction
La directive européenne 2000/60/CE du 23 octobre
2000 impose la réduction des rejets polluants dans le
milieu naturel. Les rejets urbains par temps de pluie
(RUTP), qui représentent des débits d’eaux polluées
très importants, doivent être traités pour respecter cet
objectif réglementaire.
Un bassin d’orage exploite le caractère essentiellement
particulaire des RUTP [ASHLEY et al., 2004] en faisant
décanter les matières solides transportées dans le
réseau d’assainissement : les rejets polluants sont ainsi
limités et le milieu naturel protégé. Cependant, le
dimensionnement d’un tel bassin ou la réhabilitation
d’un bassin de stockage en bassin de dépollution
posent encore la difficulté de l’évaluation de l’efficacité de dépollution. Quelle quantité de particules sera
décantée à l’intérieur du bassin pour un débit d’entrée
donné ? Comment maximiser cette quantité ? Obtenir des réponses à ces questions est rendu malaisé par
le caractère tridimensionnel de l’écoulement dans un
bassin [STOVIN et SAUL, 1994].
L’utilisation de logiciels de « computational fluid
dynamics » (CFD) apparaît comme un moyen très
1 Institut national des sciences appliquées de Strasbourg,
24 boulevard de la Victoire 67084 Strasbourg, France.
Mél. : [email protected]
2 École nationale du génie de l’eau et de l’environnement de
Strasbourg, 1 quai Koch BP 1039F 67070 Strasbourg, France.
Mél. : [email protected]
3 Institut national des sciences appliquées de Strasbourg,
24 boulevard de la Victoire 67084 Strasbourg, France.
Mél. : [email protected]
4 Institut national des sciences appliquées de Strasbourg,
24 boulevard de la Victoire 67084 Strasbourg, France.
Mél. : [email protected]
5 Institut national des sciences appliquées de Strasbourg,
24 boulevard de la Victoire 67084 Strasbourg, France.
Mél. : [email protected]
utile de tester différentes géométries de bassin avant
même sa construction et ainsi de choisir celle qui est
la plus adaptée à la dépollution [ADAMSSON et al.,
2005]. Le transport solide n’influençant pas l’écoulement en assainissement en raison de sa faible concentration [ASHLEY et al., 2004], la démarche est la suivante : la première étape est de simuler le champ de
vitesse tridimensionnel à l’intérieur du bassin ; la
seconde est d’utiliser ce champ de vitesse pour
étudier le transport solide par une approche lagrangienne [STOVIN et SAUL, 1996]. La connaissance
précise du champ de vitesse tridimensionnel à l’intérieur du bassin est ainsi le prérequis nécessaire à
l’étude du transport solide.
Afin de valider l’utilisation de la CFD pour obtenir le
champ de vitesse tridimensionnel dans un bassin et
ce, pour des conditions hydrauliques variées, une
technique de vélocimétrie a été mise en place : il s’agit
de la stereo-PIV (particle image velocimetry) [DANTEC, 2004]. Cette technique permet d’obtenir le
champ de vitesse tridimensionnel dans des plans de
l’écoulement. Cet article présente la mise en place et
l’utilisation de la stereo-PIV dans le cas d’un pilote
expérimental de bassin d’orage.
2. Dispositif expérimental
2.1. Description du pilote
Le pilote expérimental est constitué d’un bassin rectangulaire de 1,80 m de long, de 0,76 m de largeur. Il
est équipé d’un trop plein limitant la hauteur d’eau
dans le bassin à 0,40 m. L’alimentation se fait par une
pompe débitant entre 1 l/s et 7 l/s. Un débitmètre
placé en entrée permet la mesure du débit total. Deux
bacs de récupération, équipés chacun d’un capteur
de hauteur d’eau à ultrasons, permettent le calcul des
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Article disponible sur le site http://tsm.astee.org ou http://dx.doi.org/10.1051/tsm/200710097
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Étude
Figure 1. Schéma de la boucle hydraulique
débits déversés et conservés par une loi de seuil : la
répartition du débit entre les deux sorties est ainsi
connue. Un injecteur-mélangeur a également été
installé ; il permettra l’injection et l’homogénéisation
de la concentration en particules lorsque des mesures
de transport solide seront effectuées dans le bassin.
La figure 1 représente un schéma de la boucle hydraulique.
La figure 2 présente une photographie du bassin
d’orage. Dans le cas présenté, un déversement a lieu
par le trop-plein du bassin.
Figure 2. Photographie du bassin d’orage
2.2. Le dispositif PIV
La vélocimétrie par images de particules (PIV) est
une technique optique non intrusive de mesure de la
vitesse. L’écoulement est ensemencé par des microparticules dont le comportement hydrodynamique
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est supposé identique à celui du fluide. Le déplacement des particules est utilisé pour calculer la vitesse
de l’écoulement. Si l’eau utilisée contient déjà des microparticules (c’est généralement le cas de l’eau potable), il n’est pas nécessaire de l’ensemencer.
Plusieurs autres techniques de vélocimétrie existent,
dont la plus répandue en bassin est la vélocimétrie
Doppler [IMAM et al., 1983 ; McCORQUODALE et
al., 1988 ; LYN et al., 1990 ; STOVIN et SAUL, 1994].
Cette technique permet la mesure des trois composantes de la vitesse à une fréquence élevée : les intensités turbulentes sont ainsi accessibles [LYN et al.,
1990]. La PIV permet elle aussi de mesurer des vitesses
instantanées, mais de façon discontinue. En effet, il
faut attendre une durée de l’ordre de la seconde entre
chaque mesure de vitesse instantanée. Cependant, le
grand avantage de la PIV est de permettre l’obtention
de la vitesse 3D dans un plan alors que la vélocimétrie
Doppler ne permet que l’obtention de la vitesse en un
seul point de l’écoulement [SONTEK, 2001]. De plus,
ce « point » correspond en fait à un petit volume (de
l’ordre du cm3) qu’il est parfois difficile de localiser
exactement. La PIV apparaît donc comme une technique de vélocimétrie adaptée à la cartographie du
champ de vitesse moyen dans un bassin.
Un dispositif PIV nécessite une source laser plane et
une caméra (deux pour la stéréo-PIV ou PIV 3D). La
source laser éclaire un plan de l’écoulement à deux
instants t et t+Δt. A chacun de ces instants, une image
est acquise (figure 3).
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Figure 3. Exemple d’images acquises aux instants t et t+Δt
Le déplacement des particules est déterminé par
inter-corrélation entre les niveaux de gris de ces deux
images. La vitesse locale bidimensionnelle de l’écoulement (figure 4) s’obtient alors par le rapport déplacement sur durée :
La démarche présentée figure 4 est suivie pour chacune des deux caméras. Le champ de vitesse tridimensionnel est alors obtenu par combinaison entre
les résultats bidimensionnels de chacune des deux
caméras selon la figure 5.
où M est le grandissement de la prise de vue. Cette
grandeur est déterminée lors de la phase d’étalonnage
qui consiste, en prenant une image d’une mire depuis
chaque caméra, à calculer l’échelle de conversion
entre l’écoulement et son image.
Figure 5. La stéréovision de la PIV
Figure 4. Exemple de champ de vecteurs vitesses obtenus après
inter-corrélation entre les deux instants (dans cet exemple, des
vecteurs jugés anormaux ont été corrigés en bleu)
Les axes des caméras et le plan de l’écoulement étudié n’étant pas orthogonaux, des problèmes de netteté d’images peuvent être rencontrés. Afin d’assurer la netteté sur l’ensemble des images, on décale
l’axe de chacune des caméras par rapport à celui de
sa lentille jusqu’à ce que les images soient nettes ;
il s’agit de la condition de Scheimpflug. C’est une
condition mathématique angulaire, mais il est plus
rapide de procéder empiriquement en modifiant
l’angle entre la caméra et sa lentille et en observant
le résultat à l’image.
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Figure 6. Observation d’une boucle de recirculation avec la PIV
3. Résultats
La PIV a été utilisée pour retrouver qualitativement
le comportement hydrodynamique à l’intérieur du
bassin dans deux situations : un cas où un déversement par le trop-plein a lieu et un cas pour lequel
tout le débit est évacué par la conduite de sortie. Dans
les deux situations, le débit vaut 3 l/s.
Dans le premier cas, aucun déversement n’a lieu par le
trop-plein ; la hauteur d’eau est de l’ordre de 15 cm.
Un test à la fluorescéine a permis de constater que
l’écoulement est dominé par une boucle de recirculation asymétrique (horaire ou anti-horaire selon l’expérience) ; le sens de l’écoulement est présenté sur la
figure 6. Ce comportement est semblable à celui qui a
été observé par [STOVIN et SAUL, 1994] dans un
bassin de dimensions voisines. La zone d’observation
pour la PIV est un plan de 20*20 cm2, situé à 30 cm de
l’entrée du bassin ; il est présenté en bleu sur la figure 6.
La figure 7 présente le champ de vitesse tridimensionnel dans le plan d’observation. Les résultats de la PIV
mettent en évidence deux courants de sens opposés séparés par une zone où la vitesse orthogonale est pratiquement nulle (en bleu clair). Ces résultats sont donc
conformes avec les tests à la fluorescéine ainsi que les
travaux présentés par [STOVIN et SAUL, 1994].
Dans le deuxième cas, le débit vaut également 3 l/s et
un déversement a lieu par le trop-plein (hauteur
d’eau supérieure à 40 cm). L’écoulement présente
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Figure 7. Champ de vitesse obtenu sans déversement. Le bleu-violet correspond à des vitesses négatives (dans la direction perpendiculaire au plan) ; le rouge jusqu’au vert à des vitesses positives
alors une forme symétrique : deux boucles de recirculation sont constituées par un jet central et deux
jets de retour sur les côtés du bassin (tests à la fluorescéine). Les résultats obtenus par PIV sont présentés sur la figure 8 : le jet central est très clairement
identifiable par un pic de vitesse en bleu-violet. Ces
résultats sont cohérents avec ceux de [ADAMSSON
et al., 2005] obtenus dans un grand bassin.
4. Conclusions et perspectives
L’utilisation de la stéréo-PIV dans un pilote de bassin
d’orage a été présentée. Cette technique de vélocimé-
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de la PIV avec un vélocimètre Doppler pourra permettre de justifier ou pas l’emploi de cette technique
dans un bassin d’orage.
Figure 8. Champ de vitesse tridimensionnel obtenu dans le plan
d’observation lorsqu’un déversement a lieu par le trop-plein
trie 3D a permis d’observer deux configurations
d’écoulement pour un même débit de 3 l/s : une
boucle de recirculation asymétrique dans le cas où
aucun déversement n’a lieu et un jet central dans le
cas contraire. Ces résultats sont conformes aux tests
effectués avec de la fluorescéine.
De plus, la PIV n’a pour l’instant été utilisée que sur
une zone restreinte de l’écoulement (mire de dimensions 20*20 cm2). Afin de pouvoir cartographier le
champ de vitesse dans l’ensemble du bassin, nous
projetons d’utiliser une mire de mêmes dimensions
que la section du bassin (75*45 cm2). Le déplacement
du plan laser et des caméras longitudinalement dans
le bassin permettra de cartographier des plans transversaux de l’écoulement ; la réunion des données des
différents plans permettra d’aboutir au champ de vitesse tridimensionnel dans tout le bassin.
L’étape suivante de cette étude est d’utiliser la PIV
pour corroborer les résultats numériques obtenus par
CFD afin, par la suite, d’étudier le transport solide en
bassin d’orage.
Remerciements
Nous remercions le GEMCEA pour sa participation
financière à ce projet de recherche.
Les résultats actuels permettent de dire que la PIV est
un moyen prometteur pour obtenir une cartographie
précise du champ de vitesse tridimensionnelle dans
un bassin. Cependant, ces résultats doivent être vérifiés quantitativement. La comparaison des résultats
Nous remercions également Yoann André et Benjamin Frugier qui ont effectué leur travail de fin
d’études (INSA de Strasbourg) sur la construction du
bassin expérimental ainsi que sur la mise en place du
dispositif de PIV.
Bibliographie
LYN D.A., RODI W., 1990. « Turbulence measurements in
model settling tank ». Journal of Hydraulic Engineering
116, 1, 3-21.
McCORQUODALE J.A., MOURSI A.M., EL-SEBAKHY I.S.,
1988. « Experimental study of flow in settling tanks ».
Journal of Environmental Engineering 114, 5, 1160-1174.
SONTEK, 2001. « SonTek ADVField Acoustic Doppler
Velocimeter: technical documentation ». SonTek.
STOVIN V.R., SAUL A.J., 1994. « Sedimentation in storage
tank structures ». Water Science and Technology 29,
1-2, 363-372.
STOVIN V.R., SAUL A.J., 1996. « Efficiency prediction for
storage chambers using computational fluid dynamics ».
Water Science and Technology 33, 9, 163-170.
ADAMSSON A., BERGDHAL L., LYNGFELT S., 2005.
« Measurement and three-dimensional simulation of
flow in a rectangular detention tank ». Urban Water
Journal 2, 4, 277-287.
ASHLEY R.M., BERTRAND-KRAJEWSKI J.-L., HVITEDJACOBSEN T., VERBANCK M., 2004. « Solids in sewers ».
IWA Publishing, Scientific and technical report n°14.
DANTEC, 2004. « FLOWMAP 3D-PIV System, Installation
& User’s guide ». Dantec Dynamics.
IMAM E., McCORQUODALE J.A., BREWTA J.K., 1983.
« Numerical modelling of sedimentation tanks ».
Journal of Hydraulic Engineering 109, 12, 1740-1754.
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Résumé
Summary
M. DUFRESNE, J. VAZQUEZ, A. TERFOUS,
A. GHENAIM, J.-B. POULET. Vélocimétrie par
images de particules dans un bassin d’orage
L’utilisation de la vélocimétrie par images de
particules dans un bassin d’orage est présentée. Cette technique permet de cartographier
le champ de vitesse tridimensionnel dans des
plans de l’écoulement. Deux configurations
d’écoulement ont été observées avec la PIV :
une boucle de recirculation et un jet central.
Les résultats de ces observations montrent
que dans le cas où aucun déversement n’a lieu
par le trop-plein, l’écoulement est dominé par
une boucle de recirculation asymétrique.
Dans le cas d’un déversement par le tropplein, l’écoulement présente alors une forme
symétrique : deux boucles de recirculation
sont constituées par un jet central et deux jets
de retour sur les côtés du bassin.
M. DUFRESNE, J. VAZQUEZ, A. TERFOUS,
A. GHENAIM, J.-B. POULET. Particle image
velocimetry (PIV) in a storm-water tank
Particle image velocimetry is used in a stormwater tank. With this technology, it is possible
to obtain 3D velocities charts in the plan of the
studied flow. Two different flows have been
observed in the basin: an asymmetric circulation and a central jet. When no overflow occurs, an asymmetric circulation dominates the
flow. When an overflow occurs, there are two
symmetrical circulations in the basin and a
central jet dominates.
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