Le télésuivi des plaies chroniques traitées au domicile - FC

© 2016 Publié par Elsevier Masson SAS
http://dx.doi.org/10.1016/j.soin.2016.09.011 SOiNS - no810 - novembre 2016
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La télémédecine en actes
dossier
Le télésuivi des plaies chroniques
traitées au domicile
Dès 2009, le Centre de traitement ambulatoire
des plaies chroniques (CTAPC) du centre hos-
pitalier universitaire de Besançon (25) a travail
à un projet de télésuivi des plaies chroniques au
domicile. Ce projet a vu le jour gce à des subven-
tions européennes, à lappui de l’agence gionale
de san (ARS) de Franche-Com et à une colla-
boration fructueuse entre médecins et infirmiers
libéraux.
Une approche expérimentale
avec plUsieUrs sites volontaires
z
L’ARS de Franche-Comté a développé ce
programme de suivi à distance
des plaies chro-
niques et des compli-
cations liées au diabète,
dont une première étape
a consisté à ployer cette
nouvelle technologie:
en mobilisant douze
sites répartis dans l’en-
semble de la gion, per-
mettant ainsi de couvrir une grande diversité
d’acteurs demandeurs: infirmiers libéraux,
hôpitaux locaux, centre hospitalier spécialisé,
Établissement d’hébergement pour personnes
âgées pendantes (Ehpad), decins généra-
listes, etc.;
 en accompagnantleséquipesdu servicede 
dermatologie du CTAPC et du service de diabé-
tologie dans la montée en charge technique de
ce projet et l’utilisation de la plateforme de télé-
decine.
Les sites volontaires ont été équipés d’outils de
suiviàdistance des plaies chroniques (tablette,
chariot de télémédecine selon les sites). Ainsi, dès
la parution du décret relatif à la lémédecine en
2010[1], les professionnels de san étaient prêts
à mettre en œuvre la nouvelle pratique selon les
modalités prescrites.
z
Depuis lors, le dispositif a continué de se
velopper
en fonction des textes et appels à
projets successifs. À ce jour, quatre cabinets
d’infirmiers libéraux participent au diagnostic
à distance de plaies chroniques avec le CHU de
Besançon. Des clichés des
plaies sont pris et envoyés
à la dermatologue grâce à
une tablette numérique.
Cette spécialiste fait
part, en différé, de son
diagnostic à l’infirmier.
Ainsi, une cinquantaine
de patients sont pris en charge par les quatre
cabinets infirmiers depuis 2013. Il a été décidé
que seuls les cas complexes et chroniques béné-
ficieraient d’un acte de lémédecine, afin de ne
pas engorger le CTAPC avec des plaies que les
infirmiers libéraux devraient être capables de
rer en collaboration avec les médecins traitants
des patients concernés.
pratique soignante
z L’agence régionale de santé de Franche-Comté, en collaboration avec le Centre de traitement
ambulatoire des plaies chroniques du centre hospitalier universitaire de Besançon et douze sites
volontaires, a développé un dispositif de télésuivi des plaies chroniques à domicile z Celui-ci est
mis en œuvre par des infirmiers libéraux depuis 2009.
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The remote monitoring of chronic wounds treated in the home. The Franche-Comté Regional
Health Authority, in collaboration with the chronic wound outpatient centre of Besançon university
hospital and twelve volunteer sites, has developed a remote patient monitoring programme for
monitoring chronic wounds in the home. It has been used by private practice nurses since 2009.
Nicolas schiNkel
Infirmier libéral chargé
de mission e-health à l’URPS
des infirmiers
de Franche-Comté
3,rue du Pont,
25350Mandeure, France
Adresse e-mail :
nicolas.schinkel@wanadoo.fr
(N. Schinkel).
Mots clés – domicile; expertise; plaies chroniques; télémédecine; télésuivi
Keywords – chronic wounds; expertise; home; remote patient monitoring, telemedicine
Des clichés des plaies sont pris
et envoyés à la dermatologue
grâce à une tablette numérique
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La télémédecine en actes
dossier
le télésUivi en pratiqUe
z
Lorganisation mise en œuvre s’appuie sur une
relation directe
entre le professionnel de san
demandeur, le decin scialiste, le médecin trai-
tant et le patient. Les patients sont inclus, après leur
accord, sur linitiative de l’infirmier libéral, lorsque
ce dernier constate que la plaie n’évolue pas favora-
blement après quatre à six semaines de traitement.
Le decin traitant en est alors informé et reçoit le
compte rendu de la dermatologue.
z
Il arrive aussi parfois que ce soit le médecin
traitant qui demande à l’infirmier de pratiquer
un acte de télémédecine
afin d’obtenir un dia-
gnostic plus rapide. Linrmier libéral se rend alors
au domicile du patient dans le cadre des soins habi-
tuels (changement des pansements, figure1). Il
dige une description de la plaie ainsi que de son
contexte d’apparition ou d’évolution, puis prend
une ou plusieurs photos avec la tablette avant de
refaire le pansement (figure2). Ces clichés sont
pris, si possible, sur un champ de couleur verte ou
bleue. Le vert est en effet la couleur pour laquelle
la plupart des capteurs vidéo sont les plus sensibles,
la plus lumineuse, celle qui génère le moins de
bruit sur ces capteurs. C’est également la couleur
la plus éloignée de celle de la peau. Cela permet à
l’œil du spécialiste de se concentrer uniquement
sur la plaie du patient. Il faut prendre une pre-
mière image des deux membres ensemble, puis
du membre atteint. Des clics de la plaie en mode
macroscopique sont ensuite indispensables pour
que la dermatologue puisse établir un diagnostic.
z
Toutes ces informations cliniques sont auto-
matiquement ajoutées au dossier du patient
et transmises à la dermatologue sous forme
d’images. Celle-ci, 48heures au plus (en pratique,
moins de 12heures) après l’envoi des clichés,
analyse ces derniers et indique la conduite à tenir.
Son compte rendu, complété avec les prises de
vue et les informations cliniques relevées dans le
cadre du suivi à distance, est mis à la disposition
de l’infirmier demandeur et posé dans le dos-
sier médical parta (DMP) du patient.
Ainsi, l’ensemble des professionnels, notamment
le médecin traitant, qui interviennent ou inter-
viendront dans la prise en charge du patient, dis-
pose de toutes les informations utiles.
Madame R.
z
Après s’être écorchée en jardinant, MadameR.
présente des plaies de la face antéro-externe de la
jambe gauche depuis six semaines, sans évolution
positive. Sa plaie principale se creuse, elle est
fibrineuse et s’étend. La patiente a mal et estime sa
douleur, sur une échelle visuelle analogique (EVS),
à 6 sur10. En accord avec elle et son médecin
traitant, l’infirmier décide de recourir à un acte de
télémédecine.
z
Il réalise divers clichés et une anamnèse,
et transmet le tout de façon sécurisée, à l’aide d’un
logiciel dédié, au médecin spécialiste du Centre
de traitement ambulatoire des plaies chroniques
(CTAPC).
z
La dermatologue lit l’histoire de la patiente
et, grâce aux clichés macroscopiques, peut analyser
le fond de la plaie. Elle peut affirmer que cette
dernière est exsudative et cyanotique sur les bords.
Elle ne pense pas qu’il s’agisse d’ulcères veineux. Il y
a également un biofilm bactérien.
z
La dermatologue préconise une détersion
manuelle, un lavage au savon de Marseille et des
pansements absorbants. Elle demande à recevoir
de nouveaux clichés dans une dizaine de jours afin
d’observer l’amélioration ou non des plaies. Elle
envoie ces recommandations de façon sécurisée à
l’infirmier via le même logiciel de télésuivi.
z
Grâce à ces conseils, les plaies se sont
refermées en deux mois. MadameR. n’a pas eu
besoin d’effectuer 160kilomètres aller-retour pour
un diagnostic, ni de laisser son mari malade sans
surveillance durant plusieurs heures.
Figure 1. Tablette numérique utilisée par l’infirmier.
©DR
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La télémédecine en actes
dossier
z
L’infirmier demandeur
reçoit un courriel lui indi-
quant que la spécialiste
a répondu à sa requête. Il
en prend connaissance et
modifie sa prise en charge
si cessaire. Le decin
traitant n’ayant pas for-
cément accès au DMP de
son patient, l’infirmier
l’informe du diagnostic
et de la conduite que lui
suggère la dermatologue.
Un accès facilité à lexpertise
poUr les soins de proximité
z
Les infirmiers libérauxalisent un grand
nombre de pansements.
La possibilité de pres-
crire directement les dispositifs médicaux[2]
a grandement facilité et amélioré leur prise en
charge des plaies chroniques et complexes de
personnes, souvent très âgées, à leur domicile.
z
Le lésuivi permet aux patients de bénéfi-
cier, en cas de besoin et sans retard, d’un avis
spécialisé
pour traiter ces plaies souvent handi-
capantes. Il apporte également aux infirmiers,
au-delà d’un conseil ponctuel, un lien permanent
très formateur avec la dermatologue. Ce lien per-
met une collaboration de qualité entre l’infirmier
qui assure la surveillance et les soins, le médecin
spécialiste qui donne un avis en fonction des don-
nées transmises et le médecin traitant qui suit
leurs échanges afin de mieux coordonner toutes
les interventions au domicile.
Outre une meilleure prise en charge, cette technolo-
gie permet enn une elle économie de transports
et d’hospitalisations inutiles, souvent éprouvants
pour des patients chroniques et fragiles.
n
RéféRences
[1] Décret n°2010-1229 du
19octobre 2010 relatif à la
télémédecine. www.legifrance.
gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=
JORFTEXT000022932449&categ
orieLien=id
[2] Arrêté du 20mars 2012 fixant
la liste des dispositifs médicaux
que les infirmiers sont autorisés
à prescrire. www.legifrance.gouv.
fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFT
EXT000025592708
Déclaration de liens dintérêts
L’auteur déclare ne pas
avoir de liens d’intérêts.
Un dispositif de télésuivi des plaies
chroniques à domicile a été mis en place.
C’est l’infirmier libéral ou le médecin traitant
qui décide d’inclure le patient dans le télésuivi
lorsqu’il constate une absence d’amélioration de la
plaie.
Les photos et autres informations sont
envoyées directement au spécialiste qui donne un
avis dans les 48heures.
Ce dispositif améliore la prise en charge et la
qualité de vie de la personne âgée, aide l’infirmier
et se révèle pour lui très formateur.
Les points à retenir
Figure2. Exemple de dossier patient transmis par l’infirmier sur la tablette.
©DR
Le télésuivi permet une
collaboration de qualité
entre l’infirmier, le médecin
spécialiste et le médecin
traitant
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