Section 1 - Website of Bernard Yvars, Jean Monnet Chair in

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Cours d’Environnement
économique international
Bernard Yvars
Université Montesquieu-Bordeaux IV
Introduction
Section 1 - L’ouverture contemporaine à l’échange international par les négociations commerciales
multilatérales et les zones d’intégration régionale
Section 2 - Mondialisation et OMC : une nouvelle hiérarchie des Etats dans le commerce international
Chapitre 1 - Les relations commerciales internationales
Section 1 - Les déterminants des échanges internationaux : un faisceau explicatif complexe
Section 2 - Les politiques commerciales : l’affirmation d’une aversion pour le protectionnisme
visible
Chapitre 2 - L’évolution du système monétaire international (SMI)
Section 1 - L'instabilité du SMI contemporain : l’émergence de pays à déficits jumeaux
Section 2 - Les difficultés de la coopération monétaire internationale : une guerre incessante
des monnaies
Chapitre 3- Les expériences d’intégration économique et monétaire : le cas de l’Union
européenne
Section 1 - Les effets de l’intégration commerciale: gains actuels et potentiels
Section 2 - Une logique cumulative de l’intégration : l’unification monétaire européenne imparfaite
Conclusion
Les perspectives de la coopération internationale : l’aggravation des inégalités dans le partage
des activités et des revenus ?
BIBLIOGRAPHIE :
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L. Abdelmalki et R. Sandretto, Politiques commerciales des grandes
puissances, De Boeck, 2011.
J.-L. Amelon et J.- M. Cardebat, Les nouveaux défis de l'internationalisation
- Quel développement international pour les entreprises après la crise ?, De
Boeck, 2010.
M. Chossudovsky, Mondialisation de la pauvreté et nouvel ordre mondial,
Éditions Écosociété, Montréal, 2010
M. Lemoine et alii, Les grandes questions d’économie et finances
internationales, De Boeck, 2007.
M. Massabie-François, Commerce international - Marketing, Etudes et veille
commerciales, Vendre et négocier à l’export, Ed. Bréal, 2009.
T. Mayer et J.-L. Mucchielli, Economie internationale Dalloz, 2010.
J.-L. Mucchielli, La mondialisation - Chocs et mesure, Hachette Sup, Les
Fondamentaux, 2008.
M. Rainelli, Le commerce international, Coll. Repères, Ed. La découverte,
2010.
SITES INTERNET :
Le site de la Chaire Jean Monnet en Intégration régionale comparée
héberge toutes les ressources à utiliser et à maîtriser par les étudiants :
http://Integeco.u-bordeaux4.fr/ . Il comporte un certain nombre de liens vers
des sites extérieurs utiles : OMC, FMI, OCDE, Commission européenne,
DREE, etc.
INTRODUCTION
La crise économique et financière dans les derniers mois de 2008 a
provoqué en 2009 une récession mondiale contraction du commerce sans
précédent en plus de 70 ans. La croissance du commerce avait déjà marqué
le pas entre 2007 et 2008, passant de 6,4% à 2,1 %, mais, en 2009, le volume
des échanges a chuté de 12,2% (plus forte baisse de l’histoire récente).
L’OMC a prévu une modeste reprise en 2010 devant inverser l’effet de
la contraction du commerce. Un fait positif en 2009 : absence de renforcement
des obstacles au commerce imposés par les membres de l’OMC en réponse a
la crise, malgré un fort taux de chômage dans de nombreux pays.
La contraction des échanges mondiaux en 2009 (figure ci-après) a été
encore plus prononcée en valeur en dollars EU (-22,6 %), qu’en volume (12,2%), du fait notamment de la chute des prix du pétrole et d’autres produits
primaires. La production mondiale mesurée par le PIB a également diminué en
2009 (-2,3 %), ce qui représente la plus forte baisse depuis la fin de la
Deuxième Guerre mondiale. Tous ces éléments  récession économique
mondiale la plus grave depuis la Grande Dépression.
Selon l’OMC, Le commerce mondial devrait ralentir en 2012,
pour s'établir à 3,7 % contre 5 % en 2011. Cela doit être attribué
à la perte de vitesse de l'économie mondiale due notamment à
la crise des dettes publiques en Europe.
Toutefois, pour 2013, l'OMC prévoit une légère reprise de la
croissance du commerce mondial en volume, à 5,6 %. Ces
prévisions
supposent une
croissance
de
la
production
mondiale de 2,1 % en 2012. D'ores et déjà, l'OMC prévient de
risques importants pour la croissance, qui ne seraient pas sans
conséquence sur le commerce.
Précisons que le trafic de marchandises est prépondérant
dans le commerce international par rapport à celui des
services dont la croissance se poursuit (part passée de
16% à environ 20 % de 1984 à aujourd’hui). La nature des
échanges de services s’est aussi modifiée puisque la part
représentée par le transport international et les voyages
(respectivement 24% et 26%) dans le commerce mondial
de services a baissé au profit des autres services (50%) au
sein desquels les services informatiques et financiers
enregistrent les taux de croissance les plus élevés.
Pour la France, la situation est très difficile et
rend plausible un affaiblissement économique
durable :
Beaucoup d’indicateurs sont au rouge, excepté la
diversification de sa spécialisation économique
internationale et l’existence d’un fort taux d’épargne des
ménages (16,8 % de leurs revenus en 2011). Quels
sont les indicateurs ou critères défavorables ? :
-le déficit public (103,1 milliards d’euros en 2011,
soit 5,2 % du PIB) et l’endettement public (1 789,4
milliards d’euros fin mars 2012, soit 89,3 % du PIB)
absence donc d’épargne publique
- le déficit chronique de la balance commerciale (71
milliards d’euros en 2011)  absence donc d’épargne
externe
- un modèle de croissance économique trop axé sur la
consommation (absence d’une politique suffisante de
l’offre).
- une insuffisante capacité d’innovation. Exemple : le
nombre de dépôts de brevets triadiques (les innovations
brevetées à la fois en Europe, au Japon, et aux ÉtatsUnis). D'après l'OCDE, l'Allemagne a déposé en 2008
plus de 70 brevets de ce type par million d'habitants,
contre moins de 40 pour la France, 27 pour le Royaume
-Uni et moins de 20 pour l'Italie et l'Espagne.
- un appareil éducatif, trop généraliste ne répondant pas
suffisamment aux besoins du marché (trop de diplômés
sans savoir-faire).
Ces
résultats
négatifs
trouvent
principalement leur origine dans une
inadaptation de la France à la compétition
économique intra-européenne. Un taux de
change flexible entre la France et
l’Allemagne serait-il préférable (solution
partielle aux difficultés du pays) ?
Notons enfin que l’internationalisation
du marché du travail peut contribuer à la
détérioration des comptes sociaux (sous utilisation de la main-d’œuvre sédentaire).
Le développement du commerce international a
été favorisé, d’une part, par le développement des
accords commerciaux depuis 1947 sous l’égide du
GATT puis de l’OMC à partir de 1994 et, d’autre
part, par la constitution de zones d’intégration
régionale. (Section 1). Cela dit, l’accentuation de la
mondialisation a engendré une nouvelle hiérarchie
des Etats dans le commerce international (Section
2)
Section 1 - L’ouverture contemporaine à l’échange international par
les négociations commerciales multilatérales et les zones
d’intégration régionale
Depuis 1945, le processus de libéralisation du commerce mondial repose sur des
systèmes fondés sur la coordination des politiques commerciales au sein du GATT puis de
l’OMC. Ils s’appuient sur le principe du multilatéralisme : les concessions et les règles sont
négociées non plus entre deux pays mais dans le cadre de cycles rassemblant un grand
nombre de pays (23 à la naissance du GATT, 149 en 2005 dans le cadre de l’OMC).
Simultanément, et parfois en raison des difficultés de la négociation multilatérale, se sont
développées les zones d’intégration régionale (CEE en 1957, AELE en 1960, par exemple).
•
A - Les négociations commerciales multilatérales
Pour tenir compte des enseignements tirés du repli des économies sur elles-mêmes
dans l’Entre-deux-Guerres, des pays occidentaux développés ont mis en place un système de
coordination des politiques commerciales pour ouvrir leurs frontières aux marchandises
étrangères. En 1947, le GATT impulse une dynamique de participation accrue des nations à
l’échange international. Pourquoi un tel choix d’ouverture internationale des économies ? Les
organisations internationales se réfèrent souvent aux théories classiques et néo-classiques
de l’échange international qui ont établi la supériorité du libre-échange sur toute autre forme
d’organisation internationale des échanges : tous les pays obtiennent des gains de l’échange
international (par rapport à toute situation de protectionnisme) sous les hypothèses de
stabilité dans le temps des structures de coût et de concurrence pure et parfaite.
Cela dit, des économistes, tels P. Samuelson, qui ont contribué à l’établissement du
corps théorique traditionnel de l’échange international ont fait évoluer leurs analyses initiales
(reconsidération de résultats établis sur les déterminants de l’échange international sous une
nouvelle hypothèse : celle de la mobilité internationale des facteurs de production
L’Accord général
fondamentaux :
repose
sur
quatre
principes
•
- l’égalité de traitement entre partenaires commerciaux en généralisant uniformément
à tous les partenaires les avantages consentis à un seul : c’est la clause de la nation
la plus favorisée. Ce principe fonde le multilatéralisme (principe différent du
bilatéralisme) et est le plus important de l’Accord.
•
- les concessions octroyées doivent l’être sur une base de réciprocité et d’avantages
mutuels de façon à éviter les comportements de passagers clandestins dans le
système commercial multilatéral.
•
- le traitement national qui impose que les produits étrangers soient soumis au même
traitement que les produits similaires d’origine nationale dès qu’ils se sont acquittés
des droits de douane pour entrer sur le territoire national.
•
- l’Accord favorise les pratiques commerciales transparentes. L’usage du droit de
douane est préféré à toute autre forme de protection (restrictions quantitatives aux
échanges ou quotas, par exemple). C’est la raison pour laquelle les prélèvements
agricoles de la PAC originelle ont été transformés en équivalents tarifaires par
l’accord de l’Uruguay round (à l’initiative des Etats-Unis). Voir en annexe les mécanismes du
cycle agricole et de la politique de soutien des prix agricoles avant l’accord de Marrakech.
Cela étant, il existe des exceptions à l’application des principes
précédents (exceptions aux principes généraux du libre-échange). Le
GATT et l’OMC encadrent et contrôlent de tels dispositifs dérogatoires
dont le nombre est en régression aujourd’hui :
•
- une exception à la clause de la nation la plus favorisée en autorisant
la constitution de zones de libre-échange ou d’union douanière (article
XXIV du GATT) ;
•
- les échanges entre pays développés et pays en développement
peuvent être exonérés de la clause de réciprocité. Citons l’exemple
des accords de l’Union européenne avec certains pays tiers, par
exemple les pays ACP dans le cadre des conventions de Lomé ou
encore, l’exemple du système des préférences généralisées ;
•
- la principale exception au principe du traitement national concerne
l’imposition de quotas à l’écran pour les films d’origine nationale.
•
- les exceptions à l’usage exclusif de droits de douane comme moyens
de protection sont nombreuses : cas de l’agriculture, de la pêche ou
encore de pays qui connaissent de graves difficultés de balances de
transactions courantes.
Notons que l’Accord général autorise la mise en place de mesures
protectionnistes en situation de crise ou de pratiques déloyales (clauses de
sauvegarde ou mesures antidumping). Les clauses de sauvegarde doivent
obéir au principe de non - sélectivité.
Dans un tel contexte, le GATT a ouvert plusieurs rounds de négociation
pour abaisser le niveau de protectionnisme tarifaire et non tarifaire
international (cas de l’accord de l’Uruguay round qui s’est conclu par l’accord
de Marrakech, le 15 avril 1994).
Quels en sont les résultats principaux ? On peut citer :
- la poursuite du démantèlement des droits de douane avec notamment la
réduction des pics tarifaires (droits de douane supérieurs à 15%).
- l’extension des règles du GATT à des secteurs exclus (services, le
secteur textile régi par l’accord multifibres -AMF-, l’agriculture qui dérogeait
aux règles générales en matière de subventions et d’accès aux marchés).
- le renforcement des règles qui s’imposent aux parties contractantes du
GATT et le renforcement des procédures de règlements des différends afin de
s’assurer que les échanges sont pratiqués de manière loyale (nouveaux
accords anti-dumping, sur les subventions et sur les marchés publics,
adoption par le GATT de normes internationales de l’Organisation mondiale
de la propriété intellectuelle-OMPI-).
La transformation du GATT en OMC donne un cadre institutionnel aux
négociations commerciales multilatérales  un travail continu de négociation
au siège de l’OMC. Ajoutons que le champ d’action de l’OMC s’est élargi avec
de nouvelles prérogatives en matière de commerce des services (GATS),
l’accord sur le respect des droits de la propriété intellectuelle (ADPIC),
l’accord sur l’application des mesures sanitaires et phytosanitaires (SPS),
l’accord sur les obstacles techniques au commerce (accord OTC), etc.
Dans les faits, le lancement du neuvième cycle de négociations
commerciales multilatérales à Seattle en 1999 s’est soldé par un
échec dans un contexte de contestation extérieure de la
mondialisation libérale et de dénonciation d’une insuffisante
association des pays en développement aux négociations.
A ce propos, on peut noter que si les ONG
demandent la prise en compte dans le commerce mondial de
normes sociales, sanitaires et environnementales (optique de
développement durable), les pays du Sud refusent une telle
approche qui serait de nature à remettre en question leurs
avantages comparatifs.
On est ainsi conduit à se poser la question de la
recevabilité du fondement de l’avantage comparatif actuel. Un
avantage de coût, basé sur une innovation, un progrès technique,
un savoir faire (que les autres pays n’ont pas ou n’ont pas encore
acquis), n’est pas de même nature qu’un avantage de coût, basé
sur l’exploitation du travail (bas taux de salaire, absence ou
faiblesse de la protection sociale) ou sur l’absence de normes
environnementales (excès de pollution des eaux, des sols, de l’air, etc). Question
fondamentale qui ne constitue pourtant pas une priorité de l’OMC aujourd’hui !
•
Par ailleurs, à Seattle, l’UE et les Etats –Unis se sont opposés sur le dossier agricole,
notamment en matière de subventions à l’exportation. Dans le cadre du cycle de Doha
(round de négociation d’une durée de 3 ans pour libéraliser davantage le commerce
international, notamment avec les pays en développement), la conférence de Hong Kong
de décembre 2005 avait abouti à une déclaration finale adoptée par consensus laissant
entrevoir la possibilité d’un accord. Trois dispositions étaient prévues :
- détermination d’une date butoir pour l’élimination des subventions agricoles aux
exportations au 31/12/2013 ;
- différentes mesures en faveur des pays pauvres. Les pays développés devaient
accorder à partir de 2008 un accès libre de quotas et de droits de douane sur leur marché
intérieur à 97% des produits en provenance des pays les moins avancés (PMA) ;
- suppression dès la fin de l’année 2006 des subventions aux exportations de coton
(les Etats-Unis étant principalement concernés). Les Etats-Unis n’ont pas pris
d’engagements précis quant à la diminution de leur soutien interne à la production de
coton. Cependant la déclaration finale de Hong Kong restait décevante, notamment pour
l’UE, en ce qui concerne les questions de l’accès aux marchés des produits industriels et
de la libéralisation des services. En définitive, l’accord ne sera pas obtenu, les discussions
officielles stoppant en juillet 2006. Les travaux se sont poursuivis au siège de l’OMC qui
espérait aboutir à un accord définitif dans le courant de l’année 2011.
Deux écueils majeurs rendent difficiles la conclusion de l’accord :
- la question agricole ;
- les questions de propriétés intellectuelles.
En fait, la question agricole est la principale cause de blocage
des négociations. Les pays du Sud accusent les économies
développées de soutenir leur agriculture avec des subventions
pouvant représenter 40 à 50% des coûts (concurrence forte sur les
marchés des pays en développement et sur les marchés mondiaux).
Dans un contexte international marqué par le développement de
crises alimentaires, une augmentation de la pénurie d’eau (et de
terres arables ---> développement du land grabbing, par exemple),
une croissance démographique encore significative, l’agriculture
redevient un secteur très stratégique. Un accord sur le dossier
agricole apparaît donc bien improbable.
Pour les questions de propriété intellectuelle, des enjeux
multiples (au nombre de 3) sont à considérer :
. Le 1er tient à la question suivante : faut-il étendre le système de
protection des indications géographiques à d’autres secteurs que le vin et
spiritueux ? Les pays du Sud n’y sont pas favorables.
. Le second concerne le lien entre ADPIC et le maintien de la biodiversité
et des savoirs traditionnels. En effet, la brevetabilité du vivant induit des
biais importants entre le Nord et le Sud. Par exemple : la possibilité offerte
aux groupes industriels du Nord de breveter certaines molécules ou gènes
issus des pays du Sud  captation du patrimoine biologique du Sud par le
Nord.
. Le 3ème relève de la santé publique. Les connaissances médicales
ancestrales de pays en développement peuvent être captées par des
entreprises recourant aux biotechnologies. L’ADPIC impose que des
brevets soient accordés à des inventions dans tous les domaines
technologiques (incluant les biotechnologies). De nombreux médicaments
tombent sous cette règle. Il peut donc arriver que suite aux dépôts de
brevets par le Nord, les populations, locales du Sud doivent payer pour des
médicaments qu’elles ont développés collectivement au fil du temps.
On peut noter que des laboratoires pharmaceutiques de pays du Sud
(Inde, Afrique du Sud) ont développés des médicaments génériques
illégaux de certains médicaments mis au point par des groupes européens
ou étasuniens. Il s’agissait de faire face à un problème majeur de santé
publique, la pandémie du sida (procès notamment en Afrique du Sud et
Inde respectivement en 2002 et 2006). Des avancées ont été obtenues
notamment la possibilité de passer outre les droits de propriété intellectuelle
dans le cas d’extrême urgence sanitaire). Cela étant, les ADPI restent une
source de conflit importante dans les négociations de l’OMC.
Au final, l’absence de conclusion de l’accord de Doha risque
d’entraîner une recrudescence du protectionnisme.
• B - La mise en place de zones d’intégration
régionale
Après la IIème guerre mondiale, la libéralisation du commerce 
cadre multilatéral avec Gatt puis OMC. Dans les années 50, le
régionalisme, à la suite des accords européens, s'est développé en
Amérique latine, en Afrique et au Moyen-Orient. Il se caractérise par la
constitution d'accords commerciaux discriminatoires  un accès
réciproque et préférentiel aux marchés des pays membres et le maintien
d'une politique restrictive à l'égard des pays tiers. Cette régionalisation
s'est ralentie dans les années 80 avant de réapparaître dans les années
90, favorisée par les difficultés de négociation de l'Uruguay round.
L'objectif économique de l'intégration régionale reste le même que celui du
libre-échange : la recherche d'une plus grande efficacité économique.
Cependant, les moyens sont différents :
- l'intégration implique le développement privilégié de relations
commerciales, économiques et financières entre un nombre restreint de
partenaires ;
- elle repose sur la suppression de toutes les formes de discrimination
entre les économies de ces pays. Elle vise donc la constitution d'un
ensemble économique unifié et dépasse la simple suppression des
obstacles aux échanges internationaux.
B. Balassa définit l'intégration comme étant un processus visant à
supprimer les discriminations entre unités économiques de différents pays.
La constitution de zones préférentielles représente le stade le plus faible de
l'intégration (réduction des tarifs douaniers et suppression des contingents).
En dehors de cette forme élémentaire d'intégration, il distingue 5 degrés
d'intégration classés par ordre d'intensité croissante, chacun des degrés
retenus contenant le degré précédent + un élément nouveau :
- la zone de libre-échange ; les pays membres éliminent entre eux les
droits de douane et les restrictions quantitatives freinant la libre circulation
des marchandises mais conservent chacun leur protection initiale envers le
reste du monde (Aele créée en 1960 ou Mercosur créé en 1991) ;
- l'union douanière, se distinguant de l'intégration précédente par
l'adoption d'une politique commerciale commune, notamment l'instauration
d'un tarif douanier commun à l'égard des pays tiers (Union douanière
économique de l'Afrique centrale - Udeac - créée en1973) ;
- le marché commun, est une union douanière dans laquelle les pays
réalisent la libre circulation et le libre établissement des personnes et des
capitaux : la Cee de 1993 avec l'achèvement du marché intérieur recouvre
le mieux la définition du marché commun, tout en se rapprochant des deux
définitions suivantes de l'intégration ;
- l'union économique, ajoute aux principes du marché commun
l'harmonisation des politiques économiques nationales ;
- enfin, l'union économique et monétaire ou intégration économique
totale, implique l'unification des politiques économiques et rend nécessaire
l'instauration d'une autorité supranationale si monnaie commune ou unique;
la suite logique de l'intégration économique est l'union politique : il existe
une logique cumulative de l'intégration en vertu de laquelle l'intégration des
marchés, c'est-à-dire la création d'un véritable marché commun, appelle
une intégration plus poussée d'abord sur le plan économique
(harmonisation des politiques économiques) puis sur le plan monétaire.
• Remarque : l'augmentation de la taille d'une zone intégrée suscite de
nouvelles adhésions. Le même résultat peut être obtenu lorsque le degré
d'intégration s'accroît, à couverture géographique inchangée. Ainsi, la
réalisation du Marché unique européen a précédé l'entrée dans l'UE de
l'Autriche, de la Finlande et de la Suède le 1er janvier 1995.
Aujourd’hui, les zones d’intégration régionale doivent
respecter les règles de la mondialisation (règles de l’OMC
notamment). L’intégration commerciale européenne n’a plus
de réalité puisque l’économie européenne est diluée dans la
mondialisation : l’union douanière, voire le marché unique,
sont des formes d’organisation de la coopération économique
dominées par les règles de l’OMC.
De plus, on constate que les objectifs d’une intégration
économique sont le plus fréquemment atteints quand le degré
d’intégration recherché est élémentaire
Mais
si le processus intégrateur s’approfondit, les objectifs
d’intégration ne sont que partiellement obtenus, y compris
pour l’Union européenne (tableau 1 ci-après)
De façon générale, les processus d’intégration régionale centrés sur
l’économie et considérés comme aboutis (ou réussis) sont peu
nombreux. Il en existe deux :
- celui de l’unification allemande au XIXème siècle (du Zollverein à
l’unification politique allemande en 1871) ;
- celui de la CEE jusqu’à l’union monétaire actuelle. Cela étant, l’UE
s’est figée «au milieu du gué» en refusant pour l’heure d’achever son
processus intégrateur économique (budget fédéral pour l’union
monétaire, fédéralisme devant être étendu à tous les champs
économiques majeurs-industrie notamment) et politique (Etat fédéral
européen).
Les autres processus dans le monde sont peu approfondis malgré la
référence dans les traités à des formes d’intégration économique
telles que l’union douanière, l’union monétaire, etc.
En conclusion, la viabilité des expériences ayant pour objectif
l’intégration par l’économie nécessite la mise en œuvre de structures
fédérales fortes, à la fois économiques, budgétaires et politiques.
Si cela n’est pas le cas, les zones d’intégration régionale sont
sans doute plus efficaces dans des actions non économiques
d’intégration (démocratie, droits de l’Homme, des minorités, capital
humain -éducation, santé-, apprentissage des langues, culture, etc)
afin de créer et consolider un espace communautaire de solidarité,
capable de «survivre» à la concurrence induite par l’intégration
économique (génératrice d’une compétition impitoyable pour le
revenu).
Section 2 - Mondialisation et OMC : une nouvelle hiérarchie des
Etats dans le commerce international
Le décloisonnement international des économies a sérieusement démarré
dans les années 90 et se poursuit sous l’égide de l’OMC à laquelle adhèrent de
plus en plus d’Etats (157 en août 2012) renforcement de la prégnance du
multilatéralisme et amélioration de l’efficience de l’allocation internationale des
ressources. Les graphiques ci-après révèlent des mutations rapides dans le
commerce des nations au cours de la décennie 2000. De nouvelles lignes de
force apparaissent et
d’anciennes
s’estompent. On peut notamment
remarquer:
- le poids considérable et stable ou en progression de l’UE dans la DIT en
termes d’échanges commerciaux et d’IDE : la mondialisation a depuis le début
des années 2000 consolidé le rôle de première zone économique mondiale de
l’U. E. à 27.
- L’UE est la 1ère zone de consommation mondiale et est aussi la 1ère zone
d’IDE et de production (PIB mondial le plus élevé). Globalement, si l’Europe a
tiré un grand bénéfice de la mondialisation, les inégalités productives se sont
creusées entre les pays européens, en particulier au sein de la zone euro (pb
des chocs asymétriques nominaux et réels).
- l’émergence de la zone asiatique est très marquée dans
les échanges commerciaux et les IDE entrants. C’est la zone de
production mondiale qui enregistre la croissance la plus forte.
Selon les activités, elle est la première ou la seconde aire
d’exploitation des avantages comparatifs ou compétitifs.
- le déclin relatif de l’Amérique du Nord, nomment des EtatsUnis, est net. Bien qu’ayant à ce jour le PIB courant annuel le plus
élevé après celui de l’UE, les Etats-Unis  érosion de leurs
positions économiques sur les marchés extérieurs et sur leur
marché intérieur. En effet, le poids de leurs exportations dans le
total mondial s’érode et leur part dans les importations mondiales
s’abaisse tendanciellement. Ce recul dans la DIT est sensible en
matière d’IDE entrants ou sortants (flux ou de stocks). On peut
aussi remarquer que la part de l’importation en proportion du PIB
s’accroît sensiblement aux Etats-Unis en passant de 9 % en 2000
à 15 % en 2008 (pénétration accrue du marché intérieur par les
concurrents des pays tiers).
L’UE tire globalement avantage de la mondialisation et
gagnerait à agir pour une régulation accrue afin d’amplifier sa
performance internationale actuelle. Deux lignes d’action :
- soit l’approfondissement de son processus intégrateur
interne par davantage de politiques communes impulsées par un
gouvernement économique et politique de la zone euro (la référence
optimale résidant dans un fédéralisme généralisé1) de façon à
renforcer sa cohésion économique et sociale interne (et éviter les
crises). Au niveau international, le libre-échange sans régulation
crée des situations chaotiques. L’UE a la capacité économique
(mais pas une volonté politique suffisante) de proposer ses choix de
politique économique dans la négociation internationale pour
contribuer à la correction des déséquilibres réels ou monétaires
internationaux.
Non pas un fédéralisme reprenant peu ou prou des expériences existantes d’Etats-nations fédéraux, l’UE
construisant son propre modèle fédéral composé de nouveaux outils originaux pour répondre aux problèmes des
Etats membres.
1
- soit le retour à une souveraineté monétaire nationale pour tenter
de surmonter les divergences intra-zone euro. La pertinence d’un
euro fort est désormais posée pour certains pays confrontés à
une récession économique longue et une dévaluation salariale.
Selon P. Artus (juillet 2012), le remplacement de l’euro par les
monnaies nationales  la modification suivante du pouvoir d’achat des
monnaies nationales par rapport à celui de l’euro actuel :
Allemagne : +18%  le pouvoir d’achat du mark croîtrait de 18 %
Espagne : -20%
France : -2%  le pouvoir d’achat du franc baisserait de 2 % (faible baisse)
Italie : -12%
Pays-Bas : +16%
Belgique : -6%
Autriche : -8%
Finlande : +20%
Grèce : -30%
Portugal : -28%
Irlande : - 49%
Source : Natixis, Flash Eco, juillet 2012
Ces résultats sont cohérents avec ceux enregistrés lors de
l’épisode du SME (1979-1999). La flexibilit du taux de change peut
faciliter la reconstruction d’un processus productif, quasi impossible
avec un euro fort dans une économie mondialisée. Cependant, le
retour à des prérogatives nationales se heurte à de sérieuses
difficultés :
-l’instabilité des systèmes bancaires et financiers induits par les
conséquences d’une déréglementation (règle des 3D) mal
maîtrisée depuis une trentaine d’années (recherche effrénée de
profits que la sphère réelle ne permettait plus d’obtenir)  risque
majeur de crise systémique  pertinence d’une mutualisation des
risques  avantages d’une régulation internationale surtout en
situation de crise des dettes souveraines.
- A ce risque collectif s’ajoute pour la France, des points faibles
qu’une régulation européenne ne peut toutefois prendre en charge
:
Selon P. Artus (4 octobre 2012), «la situation de l’économie
française est préoccupante : seule économie en difficulté de la zone euro à
la fois sans aucun redressement de la compétitivité-coût, des exportations,
de la profitabilité, du niveau de gamme, du commerce extérieur, et sans
aucune politique économique n’annonçant ce redressement. Mais les
investisseurs (les marchés financiers) ont une vue positive de la France (taux
d’intérêt). Comment expliquer ce mystère français?»:
- l’ignorance ou les habitudes des investisseurs, qui ont toujours considéré la
France comme un pays du «cœur» de la zone euro ;
- la présence du CAC 40 qui fait croire aux investisseurs que la France est un
grand pays industriel alors que c’est un pays aussi désindustrialisé que l’Espagne
(en termes de part de la valeur ajoutée industrielle dans le PIB) ;
- la confiance dans l’amélioration des finances publiques malgré la dégradation
structurelle (microéconomique) de l’économie ;
- la résistance de la consommation à court terme qui est en réalité une
conséquence du mauvais fonctionnement du marché ;
- le poids des investisseurs institutionnels domestiques qui renationalisent leurs
portefeuilles ;
- l’impossibilité de vendre la dette française compte tenu de sa taille (détention
d’OAT)…
Notons que l’influence économique des Etats-Unis
(dans le paradigme techno-économique actuel qui a
épuisé ses sources d’innovation majeures) est
déclinante. Un nouveau cycle long d’activités pourrait
rendre à cette économie son rôle de leader de
l’économie mondiale en mobilisant son potentiel de
recherche et d’innovation (le premier au monde) qui
pourrait être à l’origine d’un nouveau paradigme
productif. Cela dit, il n’y a pas d’arguments économiques
justifiant la naissance de telles activités exclusivement
aux Etats-Unis, sauf au stade de leur conception.
Aujourd’hui, tout se passe comme si en
s’engageant dans la mondialisation sous l’égide de
l’OMC, les nations ont choisi de privilégier une structure
spatiale de production et de consommation qui, pour
l’heure, se construit à l’avantage de l’UE et de l’Asie…
ANNEXE
Cycle agricole et politique européenne de soutien des
prix dans le cadre de la PAC originelle
L'activité agricole est soumise aux aléas climatiques sans que
l'action des pouvoirs publics ne puisse faire autre chose que d'en
atténuer les conséquences. Cependant, il existe aussi des cycles
endogènes dans l'agriculture produits par les mécanismes de
marché eux-mêmes. Du fait des délais de production, les décisions
des agriculteurs sont basées sur les prix présents et les plans de
production peuvent s'avérer mal ajustés à la demande future. Il
s'ensuit un effet de rétroaction sur l'offre engendrant des cycles
selon le modèle en toile d'araignée ou phénomène du cobweb
(graphique 1).
Soit DD et SS respectivement les courbes de demande et d'offre
d'un produit agricole quelconque. Dans la situation initiale, le marché
est à l'équilibre (Po, Qo). Par suite d'une mauvaise récolte, la quantité
produite va s'établir en Q1. Cette réduction de l'offre va élever le prix
qui atteindra le niveau P1. A ce niveau de prix plus élevé, les
agriculteurs déterminent des plans de production qui débouchent sur
des quantités produites plus importantes atteignant le niveau Q2.
Cette offre accrue va être confrontée sur le marché à une demande
relativement inélastique ce qui va entraîner un abaissement des prix
au niveau P2. Dès lors, cette baisse des prix engendrera à son tour
une contraction des niveaux des plans de production antérieurs. La
conséquence en est une récolte d'importance moindre de niveau Q3
qui va provoquer une hausse des prix des quantités produites, etc.
Cette instabilité des prix agricoles est un phénomène connu
et persiste en dépit du progrès technique. Les producteurs et les
consommateurs peuvent être lésés par des modifications récurrentes
des prix et des quantités produites. Aussi, les pouvoirs publics
interviennent-ils pour assurer un niveau de revenu correct aux
agriculteurs et des prix raisonnables dans les livraisons aux
consommateurs.
Quels sont les mécanismes fondamentaux initiaux de la Pac ? Le choix
d'une politique interventionniste de soutien des prix des principaux produits
de base (lait, viande, céréales) régis par des organisations communes de
marché a permis d'atteindre trois objectifs fondamentaux : la croissance
des volumes produits et livrés, l'amélioration des revenus agricoles et la
modernisation de l'agriculture.
Plusieurs catégories d'organisations communes de marché (Ocm)
peuvent être distinguées. La plus importante est celle des Ocm à prix de
soutien et concerne environ les 3/4 de la production agricole (céréales, lait,
sucre, viandes bovine, porcine, etc.). Les autres Ocm sont fondées sur la
protection extérieure, sur une aide complémentaire ou sur une aide
forfaitaire.
Les Ocm de protection extérieure (environ 25% de la production agricole certains fruits et légumes, fleurs, oeufs, volailles, etc.) sont concernées par une
organisation de marché essentiellement limitée à la protection contre la concurrence
des pays tiers.
Le système d'aide complémentaire (2,5 % de la production agricole) permet
d'assurer des prix relativement bas au consommateur et le soutien des revenus des
producteurs. Pour certaines productions, il existe une aide directe complémentaire au
système de prix de soutien (blé dur) ; pour d'autres produits, l'aide sert à compenser la
faiblesse ou l'absence de protection extérieure (absence de prix de seuil ou Tec faibles
- colza, tournesol, coton, tabac).
Enfin, certaines Ocm comportent des aides forfaitaires à l'hectare ou par
quantités produites sur le modèle américain (0,6 % de la production agricole - lin,
houblon). L'ensemble des Ocm représentait au début des années 90, environ 91 % de la
production agricole.
Cela étant, le fonctionnement de l'Ocm à prix de soutien
comporte un soutien interne et un soutien externe.
Examinons tout d'abord le soutien interne. A l'intérieur de la
Communauté, le prix de marché fluctue entre deux prix - limites qui
sont des prix institutionnels ou administrés déterminés chaque
année : un prix - plafond, appelé prix indicatif, et un prix - plancher,
appelé prix d'intervention. Lorsque ces prix - limites sont atteints,
des mesures correctrices de stabilisation des marchés agricoles
sont déclenchées. Au niveau du prix indicatif (production
insuffisante), l'importation devient compétitive sur les marchés
communautaires et empêche les prix de marché de s'élever audessus de ce prix institutionnel (situation qui léserait le
consommateur). Quand le prix de marché baisse trop (production en
excédent), le prix d'intervention représente une limite à laquelle la
Cee achète "à guichets ouverts " toutes les quantités proposées
(situation limitant les pertes du producteur).
Le soutien externe présente un volet relatif à l'importation et à
l'exportation. Pour les importations en provenance des pays tiers, un
prix minimum à l'entrée de la frontière de la Cee est fixé : le prix de
seuil. Il est calculé de façon telle qu'aucun produit agricole importé
(frais de déchargement et de transport compris) ne puisse être
vendu sur les marchés de consommation communautaire à un prix
inférieur au prix indicatif. La différence entre le prix de seuil et le prix
caf de la marchandise importée est perçue sous la forme d'un
prélèvement (instrument plus efficace qu'un droit de douane).
Un tel système crée une préférence communautaire
puisqu'en situation normale, les prix de marché se situent au
dessous du prix indicatif. Pour les exportations, dans la mesure où
les prix européens s'établissent généralement au-dessus des prix
mondiaux, des subventions appelées restitutions sont octroyées aux
exportateurs pour combler la différence entre les prix de marché
communautaires et les prix mondiaux.
Ce dispositif permettant l’affirmation d‘une préférence
communautaire, mettant l’UE à l’abri des fluctuations
(parfois fortes) des prix sur les marchés agricoles
mondiaux a été supprimé par les dispositions de l’accord
de l’Uruguay round qui ont aboli le mécanisme des
prélèvements agricoles pour lui substituer des équivalents
tarifaires (et un calendrier de désarmement de ces
nouvelles protections tarifaires). L’accord de Marrakech
met un terme à la préférence communautaire et contribu à
internationaliser l’agriculture européenne (aujourd’hui,
seuls des prix d’intervention sont fixés par les instances
agricoles européennes).
Les prix institutionnels européens qui ont évolué à la
baisse depuis 1992 ont été compensés par un régime
d’aides directes (dégressives et conditionnelles) aux
agriculteurs sur le modèle des deficiency payments
étasuniens.
Chapitre 1 - Les relations
Commerciales internationales
Les avantages comparatifs ?
« C'est sans doute la théorie la plus brillante
de la science économique. » OMC
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