Stratification du risque de la maladie coronarienne (<1Mo)

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Stratification du risque de la
maladie coronarienne
Micha T. Maeder 1 et Michael J. Zellweger 2
les cons&eacute;quences pathophysiologiques de la
1
Cardiologue FMH, Baker IDI Heart and
coronaropathie (isch&eacute;mie), alors que l’angio-
Diabetes Institute/Heart Center, Alfred
graphie coronarienne classique et sa variante
Hospital, PO Box 6492, St Kilda Road
non invasive par tomographie comput&eacute;ris&eacute;e vi-
2
Central, Melbourne 8008 Victoria, Australia,
sualise le corollaire morphologique (st&eacute;nose
[email protected].
coronarienne). De prime abord, les r&eacute;sultats de
Cardiologue FMH, Chef de Clinique et
ces deux approches peuvent para&icirc;tre diver-
Directeur de la Division de Cardiologie
gents, notamment chez des patients asympto-
nucl&eacute;aire, Kardiologische Klinik, Universi-
matiques; ainsi, la normalit&eacute; d’un test non
t&auml;tspital Basel, Petersgraben 4, 4031 Basel,
invasif &agrave; la recherche d’isch&eacute;mie ne garantit
[email protected].
pas l’indemnit&eacute; des coronaires, mais rend
probable l’absence d’une st&eacute;nose h&eacute;modyna-
R&eacute;sum&eacute;
miquement significative et, par voie de cons&eacute;-
La maladie coronarienne fait partie des causes
quence, est de bon pronostic.
de d&eacute;c&egrave;s majeures. La d&eacute;tection pr&eacute;coce de la
maladie et son traitement est d&egrave;s lors primordiale. Chez les individus asymptomatiques,
une estimation du risque global faite &agrave; partir
des facteurs de risque cardio-vasculaire classiques est la base d’une stratification du risque
d&eacute;terminant les mesures prophylactiques primaires. Exception faite de quelques situations
bien d&eacute;finies, des investigations compl&eacute;mentaires pouss&eacute;es ne sont pas pr&eacute;conis&eacute;es pour
le collectif d’individus asymptomatiques faute
de m&eacute;thodes simples, pr&eacute;cises, &eacute;conomiques
et sans risques. Si un tel examen est effectu&eacute;,
le choix se portera sur le proc&eacute;d&eacute; adapt&eacute; &agrave; la
situation individuelle de mani&egrave;re optimale.
Il convient de se souvenir qu’une ergom&eacute;trie
ou une imagerie sous stress met en &eacute;vidence
Introduction
La maladie coronarienne est en t&ecirc;te de
liste des causes de d&eacute;c&egrave;s dans le
monde entier. L’importance majeure de
la pr&eacute;vention, du d&eacute;pistage et d’un traitement ad&eacute;quat est incontestable; en
revanche, la mise en application pratique de telles mesures est difficile
faute de m&eacute;thodes simples, pr&eacute;cises,
&eacute;conomiques et sans risque, adapt&eacute;es
&agrave; un screening &agrave; large &eacute;chelle. Cette
revue se focalise sur l’estimation de la
probabilit&eacute; d’une coronaropathie chez
des individus* asymptomatiques, sur
les tests compl&eacute;mentaires disponibles
et l’interpr&eacute;tation de leurs r&eacute;sultats.
ASA SVV Infom&eacute;d 2008/2 Des risques de la maladie coronarienne
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La mise en &eacute;vidence de calcifications
coronariennes (corrolaire anatomique)
est preuve d’une coronaropathie &agrave; un
stade ind&eacute;tectable par ergom&eacute;trie
(documentation de cons&eacute;quences pathophysiologiques). Conform&eacute;ment &agrave;
l’illustration 1, plusieurs tests sont
disponibles, bas&eacute;s sur des principes
diff&eacute;rents, dont la valeur se positionne
toutefois de mani&egrave;re pr&eacute;pond&eacute;rante
(Annotation &agrave; ins&eacute;rer:* par simplification, ce
manuscrit utilise exclusivement la forme masculine recouvrant les deux sexes)
Principe de la stratification du risque
chez des individus asymptomatiques
La symptomatologie d’angine de poitrine ne repr&eacute;sente que la pointe de
l’iceberg de la &laquo;cascade isch&eacute;mique&raquo;
(illustration 1).
Illustration 1: Principe de la &laquo;cascade isch&eacute;mique&raquo;
Des alt&eacute;rations morphologiques pr&eacute;coces silencieuses pr&eacute;c&egrave;dent l’isch&eacute;mie symptomatique associ&eacute;e &agrave; des l&eacute;sions plus avanc&eacute;es. Les m&eacute;thodes d’investigation cit&eacute;es mettent en
&eacute;vidence des stades vari&eacute;s de la maladie coronarienne; de ce fait et de prime abord, les
r&eacute;sultats peuvent para&icirc;tre divergents.
CAC-Score: &laquo;Coronary artery calcium-Score&raquo;, Coronarographie: Angiographie coronarienne,
CT: &laquo;Computerized tomography&raquo; coronarienne, Dysfonction VG: Dysfonction ventriculaire
gauche, &Eacute;cho: &Eacute;chocardiographie, IRM: Imagerie par r&eacute;sonance magn&eacute;tique cardiaque,
SPM: Scintigraphie de perfusion du myocarde.
PATHOPHYSIOLOGIE
Anamn&egrave;se
Ergom&eacute;trie
Angor
&Eacute;cho, IRM, SPM
SPM, IRM, &Eacute;cho
Coronarographie, CT
Sous-d&eacute;nivellation ST
Dysfonction VG
Perfusion
St&eacute;nose coronarienne
CT (CAC-Score)
Calcification coronarienne
MORPHOLOGIE
ISCH&Eacute;MIE &Oslash;
ISCH&Eacute;MIE
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dans le domaine du diagnostic et/ou de
la stratification du risque de patients
symptomatiques, dont la probabilit&eacute;
d’une coronaropathie sous-jacente est
moyenne &agrave; &eacute;lev&eacute;e.
Le but de la stratification du risque chez
l’individu asymptomatique est l’appr&eacute;ciation de la probabilit&eacute; de survenue
d’une manifestation coronaropathique
dans le long terme permettant de d&eacute;terminer la mise en application de mesures prophylactiques primaires ad&eacute;quates. La stratification de risque s’appuie
principalement sur l’&eacute;valuation des facteurs de risque cardio-vasculaire classiques, en bonne partie modifiables
(nicotine, hypertension, cholest&eacute;rol, diab&egrave;te …). Le risque global individuel calcul&eacute; sur la base de ces donn&eacute;es d&eacute;terminera la nature de la prophylaxie
primaire (mesures non m&eacute;dicamenteuses ou pharmacoth&eacute;rapie). Les scores
de Framingham, PROCAM ou AGLA
(AGLA-Kalkulator sur www.agla.ch) &eacute;valuent le risque eu &eacute;gard &agrave; la survenue
d’une manifestation coronarienne &agrave; 10
ans. Ces diff&eacute;rents scores s’appuient
sur un m&ecirc;me principe tout en int&eacute;grant
certaines particularit&eacute;s g&eacute;ographiques
ou ethniques.
Un taux inf&eacute;rieur &agrave; 10% repr&eacute;sente un
risque faible &agrave; 10 ans, un taux &agrave; 10-20%
un risque moyen et un taux sup&eacute;rieur &agrave;
20% un risque &eacute;lev&eacute;.
A l’heure actuelle, toute investigation
allant au-del&agrave; d’une d&eacute;termination simple du profil de risque est non pr&eacute;conis&eacute;e pour une population asymptomatique, la pr&eacute;valence d’une coronaropathie &eacute;tant dans ce collectif clairement
inf&eacute;rieure &agrave; celle d’un collectif de patients symptomatiques (illustration 2);
de plus, les m&eacute;thodes d’examen disponibles sont compliqu&eacute;es, on&eacute;reses et
insuffisamment pr&eacute;cises pour un screening. Une attitude plus agressive face &agrave;
des individus asymptomatiques avec
risque cardio-vasculaire interm&eacute;diaire
est en discussion avec recours &eacute;ventuel
&agrave; des tests tel le &laquo;coronary artery calcium (CAC) score&raquo;; suivant le r&eacute;sultat,
une cat&eacute;gorisation &laquo;haut risque&raquo; serait
possible ouvrant la voie &agrave; l’instauration
d’un traitement agressif d’hypertension
ou de dyslipid&eacute;mie dans le but d’une r&eacute;duction pr&eacute;coce du risque coronarien.
En revanche, des investigations compl&eacute;mentaires sont inutiles en cas d’une
appr&eacute;ciation &laquo;haut risque&raquo; d’un individu asymptomatique; en effet et selon
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Illustration 2 Pr&eacute;valence de la coronaropathie en fonction du sexe,
de l’&acirc;ge et des sympt&ocirc;mes.
1: Angor typique
2: angor atypique
3: Douleurs thoraciques non-cardiog&egrave;nes
4: Absence de sympt&ocirc;mes.
Illustration modifi&eacute;e d’apr&egrave;s : Diamond, G.A. and Forrester, J.S., Analysis of probability as an
ƃ
60
80
1
40
2
20
Pr&eacute;valence de la coronaropathie
100%
aid in the clinical diagnosis of coronary-artery disease, N Engl J Med, 1979, 300, p. 1350-8
3
0
4
30
40
50
60
70
80
90
Ƃ
1
60
80
2
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3
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0
Pr&eacute;valence de la coronaropathie
100%
Ag&eacute;
Ag&eacute;
30
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50
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70
80
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le th&eacute;or&egrave;me de Beyes, cette appr&eacute;ciation ne changera pas quelque soit le
r&eacute;sultat des examens compl&eacute;mentaires
(positif ou n&eacute;gatif ). Dans ce groupe de
patients, l’indication d’un traitement
prophylactique primaire selon les directives en vigueur est de toute fa&ccedil;on donn&eacute;e et cela ind&eacute;pendamment de toute
investigation compl&eacute;mentaire. Chez un
patient &agrave; haut risque m&ecirc;me un examen
n&eacute;gatif ne rassure pas, tant en raison de
la nature de la maladie coronarienne
que des tests utilis&eacute;s: d’une part, les
plaques non st&eacute;nosantes &eacute;chappent &agrave;
toute d&eacute;tection fiable par les m&eacute;thodes
d’examens disponibles, tout en &eacute;tant
source d’&eacute;v&egrave;nements coronariens aigus
sur rupture; d’autre part, la sensitivit&eacute;
des tests disponibles ne permet pas un
diagnostic infaillible d’une maladie
coronarienne m&ecirc;me significative.
Le cas des diab&eacute;tiques est particulier en
ce sens que l’absence de sympt&ocirc;mes
n’exclut pas la pr&eacute;sence d’une isch&eacute;mie
d’effort significative; compte tenu de
ceci, une strat&eacute;gie plus lib&eacute;rale est propos&eacute;e pour ce collectif bien d&eacute;fini, afin
d’identifier ceux susceptibles de b&eacute;n&eacute;ficier d’une investigation invasive.
Retenons qu’en cas d’absence de sympt&ocirc;mes il n’y a que rarement indication
d’ un test non-invasif; en pratique pourtant, de tels examens sont souvent
effectu&eacute;s, engendrant en cas de fausse
positivit&eacute; de nouvelles investigations
inutiles et on&eacute;reuses. Nous vous proposons ci-apr&egrave;s une revue succincte des
diff&eacute;rentes investigations cardiologiques
non-invasives et leur interpr&eacute;tation dans
le contexte clinique.
ECG &agrave; l’effort
La consommation d’oxyg&egrave;ne augmente
&agrave; l’effort physique en parall&egrave;le &agrave; l’augmentation de la fr&eacute;quence cardiaque
et de la tension art&eacute;rielle. La pr&eacute;sence
d’une st&eacute;nose coronarienne limite l’accroissement du flux sanguin, provoquant une isch&eacute;mie, qui peut se manifester par de l’angor et/ou des modifications ECG; toutefois, jusqu’&agrave; 60% des
&eacute;pisodes isch&eacute;miques sont silencieux.
En pr&eacute;sence d’un ECG normal (sous-d&eacute;nivellation ST &lt;0.1mV par rapport au
segment PQ) et d’une tol&eacute;rance &agrave; l’effort suffisante, c’est l’ECG &agrave; l’effort qui
reste l’examen de premier choix. Une
augmentation de la fr&eacute;quence cardiaque &agrave; au moins 85% de la fr&eacute;quence
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pr&eacute;dite est n&eacute;cessaire pour valider un
test (la fr&eacute;quence cardiaque pr&eacute;dite est
en fonction de l’&acirc;ge: 220 – &acirc;ge en ann&eacute;es). Une sous-d&eacute;nivellation horizontale ou descendante du segment ST
d’au moins 0.1 mV est consid&eacute;r&eacute;e &laquo;positive&raquo;, soit indicative d’une isch&eacute;mie
myocardique induite par l’effort. Un segment ST abaiss&eacute; ascendant est peu sp&eacute;cifique et n’est consid&eacute;r&eacute; positif qu’en
cas d’une ascension lente et d’une sousd&eacute;nivellation d’au moins 0.15mV. De
plus, les &eacute;l&eacute;ments suivants sont &agrave; prendre en consid&eacute;ration &eacute;galement:
1. En l’absence d’un effort suffisant
(augmentation de la fr&eacute;quence cardiaque), le test n’est pas n&eacute;gatif
mais ininterpr&eacute;table.
2. Une isch&eacute;mie se d&eacute;veloppe lentement et persiste pour un certain
temps (sur le plan formel,
trois contractions du cœur sont exig&eacute;es avec une ligne ST stable; des
modifications &laquo;fugaces&raquo; sont suspectes d’&ecirc;tre d’une origine &laquo;faussement positive&raquo;).
3. Plus la sous-d&eacute;nivellation ST est pr&eacute;coce et profonde, plus l’isch&eacute;mie est
importante.
4.Les d&eacute;rivations touch&eacute;es par des sous-
d&eacute;nivellations ST ne permettent pas la
localisation de l’isch&eacute;mie; l’abaissement du segment ST est le plus prononc&eacute; dans les d&eacute;rivations pr&eacute;cordiales V5-V6 et cela ind&eacute;pendamment
de la localisation de l’isch&eacute;mie.
5. En cas de sous-d&eacute;nivellation ST pr&eacute;existante de &gt; 0.1mV, l’interpr&eacute;tation
d’un test d’effort sera incertaine. En
cas de bloc de branche gauche, de
pr&eacute;excitation, d’un pace-maker ou de
la digitale, les modifications du segment ST sous effort sont ininterpr&eacute;tables et une ergom&eacute;trie &agrave; but diagnostic est d&egrave;s lors &agrave; proscrire &agrave; la faveur
d’un proc&eacute;d&eacute; par imagerie.
Une m&eacute;ta-analyse chiffre la sensitivit&eacute;
de l’ergom&eacute;trie &agrave; 68% et la sp&eacute;cificit&eacute; &agrave;
77%; le test est moins sensitif et probablement moins sp&eacute;cifique chez les
femmes comparativement aux hommes.
En dehors des modifications du segment ST, l’ergom&eacute;trie fournit d’autres
informations pronostiques utiles: Inadaptation &agrave; l’effort, incomp&eacute;tence chronotrope, r&eacute;cup&eacute;ration lente d’une fr&eacute;quence cardiaque normale (&laquo;heart rate
recovery&raquo;) et adaptation tensionnelle
faible, &eacute;l&eacute;ments qui sont tous associ&eacute;s
&agrave; un pronostic d&eacute;favorable.
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Une ergom&eacute;trie visant &agrave; appr&eacute;cier une
probabilit&eacute; de maladie coronarienne
n’est pas pr&eacute;conis&eacute;e pour les individus
asym- ptomatiques non s&eacute;lectionn&eacute;s.
L’approche pour le collectif des diab&eacute;tiques est r&eacute;gie par des indications
sp&eacute;ciales d&eacute;termin&eacute;es en fonction de
facteurs de risque suppl&eacute;mentaires et
/ou de co-morbidit&eacute;s. Une part significative de ces patients, &eacute;tant incapables
de fournir une charge physique suffisante, doivent &ecirc;tre investigu&eacute;s par imagerie m&eacute;dicale combin&eacute;e &agrave; une charge
pharm- cologique (cf scintigraphie de
perfusion myocardique). L’ergom&eacute;trie est
une moda- lit&eacute; d’investigation ad&eacute;quate
pour le groupe d’individus asymptomatiques pr&eacute;sentant de multiples facteurs
de risque cardio-vasculaire ou au moins
une probabilit&eacute; interm&eacute;diaire de coronaropathie ainsi que pour des hommes
&gt; 45 ans ou des femmes &gt; 55 ans, qui: a)
d&eacute;butent &agrave; nouveau un entra&icirc;nement
physique, b) exercent une profession
ayant une incidence significative sur la
s&eacute;curit&eacute; d’autres personnes (p.ex. pilotes) ou c) pr&eacute;sentent des co-morbidit&eacute;s associ&eacute;es &agrave; la coronaropathie (p.ex.
art&eacute;riopathie obstructive p&eacute;riph&eacute;rique).
Scintigraphie de perfusion
du myocarde (SPM)
La SPM documente le trouble de la perfusion dont le r&eacute;sultat sera l’isch&eacute;mie.
La perfusion myocardique peut &ecirc;tre mesur&eacute;e au repos et &agrave; l’effort apr&egrave;s injection d’un marqueur radioactif (p. ex.
Technetium ou Thallium) gr&acirc;ce &agrave; sa distribution myocardique proportionnelle
au flux sanguin coronarien. Un d&eacute;faut
de perfusion &agrave; l’effort mais non pas au
repos est indicatif d’une isch&eacute;mie. Un
d&eacute;faut de perfusion pr&eacute;sent tant au repos qu’&agrave; l’effort par contre, repr&eacute;sente
une cicatrice. Contrairement &agrave; l’ergom&eacute;trie, la SPM permet la d&eacute;termination
tant de la localisation que de l’&eacute;tendue
de l’isch&eacute;mie/cicatrice. Dans la m&ecirc;me
s&eacute;ance (sous r&eacute;serve d’un rythme sinusal) il sera possible de mesurer les volumes ventriculaires gauches et la fraction d’&eacute;jection.
La sensitivit&eacute; de la SPM est sup&eacute;rieure
(85-90%) &agrave; celle de l’ergom&eacute;trie. Si toujours possible, la charge sera physique
en raison des informations suppl&eacute;mentaires sur l’adaptation &agrave; l’effort et les
donn&eacute;es cliniques et &eacute;lectriques (angor, intervalle ST). En cas d’inadaptation &agrave; l’effort du patient, une charge
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pharmacologique sera appliqu&eacute;e moyennant vasodilatation par Ad&eacute;nosine ou
Dipyridamole (induction d’un &laquo;coronary
steel&raquo;) ou alors moyennant une augmentation de la fr&eacute;quence cardiaque et
du besoin en oxyg&egrave;ne myocardique par
Dobutamine. Les aspects positifs de la
SPM sont nombreux et comportent notamment: Informations diagnostiques
et pronostiques fiables ind&eacute;pendamment de l’&eacute;tat du patient et de ses ant&eacute;c&eacute;dents (p. ex. aussi en pr&eacute;sence de cicatrices &eacute;tendues, fibrillation auriculaire ou bloc de branche); applicabilit&eacute;
de toutes les modalit&eacute;s de stress disponibles lors d’une SPM; &eacute;tant un proc&eacute;d&eacute;
bien standardis&eacute; et largement ind&eacute;pendant de l’examinateur, la SPM se pr&ecirc;te
bien &agrave; une utilisation &agrave; large &eacute;chelle en
tant que m&eacute;thode de screening efficace
et &eacute;conomique &agrave; vis&eacute;e appr&eacute;ciative de
la maladie coronarienne. Les aspects
n&eacute;gatifs englobent son acc&egrave;s limit&eacute; (infrastructure de m&eacute;decine nucl&eacute;aire),
ses frais et l’exposition &agrave; la radiation.
Il n’y pas d’indication claire eu &eacute;gard
aux patients asymptomatiques. La SPM
est une option d’investigation raisonnable pour les patients (notamment les
diab&eacute;tiques) connaissant des indica-
tions sp&eacute;ciales telles que mentionn&eacute;es
dans le chapitre pr&eacute;c&eacute;dent d&eacute;volu &agrave;
l’ECG d’effort. Le pronostic des patients
sans cicatrice ni isch&eacute;mie &agrave; la SPM est
excellent avec un taux d’&eacute;v&egrave;nements
myocardiques ou de d&eacute;c&egrave;s &lt; 1% et cela
m&ecirc;me en pr&eacute;sence d’une coronaropathie.
Echocardiographie de stress
L’&eacute;chocardiographie de stress met en
&eacute;vidence le trouble de la contractilit&eacute; induit par l’isch&eacute;mie. Le stress peut &ecirc;tre
physique ou pharmacologique (Dobutamine, &eacute;ventuellement avec Atropine
en plus).
Le stress provoque initialement une
augmentation de la contractilit&eacute; de
toutes les parois du myocarde. Sous
charge croissante, les r&eacute;gions isch&eacute;miques pr&eacute;sentent une contractilit&eacute; diminu&eacute;e (hypokin&eacute;sie), absente (akin&eacute;sie) ou paradoxale (dyskin&eacute;sie). Tout
comme la SPM, l’&eacute;chocardiographie de
stress permet &eacute;galement une localisation de l’isch&eacute;mie ainsi que d’autres
constatations morphologiques (p. ex. hypertrophie ventriculaire gauche). A l’instar de l’ergom&eacute;trie, l’&eacute;chocardiographie
de stress ne n&eacute;cessite que peu d’infrastructures et n’expose pas &agrave; des rayons.
ASA SVV Infom&eacute;d 2008/2 Des risques de la maladie coronarienne
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L’interpr&eacute;tation est difficile en cas de
fen&ecirc;tre sonographique sous-optimale
(Ob&eacute;sit&eacute;, COPD). L’interpr&eacute;tation est
fortement tributaire du savoir de l’examinateur et sera difficile en cas de bloc
de branche gauche, pacing et de troubles de la motilit&eacute; pari&eacute;tale pr&eacute;existants. La sensitivit&eacute; de l’&eacute;chocardiographie de stress est l&eacute;g&egrave;rement inf&eacute;rieure
&agrave; celle de la SPM, sa sp&eacute;cificit&eacute; en revanche est meilleure. Les deux modalit&eacute;s sont &eacute;quivalentes pour beaucoup
de patients et le choix sera dict&eacute; par la
disponibilit&eacute; et l’expertise du centre
d’investigations. En pr&eacute;sence de patients asymptomatiques avec un risque
coronarien faible &agrave; interm&eacute;diaire, les
&laquo;guidelines&raquo; consid&egrave;re le recours &agrave;
l’&eacute;chocardiographie de stress disproportionn&eacute;; les r&eacute;sultats sont peu clairs
en l’absence de sympt&ocirc;mes m&ecirc;me en
cas d’un risque coronarien &eacute;lev&eacute;.
CT coronarienne
La tomographie comput&eacute;ris&eacute;e permet
une mesure du calcium coronaire (CACscore) d’une part, et d’autre part une
visualisation directe des coronaires (angiographie coronarienne non-invasive).
Le CAC-score est le t&eacute;moin quantitatif
de la pathologie vasculaire, il a une
dimension pronostique et est dans une
large mesure un reflet de l’&acirc;ge biologique de l’individu. Un CAC-score &agrave; 0
rend l’existence d’une st&eacute;nose coronarienne significative tr&egrave;s invraisemblable et se trouve associ&eacute; &agrave; un bon pronostic pour un horizon de 2-5 ans. La
proposition a &eacute;t&eacute; faite qu’un CAC-score
tr&egrave;s bas ou tr&egrave;s &eacute;lev&eacute; chez un individu
asymptomatique avec un taux interm&eacute;diaire dans la stratification du risque
coronarien puisse donner naissance &agrave;
un reclassement dans le groupe &agrave; bas
ou &agrave; haut risque respectivement.
L’imagerie coronarienne exacte par CTangiographie reste inf&eacute;rieure &agrave; l’examen par angiographie invasive et cela
malgr&eacute; de gros progr&egrave;s techniques.
Ainsi, plus la calcification des vaisseaux
est &eacute;lev&eacute;e, plus l’&eacute;valuation de la lumi&egrave;re coronarienne sera difficile. De
plus, l’exposition aux rayons X pour les
deux formes d’investigations est d&eacute;favorable &agrave; l’approche par CT-angiographie lors d’utilisation d’un &eacute;quipement
conventionnel. Un autre aspect n&eacute;gatif
sont les nombreux r&eacute;sultats douteux
possibles, n&eacute;cessitant un encha&icirc;nement avec d’autres investigations compl&eacute;mentaires co&ucirc;teuses et associ&eacute;es &agrave;
ASA SVV Infom&eacute;d 2008/2 Des risques de la maladie coronarienne
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une exposition &agrave; rayons X et produit de
contraste (telles IRM cardiaque ou angiographie invasive); ces situations
sont: R&eacute;sultat faussement positif (exclusion d’une coronaropathie au moyen
d’une angiographie invasive), r&eacute;sultat
r&eacute;ellement positif (angiographie invasive avant intervention) ou r&eacute;sultat
faussement n&eacute;gatif (lev&eacute; du doute persistante moyennant des examens plus
pouss&eacute;s). Ainsi, la CT-angiographie coronarienne n’est r&eacute;ellement indiqu&eacute;e
qu’en cas d’une tr&egrave;s faible probabilit&eacute;
d’un r&eacute;sultat normal, &eacute;vitant l’encha&icirc;nement d’une coronarographie conventionnelle, telle la situation par exemple
d’un individu asymptomatique avec
examen fonctionnel pr&eacute;alable (ergom&eacute;trie etc.) douteux.
IRM cardiaque
L’imagerie par r&eacute;sonance magn&eacute;tique
(IRM) cardiaque fournit des images du
cœur d’excellente qualit&eacute; et cela presque ind&eacute;pendamment de la constitution de l’individu; c’est pour cette raison que l’IRM cardiaque s’est profil&eacute;e
comme &eacute;talon d’or de la quantification
des volumes et de la fonction ventriculaire gauche. De plus, ce proc&eacute;d&eacute; permet une visualisation non seulement
fonctionnelle de tissu fibrotique (en g&eacute;n&eacute;ral cicatriciel) mais &eacute;galement morphologique en utilisant des s&eacute;quences
retard&eacute;es de 10-20 minutes par rapport
&agrave; l’application du produit de contraste
(&laquo;delayed enhancement imaging&raquo;).
Ainsi, l’IRM cardiaque est en mesure
d’identifier un infarctus myocardique
ancien, m&ecirc;me petit et muet. La mani&egrave;re
d’int&eacute;gration de ces donn&eacute;es dans des
algorithmes d’investigation est pour
l’instant incertaine. La visualisation directe des coronaires reste une difficult&eacute;
pour l’IRM cardiaque, except&eacute; la mise
en &eacute;vidence d’un point de d&eacute;part anormal du vaisseau.
D’une part et en analogie &agrave; l’&eacute;chocardiographie de stress, la stress-IRM sous
Dobutamine permet une &eacute;valuation de
la motilit&eacute; des parois myocardiques;
d’autre part et sous charge phamacologique par Ad&eacute;nosine, une visualisation
directe de la perfusion est obtenue
gr&acirc;ce au principe du &laquo;first pass&raquo;. Apr&egrave;s
application par voie veineuse, le produit de contraste contenant du Gadolinium peut &ecirc;tre suivi lors de son passage du coeur droit vers le cœur gauche
et ensuite durant sa phase myocardique.
ASA SVV Infom&eacute;d 2008/2 Des risques de la maladie coronarienne
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L’image myocardique est normalement
homog&egrave;ne, alors qu’en cas d’isch&eacute;mie,
la visualisation par le produit de
contraste de la r&eacute;gion concern&eacute;e sera
retard&eacute;e. Dans une petite &eacute;tude pr&eacute;liminaire, la sensitivit&eacute; et la sp&eacute;cificit&eacute; de
l’IRM cardiaque sous perfusion semblent comparables &agrave; celles de la SPM;
toutefois, la fiabilit&eacute; de l’ex&eacute;cution pratique de cet examen n’est pas encore
optimale.
Angiographie coronarienne
L’angiographie coronarienne reste l’&eacute;talon d’or dans le diagnostic de la coronaropathie gr&acirc;ce &agrave; une imagerie &agrave; haute
r&eacute;solution de la lumi&egrave;re des coronaires
et cela jusqu’en p&eacute;riph&eacute;rie. A l’heure
actuelle, elle est en r&egrave;gle g&eacute;n&eacute;rale pratiqu&eacute;e en ambulatoire. C’est un proc&eacute;d&eacute; invasif grev&eacute; d’un risque de complications faible, qui ne seront que
rarement s&eacute;v&egrave;res (h&eacute;morragie, AVC); il
requi&egrave;re l’utilisation de produits de
contraste en application intra-art&eacute;rielle
potentiellement n&eacute;phrotoxique et expose aux rayons X. Cet examen confirme
de mani&egrave;re d&eacute;finitive la pr&eacute;sence d’une
coronaropathie, mais ne peut se prononcer avec certitude sur la pertinence
fonctionnelle d’une &eacute;ventuelle st&eacute;nose
(isch&eacute;mie). En cas de doute, l’angiographie sera compl&eacute;t&eacute;e par un examen
fonctionnel renseignant sur l’&eacute;ventualit&eacute; d’une isch&eacute;mie induite.
La coronarographie est en principe indiqu&eacute;e en cas d’une probabilit&eacute; &eacute;lev&eacute;e de
st&eacute;noses significatives n&eacute;cessitant r&eacute;vascularisation pour des raisons de pronostic (st&eacute;nose du tronc commun ou
maladie tritronculaire s&eacute;v&egrave;re). Cette
situation est r&eacute;alis&eacute;e lorsque des examens non-invasifs r&eacute;v&egrave;lent un risque
&eacute;lev&eacute; d’isch&eacute;mie s&eacute;v&egrave;re ou de mort cardiaque subite (tableau 1). Cette approche s’applique aussi &agrave; des patients
asymptomatiques et cela m&ecirc;me en l’absence d’&eacute;tudes pertinentes. Comme
d&eacute;j&agrave; pr&eacute;cis&eacute;, la recherche de telles situations &agrave; haut risque se limitera dans
le groupe des individus asymptomatiques &agrave; ceux pr&eacute;sentant une haute pr&eacute;valence de coronaropathie. Une indication incertaine quoique accept&eacute;e concerne le groupe limit&eacute; de personnes
dont l’activit&eacute; professionnelle est d&eacute;terminante pour la s&eacute;curit&eacute; d’autrui
(pilotes, conducteurs de locomotives)
pr&eacute;sentant des tests non-invasifs anormaux, mais non suggestifs d’un haut
risque.
ASA SVV Infom&eacute;d 2008/2 Des risques de la maladie coronarienne
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Tableau 1
Constatations de haut risque
• Fonction ventriculaire gauche fortement limit&eacute;e au repos
(&laquo;left ventricular ejection fraction&raquo; = LVEF &lt;35%)
Constatations de
haut risque (Mortalit&eacute; &gt; 3% par an)
r&eacute;sultant de tests
non-invasifs
• Sous-d&eacute;nivellation significative du segment ST et angor pour une faible charge avec inadaptation &agrave;
l’effort ergom&eacute;trique
• Fonction ventriculaire gauche s&eacute;v&egrave;rement limit&eacute;e &agrave; l’effort (LVEF &lt; 35%)
• D&eacute;faut de perfusion &eacute;tendu sous stress (notamment de la paroi ant&eacute;rieure)
• D&eacute;fauts de perfusion sous stress mod&eacute;r&eacute;ment &eacute;tendus mais multiples
• D&eacute;faut de perfusion &eacute;tendu fixe avec &laquo;transient ischemic dilatation&raquo; (TID) ou captation du marqueur
augment&eacute;e dans les poumons (arguments tous deux en faveur d’une dysfonction ventriculaire gauche
s&eacute;v&egrave;re &agrave; l’effort)
• D&eacute;faut de perfusion sous stress avec TID ou captation du marqueur augment&eacute;e dans les poumons
• Troubles de la motilit&eacute; pari&eacute;tale lors d’une &eacute;chocardiographie de stress (&gt; 2 segments) sous faible
dose de Dobutamine (&lt; 10 mg/kg/min) ou associ&eacute; &agrave; une fr&eacute;quence cardiaque basse
(&lt; 120 pulsations/min)
• Arguments en faveur d’isch&eacute;mie &eacute;tendue lors d’une &eacute;chocardiographie de stress
En d’autres termes, une coronarographie n’est pas indiqu&eacute;e obligatoirement
pour tout patient pr&eacute;sentant une anomalie dans un test non-invasif. Les d&eacute;cisions th&eacute;rapeutiques (Aspirine, Statine) ne d&eacute;pendent pas de l’angiographie et l’angiographie suivie d’une
&eacute;ventuelle intervention ne modifiera
pas le pronostic.
Conflits d’int&eacute;r&ecirc;t
Aucun
Contribution financi&egrave;re
M. T. Maeder: Fond National Suisse
(Grant PBZHB-121007)
Litt&eacute;rature
De la litt&eacute;rature couvrant tous les aspects de cet article est disponible sur
demande aupr&egrave;s des auteurs
ASA SVV Infom&eacute;d 2008/2 Des risques de la maladie coronarienne
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