Fluctuations et conjoncture: une analyse de l’offre et de la demande globales @ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES Janvier 2001 Première partie Analyse du marché des biens et services: l’offre globale • Nous avons vu que le PIB pouvait croître avec le nombre total d’heures travaillées (L·h) et avec la productivité des heures travaillées (y). • En règle générale, la productivité augmente avec l’augmentation du stock de capital par heure travaillée (K/Lh) et avec le progrès technologique. • A court terme cependant, le stock de capital (la taille des infrastructures de production, la machinerie et l’équipement en place, etc.) est fixe et la technologie est donnée. Il est donc difficile d’augmenter la productivité. Analyse du marché des biens et services: l’offre globale • L’augmentation de la production dépend donc essentiellement de l’augmentation des heures travaillées (Lh). • Pour augmenter les heures travaillées, il y a deux solutions: – Recruter de nouveaux employés au sein de la population active et augmenter L – Allonger la durée moyenne de travail, c’est-à-dire augmenter h. • Or, ces heures travaillées ont un coût et le coût par unité produite n’est pas indépendant du niveau de production. Dérivation de la courbe d’offre globale • Faisons les hypothèses suivantes, raisonnables à court terme: – – – – La population active est fixe Le stock de capital est fixe La technologie est donnée. Le prix des intrants (travail, matières premières, énergie, etc.) sont fixes. • Pour augmenter la production, on doit recruter du personnel et/ou augmenter les heures travaillées en moyenne par les employés. Sous de telles hypothèses, est-il possible d’envisager une courbe d ’offre globale de cette nature ? P OG (relation d’équilibre entre le niveau de production et le niveau général des prix Y • La réponse est négative • P • – Ce personnel qualifié doit faire des heures supplémentaires généralement rémunérées à un taux horaire plus élevé. – On embauche du personnel moins qualifié dont la productivité est moins élevée. OG Y0 Y1 Le taux de chômage diminue en même temps que Y augmente Y Les augmentations de production (comme par exemple de Y0 à Y1) entraînent une augmentation de l’emploi. A population active constante, cette augmentation de l’emploi diminue le taux de chômage. Plus le taux de chômage se rapproche de sa limite inférieure, plus il est difficile de recruter du personnel qualifié. • Ces deux raisons expliquent pourquoi le coût par unité produite devrait augmenter avec l’augmentation de la production lorsque le taux de chômage se rapproche de sa limite inférieure. Le graphique suivant illustre la relation étroite entre le taux de croissance de la production réelle et le taux de croissance de l’emploi au Canada, entre 1980 et 1999: 8 6 6 4 4 2 2 0 0 -2 -2 -4 -4 -6 -6 80 82 84 86 88 PIB réel 90 92 94 Emploi 96 98 La limite inférieure du taux de chômage • Il y a toujours une partie de la population active qui se trouve entre deux emplois ou qui, nouvellement entrée sur le marché du travail, se trouve en chômage de courte durée en train de rechercher un emploi (taux de chômage frictionnel). • Une autre partie est régulièrement en chômage et ce, pour de longues périodes. Il s’agit des personnes qui, faute de compétences adéquates ou de mobilité, trouvent difficilement une place sur le marché du travail (taux de chômage structurel). • La somme des taux de chômage frictionnel et structurel (parfois appelé taux de chômage naturel) constitue la limite inférieure du taux de chômage. • Le taux de chômage structurel pouvant évoluer dans le temps, la limite inférieure du taux de chômage peut donc varier d’un cycle économique à l’autre. La courbe d’offre globale P OG Zone où le taux de chômage se rapproche de sa limite inférieure Zone à taux de chômage élevé Lorsque l ’économie fonctionne à pleine capacité et que le taux de chômage est à sa limite inférieure, on ne peut plus augmenter l’offre globale Y Les déplacements de la courbe d’offre globale • La courbe d’offre globale se déplacera dès lors que l’une des hypothèses suivantes sera relâchée: – – – – La population active fixe Le stock de capital fixe La technologie donnée. La fixité du prix des intrants (travail, matières premières, énergie, etc.). • Supposons pour commencer que la main d ’œuvre (grâce à la croissance de la population active) et le stock de capital (grâce à l ’investissement) augmentent au même rythme. Une expansion des facteurs de production à productivité constante: P OG Une augmentation de la population active et du stock de capital (à productivité constante) déplace la courbe OG vers la droite. Les coûts unitaires demeurent constants. Y OG’ S’il y a gain de productivité, la courbe OG se déplace encore plus vers la droite et en même temps, vers le bas. P OG OG’ OG’’ une augmentation de la productivité permet de produire plus... à un coût unitaire plus faible... Y La courbe OG peut aussi se déplacer verticalement, lorsque le prix des facteurs varie OG’ OG P L’augmentation des salaires, des taxes sur la masse salariale, du prix des matières premières et de l’énergie entraînent un déplacement vers le haut de la courbe d’offre globale. Y Même s’il peut arriver occasionnellement ... OG P OG ’ qu’une baisse du prix des matières premières, de l ’énergie, des salaires, etc., entraîne un déplacement vers le bas de la courbe d ’offre globale. Y Dans un contexte de croissance soutenue accompagnée d’un taux d’inflation positif... OG P que vers le haut. OG ’ la courbe se déplace tout autant vers la droite... Y Un prix important: le prix du pétrole 45 1990:10 35,92 40 1985:11 30,81 35 Guerre du Golfe 1999:09 23,88 25 Choc pétrolier de 1985 20 15 Année-mois 1999 1998 1997 1996 1996 1995 1995 1994 1994 1993 1992 1992 1991 1991 1990 1989 1989 1988 11,28 1998:12 1988 1987 1987 1986 1985 1984 1984 1983 1982 1982 1981 1981 0 1980 5 1985 11,58 1986:07 1998 10 1980 Prix du pétrole en $US 30 Le taux de croissance des salaires (hausses de salaire provenant des conventions collectives) 8 6 Les déplacements vers le haut de la courbe d ’offre globale s’accentuent Les déplacements vers le haut de la courbe d ’offre globale s’atténuent 4 2 0 84 86 88 90 92 94 Croissance des salaires 96 98 Lorsque la productivité et les salaires augmentent d’un même %... P OG OG ’ La courbe OG se déplace seulement vers la droite Y Les augmentations salariales ne sont inflationnistes que lorsqu’elles dépassent les gains de productivité P OG Les augmentations salariales supérieures aux gains de productivité augmentent les coûts unitaires OG ’ Les gains de productivité déplacent la courbe vers la droite Y Les hausses possibles des salaires réels • Lorsque les salaires et les prix augmentent aux mêmes taux, le pouvoir d ’achat des salaires est constant. • Lorsqu ’il y a des gains de productivité, le PIB réel par habitant augmente. Les salaires réels peuvent alors augmenter. • Lorsque les salaires nominaux augmentent au même rythme que la productivité, il n ’y a pas d ’inflation (toutes choses étant égales). Les salaires réels augmentent donc. • Lorsque les salaires nominaux augmentent plus rapidement que la productivité, les firmes augmentent leurs prix pour couvrir leurs coûts unitaires plus élevés. L’inflation réduit alors les salaires réels (et ramène leur croissance à celle de la productivité). Le concept de PIB potentiel • De manière stricte, le PIB potentiel correspond à la partie verticale de la courbe d’offre globale. • Le PIB potentiel représente donc le volume de biens et services que l’économie est en mesure de produire lorsqu ’elle utilise ses capacités de production à pleine capacité et que le taux de chômage est à son niveau minimal (chômage structurel et frictionnel uniquement). • A l’approche du PIB potentiel, les coûts croissants se traduisent par des hausses de prix. • Étant donné la rareté de la main d’œuvre disponible, on peut s’attendre à ce que les travailleurs qualifiés exigent des hausses de salaire pour maintenir la valeur de leur salaire réel. • L’inflation devrait s’accélérer. • C’est pourquoi il existe un concept légèrement différent du PIB potentiel, concept associé au taux de chômage en deçà duquel l’inflation a tendance à accélérer. On y reviendra... Fin de la première partie