Intégrale définie Montage préparé par : André Ross Professeur de mathématiques Cégep de Lévis-Lauzon Introduction Il nous faut réfléchir sur la définition d’aire sous la courbe d’une fonction non négative f posée dans la présentation n précédente. A[a; b] = lim (max∆xi) 0 S f(ci ) ∆xi i=1 où P = {x0, x1, x2, …, xn} est une partition de [a; b], ci [xi–1; xi] et ∆xi = xi – xi–1 Nous avons testé cette définition à l’aide de fonctions polynomiales, en considérant toujours une partition régulière. Nous généraliserons maintenant à toute fonction continue, mais nous devons d’abord traiter la question de l’existence de la limite d’une telle somme. Définition Fonction intégrable Fonction intégrable au sens de Riemann Soit f, une fonction définie sur [a; b] et :P = {x0, x1, x2, …, xn} une REMARQUE partition quelconque de [a; b]. Alors f est dite intégrable au sens de Si f est nonsur négative surla[a; b], suivante Riemann (ou simplement intégrable) [a; b] si limite existe : n l’intégrale définie donne l’aire sous lim f(ci )la∆xcourbe. i , où ci [xi–1; xi] (max∆xi) 0 i=1 Si f est intégrable sur [a; b], alors l’intégrale définie de f sur [a; b] est définie par : n b lim f(ci ) ∆xi , où ci [xi–1; xi] f(x) dx = (max∆xi) 0 a i=1 S S La valeur de a est appelée borne inférieure de l’intégration et b, borne supérieure de l’intégration. S Intégrale définie et indéfinie Il faut distinguer intégrale définie et intégrale indéfinie. L’intégrale définie est un nombre réel qui est la limite d’une somme : a b f(x) dx = n lim (max∆xi) 0 S f(ci ) ∆xi , où ci [xi–1; xi] i=1 L’intégrale indéfinie est une famille de fonctions, les primitives de la fonction f. f(x) dx = F(x) + k, où F '(x) = f(x) Dans cette présentation, nous établirons la relation entre l’intégrale définie et l’intégrale indéfinie grâce au théorème fondamental du calcul différentiel et intégral. Quelques théorèmes préalables nous seront utiles. S Théorème Théorème des valeurs extrêmes des valeurs extrêmes Soit f, une fonction continue sur [a; b]. Alors : • il existe au moins un c [a; b] tel que f(c) soit égale au minimum absolu de f sur [a; b] et; • il existe au moins un d [a; b] tel que f(d) soit égale au maximum absolu de f sur [a; b]. Le minimum et le maximum absolus peuvent être atteints aux frontières de l’intervalle [a; b]. Le minimum et le maximum absolus peuvent être des extremums relatifs. S Théorème de Fermat Théorème de Fermat Soit f, une fonction telle que : • f est continue sur [a; b]; REMARQUE : La fonction n’est pas dérivable à x = c. Le théorème de Fermat • f est dérivable sur ]a; b[; ne maximum s’applique (ou pas.de minimum) • c ]a; b[, où (c; f(c)) est un point de relatif ou absolu de f; alors, f '(c) = 0. On se souvient de ce théorème on l’utilisait dans l’analyse des points critiques d’une fonction pour détecter les extremums relatifs. On se souvient également que le théorème ne permettait pas de détecter tous les extremums relatifs. c S Théorème Théorème de Rolle de Rolle Soit f, une fonction telle que : • f est continue sur [a; b]; • f est dérivable sur ]a; b[; Distinguons deux cas, selon que la fonction est constante ou non dans l’intervalle [a; b]. • f(a) = f(b), alors, il existe au moins un nombre c ]a; b[ tel que f '(c) = 0. REMARQUE Si pas: constante Si la la fonction fonction n’est est constante sur [a;sur b]. [a; b]. D’aprèsLelethéorème théorèmeindique des valeurs la fonction possède un qu’il yextrêmes, a au moins Alors, elle absolu est de la f(x) = k,absolu où k sur R. [a; Parb]. conséquent. f '(x) = 0 minimum et forme un ]a; maximum un point dans b[ où la tangente est pour toutlax fonction ]a; b[ etn’est f '(c)pas = 0 constante quel que soit c ]a; b[.= f(b), elle a un Puisque et que f(a) horizontale, mais il peut y en avoir plus minimum absolu ou un maximum absolu dans l’intervalle ]a; b[. d’un. Soit c ]a; b[, tel que (c; f(c)) est un point de maximum (ou de minimum), alors f '(c) = 0 par le théorème de Fermat. Ce qui démontre le théorème de Rolle. S Exemple Déterminer si la fonction définie par f(x) = x2 + x satisfait aux conditions du théorème de Rolle sur [–1; 1]. Calculer la valeur (ou les valeurs) de c, le cas échéant. La fonction est une polynomiale, elle est donc continue sur R et, en particulier, sur [–1; 1]. Elle est dérivable sur R et en particulier sur ]–1; 1[. De plus, f(–1) = 3 = f(1). Les conditions sont satisfaites et le théorème de Rolle s’applique. Il existe au moins un nombre –1 < c < 1 tel que f '(c) = 0. La dérivée de f est : f '(x) = 2x + 1 et : 2x + 1 = 0 donne x = –1/2 La valeur prédite par le théorème de Rolle est c = –1/2. S Exercice Déterminer si la fonction définie par f(x) = sin x satisfait aux conditions du théorème de Rolle sur [0; 2π]. Calculer la valeur (ou les valeurs) de c, le cas échéant. La fonction est continue sur R, donc sur [0; 2π]. Elle est dérivable sur R, donc sur ]0; 2π[. De plus, f(0) = 0 = f(2π). Les conditions sont satisfaites et le théorème de Rolle s’applique. Il existe au moins un nombre 0 < c < 2π tel que f '(c) = 0. La dérivée de f est : f '(x) = cos x et : cos x = 0 à π/2 et à 3π/2 Les valeurs prédites par le théorème de Rolle sont c1 = π/2 et c2 = 3π/2. S Exercice Déterminer si la fonction définie par f(x) = 1/x2 satisfait aux conditions du théorème de Rolle sur [–2; 2]. Calculer la valeur (ou les valeurs) de c, le cas échéant. La fonction n’est pas continue sur [–2; 2]. En effet, elle a une trou à l’infini à x = 0 (limite de la forme c/0). L’une des conditions n’est pas satisfaite et le théorème de Rolle ne s’applique pas. On ne peut rien prédire. Le graphique permet cependant de conclure qu’il n’existe pas de valeur de c dans [–2; 2] telle que f '(c) = 0 S Exercice Déterminer si la fonction définie par f(x) = x2/3 satisfait aux conditions du théorème de Rolle sur [–8; 8]. Calculer la valeur (ou les valeurs) de c, le cas échéant. Une fonction irrationnelle est continue sur son domaine. La fonction est donc continue sur R et, en particulier, sur [–8; 8]. La fonction n’est pas dérivable à x = 0 ]–8; 8[, car : –1 f '(x) = et le domaine de f ' est R\{0}. 1/3 3x L’une des conditions n’est pas satisfaite et le théorème de Rolle ne s’applique pas. S Théorème de Lagrange Théorème de Lagrange (ou de la moyenne) Soit f, une fonction telle que : • f est continue sur [a; b]; • f est dérivable sur ]a; b[; alors, il existe au moins un nombre c ]a; b[ tel que : REMARQUEf :(b) – f (a) f '(c) = – a est un cas Le théorème debRolle particulier du théorème de Lagrange. effet, si f(a) Ce théorèmeEn affirme que si =la f(b), fonction est continue et dérivable sur la pente dealors la sécante estun 0. point (c; f(c)) où la tangente est parallèle l’intervalle il existe à la sécante passant par les points (a; f(a)) et (b; f(b)). S Démonstration du théorème de Lagrange Notons g,que la cette fonction dontfonction le graphique Vérifions nouvelle satisfait est hypothèses la sécante àdu lathéorème courbe dedelaRolle. fonction f aux passant par les points (a; f(a)) et (b; f(b)). 1. H est continue sur [a; b] car la somme de H(x) f (b) – f (a) Ladeux pente de cette continues sécante est fonctions est: continue. b–a 2. H est dérivable sur [a; b] car la somme de et la fonction g est définie par l’équation deux fonctions dérivables est dérivable. de la droite : (b) –on f (a) 3. Puisque f(a) = fg(a), a H(a) = 0. De la g(x) façon, = f(a) +H(b) = 0, et H(a) (x –=a)H(b). même b–a Définissons la fonction H dontle l’image une s’applique. valeur de On x dans Les hypothèses sont satisfaites, théorèmepour de Rolle peut l’intervalle [a;existe b] estau la moins distance et =celle conclure qu’il un verticale nombre centre ]a;lab[courbe tel quede H f'(c) 0 de g. On a alors : f (b) – f (a) La dérivée de H est : H '(x) = f '(x) – b –x a[a; b] H(x) = f(x) – g(x), pour f (b) – f (a) L’image de c est :on obtient H '(c) := f '(c) – Par substitution, =0 b–a f (b) – f (a) f (b) – f (a) H(x) + qui complète (x la – a) D’où : f '(c) démonstration. = = f(x) – f(a) Ce b – a b–a S Exemple Déterminer si la fonction définie par f(x) = 3x – x2 satisfait aux conditions du théorème de Lagrange sur [1; 4]. Calculer la valeur (ou les valeurs) de c, le cas échéant. La fonction est une polynomiale, elle est donc continue sur R et, en particulier, sur [1; 4]. Elle est dérivable sur ]1; 4[. Les conditions sont satisfaites et le théorème de Lagrange s’applique. f (4) – f (1) –4 – 2 La pente de la sécante est : = = –2 4–1 4–1 La dérivée de f est f '(x) = 3 – 2x et : 3 – 2x = –2 donne x = 5/2 La valeur prédite par le théorème de Lagrange est c = 5/2. S Exercice Déterminer si la fonction définie par f(x) = (x – 2)2/3 satisfait aux conditions du théorème de Lagrange sur [1; 4]. Calculer la valeur (ou les valeurs) de c, le cas échéant. Une fonction irrationnelle est continue sur son domaine. La fonction f est donc continue sur R et, en particulier, sur [1; 4]. Cependant, la fonction n’est pas dérivable à x = 2 ]1; 4[, car : –1 f '(x) = et le domaine de f ' est R\{2}. 1/3 3(x – 2) Puisque l’une des conditions n’est pas satisfaite, le théorème de Lagrange ne s’applique pas. Il n’y a pas de point (c; f(c)) sur l’intervalle [1; 4] tel que la tangente en ce point soit parallèle à la sécante passant par les points aux extrémités de l’intervalle [1; 4]. S Théorème Théorème fondamental fondamental du calcul différentiel et intégral Soit f, une fonction continue sur un intervalle [a; b] et F, l’une de ses primitives sur [a; b], alors : b f(x) dx = F(b) – F(a) a Démonstration Considérons une partition P = {x0, x1, x2, ..., xn–1, xn} de l’intervalle [a; b], où x0 = a et xn = b. Ces valeurs subdivisent l’intervalle [a; b] en n sous-intervalles : [a; x1], [x1; x2], [x2; x3], …, [xi–1; xi], ... , [xn–1; b] dont les longueurs sont : ∆x1, ∆x2, ∆x3, ...∆xi, ...∆xn On peut alors exprimer F(b) – F(a) par la somme télescopique : F(b) – F(a) = [F(x1) – F(a)] + [F(x2) – F(x1)] + ... +[F(b) – F(xn–1)] S Démonstration du théorème fondamental Démonstration Par hypothèse, F est une primitive de f, on a donc : F '(x) = f(x) pour tout x dans l’intervalle [a; b] Considérons le premier sous-intervalle, [a; x1]. Puisque la fonction F est dérivable sur cet intervalle, par le théorème de Lagrange, il existe une abscisse c1 dans l’intervalle telle que : F(x1) – F(a) = F '(c1) (x1 – a) De la même façon, dans chaque sous-intervalle, [xi–1; xi], on peut trouver une abscisse ci telle que : F(xi) – F(xi–1) = F '(ci) (xi – xi–1) On peut donc écrire la somme télescopique de F(b) – F(a) sous la forme : F(b) – F(a) = F '(c1) (x1 – a) + F '(c2) (x2 – x1) ... + F '(ci) (xi – xi–1) + ... +F '(cn) (b – xn–1) S Démonstration du théorème fondamental Démonstration De plus, puisque ∆xi = xi – xi–1 et F '(x) = f(x), on a : F(b) – F(a) = F '(c1) ∆x1 + F '(c2) ∆x2 ... + F '(ci) ∆xi + ... + F '(cn) ∆xn = f (c1) ∆x1 + f (c2) ∆x2 ... + f (ci) ∆xi + ... + f (cn) ∆xn En utilisant le symbole de sommation, on obtient alors la somme de Riemann suivante : n f(ci ) ∆xi F(b) – F(a) = i=1 Supposons que le nombre n de sous-intervalles s’accroît à l’infini et que la largeur du plus grand de ceux-ci tend vers 0. Le membre de gauche de cette égalité est constant et indépendant de n alors que le côté droit tend vers l’intégrale définie dans l’intervalle [a; b]. On a n donc : b lim f(c ) ∆x F(b) – F(a) = i i = f(x) dx (max∆xi) 0 a i=1 Ce qui complète la démonstration. S S S Visualisation du théorème Considérons les fonctions : F(x) = 12 + 9x2 – x3 F '(x) = f(x) = 18x – 3x2 sur l’intervalle [0; 6]. Déterminons une partition. Par le théorème de Lagrange : 4 f(ci ) ∆xi F(b) – F(a) = i=1 Et, à la limite : F(b) – F(a) S F(b) – F(a) = lim n (max∆xi) 0 S f(ci ) ∆xi i=1 b = f(x) dx a f(c1 ) ∆x1 b = f(x) dx f(c2a) ∆x2 A1 c1 AA2 A3 c2 c3 f(c3 ) ∆x3 f(c4 ) ∆x4 A4 c4 S Calcul de l’aire Procédure pour calculer l’intégrale indéfinie 1. Vérifier que la procédure s’applique (f est continue sur l’intervalle). 2. Déterminer les bornes d’intégration lorsqu’elle ne sont pas précisées. 3. Déterminer une primitive F(x) de l’intégrande f(x). 4. Évaluer la différence F(b) – F(a). Notation : b La différence F(b) – F(a) est généralement notée : F(x) a b b f(x) dx = F(x) On écrira donc : a a Lorsque la fonction est continue et non négative sur [a; b], l’intégrale définie donne l’aire sous la courbe sur l’intervalle [a; b]. S Exemple Déterminer l’aire sous la courbe de la fonction définie par : x+2 f(x) = 2 Dans l’intervalle [1; 4]. La fonction est continue et non négative dans l’intervalle, on a donc : 4x + 2 4 1 x dx + 2 4 dx dx = 2 1 2 1 1 1 x2 + 2x = 2 2 5 27 8– = 4 4 4 4 x2 = 4 +x 1 1 16 1 = 4 +4 – +1 4 27 = 4 On trouve 27/4 unités d’aire. S Exercice Déterminer l’aire sous la courbe de la fonction définie par : f(x) = 3x2 + 2x Dans l’intervalle [2; 4]. La fonction est continue et non négative dans l’intervalle, on a donc : 4 4 4 (3x2 + 2x) dx = 3x2 dx + 2x dx 2 2 2 4 3 2 = x +x 2 80 – 12 = 68 = (64 + 16) – (8 + 4) = 68 On trouve 68 unités d’aire. S Exemple Une particule se déplace en ligne droite durant 6 s et sa vitesse est décrite par : v(t) = 18t – 3t2 m/s où t est le temps en secondes. Calculer la variation de position (déplacement) durant l’intervalle [0; 2]. La variation de position est donnée par l’aire sous la courbe dans l’intervalle [0; 2]. La fonction est continue et non négative dans l’intervalle, on a donc : 0 2 (18t – 3t2) dt = = 9t2 – t3 0 2 18t dt – 0 28 – 0 = 28 2 2 3t dt 2 = (36 – 8) – (0 – 0) = 28 0 Le mobile s’est déplacé de 28 m par rapport à sa position initiale. S Exercice Une particule se déplace en ligne droite durant 6 s et sa vitesse est décrite par : v(t) = 18t – 3t2 m/s où t est le temps en secondes. Calculer la variation de position (déplacement) durant l’intervalle [2; 5]. La variation de position est donnée par l’aire sous la courbe dans l’intervalle [2; 5]. 2 5 (18t – 3t2) dt = 2 5 18t dt – 5 = 2 = (225 – 125) – (36 – 8) = 72 2 100 – 28 = 72 5 2 3t dt 9t2 – t3 Le mobile s’est déplacé de 72 m par rapport à sa position initiale. S Exercice Une particule se déplace en ligne droite durant 6 s et sa vitesse est décrite par : v(t) = 18t – 3t2 m/s où t est le temps en secondes. Calculer la variation de position (déplacement) durant l’intervalle [0; 6]. La variation de position est donnée par l’aire sous la courbe dans l’intervalle [0; 6]. 0 6 (18t – 3t2) dt = 0 6 18t dt – 6 = 0 = (324 – 216) – (0 – 0) = 108 0 108 – 0 = 108 6 2 3t dt 9t2 – t3 Le mobile s’est déplacé de 108 m par rapport à sa position initiale. S Conclusion Le théorème fondamental du calcul différentiel et intégral (première partie) donne une procédure générale pour déterminer l’intégrale définie dans un intervalle [a; b], qui est valide pour toute fonction continue sur cet intervalle. Lorsque la fonction est continue et non négative sur [a; b], l’intégrale définie donne l’aire sous la courbe sur l’intervalle [a; b]. Le théorème fondamental nous permet également d’établir une relation entre l’intégrale définie et l’intégrale indéfinie, puisque : b b f(x) dx = F(x) , où F(x) est une primitive de f(x). a a