corps etrangers ingeres - Le site de l`UHCD du CHRA

publicité
CORPS ETRANGERS INGERES
(C.E.I.)
Dr S. Franchini, Dr Th. Cotte, Dr Ph. Degrange, Dr F. Duplessy,
Dr P. Etessami, Dr A. Marfisi, Dr K. Mokdadi, Dr C. PiotBoissier, Dr E. Coppard, Dr Th. Joffre, Dr G. Morel, Dr J.
Demazière
Service des urgences, Hôpital de la Croix-Rousse,
103 Grande Rue de la Croix-Rousse, 69371 LYON Cedex 04.
CORPS ETRANGERS INGERES
INTRODUCTION
Les Corps Étrangers Ingérés constituent un motif fréquent de consultation
au S.A.U.. Une bonne compréhension de la diversité des situations
cliniques permet une conduite thérapeutique adaptée.
CORPS ETRANGERS INGERES
GENERALITES
-
-
-
Enfants : 80% des cas ; 50% des C.E.I sont des pièces de monnaie.
80 à 90% des C.E.I. passeront sans encombre l’ensemble du tube digestif, 10
à 20% devront être retirés par voie endoscopique et 1 à 5% entraîneront un
geste chirurgical.
La conduite à tenir dépend du type, de la position et des possibilités de
migration du C.E.I.. Il faut savoir reconnaître une situation à risque de
complication pour ne pas différer un acte thérapeutique nécessaire.
L’interrogatoire du patient et des témoins doit permettre d’éliminer un
passage au niveau des voies aériennes (absence de syndrome de pénétration).
Mais un examen clinique normal n’est pas le garant d’une absence
d’inhalation (5% des enfants ayant inhalé un C.E. sont asymptomatiques ;
seulement 25% des enfants ayant inhalé un corps étranger arrivent à l’hôpital
durant les 24 premières heures ; près de 20% arrivent après une semaine
d’évolution).
CORPS ETRANGERS INGERES
POPULATION CONCERNEE – MECANISMES
IL EXISTE UNE SUR-INCIDENCE CHEZ :
- les enfants : par jeu, exploration de leur environnement
- les patients atteints de maladie psychiatrique ou de déficience mentale :
suicide, manies
- les patients présentant des troubles de conscience : utilisation de drogues,
d’alcool, démences
- les patients présentant des problèmes au niveau des voies digestives supra
gastriques : problèmes dentaires (défaut de mastication) porteurs de prothèses
dentaires (défaut de sensibilité du palais), pathologie oesophagienne (blocage
du bol alimentaire)
- les populations consommant des aliments à risque : os de poulet, arêtes de
poisson
CORPS ETRANGERS INGERES
POPULATION CONCERNEE – MECANISMES
-
les passeurs de drogues : “body packing”
les détenus : suicide (bénéfice secondaire de l’hospitalisation) ou vol d’objets
les mal-voyants : accidentel
MAIS CECI PEUT CONCERNER TOUS LES INDIVIDUS :
- Accidents favorisés par les ingestions alimentaires rapides
CORPS ETRANGERS INGERES
TYPES DE CORPS ETRANGERS
EXTRÊMEMENT VARIABLES, SELON LE TERRAIN ON RETROUVERA :
- chez l’enfant : pièces de monnaie (50%), piles bouton, jouets de petite taille,
médaillons, aiguilles, clous, graviers ; des normes sont élaborées par les
organismes de surveillance dans de nombreux pays, afin de ne laisser à la
portée des enfants que les objets adaptés à leur âge (industrie)
- chez le patient psychiatrique ou sous l’emprise de drogues : objets de tous
type (exemple cuillère a café (15 cm), lames de rasoir, briquets, clous)
- chez le détenu : cuillère, fourchette, ressort de literie
- chez la personne âgée : dentiers
- en dentisterie : dents sur pivot, prothèses
- passeurs de drogue : “boletas” en forme de sphère ou de saucisse cocktail
- autres : cure dent, ballonnet gastrique migrateur, etc
CORPS ETRANGERS INGERES
COMPLICATIONS
-
-
elles sont variées : perforation digestive (médiastinite, péritonite), occlusion
intestinale, ulcération digestive, gastrite, saignement muqueux, hémorragie,
fistule, abcédation.
la mortalité n’est pas nulle : mortalité annuelle de 1500 à 1600 personnes aux
USA.
CORPS ETRANGERS INGERES
ZONES D’ARRET DES C.E.I.
ANATOMIQUEMENT, 7 ZONES PREFERENTIELLES
- amygdales pharyngées : arêtes, épingles ; accessibles à la vue avec un abaisse
langue
- sinus piriformes : tout C.E.I. ne parvenant pas à passer la bouche
oesophagienne de Killian ; le risque respiratoire est majeur ; examen au
laryngoscope sous A.L. chez un patient calme
- oesophage = trois rétrécissements anatomiques +++ : tout type de CE.I.,
d’autant plus s’il est vulnérant (crochets) ; radiographies puis endoscopie
-bouche oesophagienne de Killian (cartilage cricoïde et muscle cricopharyngien) :
en regard du disque inter-vertébral C5 - C6 sur radiographie de profil
-aortique : arc en regard de D4
-diaphragmatique : D1O - D11
-
estomac : C.E.I. volumineux ayant malgré tout passé l’oesophage ;
radiographies puis endoscopie
-fond gastrique : L3 - L4
-pylore : L1 - L2
-
valvule iléo-caecale, caecum, appendice : point de Mac Burney ;
radiographies
CORPS ETRANGERS INGERES
ZONES D’ARRET DES C.E.I.
SONT MOINS CONCERNES
- grêle et reste du cadre colique ; on retrouve parfois des C.E.I. (os de poulet)
entraînant des abcès dans la région recto-sigmoïdienne
- sur tout le tube digestif, obstacles pathologiques :
-tumeurs intrinsèques ou extrinsèques
-rétrécissement suite à ingestion de caustique, maladie digestive chronique
-cicatrices chirurgicales, brides
CORPS ETRANGERS INGERES
C.A.T. SELON LA ZONE DE DECOUVERTE
1 - AMYGDALES PHARYNGEES : ablation à la vue, bains de bouche
antiseptiques en gargarisme ou sur coton tige chez l’enfant ; statut V.A.T.
2 - SINUS PIRIFORME : ablation à l’aide d’un laryngoscope sous AL, chez un
patient calme ; attention au risque d’inhalation = à confier aux O.R.L. au
moindre doute.
CORPS ETRANGERS INGERES
C.A.T. SELON LA ZONE DE DECOUVERTE
3 - OESOPHAGE : LE PROBLÈME MAJEUR
a - le tableau clinique : tableau de blocage oesophagien avec survenue brutale
d’une dysphagie avec odynophagie, hyper-salivation et douleurs thoraciques
ou épigastriques. Il existe parfois une gêne respiratoire (blocage haut, enfants
et pièces de monnaie). Éviter toute manoeuvre intempestive type Heimlich en
l’absence de détresse vitale : le résultat peut être l’inhalation du C.E..
b - le C.E.I. ne doit pas rester dans l’œsophage :
- le corps étranger peut être vulnérant (dentier avec crochets, épingles) et
entraîner rapidement un tableau de médiastinite ou d’hémorragie (fistule
aorto-oesophagienne)
- il peut être agressif pour la muqueuse : les piles bouton au lithium de grosse
taille sont les plus dangereuses (voltage élevé, constitution d’un milieu
alcalin autour de la pile).
L’ablation se fera par voie endoscopique, avec divers outils et protection
éventuelle de la muqueuse (cf. infra).
CORPS ETRANGERS INGERES
C.A.T. SELON LA ZONE DE DECOUVERTE
c - peu d’exceptions :
- le C.E. non agressif sans gêne occasionnée, chez un patient coopératif pourra
être repoussé par des boissons (prudence).
- pour morceaux de viande bloqués au niveau du bas œsophage, test au
Glucagon (1 mg IV + sédation légère) pour relaxation du S.O.I..
- sachets de drogue.
CORPS ETRANGERS INGERES
C.A.T. SELON LA ZONE DE DECOUVERTE
4 - LES CORPS ETRANGERS GASTRIQUES :
a - indication d’extraction :
-corps étranger vulnérant (passe fréquemment sans encombre malgré tout)
-taille : longueur > 7 cm chez l’adulte, 5 cm chez l’enfant (fonction de l’âge)
diamètre >2 cm
-piles : très discuté
b - cas particulier du bézoard :
Se constitue dans l’estomac ; devra souvent être fragmenté pour l’extraction.
CORPS ETRANGERS INGERES
C.A.T. SELON LA ZONE DE DECOUVERTE
5 - LES CORPS ÉTRANGERS POST-PYLORIOUES :
a - ils sont hors d’atteinte de l’endoscope : la majorité passera le reste du tube
digestif sans engendrer de conséquences.
b - la conduite à tenir sera alors :
-évaluer les risques liés au C.E.I. : coopération urgentistes, gastro-entérologues,
chirurgiens, C.A.P..
-surveillance clinique du patient :
Celle-ci peut se faire à domicile pour un C.E.I. de petite taille, non toxique et non
vulnérant. En cas de risque toxique vital (drogues ou médicaments) ou de
risque de perforation, le patient sera gardé en hospitalisation.
Surveillance du transit, des douleurs, de la température corporelle ; tamisage des
selles. Le transit normal s’effectue en 4-5 jours ; un C.E.I. doit ressortir en 2
semaines.
-surveillance radiologique : si absence de progression durant 72h, évoquer un
début d’enclavement muqueux (C.E. vulnérant) ou un arrêt dans une zone
anatomique particulière (appendice, obstacle). La sentence sera chirurgicale.
-surveillance toxicologique (toxiques urinaires pour les opiacés, plombémie à la
3 ème semaine)
-une antibiothérapie préventive sera discutée au cas par cas
CORPS ETRANGERS INGERES
L’EXAMEN ENDOSCOPIQUE
S’adresse aux C.E.I. oesophagiens et gastriques.
Plus rarement, un C.E. duodénal ou colique pourra être retiré.
a - avant toute tentative de mobilisation, il faut s’assurer :
De la liberté des V.A.S.
De l’absence d’atteinte muqueuse
b - l’ablation sous A.G. avec I.O.T. doit être discutée :
Chez les sujets à l’état clinique précaire
Chez les patients psychotiques, agités
En cas de C.E. fragmentable
Dans tous les cas pour certains
c - l’endoscopie est diagnostique et thérapeutique :
Identifier une lésion responsable de l’arrêt
Exploration de la muqueuse
Ablation du C.E.
CORPS ETRANGERS INGERES
L’EXAMEN ENDOSCOPIQUE
d - techniques endoscopiques:
-Laryngoscope rigide : C.E. hypopharynx et oesophage proximal
-Oesophagoscope rigide : C.E. oesophagien
-Endoscope souple +++ : C.E. oesophagiens et gastriques
Endoscope à lumière large (3 mm), vision axiale, éventuellement double
canal (aspiration), muni d’instruments (pince à griffes, pince à mors crantés,
paniers de Dormia, anse lasso), comportant éventuellement une protection
pour les C.E. volumineux ou vulnérants (gaine semi-rigide ou capuchon de
protection “overtube”). Une sonde à ballonnet est parfois gonflée sous un
C.E. oesophagien pour le tirer (protection des VAS ++).
Il sera parfois nécessaire d’effectuer des manœuvres avant ablation : C.E.
repoussé dans l’estomac pour y être fragmenté (viande) ou retourné (épingle
à nourrice).
CORPS ETRANGERS INGERES
C.A.T. SELON LE TYPE DE C.E.I.
1 - CORPS ÉTRANGERS VULNÉRANTS :
Les objets pointus ou coupants (lames, aiguilles, os, arêtes), les dentiers, doivent
retirés en urgence. S’ils ont passé le pylore, une surveillance hospitalière
clinique et radiologique sera nécessaire. Un ablation chirurgicale sera
envisagée si stagnation plus de 3 jours dans un même lieu, ou si aggravation
du tableau clinique.
2 - CORPS ÉTRANGERS DE GRANDE TAILLE :
Peu de chance de passage du pylore si la taille est supérieure à 2 * 5 cm, ou la
longueur supérieure à 5 cm chez l’enfant et 7 cm chez l’adulte : l’ablation
endoscopique constitue la règle.
CORPS ETRANGERS INGERES
C.A.T. SELON LE TYPE DE C.E.I.
3 - PILES BOUTON :
Il existe un risque de perforation oesophagienne en quelque heures, pour les piles
bouton bloquées au niveau de l’œsophage. Ce risque est majoré pour les piles
de grande taille (20 mm) et les piles au Lithium (fort voltage créant un
environnement alcalin agressif). La charge de la pile importe peu. L’ablation
sous endoscope est nécessaire en urgence.
Les piles en position gastrique seront pour certains traitées comme un C.E. banal.
Pour d’autres, elle devront être enlevées, d’autant plus si elles contiennent du
mercure.
4 - C.E. CONTENANT DU PLOMB :
Ces objets comportent peu de risques si leur passage s’effectue en moins de 2
semaines ; surveillance clinique, radiologique et biologique (plombémie à la
3 ème semaine).
CORPS ETRANGERS INGERES
C.A.T. SELON LE TYPE DE C.E.I.
5 - MORCEAUX DE VIANDE :
Seront repoussés dans l’estomac ou fragmentés. Un test au Glucagon est possible
avant l’endoscopie. Rechercher une pathologie sous-jacente.
6 - BEZOARDS :
C.E. se constituant dans l’estomac : phyto-bézoard (vagotomies non sélectives)
ou tricho-bézoards (sujets psychotiques).
Découverte radiographique d’une volumineuse image gastrique (opacité ou
masse flottante).
La gêne gastrique est tardive pour des bézoards qui sont volumineux et devront
être fragmentés par endoscopie ou lysés.
CORPS ETRANGERS INGERES
C.A.T. SELON LE TYPE DE C.E.I.
7 - DROGUES :
Un passeur peut avoir ingéré jusqu’à 300 sachets de drogue pesant de 3 à 9 g
chacun ; il n’est pas rare de rencontrer un porteur de plus de 1 kg.
Découverte sur l’A.S.P. de multiples opacités rondes, images en halo ou en
rosette.
Les dosages de toxiques urinaires sont positifs dans près de 100% des cas.
L’endoscopie est à éviter (risque de libération de drogue).
Il existe un risque d’occlusion, d’autant plus que les passeurs utilisent des
ralentisseurs du transit.
Il existe un risque toxique facilement antagonisé par la Naloxone (NARCAN ®)
pour la morphine et l’héroïne, mais aussi un risque de troubles du rythme
cardiaque pour la cocaïne, non antagonisable (surveillance scopée si signes
de toxicité).
8 - AUTRES PRODUITS TOXIQUES :
Conglomérats de médicaments et autres produits toxiques seront traités en
fonction de leur degré de toxicité et de la possibilité de les retirer.
CORPS ETRANGERS INGERES
C.A.T. SELON LE TYPE DE C.E.I.
9 - CORPS ÉTRANGERS RADIO-TRANSPARENTS :
L’utilisation d’un produit de contraste hydrosoluble (Gastrographine) peut
permettre une détection si nécessaire (sachets de drogue, jouets). Cette
technique est à éviter en cas de C.E.I. oesophagien ou gastrique car elle
gênera l’endoscopie. Elle permettra de détecter une perforation digestive
(C.I. à la Baryte). Enfin, elle accélère le transit (drogues, piles)
L’échographie peut parfois apporter une aide.
CORPS ETRANGERS INGERES
CONCLUSION
Les situations cliniques sont diverses.
L’urgence vitale est représentée par les C.E.I. n’ayant pas passé la Bouche
Oesophagienne de Killian.
L’urgence à 6 h correspond aux C.E.I. oesophagiens.
Ne pas laisser passer le pylore à tout C.E. susceptible de se compliquer.
Mettre en place une surveillance adaptée (travail en collaboration).
Téléchargement