Problèmes posés par les études épidémiologiques en réanimation V. Pradel Épidémiologie OMS, 1968 "étude de la distribution des maladie dans les populations humaines, ainsi que des influences qui déterminent cette distribution" Épidémiologie Épidémiologie au sens strict : observation, pas d'intervention pendant l'étude Sinon : essais cliniques (cf cours suivant) Épidémiologie • Distribution des maladie : épidémiologie descriptive • Influences sur la maladie: épidémiologie analytique Épidémiologie descriptive Description d’une situation, indicateurs : • Mortalité • Natalité • Morbidité – Prévalence – Incidence Épidémiologie descriptive • Prévalence : nombre de personnes présentant la maladie à un moment donné exprimé en % "30% des patients présentaient une pneumopathie le jour de l'enquête" • Incidence : nombre de nouveaux cas apparus durant une période donnée TAUX (cas/personne/période de temps) "30% des patients développent une pneumopathie après 8 jours de réanimation" Épidémiologie descriptive : Durée de la maladie Temps Prévalence : Durée de la maladie : Cas prévalents Jour de l'enquête Temps Incidence Durée de la maladie : Cas prévalents (exclus) : Cas incidents Début Fin Épidémiologie descriptive • Mortalité = incidence des décès • La valeur centrale (point estimate) ne sert à rien, l'essentiel est l'intervalle de confiance – Incid. des pneumopathies après 8 jours de réanimation : 0 % IC 95 [0 % - 4 %] c'est une bonne réanimation – Incid. des pneumopathies après 8 jours de réanimation : 0 % IC 95 [0 % - 95%] c'est une mauvaise étude Prévalence et incidence • Nécessite de pouvoir définir/détecter parfaitement la maladie • En cas de comparaison, s'assurer que – les définitions de la maladie soient les mêmes – les critères d’inclusion soient comparables – la durée de suivi soit la même (incidence) "L'incidence de X varie de 5 à 90 % selon les études" Incidence instantanée Attention aux erreurs d’interprétation de l’incidence 2 cas / 100 personnes / an = 1cas / 100 personnes / 6mois • Vrai si incidence instantanée constante au cours de l’année • Faux si tous les cas surviennent dans les 6 premiers mois : 2 cas / 100 personnes / an = 2 cas / 100 personnes / 6mois Épidémiologie descriptive Quel type d'étude ? • Transversale (unique ou répétée) prévalence • Longitudinale (rétrospectif ou prospectif) incidence et prévalence Épidémiologie descriptive Nombre de sujets nécessaires • Calcul possible a priori • Nécessite de faire des hypothèses sur – % ou taux attendu – Précisions de l’intervalle de confiance souhaitée Épidémiologie descriptive • Question de base : quelle extrapolation possible ? • Définition claire et consensuelle de la maladie • Dépend +++ critères d'inclusion, de non inclusion et d'exclusion • Étude d'incidence : attention à ne pas prendre des cas prévalent Épidémiologie analytique Recherche de la liaison entre un facteur et une maladie (facteur de risque ou protecteur) • Exposés/non exposés • Cas/témoin • Etudes écologiques A de rares exceptions près, on ne peux pas rechercher l’absence de liaison Étude exposé/non exposé • Principe: on part du facteur pour définir les groupes, on compare ensuite entre ces deux groupes les incidences ou les prévalences par un risque relatif (RR) • RR= Incid. (préval.) exposés / Incid. (préval.) non exposés • Le RR varie de 0 à l’infini (= 1 : pas de lien) – 0 à 1 : facteur protecteur – 1 à l’infini : facteur de risque • RR isolé sans intérêt, voir l’intervalle de confiance Étude exposé/non exposé Ex: facteur = vaccination contre la grippe • Exposés : sujets vaccinés, incidence grippe en hiver = 2 % • Non exposés : non vaccinés, incid. grippe en hiver = 10 % • RR = 2/10 = 0,2 5 x moins de risque vaccin est facteur protecteur • Mais plusieurs IC possibles – RR= 0,2 IC [0,1 ; 0,35] : IC ne comprend pas 1 facteur protecteur – RR= 0,2 IC [0,05 ; 1,3] : IC comprend 1 on ne peut pas conclure (mais on ne dit JAMAIS : absence de lien) Étude cas/témoins • Principe: on part du statut (malade ou non) pour définir les groupes, on compare ensuite entre ces deux groupes le pourcentage d’exposition • Habituellement : tirage au sort de plusieurs témoins possible, appariement si possible (âge,sexe,…) • Problème : calcul de l’incidence impossible (nb cas et témoins fixés par l’expérimentateur) calcul du risque relatif impossible Étude cas/témoins Calcul du RR impossible 1) Calcul du rapport des cotes d’exposition chez les cas et les témoins (cote d’exposition = nb exposés/ nb non exposés) 2) Calcul du rapport des cotes d’exposition (Odds ratio) OR = cote d’exposition cas / cote d’exposition temoins 3) Si la prévalence de la maladie est faible (< 5 %), l’odds ratio est assimilable au risque relatif problème résolu Attention a regarder là aussi l’intervalle de confiance Étude cas/témoin Ex: maladie = pneumopathie • Cas : patients avec pneumopathie en réanimation, 80 % d’entre eux présente le facteur (ventilation) • Témoins : patients sans pneumopathie en réanimation, 40 % d’entre eux présentent le facteur (ventilation) • OR = (80/20) / (40/60) = 6 RR 6 si la prévalence de la pneumopathie en réa est faible …… Cas/témoin Avantages : • Plus facile si maladie rare • Plusieurs facteurs de risque analysables (risque de multiplicité) • On est sûr de l’existence ou non de la maladie Inconvénients : • Difficultés à trouver les « bons » témoins • Rappel des exposition (biais ++) • Pas de risque relatif (odds ratio qui donne une approximation du RR sous certaines conditions) • Conclusion « abstraite » : il existe un lien entre la SEP et le vaccin mais je suis incapablede donner l’incidence de la SEP sous vaccin Exposé / non exposé Avantages : • Plus facile si exposition rare (professionnelle par ex) • Risque relatif, incidence disponibles • On est sur que le patient est exposé ou non Inconvénients : • Incidence doit être suffisante (nombre de cas et délais adaptés) • Un seul facteur de risque peut être étudié (l'exposition) • Coût et lenteur si prospectif Etude de maladies rares Etude de facteurs d'exposition rares Possibilité d'étudier plus d'un facteur de risque Possibilité d'étudier plus d'une maladie à la fois Facilité pour déterminer le statut malade / non malade CAS - TEMOINS + + + ± COHORTE + ± + + si prospective - si rétrospective + (basé sur la mémoire) - (type, quantité, durée d'exposition, etc...) + + + + si rétrospective en général plus facile grande élevé (si prospective) long (si cohorte prospective et latence longue) peut être un problème dans une cohorte prospective (perdus de vue) importantes (surtout si prrospective) relativement intuitif peut être un problème E/NE vs C/T Facilité pour déterminer le statut exposé / non exposé au facteur de risque Possibilité de calculer des taux d'incidence Possibilité d'étudier l'histoire naturelle de la maladie (en particulier la séquence exposition - maladie) Utilisation des sources de données existantes Trouver un groupe de sujets comparables Taille de l'échantillon Coût Temps nécessaire Suivi Difficultés de réalisation Concept Ethique difficile petite modéré court sans objet limitées difficile à expliquer pas de problème Prospectif / rétrospectif • Les études cas/témoins sont rétrospectives • Les études exposés/non exposé peuvent être prospectives ou rétrospectives Ex : étude rétrospective sur le lien entre pneumopathie et ventilation • Cas / témoins : on prend les pneumopathies, des témoins et on regarde s’ils ont été ventilés • Exposé / non exposés : on prend les ventilés, des non ventilés et on regarde s’ils ont eu une pneumopathie Prospectif / rétrospectif Attention aux études de cohorte prospectives est-on dans l'expérimentation ? (dans ce cas CPP, consentement…) risque « éthique » même si simple observation Ex : doute sur carcinogénicité d’une exp. professionnelle étude prospective exposé/non exposé ? Les biais : erreur systématique – Sélection : erreur lors de la constitution des groupes de départ (erreur sur l’exposition dans une étude E/NE, erreur sur le statut malade ou témoin dans étude C/T) – Information : erreur lors de la recherche d’information ultérieure (erreur sur le devenir du patient dans une étude E/NE, erreur sur le recueil des expositions dans étude C/T) – Confusion Biais différentiel: • Biais non différentiel : biais affectant de la même façon les deux groupes perte de puissance mais pas de risque de fausse conclusion Ex : sous estimation de l’alcoolisme si demande au patient • Biais différentiel : biais affectant préférentiellement un groupe risque d’erreur dans la conclusion Ex : honneteté > des réponses dans le groupe malade surestimation du rôle de l’alcoolisme dans la maladie Biais de confusion : • Les hommes ont plus de K poumon que les femmes (RR =3) • Mais les hommes fument plus que les femmes – RR F fumeuses/non fumeuses = RR H fumeurs/non fumeurs le sexe n’est pas un FDR, confusion due au rôle du tabac – RR F fumeuses/non fumeuses RR H fumeurs/non fumeurs Interaction (ou modification de l’effet) du tabac en fonction du sexe Biais de confusion : Contrairement aux biais de sélection et d’information, les biais de confusions peuvent être corrigés par l’analyse statistique • S’ils ont été recueillis • Si l’effectif de l’étude est suffisant Études écologiques Épidémiologie analytique où l'unité de base n'est pas l'individu mais un groupe d'individus, dans le temps ou l’espace Ex : • Comparaison de la mortalité en réanimation à Lyon et Marseille (espace) • Évolution de la mortalité en réanimation depuis la mise en place d’une nouvelle procédure (temps) Etudes écologiques • Risque majeur de biais de confusion Mal contrôlé même si l’on dispose des données moyennes • Attention ++ aux études temporelles: – augmentation ou diminution continue ne veulent rien dire même si la corrélation est bonne (prob des cigognes) – les études avant après sont de faible qualité (multiplier les points d’inflexion si possible) Association vs causalité Critères internes à l’étude • Séquence dans le temps (l’exposition à l’agent causal précède l’effet) • Force de l’association • Relation dose/effet entre exposition et maladie • Cohérence interne (prise en compte des biais de classement, de sélection et des facteurs de confusion) Association vs causalité Critères externes à l’étude • Constance de l’association et reproductibilité dans d’autres études (! biais de publication!) • Plausibilité biologique, cohérence avec les connaissances générales (une affirmation extraordinaire nécessite des preuves extraordinaires) Les problèmes communs DEFINIR : de façon non ambiguë, reproductible,, cliniquement intéressante – Maladie (définition sensible et spécifique en plus) – Facteurs de risques ou protecteur – Recrutement Les problèmes communs Se tenir à UN objectif principal : • p<0,05 5 % de risque de conclure à tort à un différence sur UN test • Si 5 tests 23 % de risque sur un des tests • Si 10 tests 40 % Les problèmes communs La précision : taille de l'échantillon – Quantifier un phénomène rare en ep. descriptive avec une bonne précision (incidence du Creutzfeldt Jakob) – Détecter une liaison faible (hepatite B et SEP, si le lien existe) ou à long terme (nutrition) avec une puissance suffisante Un grand nombre d’individus Biais précision – A : précis mais biaisé (le plus difficile a détecter) Ex : étude multicentrique sur incidence pneumopathie en réanimation, inclusion des pneumopathies incidentes – B : imprécis non biaisé (voir les stats, IC et p) – C : imprécis et biaisé Les problèmes communs Extrapolation possible ? Étude incidence pneumopathie dans une réa marseillaise : – Ensemble des patients de réa marseillaise ? – Ensemble des patients de réanimation françaises ? – Ensemble des patients de réa dans le monde ? – Ensemble des patients hospitalisés ?