Les facteurs pronostiques des cancers Oncologie fondamentale – janvier 2009 J.P. GERARD – Centre Antoine Lacassagne I- Définition – Généralités II- Histoire naturelle des cancers III- Facteurs pronostiques Tumeur (TNM2) – Malade – Médecin IV- Conclusion : analyse multivariée 1 I • Cancérologie : - Cancer important : Incidence 1 français/3 mortalité : 1 50 000 décès/an 1 " /4 - Plan national cancer 2003 - Institut national du cancer (Paris) (INCa) - Oncologie fondamentale : règles générales qui s’appliquent à l’ensemble des cancers Le cancer Multiplication anarchique des cellules (ADN) échapant à l’homeostasie, en essaimant à distance (métastase) aboutissant à la mort en l’absence de traitement. (une cellule – cellule souche) 2 I • La guérison : C’est une réalité en cancérologie. Repose sur un postulat : éradication de la totalité des cellules cancéreuses jusqu’à la dernière. En France en 2009 : 45 à 50% de guérison. • Histoire naturelle du cancer en plusieurs phases : 1) Bonne santé 2) maladie infraclinique 3) phase initiale 4) phase rechute (poursuite évolutive) • Démarche clinique symptome – diagnostic (preuve anatomopathologique) - Bilan d’extension TNM4 – pronostic - Information – Décision (coût/bénéfice) (alternative) 3 Traitement (palliatif) Traitement Cancer Nbr cellules (1kg) 1015 1015 (1g) 101212 10 Symptome (Diagnostic) Soins palliatifs ("care") Rechute Phase terminale Rémission 109 9 10 6 10 106 103 103 1 1 Prévention Temps Dépistage Phase clandestine Guérison Phase initiale Décès Phase rechute (chronique) 4 II Histoire naturelle II.1 Cancer in situ – invasion - Au début cancer intra épithélial (col utérin) ou in situ – cellules cancéreuses uniquement dans l’épithélium respectant la membrane basale Absence de risque de dissémination à distance car pas de vaisseau dans l’épithélium. - Rupture de la membrane basale = micro-invasion - invasion – tumeur primitive II.2 Dissémination ganglionnaire Extension dans les lymphatiques qui drainent l’organe d’origine. Envahissement des ganglions. Adénopathie métastatique. 5 II.3 Métastases Dissémination par voie sanguine et atteinte du poumon, foie, cerveau, os… II.4 Cinétique de croissance La vitesse de croissance du cancer dépend : - durée du cycle cellulaire : environ 2 jours - de la fraction de croissance - des pertes cellulaires - de la stroma réaction - volume d’une sphère = 4/3 p r3 - si diamètre x 2 = volume x 8 - diamètre + 1 cm (2 3 cm) volume x 3 6 • Cinétique - Le temps de doublement (TD) Temps nécessaire pour que le volume (le nombre de cellules) double (x 2). • Ce temps est constant pendant la plus grande partie de l’histoire de la maladie (GOMPERTZ) • A partir d’une première cellule cancéreuse il faut 30 TD pour atteindre 109 cellules (1 gramme - 1 cm3) = émergence clinique. Début de la phase initiale (après la phase infraclinique). • Il faut 10 TD pour passer de 109 à 1012 cellules ; c’est-à-dire 1 kg de tumeur - phase terminale et décès. 7 Histoire naturelle – cinétique TD constant TD N° cellules Poids (volume) Clinique 1 1 10 103 20 106 (1 million) 1 mg 30 109 (1 milliard) 1 g (1 cm3) Diagnostic 40 1012 1 kg (1 litre) Décès Dépistage 8 Exemple de cinétique de croissance tumorale Cinétique TD (jour) Cancer Vie infraclinique 30 TD Moyenne 5 ans Rapide 60 4 - carcinome épidermoïde (ORL, poumon, Vie clinique Délai rechute 10 TD 5 à 30 TD 5 ans 1-5 ans 1à col utérin) - adénocarcinome colon (1800 j) (600 j) leucémie aigue 4 mois 40 j 1 à 4 mois 5 ans 2 à 15 ans (120 j) Lente 200 sein 10-15 ans prostate 9 III Facteurs pronostiques (T) Un facteur pronostique est une caractéristique (une variable) de la maladie, du malade, etc. qui influe (ou qui reflète) sur la survie (ou le risque de décès). A distinguer d’un facteur prédictif (variable influant l’efficacité du traitement médical évaluée en terme de réponse au traitement). De nombreux facteurs sont liés l’un à l’autre (facteur confondant), le traitement et sa variabilité influent fondamentalement la chance de survie. Seules des études statistiques multivariées bien conduites (régression logistique, modèle de Cox) permettent de valider clairement un (nouveau) facteur pronostique. 10 III.1 La tumeur • Le siège : bon : thyroïde - testicule mauvais : pancréas - poumon - cerveau • Le type anatomopathologique (histologique) poumon : cancer à petites cellules carcinome épidermoïde • Le profil moléculaire = signature génomique • La tumeur "T" - carcinome in situ : favorable - carcinome infiltrant la taille de la tumeur est un paramètre essentiel T1 < T2 < T3 < T4 - La vitesse de croissance (cinétique) croissance lente vs croissance rapide notion de poussée évolutive 11 III.1 La tumeur (TNM) • Les adénopathies (node) "N" l'envahissement ganglionnaire est un "tournant" majeur de la maladie, chance de succès divisée par 2 si N+ - rôle de la taille de la métastase ganglionnaire - rôle du nombre de ganglions envahis - rôle du siège de l'adénopathie (rupt. capsulaire RC + ) N de proximité vs N à distance • Les métastases "M" - principalement foie, poumon, os, cerveau - souvent signe d'incurabilité (progrès récent) classification = TNM - rôle pronostique fort 12 III.1 La tumeur • Les marqueurs (biologiques) M2 - fiabilité (sensibilité + spécificité) variable - valeur pronostique souvent liée au volume tumoral - bons marqueurs : immunoglobuline et myélome multiple. PSA et cancer de prostate III.2 Le malade TNM3 - âge - sexe : peu d'influence - état général : score de performance - comorbidité échelle OMS : 0 = activité normale 1 = réduction des efforts physiques intenses 2 = alitement < 50% du temps de veille 3 = alitement > 50% du " " 13 III.3 Le Médecin TNM4 Le traitement est une variable majeure du pronostique. Il est exceptionnel qu’un patient ne soit pas l’objet d’un traitement en cas de cancer. • Le chirurgien est une variable importante notamment en cas de chirurgie complexe (R0 – R1 – R2) • La radiothérapie : grande variabilité des techniques (dose, volume, temps, appareil, etc.) • Chimiothérapie – hormonothérapie – immunothérapie – Biothérapie ciblée (K-RAS) 14 IV Complexité et variabilité du vivant - siège histologie et TNM restent des éléments pronostiques fondamentaux - Biologie moléculaire = l'étude du génome, du transcriptome (biopuce) du protéome fait émerger de nouveaux facteurs pronostiques et de nouveaux cadres nosologiques. -Des analyses statistiques complexes nécessaires pour définir les variables pronostiques pertinentes - l’évolution dans le temps des techniques d’examens entrainent artificiellement des migrations de stade (phénomène Will Rogers). 15