Les principaux courants philosophiques sur la mort
La grande diversité de positions fournies sur le problème de la mort par l'histoire de la philosophie peut se ramener à trois lignes fondamentales :
1. Les doctrines de la chute (l’âme * descend dans le corps) / Le dualisme platonicien :
Pour Platon (IVe s av JC), à la suite de Parménide (au siècle précédent), seul l'Un existe absolument. Les âmes issues de l'Un et
immortelles comme lui-même, descendent dans les corps périssables. La mort se présente alors comme une libération de la prison
corporelle par un retour de l’âme àl’impersonnel divin.
Au XVIIe s, Descartes « L'âme est donc créée immortelle et le demeure quand la machine qu'est le corps cesse de fonctionner »
puis Malebranche et Kant (au siècle suivant) seront les successeurs du «platonisme de l'âme ». Mais, pour eux l’immortalité de
l’âme est personnelle.
2. Les doctrines de l'information (l’âme informe) / L’unité substantielle aristotélicienne :
Pour Aristote (1/2 s après Platon) l'âme est contemporaine du corps pour lequel elle joue la fonction de principe immanent
d'animation. Dans la mort, corps et âme s'évanouissent en même temps. Toutefois - et c'est ici que réapparaît le platonisme, pour
Aristote, une partie de l’âme (celle qui rend possible l’activité intellectuelle la plus abstraite) s’en retourne de façon impersonnelle à
son essence divine, comme le rayon s’en retournerait au soleil qui l’a produit.
Liens avec le christianisme : Dans les premiers siècles de l’ère chrétienne, avec notamment St Augustin, la « métaphysique
chrétienne » s’est appuyée sur le néo-platonisme, puis, au XIIIe s, avec St Thomas d’Aquin, s’est résolument insérée dans le
courant aristotélicien. L'immortalité de l’âme, cependant, subit une sorte de recul (elle n’est plus impersonnelle et systématique), ce
qui servira à mieux garantir la résurrection personnelle (corps et âme) pour celles et ceux qui le méritent.
3. Les doctrines de la dispersion (âme et corps disparaissent) / Le monisme matérialiste :
À l'encontre de Parménide et Platon pour qui l'Être-Un est fondamental, Leucippe et Démocrite (Ve s av JC) partent de la
multiplicité. Le monde est constitué d'une multitude infinie d'atomes incréés, impérissables : petits éléments de plein et de vide qui
passent du chaos originel à l'ordre du cosmos en se brassant pour former toutes sortes de figures. Aucune raison de faire appel à
une intelligence organisatrice, qu'elle soit transcendante ou immanente, puisque l'infinité des atomes en mouvement suffit à
expliquer les résultats que nous voyons. L'âme, comme le corps, est composée d'atomes. À la mort, le corps se corrompt, et les
atomes de l'âme se dispersent dans la grande circulation universelle.
À son tour, Épicure (IV e s av J), confirme : « Ceux qui disent que l'âme est incorporelle parlent sottement. Car, si elle était telle,
elle ne pourrait ni agir, ni pâtir ». Et Lucrèce (épicurien romain) dira 3 siècles plus tard : « Avec la vieillesse et la mort, la substance
de l'âme se dissipe, telle la fumée, dans les hautes régions de l'air ».
Comte et Marx, au XIXe s, donneront à ce matérialisme une forme plus élaborée : le premier en réduisant le psychisme à une
biologie dynamique, et le second en le considérant comme une supra structure dérivée d'une infrastructure socio-économique.
Mais tous deux cependant reconnaissent à l'homme une certaine immortalité : sociale bien entendu, c'est-à-dire inscrite dans la
mémoire des hommes et dans l'humanité en devenir.
(*) Âme : Ce qui permet de se mouvoir, de sentir et de ressentir. L’âme est toujours individuelle et singulière, c’est ce qui la distingue de l’esprit.