Diapos: partie II

publicité
La géométrie
histoire et épistémologie
par Jean-Pierre Friedelmeyer
Irem de Strasbourg
Deuxième Partie :
Vers les géométries non
euclidiennes et une autre conception
de la géométrie
Diapo 39
Un grain de sable :
le postulat des parallèles
Droites parallèles (définition 23 chez Euclide) :
« sont celles qui étant dans un même plan et
indéfiniment prolongées de part et d’autre ne
se rencontrent pas, ni d’un côté, ni de l’autre »
Diapo 40
Demandes (ou postulats)
1. mener une ligne droite de tout point à tout point.
2. prolonger continûment en ligne droite une ligne
droite limitée.
3. Décrire un cercle à partir de tout centre et au
moyen de tout intervalle.
4. Et que tous les angles droits soient égaux entre
eux.
Diapo 41
Le cinquième postulat ou postulat des parallèles
5. [PP] : et que si une droite
tombant sur deux droites
fait les angles intérieurs et
du même côté plus petits
que deux droits, les deux
droites, indéfiniment
prolongées, se rencontrent
du côté où sont les angles
plus petits que deux droits.
Diapo 42
Où était l’erreur ?
2/5 = 16/40 diff. 3/8 = 15/40
109,9° + 68,3° = 178,2° < 180°
Diapo 43
Diapo 44
La critique de Proclus (412 – 485)
Proclus de Lycie, un philosophe néoplatonicien
et le dernier maître du Lycée à Athènes, écrit au
sujet du [PP] :
« le fait que des lignes droites se rencontrent
finalement lorsqu’elles s’inclinent de plus en
plus l’une sur l’autre dans leur prolongement est
probable et non inéluctable, à moins qu’un
raisonnement ne démontre que le fait est vrai
pour des lignes droites. En effet certaines
lignes, indéfiniment inclinées l’une sur
l’autre, sont asymptotes (…) ; dès lors ce qui
est possible pour ces dernières ne l’est-il pas
aussi pour les lignes droites ?(…) »
Diapo 45
La géométrie absolue
27
[PP]
28
29
30
31
32
Les propositions 1 à
28 du livre I des
Éléments ne
dépendent pas du
[PP]. Ce sont des
propositions de la
géométrie
absolue (terme
introduit par
Bolyai en 1832)
Diapo 46

Le rôle central de la proposition 29 : impossible
de la démontrer sans recours au [PP]
Une ligne droite tombant
sur des droites parallèles
fait des angles alternes
égaux entre eux et aussi
l’angle extérieur égal à
l’angle intérieur et opposé,
et les angles intérieurs et du
même côté égaux à deux
droits.
Diapo 47
Durant 20 siècles,
de multiples tentatives de démonstration
À partir des axiomes et théorèmes de la
géométrie absolue
En partant de la négation du [PP] et en
cherchant une contradiction
Diapo 48

Propriétés équivalentes au postulat des parallèles
D’un point donné on peut mener une parallèle et une
seule à une droite donnée : Proclus ; Playfair,
(1748 -1819)


Étant donnée une figure, il existe une figure
semblable de taille arbitraire ; Wallis, (1616-1703) ;
Étant donnés trois points non alignés, il existe un
cercle passant par ces trois points ; Legendre,
(1752 –1833) ; Bolyai

Si dans un quadrilatère trois angles sont des angles
droits, le quatrième aussi est un angle droit ; Clairaut,
(1713 -1763)

On peut construire un triangle ayant une aire
donnée, arbitrairement grande ; Gauss, (1777-1855)
Diapo 49
L’hypothèse implicite de Wallis :
Pour toute figure, il existe une figure
semblable, aussi grande que l’on veut
Diapo 50
Démonstration
b'
b
a
b
b
b
b
C1


A


B1



c
B
On donne trois droites a, b, c, telles que a et b fassent avec c
des angles dont la somme est inférieure à deux droits. En
déplaçant b de façon que l’angle avec c reste constant
jusqu’à b’, elle devra nécessairement couper à un moment
donné la droite a en un point C1. Nous pouvons alors
construire un triangle ABC semblable à AB1C1, ce qui
montre que les droites a et b se coupent (en C)
Diapo 51
La question de fond :
qu’est ce qu’une droite ?
Définition par Euclide : Une ligne est une longueur
sans largeur. Une ligne droite est celle qui est
placée de manière égale par rapport aux points
qui sont sur elle.
Définition par Legendre (1752 – 1833) : la ligne
droite est le plus court chemin d’un point à un
autre.
Diapo 52
Quel est le chemin le plus court sur le globe terrestre ?
Diapo 53
Le scandale de la géométrie
"On parviendrait plus facilement à la trouver (la
démonstration du [PP] ), si on avait une bonne
définition de la ligne droite ; par malheur cette
définition nous manque
C'est cette non-définition de la droite qui conduit au
scandale de la géométrie comme l'explique d'Alembert
:
 "La définition et les propriétés de la ligne droite, ainsi
que des lignes parallèles, sont donc l'écueil et le
scandale
des
éléments
de
Géométrie
’’

Peut-on développer une théorie géométrique déductive
sans le [PP] ?
Diapo 54
Lobatchevskij (1829) : Théorie des parallèles
Toutes les droites tracées par un
même point A peuvent se
distribuer par rapport à une droite
donnée (BC) en deux classes :
- celles qui coupent (BC), telle (AF)
-celles qui ne coupent pas (BC), telle
la perpendiculaire (AE)
- La droite (AH) qui forme la limite
commune de ces deux classes est
dite parallèle à (BC)
Lobatchevskij développe la
géométrie hyperbolique
J. Bolyai développe le concept de géométrie absolue
dans : La science absolue de l’espace (1832) :
J’ai créé un autre monde, un nouveau monde à partir de rien
Diapo 55

Par un point donné on peut construire plusieurs
parallèles à cette droite.

Les seules figures semblables sont les figures égales.

Par trois points non alignés, il ne passe pas
nécessairement un cercle.

La somme des angles d’un triangle est strictement
inférieure à deux droits.

L’aire d’un triangle est bornée :
Aire = k(π – somme des angles)
Diapo 56
Comment se
représenter une
telle géométrie ?
Le modèle de
Poincaré (1854 – 1912)
Diapo 57
Droites et cercles
dans un modèle de Poincaré
Cette construction et les suivantes ont été réalisées grâce au site NonEuclid
Diapo 58
Les parallèles de Lobatchevskij
Diapo 59
L’angle de parallélisme de Lobatchevskij
Diapo 60
Diapo 61
Diapo 62
Diapo 63
La quadrature chez les Grecs
La figure emblématique du
concept grec de quadrature
pourrait être celle représentée cicontre : l’aire limitée par la lunule
formée d’un demi cercle et d’un
quart de cercle est exactement
égale à l’aire du carré construit à
partir des deux centres des cercles.
Réaliser la quadrature d’une figure
plane c’est construire (avec la
règle et le compas seuls) le carré
qui a la même aire que celle
délimitée par cette figure plane.
Un exemple de quadrature, en forme de puzzle
le puzzle de Dudeney (1857 – 1931)
Diapo 64
Diapo 65
Quadrature du cercle en géométrie hyperbolique
Le carré ABJG a
ses quatre côtés
égaux et ses quatre
angles égaux
chacun à π/4.
Son aire mesure π
Diapo 66
Diapo 67
Carrés en perspective
Diapo 68
Paolo Ucello : Le miracle de la
profanation de l’hostie
1465 - 1469
Diapo 69
Pavage du plan par Escher
Diapo 70
Une figure de Escher
Diapo 71
Deux types de développement
Géométrie euclidienne
Géométrie non euclidienne
Les axiomes sont le terme final Ce sont les axiomes (et surtout le
du développement
[PP]) qui sont au départ du
historique
développement historique
Le commencement historique
Les théorèmes se sont
coïncide avec le début logique. Les
constitués avant leur
théorèmes sont issus du
organisation logique, par
développement logique, en
l’expérience l’observation,
rupture avec l’intuition
en accord avec l’intuition
sensible
La géométrie est un abstrait
par rapport à l’intuitif
La géométrie devient un concret par
rapport au logique, au moyen des
modèles
Diapo 72
Définition axiomatique moderne
Hilbert (1862 – 1943) : Les fondements de la géométrie (1899)


Nous pensons trois systèmes différents de choses
: nous nommons les choses du premier système
des points (…); nous nommons droites, les
choses du deuxième système (…) ; nous appelons
plans les choses du troisième système.
Entre les points, les droites et les plans nous
imaginons certaines relations que nous exprimons
par des expressions telles que : être sur, entre, …
La description exacte (…) de ces relations est
donnée par les axiomes de la géométrie
Diapo 73
 Axiomes
Différents types d’axiomes
d’appartenance
ex. : il existe une droite liée à deux points donnés à
laquelle appartiennent ces deux points
 Axiomes d’ordre
définissent des expressions comme : A est entre B
et C ou la notion de segment
 Axiomes de congruence
définissent par ex. la congruence (égalité) de deux
segments
 Axiome des parallèles
 Axiomes de continuité
par ex. l’axiome d’Archimède
Diapo 74
Quel est alors le statut de la vérité
en mathématiques ?
La vérité-copie :
Adéquation de la chose
et de l’entendement :
la vérité dans l’esprit
est le décalque d’une
réalité hors de l’esprit
Hilbert à Frege : Si les axiomes
choisis arbitrairement ne se
contredisent pas, dans toutes
leurs conséquences, alors ils sont
vrais, les objets définis par eux
existent. Ce qui est pour moi
critère de vérité et d’existence.
Diapo 75
Conséquences épistémologiques
L’invention des géométries non euclidiennes remet en
cause l’ accord entre l’espace sensible et l’espace de la
géométrie euclidienne ; elle oblige à s’interroger :

sur la relation (qui n’est plus du tout évidente) entre
la théorie que constitue la géométrie et le réel de
l’espace sensible,

sur le caractère de vérité de la géométrie, puisqu’il y
a maintenant deux géométries, également vraies, et
pourtant basées sur des propositions contradictoires,
(dont l’une nie ce que l’autre affirme).
Problème logique : comment deux théories basées sur deux
propositions contradictoires peuvent – elles coexister ?
Construction par négation
Soit E = {a1,a2, …,an} un
ensemble d’axiomes
construisant une théorie T
Soit p une proposition non
contenue dans T.
Alors
E+ = {a1,a2, …,an,p} et
E- ={a1,a2,…,an,non(p)}
définissent deux nouvelles
théories aussi vraies l’une
que l’autre d’un point de
vue logique.
Diapo 76
A
géométrie
euclidienne
axiome des
parallèles
géométrie
absolue
O
négation de l'axiome
des parallèles
non A
géométrie non
euclidienne
G. non Eucl.
Diapo 77

Un autre exemple
l’invention des nombres complexes
Nombres réels
Il n’existe pas de
nombres dont le
carré soit égal à (- 1)

Nombres complexes
Il existe (au moins) un
nombre dont le carré
vaut (-1)
Diapo 78
Deux logiques mathématiques différentes
Logique traditionnelle
Empêcher l’intrusion
d’un élément
étranger
Logique exhaustive :
par rapport à un
concept bien défini,
sa tâche est
d’épuiser le contenu
du concept.
Nouvelle logique mathématique :
la logique de création
Construire des objets nouveaux par
négation des concepts anciens.
Briser la carapace du concept pour
en faire sortir quelque chose de
nouveau.
Ne fonctionne pas par généralisation
: la géométrie non euclidienne
n’est pas une généralisation de la
géométrie euclidienne.
Diapo 79
En guise de conclusion
la déraisonnable aptitude
des mathématiques à expliquer la nature.
« Comment se fait-il que la mathématique, (…)
s’adapte d’une si admirable manière aux objets de
la réalité ?
À cette question il faut, à mon avis, répondre de la
manière suivante :
Pour autant que les propositions de la
mathématique se rapportent à la réalité,
elles ne sont pas certaines, et pour
autant qu’elles sont certaines, elles ne se
rapportent pas à la réalité. »
Einstein : La géométrie et l’expérience
Téléchargement