Le magazine du KKL

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Chana tova 5777 !
LE MAGAZINE DU KKL
Octobre - Novembre - décembre 2016 - N°81 - 5€
© Noam Chen - IMOT
Tichri 5777 - N°81
UN RÉCIT AUTHENTIQUEMENT « YIÉROSHALMI »
QUESTION DE TEMPS…
SUR LE MONT DU TEMPLE
ÉDUCATION
CONNEXION
ÉTABLIE !
ÉDITORIAL
3
Les thèmes d’Adama pour l'année 5777
en l’honneur du ÈME
50 ANNIVERSAIRE
de la réunification de Jérusalem
4
Haïm KORSIA, Grand Rabbin de France
POUR JÉRUSALEM, je ne me tairai point
LE KEREN KAYEMETH LEISRAËL DE FRANCE
ET LA VILLE DE JÉRUSALEM
Pourquoi Jérusalem ?
1- Parce que Jérusalem est le port d’attache du Peuple Juif sur la terre
d’Israël, dans le passé comme dans le présent, et l’expression du Sionisme
dans toute sa splendeur : le retour à Sion, l’amour de Sion, la lutte pour
Israël, la construction et le développement de la terre d’Israël.
5
De la fondation de Jérusalem à la
destruction DU SECOND TEMPLE
6
LE ROI DAVID
2- 50 ans après 1967 : c’est le son du Shofar du Grand Rabbin de Tsahal
Shlomo Goren, au pied du Kotel, entouré de jeunes parachutistes israéliens, qui retentit encore dans nos oreilles, dans nos familles, dans nos
synagogues, dans nos communautés à travers le globe. Il proclame la
Réunification et l’unité de Jérusalem. Ces jeunes soldats de 1967 ont
rejoint les rangs des défenseurs de la ville, ceux du Roi David, les
Hasmonéens, les résidents de la ville de 1948 et ceux de toutes les
époques de l’histoire de cette ville.
Un récit authentiquement « yiéroshalmi »
3- Jérusalem demeure la Cité par excellence qui témoigne d’une présence
juive majoritaire et permanente et ce, depuis plus de 3000 ans.
8
10
12
14
16
la fondation du royaume d’Israël
Les sources d’eau de JÉRUSALEM
QUESTION DE TEMPS…
sur le mont du Temple
L’originalité bigarrée
mais apaisante du quartier de
BAKAA-TALPIOT À JÉRUSALEM
YÉHUDA AMIHAÏ, poète national
d’Israël et chantre de Jérusalem
Entre le Vieux-Talpiot et Arnon Hanatsiv
La vibrante communauté
« CARLEBACH »
Mizmor Lé-David à Jérusalem
17
ANDRÉ CHOURAQUI,
poète de Jérusalem
18
Éducation
CONNEXION ÉTABLIE !
20
21
23
Une piste cyclable à la mémoire
D'ALEX MOÏSE
LES BRÈVES DU KKL
Club Seniors
NOS AÎNÉS sur les traces de Rachi
4- C’est ici même, sur la colline du Mont Moriah, que se déroula le drame
le plus spectaculaire de notre histoire d’Alliance et de sacrifice ; une
alliance avec les cieux, une alliance avec la terre, une alliance éternelle.
5- C’est aussi sur le Mont des Oliviers que la lumière va éclairer les
Nations du monde pour reconnaître Jérusalem, Cité de l’éternité du
Peuple Juif et d’Israël.
6- Et enfin, pourquoi Jérusalem ? Pour expliquer aux falsificateurs de
l’histoire, les délégués des Nations au Conseil de l’Unesco, à ceux qui
ont gardé le silence, aux politiques, aux historiens, aux grands reporters,
ceux qui dans le contexte européen voudraient respecter l’Islam militant,
que le Keren Kayemeth LeIsraël s’engage sur le terrain de l’information
et de la lutte contre la désinformation.
7- Le visiteur d’aujourd’hui, comme celui du 12ème siècle, qui se promène
dans les ruelles de la ville, ressent en lui un élan d’attache à tous les
chapitres de l’histoire juive.
« Si je t’oublie Ô Jérusalem… » est un programme de réalisations
pour cette nouvelle année 5777 qui propose des expositions, des tables
rondes, des films, des journées à thème, des délégations : Seniors
(Septembre 2016 et Mars 2017), « Israël Aujourd’hui et demain »,
(Novembre 2017), la « Marche pour l’Eau » (Mars 2017), Yom
Yéroushalayim (Mai 2017). Et bien évidement les classes de CM2 tout
au long de l’année. Une vraie production « Made in Jérusalem ».
Nous invitons tous nos amis et militants à nous rejoindre, à prendre
part à nos actions et à manifester leur soutien à Jérusalem, au KKL et
à l’État d’Israël.
Continuons à couronner Jérusalem de parcs et de forêts.
« Cette année à Jérusalem »
Fino Ephraim EDERY
Robert ZBILI
Délégué général
du KKL de France
président
du KKL de France
ADAMA, le magazine du KKL, est édité par le Keren Kayemeth LeIsraël - Association loi 1901 - Directeur de la publication : Raymond BUNAN - Comité
de rédaction : Adva BENZIMRA - Nadine BISMUTH - Fino EDERY - Laurence KIMAN - Frédéric NORDMANN - Yaël SIMON - Robert ZBILI - Maquette : SH Graphic Impression: AM PLUS, 93260 Les Lilas - Dépôt légal: à parution - Commission paritaire: N° 0718G79279 - ISSN 1621 - 8590 Crédits photos : archives photos du
KKL, OTIS, sauf mention contraire - L’éditeur décline toute responsabilité en cas de perte, détérioration ou non-retour des documents qui lui sont confiés. Il se
réserve le droit de refuser toute demande d’insertion sans avoir à motiver son refus. La citation de marques, noms de firmes, d’associations, institutions, etc.
est faite sans aucun but publicitaire. Ce mailing comprendra les éléments suivants : Adama, un carnet et une lettre accompagnatrice.
Le magazine du KKL
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LES
T H È M E S D U J O U R NA L
A DA M A
DE L'AN NÉE
5777
ème
En l’honneur du 50 anniversaire
de la réunification de Jérusalem
L
es thèmes du journal Adama de l'année 5777 seront des illustrations, des promenades,
des rencontres et des dialogues autour de Jérusalem.
Nous vous emmènerons sur les hauts lieux de l’histoire ancienne et moderne de la ville de Jérusalem ;
aux sources du Guikhon, le lieu même où Salomon, fils de David, fut nommé roi d'Israël ; à l'horloge solaire
de la place du marché bâtie selon le calendrier établi à l’époque du Second Temple, pour donner un rythme
à la ville et à ses citoyens ; un arrêt face à l’esplanade du temple d'Hérode ; et sur les bancs rocailleux de la
première synagogue de l'histoire, et bien d'autres ballades inédites.
Les rencontres : avec des hommes qui ont laissé des traces éternelles sur le paysage de la ville.
Ceux qui, à travers leurs écrits, ont saisi l’opinion, le regard et l’amour; avec les civilisations
qui ont transformé Jérusalem en une cité unique, qui se sont battues pour sa Sainteté,
pour sa Liberté; le Roi David, Yehouda Hamaccabi, le poète Y. Amihaii, D. Shahar,
le général Ouzi Narkiss, Isaii Jeremie, Shai Agnon et bien d’autres encore.
© Noam Chen - IMOT
Nous maintiendrons un dialogue permanent avec les autres civilisations
qui ont également fait le choix de Jérusalem, avec les différentes
communautés qui peuplent la ville. Étudier et commenter une
prophétie, un psaume, un poème, un slogan, dialoguer avec la
cité du 21e siècle, ses universités, ses musées et son excellence dans le monde médical et sa haute technologie.
Le tout est de vous faire partager ce sentiment
de haute tension que ressent le visiteur.
Nos pieds s’arrêtent dans tes portiques, ô Jérusalem,
Jérusalem qui es bâtie
comme une ville d’une harmonieuse unité !
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D’ABONNEMENT
ADAMA
1 BULLETIN
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4-Septembre,
75002
Paris
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DR
Pour Jérusalem, je ne me tairai point
Isaïe (LXII, 1)
O
n ne peut être que profondément choqué lorsqu’on apprend
que notre pays, la France, pays
des Lumières et de la laïcité, a apposé sa
signature au bas de la résolution adoptée
par le Conseil exécutif de l’UNESCO
le 16 avril dernier, sur le point intitulé
« Palestine occupée ». Soyons clair : il ne
s’agit pas pour moi, ce n’est ni mon rôle
ni mon ambition, d’évoquer les conflits
politiques et territoriaux qui occupent et
déchirent les États du Proche-Orient.
Mais le responsable religieux français que
je suis, ne peut demeurer silencieux devant
une telle atteinte à la foi de nombre de
fidèles, qui ont accompagné la destinée du
Temple de Jérusalem, de Salomon le bâtisseur à Jésus chassant les marchands ;
je ne peux rester indifférent devant une
telle offense à l’Histoire et à l’honneur.
des pays qui approuvent cette position est
proprement révoltant pour le patriote que
je suis.
Le principe de laïcité, inscrit dans notre
Constitution, aurait dû interdire de prendre
aussi ouvertement parti pour des tenants
extrémistes, aveuglés par des considérations
bien éloignées de la miséricorde divine.
La France, l’une des nations qui a le plus
largement contribué à la clairvoyance et à
la mesure de notre civilisation, ne peut pas
ne pas être offusquée par le déni de réalité
que constitue la résolution votée. Elle ne
peut pas ne pas voir, dans la répétition,
l'insistance, la litanie maladive des termes
« Israël, Puissance occupante » tout au long
du texte, le révélateur des vrais mobiles de
ses auteurs. Elle aurait dû, sans conteste,
retenir sa plume. Aussi est-il de ma responsabilité de dénoncer cette avanie comme
un écho au prophète Isaïe (LXII, 1) : Pour
Jérusalem, je ne me tairai point.
Le Ministre des Affaires étrangères m’a
assuré de la constance de la position de
notre pays et de l’évidence de la connaissance que possèdent nos représentants et
nos diplomates des faits historiques incontestables. Jean-Marc Ayrault, dont j'ai pu
mesurer la solidité des convictions, devra
le réaffirmer de façon forte et claire lors
de son prochain voyage en Israël, mi-mai.
Nous avons fait part de notre souhait et
réitérons notre demande que cette position
soit également clairement réaffirmée
par notre pays, notamment lors de la
40ème session du Comité du Patrimoine
Mondial qui se tiendra à Istanbul du 10 au
20 juillet prochain.
En restant vigilants, nous souhaitons aussi
aider l’UNESCO à retrouver le sens premier
et profond de la charte qui la fonde et de
l’espoir qu’elle porte pour tous. ■
© Noam Chen
DR
Que l’UNESCO, dont la mission est de
promouvoir la paix, la sécurité et les libertés
fondamentales en « resserrant par l’éducation,
la science et la culture, la collaboration entre
les nations » s’inscrive dans une dénégation
aberrante, en adoptant une résolution qui
laisse entendre que les Juifs n’auraient aucun
droit de regard sur le Mur occidental (ici
appelé place Al Buraq), voire qu’ils n’auraient
pas construit le Temple de Jérusalem, ne
manque pas de laisser pantois les honnêtes
observateurs.
Il y a là injure à ce que nous rapportent
les textes sacrés, la Bible et ses 867 mentions de Jérusalem, comme les Evangiles,
mais aussi à l’Histoire. D’innombrables
voyageurs aussi érudits que Pierre Loti,
qui n’était pourtant pas un parangon de
philosémitisme, ou Chateaubriand, pour ne
citer qu’eux, témoignent, s’il en était besoin,
de l’enracinement ancestral du judaïsme
dans ces lieux : «c’est vendredi soir, le moment
traditionnel où, chaque semaine, les Juifs
vont pleurer en un lieu spécial concédé
par les Turcs, sur les ruines de ce Temple
de Salomon… » (Chateaubriand, 1811).
En citant ces écrivains, je ne fais que me référer modestement aux Témoignages sur Israël
dans la littérature française, ouvrage publié
en 1938 par le Grand Rabbin Jacob Kaplan,
qui a su souligner le rôle exceptionnel de
passeurs de mémoire qu’ont joué les auteurs
français dans l’histoire du peuple juif.
Certes, on ne devrait être que moyennement surpris par la position de l’UNESCO,
quand on sait que le tombeau des
Patriarches et la tombe de Rachel ont
été récemment classés, par la même
organisation, comme des lieux de culte
exclusivement musulmans.
Mais dénier aux Juifs, mais aussi aux
Chrétiens qui se sont appuyés sur la
construction du Temple pour élever les
cathédrales, aux Francs-Maçons qui en ont
fait le symbole de leur humanisme, et enfin
aux non-croyants, l’appartenance à ces lieux
historiques et inspirés, est faire insulte à la
mémoire et à l’intelligence collectives de
l’humanité. C'est d’ailleurs aussi faire insulte
à l'Islam, car cette foi s'enracine dans celles
qui l'ont précédée. Or, s'il n'y a pas de
Temple, pourquoi ce lieu particulier pour
une mosquée ?
Il se trouve que si, en France, nos synagogues,
nos églises, nos temples et nos mosquées
sont tournées vers l'Orient, c'est que ces
lieux suivent l'appel de Jérusalem, celui du
Temple.
Une telle attitude est sans aucun doute
préoccupante pour l’avenir de l'UNESCO,
malgré tout le respect qu’on peut avoir
pour les objectifs poursuivis par ses fondateurs et l’estime portée à sa Directrice
générale.
Que la France ajoute son paraphe à ceux
Pour Jérusalem, je ne me tairai point
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4
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Le magazine du KKL
De la fondation de Jérusalem
restitution par Cyrus des objets sacrés pillés (mais les
tables de Moïse manquent).
−1004 avant l'ère chrétienne : date la plus
probable, selon les historiens, de la fondation de Jérusalem par le roi David, d'où la commémoration officielle
des 3000 ans de la ville en 1996. Une première commémoration plus approximative avait été organisée dans les
années 1952-1953, donnant lieu à la création à Jérusalem,
le 1er juin 1954, de David, opéra en cinq actes de Darius
Milhaud sur un livret d'Armand Lunel. Sur le site de la
ville, Abram avait jadis rencontré Melchisédech, roi de
Salem, et c'est sur le mont Moriah que, devenu Abraham,
il s'était apprêté à sacrifier son fils Isaac. La tradition juive
situe même dans ce lieu la résidence d'Adam expulsé
du paradis. David y achète au roi jébuséen Arauna une
aire de battage où sera construit le futur sanctuaire.
Il danse devant l'Arche lors de son installation sur ce site,
au son des trompettes et du chofar. Au lendemain de
l'affaire Dreyfus, le jeune philosophe juif français Henri
Franck (1889-1912) écrira un long poème, publié après
sa mort et intiulé La Danse devant l'Arche, qui exprime sa
quête d'une identité plénière : « Je suis fier d'être admis à
vos cérémonies, Ô Dieu du peuple élu, ô mon maître, ô mon
roi; Je suis heureux que mon enfance soit nourrie Dans votre
temple saint, de votre sainte loi. »
−444 a.e.c. : inauguration des murailles de la ville
reconstruite par Néhémie.
−332 a.e.c. : Alexandre le Grand à Jérusalem. Domination grecque, initialement tolérante.
−167 a.e.c. : profanation du temple par Antiochus
Epiphane, roi de la dynastie séleucide. Début de la révolte
des Maccabim.
−141 a.e.c. : victoire des Maccabim et réinauguration
du Temple.
−140 a.e.c. : Jérusalem capitale du royaume indépendant de la dynastie hasmonéenne.
−63 a.e.c. : conquête romaine de Pompée, autonomie
juive et non plus indépendance.
−37 à −4 a.e.c. : règne de Hérode. Agrandissement
important du temple et projets architecturaux spectaculaires. Le musée d'Israël à Jérusalem a proposé, en
2013-2014, une vaste exposition intitulée Hérode le Grand,
le dernier voyage du roi.
−965 à −925 a.e.c. : règne de Salomon, qui construit
en sept ans le temple et aussi, en treize ans, un vaste palais
royal. Dès la mort de Salomon, scission du royaume du
nord (capitale Samarie), distinct du royaume de Juda,
autour de Jérusalem.
6 e.c. : les procurateurs romains successifs, basés à
Césarée, gouvernent la Judée et se rendent à Jérusalem
pendant la période de la Pâque.
−725 a.e.c. : règne d'Ezechias, qui évite au royaume
de Juda la destruction subie par le royaume d'Israël et fait
percer le tunnel du Siloë vers la source du Guihon (une
inscription en hébreu découverte en 1880 attestait de
la fin des travaux). Isaïe prophétise la paix universelle
messianique autour du temple.
33 e.c. : procès et crucifixion à Jérusalem de Jésus de
Nazareth sous la procurature de Ponce-Pilate.
66 e.c. : début de la révolte juive contre les Romains,
commandés par Vespasien.
70 e.c. : siège de Jérusalem par Titus, fils de Vespasien
(qui est devenu empereur). Guerre civile juive. Fuite de
Yohanan Ben Zackaï, qui est autorisé par les Romains à
fonder l'académie de Yavneh. Première brèche dans les
murs du temple le 17 Tamouz. Prise et incendie du temple
le 9 Av. Les morts juifs se comptent par centaines de
milliers. Défilé à Rome des chefs captifs de la révolte et
des objets pillés dans le temple, dont la menorah. Un arc
de Triomphe édifié à Rome sur le forum les représente. ■
−586 a.e.c. : conquête babylonienne, Nabuchodonosor détruit le temple le 9 du mois de Av et exile les élites
juives. Prophéties d'Ezechiel (un des premiers exilés) et de
Jérémie (qui a fui en Egypte).
−538 a.e.c. : décret du roi perse Cyrus autorisant le
retour des exilés.
−516 a.e.c. : inauguration du temple reconstruit,
De la fondation de Jérusalem...
ADAMA
5
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DR
© Noam Chen - IMOT
à la destruction du Second Temple
Le
Personnage clé de l’histoire juive, David
exerça la fonction royale pendant quarante ans.
Né en 907 avant notre ère et mort en 837,
il joua un rôle déterminant dans la transformation du
peuple hébreu, dispersé et divisé, en puissance politique
régionale. Devenu roi, David rassemble les tribus d’Israël
sous la bannière d’un État souverain, avec une capitale,
Jérusalem, et des institutions qui assurent sa pérennité.
L
e récit biblique sur David comprend
tous les ingrédients qui ont permis
d’écrire sa légende et d’en faire un des
héros de l’histoire d’Israël. Jeune berger
devenu chef de bande David est un
homme dont la Bible ne cache pas les faiblesses ou les fautes, mais affirme aussi les
qualités de poète, puisqu’on lui attribue la
rédaction des Psaumes. L’accession au pouvoir de David, rapportée dans le premier
livre de Samuel, est ponctuée de prouesses
militaires, d’aventures multiples et de ruses
ingénieuses d’un chef de guerre doué d’un
charisme évident et d’un sens politique
aiguisé. David réussit à conquérir la ville
de Jérusalem, restée imprenable pendant
450 ans après l’entrée des Hébreux en
terre d’Israël, et y fixa la capitale du
Royaume d’Israël. Il mit ainsi un terme à la
menace des Philistins et s’empara de la
DR
DR
Mosaïque
du roi David.
cité-forteresse de Jérusalem dominée par
les Jébuséens. David avait réussi à unifier
plusieurs groupes en leur accordant des
parts de butin : « Tous les gens en détresse,
tous ceux qui avaient des créanciers, tous
les mécontents se rassemblèrent autour de
lui et il devint un chef. » (Samuel 1, 22, 1-2).
Désigné par Samuel, David remplacera
Saül, qui l’avait nommé à ses côtés après
son duel mémorable contre Goliath. Ce
combat est devenu un des mythes fondateurs de l’héroïsme juif à travers les âges.
Selon la tradition, malgré la profonde jalousie de Saül envers lui, celui-ci lui donna sa
fille Mikhal, ce qui lui permit
ensuite d’acquérir un statut de roi légitime
auprès du peuple
et de fonder la
dynastie royale
d av i d i q u e ,
reprise
ensuite
dans la
conception messianique
j u i v e .
Pour suivi
Combat entre David
par les fouet Goliath par Daniele
da Volterra (1555).
dres de Saül,
D av i d m e n a
une vie d’errance
dans les montagnes
Le roi David
ADAMA
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6
de Juda, au cours de laquelle il conclut
même un pacte avec les Philistins.
Il ne fait aucun doute que l’événement le
plus important de la vie de David est la
conquête de Jérusalem, et le livre des
Chroniques nous décrit comment son
général Yoav réussit à pénétrer dans la
ville en escaladant un tunnel, probablement
celui qui monte vers la cité depuis la source
du Gikhon, qui se trouve hors des murs.
Jérusalem, en dépit de sa position centrale,
n’appartenait à aucune tribu, tout en étant
à cheval entre le territoire de Benjamin et
de Juda. En introduisant dans la
ville l’Arche d’alliance, il
posa les fondations du
futur Temple, dont
il négocia l’achat
de l’emplacement. La
célébration
de cette
acquisition
fut suivie
d’une fête
au cours
de laquelle
D a v i d
exprima sa
joie d’une
manière telle
que Mikhal lui fit
le reproche de se
Le magazine du KKL
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© Noam Chen
DR
Le roi David par Michel-Ange (1501).
humains, un grand homme aux yeux de la
tradition, dont la lignée donnera naissance
au Messie, désigné fils de David. Le fils qu’il
conçut avec Bat Sheva mourut, en dépit
des actes de contrition et de prières de
son père, mais un peu plus tard un autre
fils naquit, doué d’une grande sagesse,
Salomon.
La tour du roi David
à Jérusalem.
Psautier et roi fondateur d’un État, David
était aussi un grand musicien dont le génie
de rassembleur et de guerrier créa autour
de lui un véritable mythe qui inspira de
nombreux artistes comme Michel-Ange,
Chagall, Cranach ou Charpentier. ■
Statue du roi David
jouant de la harpe.
C’est par la bouche du prophète
Nathan que l’Eternel confirme
le contrat d’alliance avec
le roi David et le lien
indéfectible qui existera à l’avenir entre
le peuple d’Israël et
son royaume dont
la capitale est et
sera Jérusalem. Une
fois ce lien établi,
le rôle de David
consista à étendre
le royaume d’Israël
et à le renforcer par
des conquêtes et des
alliances. Le texte biblique ne fait pas l’économie des aspects troubles de
la personnalité de David,
notamment lorsqu’il décrit
son péché envers Bat Sheva,
dont il envoie le mari, Uri,
se faire tuer au combat,
afin de pouvoir l’épouser ensuite. David
reconnut sa faute, et
son aveu explique
pourquoi il reste,
malgré ses défauts
DR
donner en spectacle devant les servantes
comme un rustre (Samuel 2, 16). Mais
David lui répliqua : « C’est devant Dieu que
j’ai dansé ; Et je m’humilierai davantage et
me ferai tout petit à mes propres yeux. Et
quant aux servantes, par elles je serai tenu
en honneur. » Certes il ne sera pas celui
qui construira le Temple, mais l’Eternel lui
attribue une maison, à savoir une dynastie
dont la vocation est de durer dans l’histoire.
Le choix de Jérusalem comme capitale
constitue un acte politique majeur et
marque la volonté de David de construire
un Etat centralisateur et fort. Cette décision
ne résulte pas uniquement de son importance stratégique, ville haute protégée par
des collines, mais avant tout du lieu où elle
se trouve, qui possède un sens spirituel,
car selon le texte biblique l’achat de terres
mentionné dans Samuel II, 24 correspond
au site du mont Moria, lieu de la scène du
sacrifice d’Isaac, et c’est également en ce
même endroit que Jacob a rêvé de l’échelle
qui mène vers le ciel. Il donna à cette
citadelle le nom de Sion.
Le roi David
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Les sources d’eau de Jérusalem
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© Noam Chen - IMOT
Depuis la fondation de Jérusalem par les Jébuséens, l’eau est un enjeu crucial
pour cette ville perchée à près de 800 m. au-dessus du niveau de la mer et dont
les sources hydrologiques sont rares, donc précieuses. Le climat plutôt sec de cette
cité, proche du désert de Judée ne permet pas non plus une rétention des eaux de
pluie, dont la moyenne annuelle ne dépasse pas 550mm. Ville située au carrefour
des deux grands aquifères de la région, celui de la bande côtière et celui qui va de
la Mer Morte au lac de Tibériade, elle souffre d’une véritable carence hydrologique
et d’une incapacité à empêcher la fuite des eaux. La situation hydrologique de la
ville fait face à deux problèmes majeurs : la profondeur des nappes phréatiques
en raison de l’altitude de la ville, et la rareté des sources d’eau naturelles.
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Hamigdalim et Breikhot Hanakhachim, les
bassins des tours et les bassins des serpents,
ont servi pendant toute cette période. La
plupart ont disparu mais il en subsiste certains vestiges comme les bassins de Sultan
et de Mamila, à proximité de la Vieille Ville
de Jérusalem. A l’époque de l’existence du
Temple l’eau faisait l’objet d’une attention
particulière dans les rites et coutumes de
la ville et chaque année on fêtait la présence
de cette « matière précieuse » au moment
de Souccot où il est raconté que personne
ne peut connaître ce qu’est la joie s’il n’a
pas vu la joie de Beit Hachoeva (littéralement la maison du pompage). On remerciait le Seigneur pour les pluies des années
précédentes et on priait pour celles de
l’année à venir.
A
son origine, il y a plus de 4000 ans, la
ville était alimentée par deux sources
naturelles, qui permettaient tant bien que
mal de nourrir une population peu nombreuse, inférieure à 1000 habitants pendant
la période jébuséenne. Ces deux sources,
Ayn Rogel et Maayan Hagihon, se trouvent
légèrement hors de la ville fortifiée, proches
de Kfar Silouan aujourd’hui, et leur situation
géographique explique pourquoi les premiers habitants de Jérusalem élirent domicile à proximité de ces sources, avant la
création d’un tunnel souterrain protégé
par des parois en pierre, reliant les sources
à la ville. La source de Gihon ne fournissait
en moyenne que 50m3 par jour à cette
période. Le tunnel souterrain et secret permit à la ville de résister pendant plus de
700 ans à des sièges successifs jusqu’à la
conquête par David grâce à un subterfuge,
qui consista à pénétrer par un tuyau le long
de la source du Gihon, c’est-à-dire en
empruntant ce tunnel souterrain si l’on
comprend à la lettre la description de cette
expédition dans le livre de Samuel. Ces
deux sources étant insuffisantes, les habitants de la ville commencèrent à creuser
des puits, mais cette activité de forage ne
fit que dégrader la situation des nappes
phréatiques. Le tunnel souterrain menant
à la source finit par s’engorger et s’ensabler
et cessa d’être utilisé par les habitants pendant plus de 2000 ans. Ce n’est qu’il y a
150 ans qu’un archéologue britannique,
Ce sont les Hasmonéens qui mirent en
œuvre un projet de grande envergure pour
résoudre le problème d’approvisionnement
en eau à Jérusalem. Ils comprirent qu’il fallait
trouver un moyen d’acheminer des quantités suffisantes en provenance de sources
éloignées de la ville. A cet effet ils construisirent deux aqueducs à partir des sources
d’Arouv et de Biar situées à plusieurs
dizaines de kilomètres de la cité royale. Ces
Les bassins de Salomon, 1890
DR
DR
Charles Warren, en redécouvrit une ouverture et la fit connaître du public.
Pendant la période du royaume d’Israël, la
question de l’eau ne cessa de préoccuper
le pouvoir en place, et il y a 2600 ans le
roi Ezéchias fit construire un bassin de plus
de 500 m2 à Shiloah pour y recueillir les
eaux de la source de Gihon. En 1880 une
équipe d’archéologues découvrit une
plaque en hébreu ancien décrivant les travaux de construction de ce bassin. Cette
plaque est aujourd’hui exposée au musée
d’Istanbul.
aqueducs aboutissent à des bassins surnommés Breikhot Schlomo, les bassins de
Salomon. Le parcours de l’eau, serpentant
en dénivelé, permettait de fournir aux habitants les quantités nécessaires à leurs
besoins ménagers. Grâce à ces infrastructures ce sont des milliers de litres d’eau
qui parvenaient chaque jour à Jérusalem.
Sous l’occupation romaine, Hérode utilisa
le même procédé en le développant et en
ajoutant d’autres aqueducs, ainsi que des
tunnels souterrains qui permirent de raccourcir les distances, puisqu’ils traversaient
les roches des collines encerclant la ville.
Il créa également des bassins de rétention
qui, bien que ne fournissant pas de l’eau
potable, pouvaient être utilisés pour d’autres
tâches. Ces bassins surnommés Breikhot
Après la destruction et l’exil d’une grande
partie de la population, la ville ne fut plus
la capitale d’aucun État, excepté pendant
la courte période du royaume des Croisés.
Les crises de pénurie d’eau étaient fréquentes et les habitants trouvèrent des
solutions individuelles au problème en
creusant des puits dans leurs jardins. Le
résultat de cette action fut catastrophique
pour les nappes phréatiques et la ville
continua de souffrir de ce fléau jusqu’à
l’arrivée des Anglais après l’application du
Mandat britannique en Palestine. L’autorité
mandataire construisit un aqueduc long
d’une soixantaine de kilomètres pour
approvisionner Jérusalem à partir de la
rivière Yarkon, dont la source se trouve
près de Roch Haayn. Grâce à ce système
la ville put bénéficier d’environ 13.000 m3
d’eau par jour. Mais l’équilibre hydrologique
de la cité resta encore très fragile pendant
de nombreuses années, comme on put le
constater lors de la guerre d’Indépendance
où toute une partie de la ville juive fut
coupée de ressources en eau pendant plusieurs semaines par la Légion jordanienne.
Il fallut l’opération Shiloakh, menée par le
Palmah, pour soulager les habitants de la
disette qui sévissait dans la partie juive de
la ville. Depuis la création de l’État d’Israël
de nombreuses infrastructures ont été
mises en place par Mekorot et le KKL pour
assurer l’alimentation en eau potable ainsi
que l’évacuation des eaux usées et leur
recyclage. ■
Les sources d’eau de Jérusalem
ADAMA
9
N °81
- T I C H R I 5777 / 2016
U N R É C I T AU T H E N T I QU E M E N T « Y I É RO S H A L M I »
Question de temps...
DR
C
Si vous vous promenez
le long de la rue Yaffo
à Jérusalem, à hauteur
du célèbre marché
Mahané Yéhouda,
et plus exactement
au numéro 92,
vous découvrirez sur
la façade d’une maison
un très beau cadran
solaire.
C’est l’une des
dernières œuvres qui
nous reste du maître
artisan Moshé Shapiro,
qui fit le bonheur de
nombreuses synagogues
de Jérusalem au tout
début du XX ième siècle (*).
et horloger s’était en effet spécialisé
dans la fabrication de cadrans solaires
de très grande précision, d’autant que la loi
juive utilise fréquemment les heures de lever
et de coucher du soleil pour indiquer à
chaque Juif le moment le plus opportun
pour réaliser certaines de ses obligations
telles que les prières du matin, de l’aprèsmidi et du soir, ainsi que l’allumage des bougies de Chabbat le vendredi soir. Et c’est
donc à juste titre que les horloges solaires
de Moshé Shapiro furent très appréciées.
Or, la vie juive n’est pas la seule à être rythmée par le soleil puisque l’islam également
impose à ses fidèles nombre de pratiques
religieuses à des « heures relatives ». De
tout temps, les chefs religieux musulmans
furent donc très intéressés à posséder un
cadran solaire, notamment ceux qui avaient
en charge la mosquée d’Omar située dans
la Vieille Ville de Jérusalem. Mais s’ils étaient
prêts à de grands sacrifices pour ériger une
telle horloge sur le mur de cette mosquée,
ce n’était pas tant par souci religieux que
par désir de réhausser le prestige de ce lieu
de pèlerinage aux yeux du monde arabe…
C’est ainsi qu’en 1901, Moshé Shapiro fut
invité dans les bureaux du cheikh Nimar, le
chef religieux musulman de Jérusalem, qui
le reçut chaleureusement et lui demanda
de construire un cadran solaire sur la mosquée d’Omar. Tout en affirmant que de
nombreux artisans arabes possédaient un
talent semblable à celui de son hôte, il avait
pensé que si un Juif réalisait ce cadran solaire,
cela contribuerait grandement à améliorer
les relations entre les Juifs et les Arabes.
Shapiro ne fut pas dupe : il savait très bien
que le cheikh ne pouvait compter que sur
lui pour mener à bien cet ouvrage. Aussi
fut-il très embarrassé : il n’osait refuser de
peur de provoquer le courroux de cet
homme puissant prêt à tout pour obtenir
ce cadran solaire qui lui permettrait d’améliorer son prestige. Mais la mosquée était
érigée sur le mont du Temple, là-même
où furent érigés les deux Temples du peuple
d’Israël… Or, bien que ces deux Temples
Question de temps... sur le mont du Temple
ADAMA
N °81
- T I C H R I 5777 / 2016
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aient été détruits, la sainteté de
ce lieu n’a pas disparu au fil des générations,
et il reste donc interdit aux personnes
« impures » inaptes à s’y rendre.
Un salaire considérable !
Remarquant le désarroi de Shapiro, le cheikh
lui proposa de poursuivre cette discussion
dans sa maison princière, loin du bruit de
la foule qui se pressait dans ses bureaux :
peut-être serait-il alors plus à son aise pour
se décider ?
Le cheikh introduisit l’horloger dans sa somptueuse maison et lui réitéra sa proposition,
mais cette fois en lui faisant comprendre
subtilement – mais fermement – où était
son « intérêt »… L’artisan obtint finalement
un délai de réflexion de deux jours.
Dès qu’il quitta le cheikh, il se dirigea vers
la maison du seul homme capable de l’aider
dans cette affaire : le fameux Rav Haïm
Sonnenfeld, l’une des sommités rabbiniques
du Yichouv juif d’Eretz Israël.
Voici le conseil qu’il donna : notre horloger
devait dans un premier temps exiger un
prix exorbitant pour son travail. Et si l’argent
ne se révélait pas un obstacle, Shapiro devait
alors invoquer le «problème religieux » de
l’entrée d’un Juif sur le mont du Temple. La
décision ne lui appartenant pas, une «autorité rabbinique compétente » devait être
consultée.
Deux jours plus tard, Shapiro réapparut
devant le cheikh qui lui demanda sans
préambule quelle était sa réponse.
Conformément aux conseils du Rav
Sonnenfeld, Shapiro l’avertit que le salaire
de ce travail était « considérable ». Sans
dire un mot, le cheikh se leva, alla à son coffre-fort et en retira un gros sac contenant
30 000 napoléons d’or qu’il plaça devant
l’horloger, puis lui dit en souriant : « Tout est
à vous ! Et si cela ne suffit pas, je suis prêt à
vous donner deux fois et même trois fois cette
somme s’il le faut ! ».
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sur le mont du Temple
« Maitre du monde ! Qui est comme
Ton peuple Israël ? ».
Moshé Shapiro ne sut plus quoi répondre,
car le Rav lui avait ouvert un horizon qu’il
n’avait à aucun moment imaginé – ce qui
le plongea dans un profond embarras…
Aussi demanda-t-il la nuit pour réfléchir !
Le lendemain, le Rav ouvrit sa porte à un
homme très résolu, et lorsqu’il questionna
l’horloger sur sa décision, celui-ci lui répondit : « Je ne construirai aucune horloge sur la
mosquée d’Omar, même si le cheikh m’offrait
un million de napoléons ! ». Des paroles qui
émurent beaucoup le Rav, d’autant que la
pauvreté était si grande à Jérusalem en ce
temps-là ! Aussi embrassa-t-il Shapiro en
s’exclamant : « Maitre du monde ! Qui est
comme Ton peuple Israël ? ».
Lorsque le cheikh vint entendre la décision
du Rav Sonnenfeld, un « non » catégorique
lui fut annoncé. Comme la Torah interdisait
à tout Juif de pénétrer sur le mont du
Temple, le Rav ne saurait autoriser Shapiro
à construire un cadran solaire sur la mos-
quée d’Omar. Il rappela aussi au cheikh que
la loi musulmane reconnaissait à chaque
individu le droit de pratiquer sa religion et
qu’en aucun cas, on ne pouvait le contraindre à la transgresser.
Lors d’une rencontre secrète , le
cheikh Nimar avertit Shapiro du danger qui le menaçait
et, tout en lui accordant son soutien
parce qu’il estimait
que son refus était
justifié, il lui conseilla
néanmoins de quitter Jérusalem pour
sa propre sécurité :
le peuple ne se calmerait, en effet, pas
si facilement…
DR
Le cheikh accepta sans broncher cette sentence et quitta le Rav en termes amicaux.
Mais ce ne fut pas le cas de la population
arabe, dont la colère fut soulevée par ce
refus de l’honneur d’embellir l’un des plus
prestigieux lieux de pèlerinage de l’islam :
un tel affront de la part d’un Juif devait donc
être vengé !
DR
Shapiro lui exposa alors le problème fondamental qui l’empêchait d’arrêter sa décision : un Juif avait-il le droit d’entrer sur le
mont du Temple ? Seule une autorité rabbinique était en mesure de répondre.
Quand le cheikh lui demanda à qui il envisageait de soumettre le problème, il avança
le nom du Rav Sonnenfeld auquel la population arabe vouait alors un grand respect.
L’horloger rapporta ensuite cet entretien
au Rav qui l’écouta attentivement et qui
lui posa une question autant directe
qu’inattendue :
- Trouvez-vous séduisante la perspective de
recevoir 30 000 napoléons ?
- Que veut donc dire le Rav ?, s’étonna Shapiro.
- Si cet argent est important pour vous, nous
pouvons peut-être trouver - bien évidemment
sans nous opposer à la Torah - des moyens
vous permettant d’entrer sur le mont du Temple
pour réaliser ce cadran solaire.
L’horloger Moshé
Shapiro fut donc
contraint de fuir sa
Jérusalem natale
pour aller se réfugier à Pétah Tikva
où il vécut jusqu’à
la fin de sa vie. ■
Richard Darmon
(*) Extrait et adapté
du livre « Gardian of
Jerusalem » - Artscroll
History Series – 1983.
Question de temps... sur le mont du Temple
ADAMA
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N °81
- T I C H R I 5777 / 2016
L’originalité bigarrée
mais apaisante du quartier de
Bakaa-Talpiot à Jérusalem
DR
Situé dans la partie-sud de
Jérusalem et s’étalant sur les
nombreuses petites rues
parallèles ou perpendiculaires
aux boulevards de Hébron et
de Bethléem qui lui confèrent
un irrésistible cadre de
détente, ce quartier très vert,
paisible et ouvert est doté
d’une population
étonnamment variée: en effet,
il comporte tout d’abord des
familles de résidents venus
d’Irak, d’Iran, du Maroc et
d’Europe centrale dans les
années 1950, mais aussi de
nombreux anciens et plus
récents émigrants américains
mais aussi francophones
ayant fait leur alya en Israël
depuis la fin des années 1970.
A tel point qu’on y entend
autant parler l’hébreu que
l’anglais et le français…
La maison de Bethléem à Bakaa.
Bakaa-Talpiot à Jérusalem
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ans cesse en train d’être rénové, ce double
quartier résidentiel, qui englobe aussi le
secteur de Talpiot, est délimité à l’ouest par
l’avenue Emek Réfaïm – cette artère pleine
de restaurants, de cafés et de petites boutiques
rattachées à la Mochava-Germanite -,
ainsi qu’à l’est par le Derekh Bethléhem, où
pubs avec terrasses ou jardins et petits
magasins de mode se sont beaucoup aussi
implantés ces dernières années. Sa limitesud est constituée par les vergers et les
installations rénovées du kibboutz-hôtel de
Ramat-Rahel (qui font face au nouveau
quartier plus distant de Har-Homa, pendant
que son extrémité-nord n’est autre que la
Promenade Haas (Tayélet) surplombant
magistralement le village d’Abou-Tor avec
plus au loin, une vue panoramique très
élargie sur toute la Vieille Ville de Jérusalem
et sur la partie-ouest de la capitale.
Bakaa-Talpiot jouxte aussi la zone - encore
plus recherchée au plan immobilier - de
Arnona, du haut de laquelle les habitants
peuvent voir quand le ciel est dégagé, depuis
leurs balcons ou leurs terrasses, certaines
parties de la mer Morte située 1200 mètres
plus bas… ainsi que les monts jordaniens
de Moav se dressant de l’autre côté de la
frontière du Jourdain et où la Bible hébraïque
a bien pris le soin de préciser que Moshé,
le libérateur du peuple hébreu de l’Egypte
pharaonique, était enterré dans un lieu
« secret »…
Deux « sous-quartiers » à l’histoire
mouvementée, mais assez différente
Avant 1948, la plupart des somptueuses
maisons maures de type ancien de Bakaa
(avec fenêtres et portes en voûte, avancées
en colonnades, patios et cours intérieurs
dotés de bassins d’eau) abritaient avant
1948 les familles de riches commerçants et
propriétaires terriens arabes de la région,
tout en constituant aussi les résidences
secondaires de certains grands bourgeois
de l’élite jordanienne. Or, ce sont ces mêmes
mini-palais saisis au début 1949 par l’État
d’Israël naissant puis remis en gestion à
l’Agence juive, qui seront scindés - pour
chacun d’eux - en plusieurs mini-appartements distribués dès le début des années
1950 aux familles nombreuses venant d’Irak,
d’Iran puis du Maroc.
Quant au sous-quartier de Talpiot (un lieu
lui aussi cité dans la Bible pour ses jardins
et ses abondants vergers, notamment dans
le Cantique des Cantiques), il a été fondé
en 1922 par des Juifs européens arrivés
en Israël et qui en ont édifié les première
bâtisses.
de mètres de là - aimait tirer sans raison
des obus malheureusement souvent meurtriers… Ce que l’écrivain Shmuel Yossef
Agnon, le célèbre Prix Nobel israélien de
Littérature qui s’était installé en 1924 dans
le haut de la zone d’Arnona a, lui-même,
plusieurs fois décrit dans ses essais et
nouvelles (sa maison existe toujours et a
été transformée en musée).
Mais ce quartier ne fut pas très longtemps
habité : ainsi, les premiers résidents juifs de
Talpiot durent-ils être évacués d’urgence
de leurs maisons lors des sanglantes
émeutes arabes de 1929, pour ne pouvoir
y revenir que quelques années plus tard.
D’autant qu’après ces émeutes, ce quartier
était alors assez bien protégé et connu
comme relativement sûr, notamment du
fait de la présence de la base militaire
britannique d’Allenby, le plus important
camp militaire anglais de Palestine.
Après juin 1967, Israël aménage une zone
industrielle dans la partie sud-ouest du
quar tier de Talpiot, afin d’y accueillir
d’ailleurs de nombreuses entreprises et
commerces précédemment implantés dans
le quartier de la Mamilla – lequel devient
quant à lui plutôt touristique. La construction de deux nouveaux quartiers populaires d’habitation est parallèlement lancée
au début des années 1970 sur les deux
grandes collines contrôlées par l’ONU
avant 1967 : Arnona et Arnon-Hanatsiv.
Le vrai plaisir de vivre
à Bakaa-Talpiot…
DR
S
The Little House à Bakaa(1930)
En mai 1948, à l’expiration du Mandat
britannique, la Haganah lance l’Opération
Kilshon qui consiste à renforcer les points
de défense de Jérusalem contre les attaques
des légions arabes. Capturée par la Haganah,
cette base militaire de Talpiot devient l’un
des points stratégiques permettant la réussite de cette opération. Ce qui transforme
alors Talpiot en quartier frontalier jouxtant
le tracé de la ligne séparant Israël de la
Jordanie. Une situation qui se poursuivra
jusqu’en juin 1967 lorsque Tsahal va conquérir tous les quartiers et zones alentours lors
de la fameuse Guerre des Six-Jours.
Cette victoire militaire israélienne permettra
de repousser la frontière 30 km plus à l’est
et, ce faisant, de ramener calme et sérénité
à Bakaa comme à Talpiot sur les rues desquelles la Légion arabe jordanienne – alors
positionnée à peine à quelques centaines
Contrairement à certains autres quartiers
bien plus « homogènes » de Jérusalem
dotés de barrières aussi bien mentales que
physiques et très réelles, Bakaa-Talpiot a
la particularité de regrouper plusieurs types
de populations cohabitant tranquillement
ensemble sans le moindre incident : religieux et laïcs, traditionnalistes et sionistes
pratiquants, jeunes couples, célibataires,
retraités et familles nombreuses, immigrants
d’anciennes ou de récentes dates originaires
de France, de Belgique ou d’Amérique et
d’Angleterre...
Un « savoir-vivre ensemble » qui fait de
ce quartier – où tout est tranquillement
accessible à pied - un microcosme enfin
apaisé de la grande mosaïque israélienne,
en conférant ainsi à cette par tie de
Jérusalem une véritable harmonie. Laquelle
s’accorde si bien à la tranquillité des
après-midis parfois ensommeillés du dédalle
de tous ses jardins où poussent, dans des
senteurs enivrantes, citronniers, figuiers,
orangers, grenadiers et arbres de Jasmin
et de Judée. ■
Richard Darmon
Bakaa-Talpiot à Jérusalem
ADAMA
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N °81
- T I C H R I 5777 / 2016
Yéhuda Amihaï, poète national d’Israël
et chantre de Jérusalem
N
é en 1924 avec le nom Ludwig
Pfeuffer à Wurtzbourg en Allemagne
et mort à Jérusalem en septembre 2000,
Amihaï vient d’une famille juive d'éleveurs
de chevaux et de maquignons liée au
monde paysan de la Franconie bavaroise.
Effrayée dès 1935 par les persécutions
nazies, sa famille émigre en 1936 en
Palestine et ce n’est donc qu’à 12 ans qu’il
entreprendra l'étude intensive de l'hébreu.
Dix ans plus tard, la famille changera de
nom et s’appellera désormais Amihaï en français : Mon peuple vit.
Après des études littéraires et religieuses,
il s'engage d'abord dans la Brigade juive
de l'armée britannique pendant la
Seconde Guerre mondiale puis, il rejoint
en 1948 le Palmach (bras armé de la
Haganah) durant la guerre d'indépendance. Paradoxalement, ce n'est pas l'étudiant mais le soldat - lors ses interminables
veillées militaires entre deux combats près
du canal de Suez en 1948-49 - qui découvrira la poésie, notamment celle de
Thomas Stearns Eliot et Rainer Maria Rilke.
Il comprend alors que la grandeur passée
et parfois un peu désuète de l’hébreu
biblique qu'il a étudié à l'école doit devenir,
grâce à la poésie, la langue d'un peuple :
peu à peu, se faisant poète de l’amour en
temps de guerre, il forgera donc en écrivant dans sa « langue personnelle » une
approche créatrice intimiste, populaire et
savante, initiée depuis sa découverte d’Eliot
et de Rilke.
De sa vie heurtée et de
ce réapprentissage
d'une nouvelle
langue, il a tiré
une leçon d'espoir, devenant un
homme de paix, de
bonté et d’ouverture :
« S’il vous plaît ne
jetez plus une
seule pierre encore,
Yéhuda Amihaï, poète national d’Israël
ADAMA
N °81
- T I C H R I 5777 / 2016
14
vous faites remuer ma terre, la sainte,
l’entière, l’ouverte terre, vous la remuez vers
la mer et la mer ne le veut pas, la mer dit,
pas en moi », écrira-t-il dans son Poème
provisoire « De mon temps » rédigé en
1988 au beau milieu de « l’Intifada des
pierres » palestinienne…
La « vigie de Jérusalem »
Revenu à la vie civile, Amihaï habite le
quartier de Yémin Moshe à Jérusalem où
il étudie l’histoire et l’exégèse biblique,
ainsi que la littérature hébraïque. Il deviendra professeur dans les lycées, puis dans
les séminaires d'enseignants israéliens et
enfin maître de conférence à l'Université
hébraïque de Jérusalem.
Sa langue n'était plus l'allemand natal, mais
l'hébreu : celui des prophètes, mais aussi
celui des gens simples. Celui du quotidien,
de ses objets « domestiques », et aussi
des effrayants cadavres de la guerre,
comme de la beauté des amoureux et
des enfants de ce pays déchiré…
Détestant les honneurs et les intrigues
politiques et aimant à se définir comme
un « révolutionnaire humaniste», il a vécu
simplement à Jérusalem en en arpentant
les ruelles, les jardins parfumés et les
terrasses à toutes les heures du jour ou de
la nuit pour y capter leur chant profond :
« L’air au-dessus de Jérusalem est chargé
de prières et de rêves, comme l’air au-dessus
des villes industrielles, il est
très difficile à respirer » Ecologie de Jérusalem,
1980).
Plus en core : il
entretenait une
relation amoureuse, passionnelle et même
fusionnelle avec
cette ville qu’il
considérait
DR
Poète juif sans doute le
plus traduit depuis le Roi
David, Yéhuda Amihaï
était un sage parmi ces
sages que l'on croisait
parfois à Jérusalem: une
ville dont il a tant chanté,
dans sa langue simple et
sensible, le «paysage
humain», les jeux de
lumière, ainsi que les
contrastes quotidiens
parfois violents. Auteur
de 80 ouvrages dont la
moitié a été traduite en
langues étrangères (*), il a
été honoré – en plus d’une
dizaine de récompenses
notoires – du Prix Bialik
ainsi que du grand Prix
Israël de Poésie en 1982
pour avoir initié une
mutation révolutionnaire
dans le langage poétique
de l’hébreu.
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comme une offrande possible de « partage » : « Je peux rester sur mon balcon et
dire à mes enfants. Juste là je fus bombardé
pour la première fois. Et là-bas, juste à droite,
juste derrière ces arbres, je reçus mon premier
baiser ».
Le leader d’une véritable
« révolution poétique »
Un peu comme au temps des prophètes,
Amihaï aura réussi une étonnante fusion
entre le peuple et « son » poète : il avait
en effet le verbe heurté et parfois très dur
pour rappeler à chacun les exigences de
la fraternité humaine. Poète de tous et
non pas d'une élite fermée, il parlait d'espoir en se dressant sobrement - et avec
l’humilité des vrais poètes - contre l'oppressante blessure de la guerre et de la
haine : « Mon fils a un parfum de paix. Le
ventre de sa mère lui a promis ce que Dieu
ne peut nous promettre ». Ou encore :
« Mon seul drapeau ce sont mes habits -
Quelques poèmes sur Jérusalem…
L'Amour de Jérusalem
Ici on construit une maison et là on détruit
ici on creuse la terre
et là on creuse le ciel,
ici on s'assoit et là on marche
ici on hait et là on aime.
Mais celui qui aime Jérusalem
dans les guides touristiques ou les livres de
prières ressemble à celui qui aime une femme
selon le Kama sutra.
Parfois Jérusalem est une ville de couteaux :
même les espoirs de paix sont affûtés pour
trancher dans la difficile réalité, ils s'émoussent
ou se cassent.
Les cloches des églises font tellement d'efforts
de paix qu'elles deviennent lourdes, comme un
pilon qui broie dans le mortier des voix lourdes,
graves et remuantes.
Et lorsque le chantre et le muezzin entonnent
leur chant, surgit le cri tranchant :
notre seigneur notre Dieu à tous est un Dieu
un et affûté.
Traduit par Michel Eckhard Elial
© Noam Chen
Il y a une rue où l'on ne vend que viande rouge
et une rue où l'on ne vend qu'habits et
parfums.
Il y a des jours où je ne vois qu'êtres jeunes et
beaux, et des jours où je ne vois qu'infirmes,
aveugles, lépreux, faces convulsées et rictus.
Touristes
Un jour, j'étais assis sur les marches près
d'une porte à la Tour de David
J'avais posé mes deux lourds paniers à mes
côtés.
Un groupe de touristes entourait
leur guide et je devins leur point de repère.
Vous voyez cet homme avec les paniers ?
Juste à droite de sa tête, il y a une voûte
datant de l'époque romaine. Juste à droite de
sa tête.
Mais il s'en va, il s'en va !
Je me suis dit : la délivrance ne surviendra
que si leur guide leur dit :
Vous voyez cette voûte datant de l'époque
romaine ? Ce n'est pas important, mais à
côté,
à gauche, un peu vers le bas, un homme est
assis qui a acheté des fruits et légumes pour
sa famille.
Traduction personnelle d’après l’anglais
mon seul hymne est mon souffle, et le
premier et le dernier mot est : ‘ICI’ ».
A la tête de la « révolution poétique »
surgie au début des années 1950 et initiée
par un groupe de jeunes écrivains, Amihaï
a totalement remis en question les thèmes
et les formes chers aux poètes antérieurs :
appréhendant l’hébreu comme une
« langue de cœur », il va donc désacraliser
et parfois même vulgariser la trop grande
solennité de cette langue pleine de lourdes
métaphores héritées des prophètes
bibliques : prônant une modernisation
de la langue, il mettra en avant, non plus
les « idéaux de la nation » chantés avec
rhétorique par la génération précédente,
mais tout simplement l’irréductible «condition humaine» à partir d’images dénudées
– parfois tirées de la Bible – mais exprimées
dans l’«hébreu parlé » des Israéliens, lié à
son temps et à son peuple, bien que charriant toujours la souffrance et la mémoire
juives !
Aimant jouer avec les mots en les détournant souvent de leur sens et en utilisant
un hébreu charnel et imagé, Amihaï – dont
certains accents font penser parfois à ceux
d’Henri Michaux - mêlait le scepticisme et
la foi, l’humour et le tragique, le profane
et le saint, le doux et le cruel, le transcendant et le trivial, le cosmique et l’intime…
Car, pour lui la fonction du poète est « de
nommer toute chose, toute émotion, toute
expérience, et ceci sobrement et exactement,
sans aucune mignardise ! ».
Enraciné dans la puissante géographie
physique et affective d’Israël, de ses amours,
de son corps, de ses propres batailles
intérieures, Amihaï est resté profondément
et sensuellement enlacé dans les contradictions de sa ville et de sa patrie. ■
Richard Darmon
© Noam Chen
(*) Ouvrages de Yéhouda Amihaï parus en langue
française : Poèmes (Actes Sud - 1992 ), Poèmes de
Jérusalem (Éditions de l'Éclat - 1992), Anthologie personnelle (Actes Sud - 1992), Les morts de mon père
et autres nouvelles (Éditions de l'Éclat - 2001), Début
fin début (Éditions de l'Éclat - 2001), Perdu dans la
grâce (Poèmes choisis - Gallimard - 2006).
Yéhuda Amihaï, poète national d’Israël
ADAMA
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E N T R E L E V I E U X - TA L P I OT E T A R N O N H A N AT S I V
La vibrante communauté
«Carlebach» Mizmor Lé-David
à Jérusalem
Alliant des offices enthousiastes
de chabbat – surtout ceux, très
fréquentés et très chantés, du
vendredi soir - avec l’accueil
toujours chaleureux de tous ses
hôtes de passage et toute une
série d’activités « holistiques »
parallèles, cette synagogue est
devenue au fil des ans le point
de ralliement de nombreux
jeunes – seuls ou en couple –
dans cette si plaisante partiesud de Jérusalem.
T
out a commencé il y a une dizaine
d’années par un petit « minyan » privé,
organisé le vendredi soir seulement avec
quelques chants hassidiques, dans le studio
situé au rez-de-chaussée au domicile de
Neil Kummer, l’un des fondateurs de cette
communauté habitant au bout de la rue
Efrata.
Puis, quand les fidèles devinrent trop
nombreux à s’entasser dans cette pièce
- qui répandait dans le silence de la tombée
de la nuit du vendredi soir les accents à la
fois nostalgiques et entraînants de chants
hassidiques vers les rues adjacentes-, les initiateurs de cette mini-synagogue se mirent
en quête d’un local plus grand digne de
les recevoir : à deux pas de là, dans la rue
Nahum Shadmi, ils obtinrent la jouissance
– au départ seulement pour le chabbat –
du petit pavillon local des scouts israéliens
(les tsofim de la tribu Avot).
Un emménagement qui donna aussitôt un
grand essor à cette communauté à laquelle
ils donnèrent le nom de « Mizmor Lé-David »,
l’un des nombreux chants (re)mis en musique
par leur maitre à penser, le rav Schlomo
Carlebach : le « rabbin chantant » des
années 1979 et 1980 dont les disques
avaient déjà fait un tabac aux USA, en Israël
- où il donnait souvent des récitals surtout
au départ dans le moshav Méhor Moddiin
qui devint son lieu d’habitation de 1976 à
1994 et celui de nombreux de ses disciples
jusqu’à aujourd’hui - puis dans les grandes
villes du pays, et même en France, où ses
adaptations à la guitare de certains Psaumes
de David et des mélodies les plus connues
du répertoire hassidique moderne l’avaient
aussi rendu populaire dans certains cercles
d’initiés.
L’une des prières parmi
les plus ferventes et entraînantes
du vendredi soir à Jérusalem !
Ralliant au départ plusieurs familles d’anciens
puis de nouveaux immigrants venus des
États-Unis, mais aussi de France et d’ailleurs,
ainsi que plusieurs Israéliens « du cru » et
des jeunes du quartier, tous en mal d’une
synagogue dynamique dans cette partie-là
de Jérusalem proche de la Promenade Haas
(la Tayélet reliant le Vieux-Talpiot à ArnonHanatsiv), la communauté a commencé par
élargir le cercle de ses fidèles grâce à son
minyan de plus en plus élargi du vendredi
soir d’où l’on vient de tout Jérusalem et où
alternent, au milieu de prières ferventes,
des chants enthousiastes allant droit au
cœur… Au point que la salle de prières
manque vraiment de place ! Là même où,
juste avant Chabbat, on a réinstallé à la hâte
le Séfer Torah (venu de la maison voisine
de Neil Kummer) dans son Armoire sainte
à l’allure encore provisoire plantée, comme
dans le Michkan du désert, au milieu de
cette salle de scouts en transhumance
juive…
Autres particularités de cette communauté
toujours très accueillante qui reçoit souvent
La vibrante communauté « Carlebach »
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- T I C H R I 5777 / 2016
16
des hôtes étrangers (juifs et non-juifs), ainsi
que, presque chaque chabbat, des groupes
de soldats portant l’uniforme du Nahal pour
« une expérience religieuse à Jérusalem » :
- une série de cours quotidiens très originaux donnés chaque matin de semaine
une demi-heure avant la prière journalière
de Chaarit et portant sur la tradition mystique (du rav Ashlag au Ari Ha-Kadoch),
sur la pensée du rav Abraham Kook, sur
l’étude du Talmud ou bien de la Paracha
Ha-Chavoua commentée par le Livre du
Zohar ;
- une caisse d’entraide sociale très active
qui distribue ses bienfaits dans tout le
quartier et au-delà ;
- une série de séances de méditation et de
yoga pour femmes ;
- et aussi un charmant jardin de plantes et
de légumes biologiques attenant à la
synagogue, tenu par des membres de
Mizmor L é-David qui observent scrupuleusement les lois du Maasser (dîme) et
de la Shmita (l’année de jachère chabbatique) prévues par la Torah !
Un conseil : si vos pas vous amènent une
fin de semaine à Jérusalem, prévoyez d’aller
prier le vendredi soir à Mizmor Lé-David,
quitte à faire une bonne marche avant et
après l’office. Vous en sortirez transformés
et enthousiasmés, car vous aurez renoué
avec une prière à la fois fervente et
gaie, chantée sur les accents de Shlomo
Carlebach… dont les disciples disent qu’il
aurait retrouvé « par intuition » certaines
mélodies anciennes qui furent celles du hautchant des Léviim entonnées, voilà près de
2 000 ans, dans le Temple de Jérusalem ! ■
Richard Darmon
[email protected]
2, rue nahum Shadmi - Jérusalem
www.kkl.fr
Le magazine du KKL
André Chouraqui,
poète de Jérusalem
A
ndré Chouraqui, né à Aïn Temouchent
(Algérie) en 1917, est sans conteste
un homme de Jérusalem. Il y a habité à
partir de 1959, jusqu'à sa mort en 2007.
Ses cinq enfants sont nés dans cette ville
dont il a été, de 1965 à 1973, l'adjoint au
maire auprès de Teddy Kollek. Connu
aujourd'hui surtout pour ses très novatrices
traductions en français de la Bible juive, du
Nouveau Testament et du Coran, il a exercé
divers métiers, parlé et écrit dans des
registres différents, mais c'est l'inspiration
poétique qui fournit le fil conducteur d'un
parcours qui, de l'Algérie à la France et de
la France à Israël, a été fait plus de continuité
et d'harmonie que de contradictions.
C'est en pleine tension entre les immigrants
venus d'Europe et ceux venus des pays
arabes, après les émeutes de Wadi Salib,
qu'il se vit confier sa première responsabilité
officielle en Israël, celle de conseiller David
Ben Gourion sur les moyens de faciliter ce
qu'on appelait alors la « fusion des communautés ». Jusque là, c'est auprès de René
Cassin qu'André Chouraqui avait oeuvré
comme un des responsables de l'Alliance
israélite universelle (A.I.U.). Scolarisant des
dizaines de milliers d'enfants juifs au Maroc
et en Tunisie, cette institution a dû s'adapter
non seulement à la fin du protectorat
français, remplacé par des États indépendants membres de la Ligue arabe, mais aussi
au départ vers Israël de la majorité de ses
élèves présents, passés et sans doute à venir.
A travers ses écrits juridiques et historiques,
Chouraqui a incarné ce ralliement au projet
sioniste de l'A.I.U., amenée à modifier ses
perspectives initiales. Il publia d'ailleurs à
cette époque un Que sais-je ? sur L'État
d'Israël, suivi en 1973 d'une biographie de
Théodore Herzl, qui répondait à une
attente. En réponse à l'envoi de son Que
sais-je ?, le général de Gaulle écrivait le
23 juin 1955 : « votre excellente étude, que
je vous remercie de m'avoir aimablement
envoyée et dédidacée, m'a permis de
constater le magnifique essor réalisé dans
tous les domaines par l'État d'Israël. C'est
là un beau témoignage de ce que peut faire
un peuple courageux, animé d'une même
foi en son avenir et d'une même volonté
de le forger. Je forme les meilleurs vœux
pour sa prospérite ».
Une fois en Israël, il fallut agir pour que le
patrimoine culturel spécifique aux communautés juives d'Afrique du Nord soit
reconnu à sa juste valeur, tâche pour
laquelle ce descendant du rabbin érudit
Saadia Chouraqui était bien qualifié. A
partir de 1964, son domicile était fixé à
Aïn Rogel sur la ligne de cessez-le-feu d'où
par taient, souvent, des tirs jordaniens.
Chouraqui accepta des démarches confidentielles pour entrer en dialogue avec les
milieux du Vatican (au temps de Vatican II)
comme avec des interlocuteurs arabes et
musulmans inatteignables de manière officielle. Il fut ainsi mêlé à la création à Paris
de la Fraternité d'Abraham, complémentaire de l'Amitié judéo-chrétienne.
Dans une vie antérieure, il avait été élève
du séminaire rabbinique de la rue Vauquelin
en même temps qu'étudiant à la Sorbonne,
membre des réseaux clandestins de sauvetage de l'OSE en France occupée, voisin
attentif de l'École des prophètes, également
clandestine, animée par Jacob Gordin près
du Chambon sur Lignon ; puis juge de paix
en Algérie au lendemain de la guerre, marié
en premières noces à une femme convertie
au judaïsme, qui choisit de revenir au christianisme et de mener une vie contemplative... Le souffle poétique de Jérusalem a
permis de donner son unité à un parcours
tourné vers l'espérance. ■
Quatre ouvrages d'André Chouraqui consacrés à Jérusalem
Vivre pour Jérusalem
Desclée de Brouwère, 1973
Jérusalem,
une métropole spirituelle
Bordas, 1981
Jérusalem revisitée,
quatre millénaires d'Histoire
Le Rocher, 1995
Jérusalem, ville sanctuaire
Le Rocher, 1996 (poche 1998)
Un riche site Internet dédié à André Chouraqui par ses amis : www.andrechouraqui.com
André Chouraqui, poète de Jérusalem
ADAMA
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Fort des excellents retours enregistrés l'année dernière,
le KKL de France a réédité, avec tout autant de succès,
son séminaire estival à destination des enseignants des
établissements juifs. Du 17 au 24 juillet, 45 professeurs français
et belges, toutes matières confondues, ont pris part à
un programme des plus enrichissants en Israël.
F
avoriser l'identification des jeunes à Israël.
Tel est le défi singulier que relèvent au quotidien les équipes pédagogiques des écoles juives de
diaspora. Pour ce faire, rien n'égale l'expérience
personnelle de ce lien privilégié, alimentée par
les connaissances livresques, certes, mais aussi, et
surtout, par la fréquentation directe de la terre de
la Bible et de l'innovation.
Des visites
variées
Le périple a débuté par un geste hautement symbolique :
une plantation d'arbres dans la forêt de Tzora. Par la suite,
la délégation, accompagnée par Raymond Bunan,
président d'honneur du KKL de France, Fino Edery, son
délégué général, et Laurence Kiman, responsable du
En immersion
totale
Afin de soutenir les éducateurs dans leur œuvre de
transmission des valeurs juives et sionistes, le KKL de
France a lancé une initiative originale : un séminaire d'une
semaine à la découverte des réalités israéliennes, d'hier
à aujourd'hui. Après une première édition consacrée à la
Galilée, en juillet 2015, ce deuxième séjour faisait la part
belle à la magie du Néguev, celle des paysages et de la
créativité sans équivalent qui s'y épanouit. Recyclage des
eaux usées et désalinisation de l'eau de mer, technologies
agricoles de pointe, avancées écologiques, rencontres
avec des résidents passionnés..., les participants ont
bénéficié d'un large aperçu de ce que le grand désert
israélien a à offrir au pays et au monde, de Sdé Boker à la
vallée de la Arava.
DR
Éduc@tion
Connexion
Pour plus d'informations, contactez le département de l’Éducati
établie !
www.kkl.fr
département de l'Éducation, a visité de nombreux sites
à vocation historique, éducative ou économique, dont la
maison de Ben Gourion à Sdé Boker, le centre Beer
Avraham à Beersheva, le centre de recherche et développement de la Arava, le village de jeunes de Nitzana, sans
oublier une excursion en jeep dans le cratère de Ramon.
Après les reliefs dépaysants du Néguev, les membres
du groupe ont fait escale au parc de France-Adoulam,
au pied des collines de Judée, puis conclu leur voyage à
Le magazine du KKL
Jérusalem, qui sera le théâtre du troisième séminaire,
en 2017, en l'honneur du cinquantième anniversaire de
la réunification de la capitale d'Israël.
Dans cette attente, les heureux bénéficiaires de ce circuit
inoubliable s'en sont retournés dans leurs pénates des
images, des idées et des méthodes plein la tête,
impatients de livrer à leurs élèves, dès la rentrée, le fruit
de leur découverte du sionisme moderne... en actes ! §
en bref... en bref... en bref... en bref... en bref... en bref...
Le séjour des
Éclaireuses et Éclaireurs
israélites de France (EEIF)
Le département de l'Éducation du KKL de
France a également orchestré plusieurs
activités en direction des jeunes cet été.
Des moments de découverte, d'amitié et
de communion avec l'État d'Israël !
À l'occasion du séjour de trois semaines organisé par
les Éclaireuses et Éclaireurs israélites de France (EEIF)
en Israël du 6 au 26 juillet, 35 jeunes Juifs français et
leurs homologues israéliens du groupe Ron-Arad ont
bénéficié de cinq journées d'excursion avec le KKL
dans la région de Jérusalem et le désert de Judée.
Des vacances qu'ils ne sont pas près d'oublier... §
Le voyage
des bné Mitsva
Le traditionnel voyage des bné mitsva en Israël a été
conjointement organisé par le KKL, le Consistoire,
l'Organisation sioniste mondiale et l’Agence juive,
grâce à la collaboration active de la H’avaya, du
11 au 21 juillet. Une quarantaine de jeunes ont ainsi
profité d'un séjour éducatif de dix jours en Terre
sainte. Un exceptionnel cadeau pour célébrer leur
majorité religieuse ! §
La caravane
du KKL
DR
DR
Ceux qui n'ont pas quitté l'Hexagone n'ont pas été en
reste. Comme chaque année, la caravane du KKL a
sillonné la France au mois du juillet, du sud du pays
à la région parisienne. Les sympathiques éducateurs
de l'institution sioniste sont ainsi allés à la rencontre
de plus de mille enfants dans les centres de loisirs et
autres colonies de vacances. Au menu, des activités
ludiques autour d'Israël, des valeurs du KKL et de la
déclaration d'indépendance. De quoi apprendre en
s'amusant ! §
on du KKL : Tél. : 01 42 86 88 88 - [email protected] - [email protected]
Une piste cyclable
à la mémoire d'Alex Moïse
P
DR
Dans le cadre de la journée
d'excursion organisée par
le KKL de France en Israël
le 9 août dernier, une piste
cyclable a été inaugurée
dans le parc de
France-Adoulam à la
mémoire d'Alex Moïse (zal),
grand militant de la cause
sioniste et du KKL, disparu
prématurément
le 5 décembre 2012.
Retour sur une émouvante
cérémonie.
etit-fils de déporté, fils d’enfant caché
et membre des Éclaireurs israélites,
Alex Moïse nourrissait un amour indéfectible
pour l’identité, les valeurs et la culture juives,
mais aussi – et surtout – pour Israël, la
grande passion de sa vie. Membre du conseil
d'administration du KKL et secrétaire général
de la Fédération sioniste, il s'est distingué
par un sens de l'engagement sans faille en
faveur de ses frères en détresse, qu'il s'agisse
du sauvetage des Juifs éthiopiens, de la campagne de soutien aux Juifs d'Iran persécutés,
de la mobilisation pour la libération de Gilad
Shalit et contre la haine antisémite.Terrassé
par de graves problèmes de santé, il s'est
éteint à l'âge de 48 ans, laissant derrière lui
une famille et des amis inconsolables. Sur
son lit de mort, il avait appelé tous ceux
qui l'aimaient à faire un don au KKL pour
qu'un projet fût réalisé à son nom sur cette
terre d'Israël qu'il chérissait tant.
Une dernière volonté exaucée en cette
belle journée du 9 août, où nombre de
ses proches se sont réunis pour lui rendre
hommage, à l'occasion de l'inauguration
du circuit Kanim, une piste cyclable de
23 km traversant du nord au sud le parc
de France-Adoulam, haut lieu d'histoire et
de culture sis au pied des collines de Judée.
« Le parc Adoulam France est situé dans
cette même zone géographique où David a
combattu Goliath et où Judah le Macchabée
a rallié ses forces pour attaquer les Romains,
a expliqué à ce propos Fino Edery, délégué
général du KKL et maître de cérémonie.
En choisissant d’honorer la mémoire d’Alex
Moïse à cet endroit, le KKL de France ajoute
son nom à la liste des héros du peuple juif
au cours de l’histoire. »
« Il était comme un petit frère pour moi, a
témoigné son ami Michael Adari, délégué
du KKL pour le sud de la France et l'Espagne.
Il n'était pas seulement membre du conseil
d'administration du KKL de France ; il occupait
de nombreux postes au sein de la commu-
Une piste cyclable à la mémoire d'Alex Moïse
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nauté juive française, en plus de ses fonctions
de secrétaire général de la Fédération sioniste.
[…] Le courage dont il a fait preuve face à
la maladie à laquelle il a finalement succombé
reflétait le courage qui a caractérisé sa vie
entière. » Et Michael Adari de relater la
réflexion entreprise par le KKL pour
respecter son ultime vœu. « Cet homme
au cœur en or vivra pour l'éternité au cœur
d’Israël », a-t-il conclu.
« Alex était une personne vraiment unique, a
déclaré, pour sa part, Raymond Bunan, président d'honneur du KKL de France. Nous
ne l'oublierons jamais. Nous sommes fiers de
son héritage, et la piste cyclable en sa mémoire
assurera la transmission de son message. »
Selon son ami Charles Silberman, « Israël
était inscrit dans les gènes d'Alex. Rien ne
pouvait l’arrêter lorsqu'il était en mission. Les
derniers chiffres de son numéro de téléphone
étaient "1948" ! Israël faisait partie de tout
ce qu'il faisait. La région d'Adoulam est le
cœur d’Israël. C'est là que le roi David déambulait dans sa jeunesse. Chaque personne qui
viendra ici verra le nom d'Alex. Il ne saurait y
avoir de plus grand hommage pour lui. »
Sensible à ces touchantes marques d'affection, Julie, l'épouse d'Alex, a chaleureusement remercié le KKL de France pour
son implication dans ce projet, au nom des
quatre enfants du disparu et de tous les
siens : « Alex aurait été très fier de voir son
nom sur cette plaque et de savoir qu'une
piste cyclable porte son nom. Grâce à vous,
il continuera à vivre ici pour l'éternité. » ■
www.kkl.fr
Le magazine du KKL
22E TROPHÉE DE GOLF SIMON ET BERTRAND LAUFER
KKL ON THE GREEN
© Rachel Marty
S
outenue par la compagnie El-Al et la banque Hapoalim, la 22e édition
du trophée de golf Simon et Bertrand Laufer a réuni une centaine
de joueurs, le jeudi 23 juin dernier, sur le site champêtre du Golf Club
d'Apremont, dans l'Oise. Heureux de se retrouver à l'occasion de cette
compétition amicale saluant traditionnellement le début de l'été, les
amis sportifs du KKL de France se sont affrontés dans la bonne humeur,
à laquelle contribuait, cette année, une météo particulièrement clémente.
Robert Zbili, président du KKL de France, Fino Edery, son délégué
général, et Haïm Cohen, délégué du KKL de Jérusalem, ont dûment
félicité les participants, tandis que Carmel Shama Hacohen, ambassadeur
d'Israël auprès de l’Unesco, a procédé à la remise des prix aux lauréats
du concours. Les bénéfices de la manifestation seront consacrés à la
plantation de la forêt des Rabbins, une initiative du grand rabbin de
France, Haïm Korsia, et du président du Consistoire, Joël Mergui, en
hommage aux ministres du culte juifs déportés ou assassinés pendant
la Shoah, dont de nombreux résistants au nazisme. Le KKL de France
remercie chaleureusement toutes celles et tous ceux qui ont pris part
à ce projet à la mémoire de ces grandes figures du judaïsme français. ■
OLYMPIYYAR
DES J.O. BLEUS-BLANCS
A
lors qu'était lancé le coup d'envoi des XXXIe Jeux olympiques
à Rio, de jeunes volontaires du KKL organisaient, en faveur
des enfants, leurs propres olympiades dans la forêt de Ben Shemen.
En cette chaude journée du 5 août, les « Olympiyyar » ont ainsi
transformé pour quelques heures l'aire récréative du Mexique
en terrain multisports. Football, golf, tir à la corde, course de
relais et d'obstacles, tir à l'arc, funambulisme, karting, tournoi de
foot en chaise roulante..., les petits participants ne manquaient
pas de choix pour se mesurer à leurs camarades. Les valeurs de
l'olympisme, du respect de l'environnement et du sionisme étaient
bien sûr au cœur de cette initiative ludique et éducative. Parmi
les attractions qui ont accompagné l'événement, les enfants ont
eu le plaisir de découvrir l'un des camions anti-incendie ultramodernes de l'institution sioniste (dont deux ont été financés
par les amis du KKL de France). L'occasion de sensibiliser le
jeune public à la lutte contre les feux de forêt.Très enthousiastes
et fiers de leurs exploits, les athlètes en herbe ont visiblement
apprécié le cadeau que leur offraient les animateurs du KKL,
qui ont ensuite conclu leur année de volontariat par une excursion
à Sataf, dans les collines de Jérusalem. ■
Opération de sensibilisation
des jeunes à la lutte contre
les feux de forêt.
Les brèves du KKL
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LE GROUPE DE VISEGRÁD
À LA DÉCOUVERTE DE LA FORÊT DE YATIR
L
e 28 juin dernier, quatre représentants des ambassades de République tchèque,
Pologne, Hongrie et Slovaquie, membres du groupe de Visegrád, ont été reçus
dans la forêt de Yatir, étendue boisée de 6000 ha située dans le Néguev de l'Ouest,
pour une démonstration grandeur nature de l'innovation israélienne en matière
d'afforestation des milieux arides et semi-arides. La visite mettait notamment en
exergue l'expertise du KKL dans le domaine de la régulation des effets du changement
climatique. « Le savoir et le savoir-faire que le KKL a engrangés au cours des années
suscitent un grand intérêt dans le monde, a déclaré David Brand, forestier en chef du
KKL, en guise d'introduction. C'est seulement grâce à l'investissement du KKL dans la
recherche sur l'afforestation que nous sommes aujourd'hui en mesure de partager nos
réalisations avec nos collègues étrangers.» Le responsable de la forêt de Yatir, Abed
Abu-Alguian, un Bédouin israélien, a expliqué à ses hôtes que les populations locales
et les fermiers, y compris en provenance de l'Autorité palestinienne, étaient partie
prenante de cet écosystème durable. Le groupe s'est ensuite rendu au centre
Weizmann, où il a été accueilli par le célèbre professeur Dan Yakir. Celui-ci leur a
délivré un passionnant exposé sur ses dernières découvertes concernant la séquestration du carbone, la gestion optimale de l'eau et l'humidité générée par la forêt.
Jacek Chodorowicz, l'ambassadeur de Pologne, s'est dit impressionné par l'engagement
des résidents locaux, tandis qu'Andras Kovacs, chef de mission adjoint de l'ambassade
de Hongrie, a avoué qu'il n'avait pas connaissance de l'ampleur de l'investissement
du KKL dans la recherche. Peter Hulenyi, l'ambassadeur slovaque, et Ivo Schwarz,
son homologue tchèque, ont tous deux fait allusion, lors de la plantation d'arbres
qui a conclu l'excursion, à leurs grands-parents juifs, fervents soutiens de la cause
sioniste, empêchés de se rendre en Israël par le régime communiste. Une revanche
sur l'histoire qui a unanimement touché l'assistance. ■
HOMMAGE AU CAPITAINE TZIKA KAPLAN
D
eux ans ont passé depuis que le capitaine Tzika Kaplan (zal) nous a quittés.
Né à Haïfa en 1986, ce jeune père de famille avait été instructeur du mouvement
de jeunesse Bné Akiva. Passionné par la nature et la randonnée, combattant aussi
courageux que modeste, il est tombé au champ d'honneur lors de l'opération
Bordure protectrice. Afin de lui rendre hommage, ses compagnons d'armes de
l'unité Golani et sa famille se sont tournés vers le KKL afin de réaliser un point
de vue panoramique à sa mémoire. C'est à la date anniversaire de sa disparation,
le 20 juillet dernier, que tous les protagonistes du projet se sont rassemblés sur
le mont Carmel lors d'une émouvante cérémonie d'inauguration. «Pour nous,Tzvika
était comme une colonne de feu qui nous montrait le chemin et la direction que nous
devions prendre, a déclaré l'un de ses camarades, Asher Tamano. Il était très attaché
à la transmission des valeurs juives, et nous l'écoutions tous, laïcs et religieux confondus.
Grâce à lui, tous s'entendaient bien. » Ses proches se sont réjouis que le point de
vue qui porte désormais son nom, où une légère brise venue de la mer tempère
l'agressivité du soleil estival, donne sur le Sentier national d'Israël, qu'il appréciait
tant. Dernier à prendre la parole, Yehuda Kaplan, le père du disparu, a remercié
l'architecte paysagiste Hanna Cohen pour son aide dans la planification du site.
Il a également eu des mots très chaleureux pour les représentants du KKL à la
cérémonie, Michael Ben Abu, Pnina Zeisler and Yuval Itah, qui ont répondu immédiatement et gracieusement à sa requête. Tous ceux qui aimaient Tzika se sont
promis de se réunir chaque année en cet écrin de verdure. ■
Les brèves du KKL
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Le magazine du KKL
Nos aînés
www.kkl.fr
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sur les traces de Rachi
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oujours aussi avides de connaissances et curieux de découvertes
en tous genres, les participants, accompagnés par Raymond Bunan, président
d'honneur du KKL de France et président
du Club seniors, et son épouse, ont
été chaleureusement accueillis par les
représentants de la communauté juive
troyenne, notamment son président,
Charles Aïdan, qui a conduit la visite avec
profession-nalisme et dévouement.
Le programme de cette riche journée
a débuté par une promenade guidée
dans la magnifique cité médiévale où
Rachi a formulé ses inestimables commentaires. S'il n'existe quasiment plus
de vestiges du quartier juif de l'époque,
une sculpture sphérique signée par
Raymond Moretti témoigne de la gloire
passée d'un savant respecté bien audelà des frontières de sa communauté.
Après un déjeuner convivial, les visiteurs
se sont rendus au centre universitaire
Rachi. Sa directrice, Géraldine Roux, y a
donné une conférence très instructive
sur la vie du rabbin champenois et sur
son œuvre d'exégèse de la Bible et du
DR
Afin de clore en beauté la première année d'activités de son
Club seniors, le KKL a organisé,
le mardi 21 juin, premier jour de
l'été, une excursion à Troyes en
faveur des amis retraités de l'institution sioniste. Une soixantaine
de personnes ont profité de cette
escapade champenoise à la rencontre du plus célèbre commentateur juif français du Moyen Âge.
Une brochure
pour vous aider
à y voir plus
clair
Le KKL-JNF est au service de
celles et ceux qui souhaitent
que tout ou partie de leur patrimoine soit consacré au développement de l’État d’Israël.
Mais , concrètement, pourquoi
léguer au KKL ? Comment ?
Avec quelles garanties ? Pour
répondre à ces questions, le
KKL-JNF a édité une brochure
accessible et pédagogique.
Pour recevoir cette brochure, sans engagement de votre part,
contactez Lynda : 01 42 86 54 93 ou [email protected]
Talmud. Enfin, les membres du Club
seniors ont pu apprécier la splendide
synagogue du centre culturel Rachi, dont
les travaux de restauration étaient alors
en cours d'achèvement. Inauguré en septembre, cet espace rénové proposera,
dès 2017, des offres touristiques, des
cours et des conférences.
Alliant culture, lien social et par tage,
cette sortie a fait l'unanimité auprès des
principaux intéressés, impatients de
prendre part à la prochaine activité du
Club seniors du KKL. Alors, à très bientôt
pour de nouvelles aventures ! ■
Plus d'informations sur le Club Seniors
auprès de Lynda (01 42 86 54 93 ou
[email protected]) ou sur kkl.fr
Nouveau :
votre « Carte d’adhésion au Club Seniors »
Fort de son succès, le Club Seniors du KKL crée sa
« Carte Seniors » pour l’année 5777.
Cette carte vous offre les avantages suivants :
Faire partie de la famille « club seniors » du KKL
Tarif préférentiel sur les activités du club
Priorité sur les inscriptions
Une dizaine d’activités sur l’année
Certificat de plantation d’un arbre en votre nom
Information et adhésion auprès de Lynda au 01 42 86 88 88
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