
JF VINCENT OCCE
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de production : le coup d’envoi est lancé avec l’Association des ouvriers menuisiers parisiens,
créée en 1831, suivie par l’Association chrétienne des bijoutiers en doré, créée par 4 ouvriers
parisiens en 1834.
Lyon constitue le berceau principal de la coopération de consommation. Elle y est pratiquée,
bien avant d’être conceptualisée, par les théoriciens associationnistes et mutuellistes : « A
Lyon, on a vu de tout temps des familles d'ouvriers domiciliés dans le voisinage les unes des
autres, se cotiser pour acheter au comptant et en gros ou en demi-gros, des denrées
alimentaires qu'elles se partageaient ensuite."
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Le soutient des pouvoirs publics français durant la seconde moitié du XIXème siècle envers la
coopération sera plus ou moins important mais elle sera toujours perçue comme offrant une
alternative non violente à l’action révolutionnaire qui va progressivement s’imposer dans les
milieux ouvriers.
La seconde République va par exemple encourager le développement de l’association
ouvrière. Un décret en date du 5 juillet 1848 affirme: "L'Assemblée Nationale, pénétrée du
désir de voir s'améliorer la condition des travailleurs et du devoir qui lui est imposé de
concourir par les moyens dont elle peut disposer, à faire passer les travailleurs de l'état de
salariés à celui d'associés volontaires, a voulu encourager l'esprit d'association »
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Sous la troisième République, un décret pris le 4 juin 1888 sous la pression des radicaux
(René Waldeck-Rousseau, Léon Bourgeois
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…) et des socialistes modérés (Alexandre
Millerand, Paul Deschanel) stipule que, concernant les commandes publiques, « à égalité de
rabais, les sociétés ouvrières doivent avoir la préférence »
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.
En 1912 est créé un Groupe parlementaire de la coopération, particulièrement actif : « Ses
délégués parcourent les départements, reçoivent les doléances des sociétés, réchauffent le
zèle des préfets, signalent aux ministres de l’Intérieur et du Travail ceux dont la tiédeur
coopérative est persistante. »
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1. b. En Grande-Bretagne, c’est au début du XIX
e
siècle, dans le contexte des
bouleversements économiques et sociaux induits par l’essor rapide de la grande industrie, que
s’est réalisée, face à l’individualisme libéral, l’alchimie des réflexes solidaires et d’une
réflexion associative.
Le premier nom qui vient à l’esprit lorsqu’on évoque la genèse de la coopération anglaise est
celui de Robert Owen (1771-1858) Ce philanthrope, propriétaire d’une fabrique textile, tirant
partie de la constitution à Londres, des premières coopératives artisanales (aux alentours de
1830) élaborera un projet de nouvelles sociétés intégralement autogestionnaires qui
influencera nettement la réflexion des penseurs français.
L’expérience coopérative à laquelle il est habituel de se référer concernant l’Angleterre, est
celle des pionniers de Rochedale
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.
En 1844, 40 ouvriers, pour la plupart tisserands, fondent à Rochdale, près de Manchester, une
coopérative de consommation promue à une grande renommée, « la société des Equitables
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Eugène Flottard, « Associations coopératives de consommation », in Annuaire de l’association pour 1867, p.
171.
2
Instruction pour l’exécution du décret du 5 juin 1848, cité in Enquête sur le fonctionnement des associations
ouvrières 1883-1884. Consultable au CEDIAS/Musée social.
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La doctrine solidariste, exposée par Léon Bourgeois dans son ouvrage Solidarité, paru en 1896, apparaît
comme la conceptualisation des pratiques coopérativistes et mutualistes.
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Congrès des Associations ouvrières de production, adhérentes à la Chambre consultative, juillet 1900.
Consultable au CEDIAS/Musée social.
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Joseph Cernesson*, La Revue des deux mondes, 1911.
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Si elle n’est pas à proprement parler la première expérience coopérative , elle est celle qui va influencer de la
façon la plus déterminante l’histoire de la coopération.