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chronologique, apportent des renseignements sur l'organisation de la société d'une région à l'autre du monde
celtique, à défaut des habitats ruraux qui restent souvent peu étudiés, quasi inconnus en Suisse. Les artisans
sont au sommet de leur art: les parures en bronze, notamment les fibules, sont ciselées et ornées avec une
finesse consommée, tout comme certaines armes, en particulier des casques aux riches incrustations d'or et
de corail. Le guerrier joue un rôle prépondérant dans la société; dans certaines régions, les sépultures de
chefs militaires reçoivent en plus un char de combat à deux roues. Mais la majeure partie de la population
représentée dans les cimetières (hommes portant l'épée, donc libres, ou femmes dont les parures strictement
réglementées montrent des états de "richesse" variables) ne permet toutefois pas de restituer une
organisation hiérarchisée, comme c'était le cas aux VIe et Ve s. av. J.-C. Les Celtes, durant cette période
d'expansion de leur civilisation, occupent dès lors un vaste territoire en Europe, compris entre la péninsule
Ibérique et les îles Britanniques sur la façade atlantique à l'ouest, les Carpates à l'est, la plaine du nord de
l'Allemagne et de la Pologne, l'Italie du Nord et le bassin danubien jusqu'au défilé des Portes de fer, au sud et
au sud-est. Jamais, toutefois, ils n'ont constitué une véritable unité politique. Dans toutes les régions où des
Celtes vont s'installer, et surtout dans les secteurs périphériques, ils se mélangent à des populations non
celtiques, non celtophones, ce qui se reflète jusqu'à un certain point dans la culture matérielle, avec des
dynamiques d'assimilation réciproque difficiles à évaluer et à suivre d'une génération à l'autre. La Suisse
actuelle, véritable carrefour entre la Celtique occidentale, la Cisalpine et l'Europe centrale, a dû participer
activement à tous ces événements et brassages de populations. Il est possible que l'on retrouve la trace de
Celtes du Plateau suisse en Italie du Nord, grâce aux particularités techniques et stylistiques de certaines
parures. De même, des relations privilégiées entre la partie occidentale du Plateau suisse et la Bohême ou la
Slovaquie suggèrent des mouvements de personnes ou groupes de personnes à la fin du IVe s. av. J.-C.; les
torques à cabochons du nord de la Suisse et du haut Rhin pourraient manifester des déplacements, du moins
de femmes, en direction de la zone hongroise vers 300 av. J.-C. Rappelons ici l'épisode légendaire, difficile à
dater, rapporté par Pline l'Ancien dans le troisième quart du Ier s. av. J.-C.: Hélico, un Helvète (comme par
hasard), aurait rapporté des figues, des raisins secs, de l'huile et du vin d'un séjour en Italie, contribuant ainsi
à pousser les siens à traverser les Alpes et à envahir la péninsule italique. Le graffito Eluveitie, évoqué ci-
dessus, démontre en tout cas la présence d'un Helvète à Mantoue vers 300 av. J.-C.
Certains événements historiques sont bien connus, parce qu'ils ont frappé l'imagination des Anciens; ils
illustrent cette phase d'expansion et d'expéditions guerrières: en Italie du Nord tout d'abord, avec l'invasion
celtique du début du IVe s. qui s'acheva par la prise de Rome vers 390/386 av. J.-C. (épisode des oies du
Capitole). Les responsables seraient des Sénons, qui s'établiront par la suite sur la côte adriatique (rien ne
prouve, par ailleurs, que ce peuple puisse être assimilé aux Sénons que l'on trouvera durant la guerre des
Gaules dans la région de Sens; le même doute existe pour les autres peuples mentionnés en Cisalpine:
Lingons, Boïens, Cénomans ou encore Insubres). D'autres expéditions celtiques ont été dirigées vers l'est,
avec l'invasion des Balkans. Tite-Live, qui situait déjà vers 600 av. J.-C. l'arrivée de Celtes en Italie, fait
remonter ce mouvement au Ve s.; l'archéologie des nécropoles de Slovaquie ou de Hongrie tend à le
confirmer. Mais c'est bel et bien au cours du IVe s. que la pénétration le long de l'axe danubien fut la plus
importante: des Celtes se frottent aux armées hellénistiques d'Alexandre; repoussés, ils s'installent en
Transylvanie (Roumanie). Une armée conduite par Brennos envahit la Macédoine en 281/280 av. J.-C.,
menace Delphes en 279; une partie des troupes, suite à une défaite militaire en 278, est implantée en Asie
Mineure (l'ancienne Galatie, en Turquie); les Scordisques s'installent entre la Save et le Danube (dans
l'ancienne Yougoslavie); d'autres Celtes sont refoulés en Thrace (dans la Bulgarie actuelle) où ils fondent
l'éphémère royaume de Tylis, qui disparaîtra à la fin du IIIe s. av. J.-C. En parallèle, la poussée de Rome en
direction du nord est en marche; les Celtes de Gaule cisalpine vont progressivement être soumis après le
désastre de la bataille de Télamon en Etrurie, en 225 av. J.-C. Une partie des Boïens, défaits en 191 av. J.-C.,
décident de franchir à nouveau les Alpes. L'expansion celtique, au sud comme à l'est, est définitivement
stoppée.