30/11/2015 CHABERT Julie DFGSM3 CR : Julie Chapon

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IMMUNOPATHOLOGIE ET IMMUNOINTERVENTION – Biothérapie cellulaire
30/11/2015
CHABERT Julie DFGSM3
CR : Julie Chapon
Immunopathologie et Immunointervention
Pr. Olive
14 pages
Biothérapie cellulaire
Plan
A. Introduction
B. D'un point de vue biologique
C. D'un point de vue immunologique
I. Rappel sur les lymphocytes T
II. Rappel sur les anticorps
D. Réflexions pour le développement de biothérapies
I. Preuves d'un contrôle immun et identification des cibles immunes dans le cancer
II. Immunité adaptative
E. Immunothérapies fréquemment utilisées et leurs objectifs
F. Médicaments et vaccins
G. Antigènes associés aux Tumeurs (TAA)et Antigènes Spécifiques de Tumeurs (TSA)
I. Antigènes spécifiques de tumeurs (TSA)
II. Antigènes associés aux tumeurs (TAA) : non spécifiques de tumeurs.
L'objectif de ce cours est d'aborder le sujet des thérapies sous l'angle cellulaire, particulièrement dans le cadre
du cancer. Nous verrons quelles sont les thérapies cellulaires existantes, utilisées, et celles qui sont en train
d'émerger. Nous nous attarderont sur les anticorps puisque certaines thérapies combinent des anticorps.
A. Introduction
Les biothérapies sont centrées sur les leucémies et les lymphomes car il s'agit du prototype des
pathologies qui a apporté le plus de connaissances dans le domaine des biothérapies.
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IMMUNOPATHOLOGIE ET IMMUNOINTERVENTION – Biothérapie cellulaire
Le terme de « biothérapie » peut être abordé de deux façons :
• Outils issus de la biologie : les anticorps sont un bon exemple, les thérapies cellulaires…
•
Traitements affectant la biologie de l'individu. La différence est subtile, puisque le but final dans
l'utilisation d'outils issus de la biologie est de modifier la biologie du patient pour l'aider à éliminer un
cancer, un agent pathogène, une maladie auto-immune…
En fait, c'est un ensemble d'agents, qui sont des produits chimiques ou des facteurs de croissance (ex :
cytokines) qui vont modifier le système immunitaire (SI) du patient et surtout sa tumeur pour la rendre
plus visible et vulnérable face au SI. La classe de ces traitements qui est la plus connue est celle des
IMIDs : les immunomodulateurs, qui sont des traitements établis utilisés dans certaines formes de
lymphomes et leucémies.
D'autres traitements des leucémies et lymphomes existent :
• Chimiothérapie et radiothérapie : traitements standards, de base contre les leucémies, et tout ce qui va
être mis en place par ailleurs (thérapie cellulaire, anticorps) fera partie des traitements dits adjuvants (ils
complètent le traitement initial).
•
Inhibiteurs de kinases : cette approche permet d'agir sur les voies métaboliques qui sont modifiées dans
les cancers. Il s'agit également d'un traitement standard des pathologies tumorales.
Tout le reste correspond à de la biothérapie cellulaire pure :
• Les transplantations de cellules souches de moelle osseuse : il s'agit du traitement le plus ancien (années
1980) et abouti, réalisé quasi-quotidiennement dans les hôpitaux spécialisés (#IPC). Le donneur est le
plus souvent intra-familial avec la fratrie et dans certains cas les parents. Dans ce contexte de
biothérapie cellulaire, on utilisera plus particulièrement les lymphocytes du greffon pour obtenir un effet
anti-tumoral.
Ex : Dans le cas de leucémies myéloblastiques, les plus graves chez l'adulte, environ un patient sur
deux bénéficiera de cette biothérapie cellulaire par transplantation, qui constitue donc un standard
pour le traitement de ce type de pathologie.
•
Donor-lymphocyte infusion (injection de lymphocytes d'un donneur) : au lieu d'utiliser les cellules
souches, on va dans ce cas prendre directement les cellules lymphocytaires pour obtenir l'effet antitumoral. Cette technique est notamment intéressante pour les patients à risque de rejet.
•
Les anticorps monoclonaux (détaillés dans un autre cours)
La plupart des traitements présentés sur la figure ci-dessus sont des des standards thérapeutiques mais certains
sont encore en cours de recherche.
• Immunothérapie spécifique active : cette voie est toujours en recherche, on ne sait pas si l'on peut
utiliser cette stratégie, qui n'est pas encore aboutie (la diapo date de 1999).
•
Tous les immuno-modulateurs non-cellulaires, non-anticorps utilisés dans ce contexte de cancérologie :
interférons α, trétinoïne.
Tout ce qui a pour but de modifier le SI est largement utilisé à l'heure actuelle et l'on abordera plus loin
une stratégie à mi-chemin entre cellules et anticorps : CAR, ainsi que le cas des vaccinations.
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B. Du point de vue biologique
Le but des deux figures suivantes est de se positionner de façon logique dans l'évolution de la médecine
actuelle et de la façon dont on intègre ces différentes stratégies.
Hanahan and Weinberg, Cell, 2000
2011
La figure de gauche ci-dessous correspond à ce que l'on croyait basé sur les données de biologie
cellulaire avec ce que Weinberg appelait les « piliers » du cancer. A l'instar des piliers de la loi dans une
religion, ces piliers donneraient accès à l'ensemble des connaissances sur le cancer et toutes les stratégies
thérapeutiques devraient se faire autour de ces piliers, il n'y aurait rien d'autre par ailleurs. Ceci est une réalité :
la plupart de ces axes sont des axes importants, ils sont ciblés par des thérapies essentiellement biochimiques.
Depuis 2011, ce modèle s'élargit avec des piliers de plus en plus nombreux : on réalise que l'environnement
d'un cancer est important, il comporte le SI, c'est pourquoi de nouveaux axes ayant trait au SI ont été
développés. La date n'est pas fortuite : 2011 est l'année où le premier anticorps dirigé contre les molécules de
co-signalisation, l'anti-CTLA4, a été accepté comme médicament dans le mélanome.
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La figure ci-contre permet de positionner les
différents acteurs dans le cancer. L'environnement
tumoral est essentiel à prendre en compte.
Il comporte des cellules immunes, qui sont au
contact des cellules tumorales dans l'immense majorité
des cas (parfois elles sont plus en dehors et le cas
typique est celui du cancer du pancréas). Leur présence
dans le lit tumoral constitue un avantage
thérapeutique : on pourrait agir sur elles à des fins antitumorales.
On considère à l'heure actuelle que les lymphocytes T et leurs sous-types sont importants comme acteurs
cellulaires de biothérapie. L'immunité innée est également à prendre en compte : NK, lymphocytes T γδ,
monocytes/macrophages… Ainsi, la notion de biothérapie cellulaire s'est élargie pour aller au-delà des acteurs
classiques comme le LT, avec d'autres acteurs au moins aussi importants dans certaines circonstances.
C. D'un point de vue immunologique
I. Rappel sur les lymphocytes T
On va maintenant étudier le fonctionnement du phénomène de reconnaissance ainsi que ce qui est
nécessaire à la mise en place de biothérapies cellulaires en utilisant un récepteur T.
Un récepteur T va reconnaître son peptide antigénique associé au HLA à la surface d'une cellule, à l'aide
d'un système de co-récepteurs (CD4 ou CD8 selon le HLA, classe II ou I, qu'il va reconnaître). La notion
minimale acquise de ces simples données de biologie est que l'on peut utiliser le gène du récepteur T pour le
mettre dans un état d'excitation et si on le transfecte/transduit (chaîne alpha et bêta) dans une autre cellule hôte
lymphocytaire, on peut donner à celle-ci la capacité de combattre l'antigène concerné. Donc le module
génétique par lui-même suffit à conférer la reconnaissance, ce qui est une notion importante dans l'approche
génétique des biothérapies.
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Par ailleurs, si l'on veut que la réponse, indépendamment de la reconnaissance par TCR, soit assez
efficace pour activer la production de cytokines et une prolifération, il y a besoin de ce que l'on appelle un cosignal, avec l'intervention de molécules de co-signalisation dont le prototype est le CD28. CD28 est une
molécule d'adhésion qui, par l'intermédiaire de ses ligands B7.1 et B7.2, va compléter les signaux passant par le
récepteur T pour aboutir à une fonction immune complète.
Avec ces bases, on peut imaginer des thérapies cellulaires par complémentation de cellules en les transfectant
avec des constructions récepteur T/molécules de co-signalisation.
La fonction lymphocytaire comprend toujours trois phases :
• Tout d'abord, l'activation de la cellule naïve ;
• Puis la différenciation en cellule effectrice et sa prolifération clonale, grâce à des cytokines ;
• Enfin, la dernière étape, qui est utilisée dans les biothérapies cellulaires est celle de la reconnaissance,
conférée par le récepteur T, pour avoir éventuellement une action cytotoxique et produire des cytokines.
Il y a une interaction entre la cellule et sa cible par des molécules d'adhésion standards de la famille des
intégrines.
Les biothérapies cellulaires vont avoir pour but d'apporter du matériel génétique aux cellules afin de mimer
l'action de la troisième étape.
II. Rappel sur les anticorps (AC)
La caractéristique de fonctionnement d'un AC est la
reconnaissance d'un antigène, qui dans ce cas peut être un
peptide, une protéine, un lipide, un sucre, de l'ADN… Sa
partie constante Fc est dotée d'une capacité à recruter et
activer des cellules de l'immunité innée ou bien la voie du
complément. Dans un AC il y a donc deux modules
génétiques :
•
•
Le fragment Fab (variable) voit l'antigène
Le fragment Fc (constant) donne les fonctions par
procuration (action via d'autres cellules) ou par
activation du complément.
Sur le plan génétique, ce qui va nous intéresser sera d'obtenir le site du transcrit Fab afin de réaliser des
gènes chimères qu'on va transfecter/transduire dans des lymphocytes T.
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D. Réflexions pour le développement de biothérapies
Quelles cibles tumorales est-ce que le SI sera à même de reconnaître chez les patients touchés ?
Il y a des réponses immunes chez les patients qu'on appelle réponses spontanées : en effet, on peut détecter
dans le sérum des patients soit des AC, soit des LT à fonction anti-tumorale. Ceci tend à prouver un cancer a été
immunogénique : il induit une réponse plus ou moins efficace du SI lorsque celui-ci le détecte.
Par ailleurs, ce ne sont pas les cibles tumorales qui manquent pour les LT : ceux-ci sont capables de reconnaître
des milliers d'antigènes tumoraux.
De plus, il existe également des cibles portées par cellules tumorales constituant des récepteurs activateurs pour
les cellules de l'immunité innée (cellules NK, gamma delta, dendrocytes, NKT...). Donc les tumeurs sont en
théorie visibles par l'immunité à la fois acquise et innée.
La conclusion reste la même : pourquoi y a-t-il, malgré les arguments précités, le développement d'un cancer?
Deux mécanismes nous permettent de l'expliquer : celui de l'échappement et celui de la tolérance.
•
•
Tolérance : elle est retrouvée dans l'auto-immunité. Dans ce contexte, le principal groupe de problèmes
est lié au fait que la cellule tumorale a des contre-mesures proches de ce qui induit la tolérance dans les
maladies auto-immunes.
L'échappement est mieux connu dans le contexte des maladies infectieuses. Par exemple, un virus
(comme le CMV qui en est en prototype) a plusieurs protéines transcrites qui vont interférer l'expression
des molécules HLA. Ce phénomène contribue à diminuer la réponse immune. Dans les tumeurs
humaines, il y a peu ou prou les mêmes mécanismes que ceux vus dans les maladies infectieuses, dont la
perte du HLA par exemple.
Donc les biothérapies vont tenter de stimuler différents effecteurs afin de passer le cap de la tolérance.
La théorie des trois « E »
Cette théorie, comme toutes les autres, a ses avantages et ses limites. Créée par trois scientifiques, Lloyd Old,
Robert Schreiber, et Mark Smyth. Très mnémotechnique. S'appuyant sur un modèle murin consistant à
transplanter une tumeur de souris, en sous-cutané ou en intra-péritonéal, chez une souris syngénique
(comprendre : consanguine). Après analyse, trois étapes tumorales ont pu être décelées :
• Élimination de la tumeur
• Equilibrium (ou équilibre) : il s'agit d'une période de semi-équilibre, de dormance tumorale qui dure
plusieurs semaines, pendant laquelle la tumeur n'est pas visible macroscopiquement mais des cellules
tumorales sont toujours présentes.
• Échappement : si l'on oublie les souris pendant quelques semaines, la tumeur réapparaît
→ Peut-on identifier ce type de phénomène chez l'Homme ?
… Non, sauf dans des cas très particuliers et difficiles à identifier. Généralement, on reste dans les deux
derniers cas de figure, c'est-à-dire l'équilibre et l'échappement.
Le plus souvent, lors de la consultation, le patient est en échappement c'est-à-dire que le cancer s'est déclaré. A
ce stade, ce que l'on peut identifier dans la tumeur et le sérum du patient correspond à des éléments
d'échappement, modification de la tolérance et échappement pur par perte de molécules clés liées à l'instabilité
génétique des tumeurs humaines.
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La période d'équilibre peut être retrouvée chez l'Homme dans des cas très exceptionnels. Par exemple, il
se raconte dans le monde scientifique (« une histoire de chasse » dixit le prof) qu'un patient avait subi une
transplantation de cellules souches de moelle osseuse pour traiter une leucémie, le donneur étant son frère. Ce
patient, ayant bien contrôlé sa leucémie grâce à la transplantation, a par la suite développé par un mélanome. Il
se trouve que son frère donneur avait été soigné quelques années plus tôt pour mélanome ! Le cancer avait été
contrôlé mais il restait toutefois dans son organisme quelques cellules tumorales, en équilibre ; lors de la
transplantation cet équilibre s'est rompu et a laissé place au développement d'un mélanome chez notre patient
bien malchanceux.
Ainsi, on a pu voir chez l'homme que ces phases existent, avec un contrôle par la chimiothérapie, la
chirurgie, et par le SI sur de très longues périodes. Donc toutes les modifications présentes sur la tumeur et chez
le patient nous donnent des informations sur les processus utilisés par la tumeur pour se cacher. Beaucoup de
ces processus sont à l'heure actuelle ciblés par des AC dans le cadre des biothérapies.
I. Preuves d'un contrôle immun et identification des cibles immunes dans le cancer
•
Molecular definition of Tumor associated antigens P. van der Bruggen et al., Science
La notion de vaccination est dérivée de concepts qui ont émergé en 1991. Actuellement on sait qu'il y a
plusieurs milliers d'antigènes reconnus par les LT. En 1991, le n°1 a été identifié. A partir de ce momentlà, l'idée était de reconnaître une réponse chez les patients et de faire des essais thérapeutiques avec les
antigènes identifiés.
•
Antibodies directed against TAA in patients U. Sahin et al., Proc Natl Acad Sci USA, 1995
Quatre ans plus tard, on démontre qu'il existe chez les patients certains anticorps dirigés contre le même
type d'antigènes que ceux qui avaient été isolés en 1991. Donc chez les patients, on a une réponse
potentiellement forte, qui est à la fois une réponse T et une réponse B.
Cela constitue une excellente possibilité de vaccination prophylactique : stricto sensu, le but d'une
vaccination prophylactique est d'avoir des anticorps et des effecteurs lymphocytaires.
•
Les premiers essais ont lieu en 1995 (M. Marchand et al., Int J Cancer). Cependant, 20 ans après, on est
toujours en échec.
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IMMUNOPATHOLOGIE ET IMMUNOINTERVENTION – Biothérapie cellulaire
•
Il n'y a qu'un seul vaccin à l'heure actuelle qui fonctionne à peu près : PROVENGE (sipuleucel-T).
Il donne un petit bénéfice de survie sans pour autant révolutionner la vie des patients : amélioration de
quelques mois de survie tout au plus. Il est approuvé à l'heure actuelle dans les cancers de la prostate,
uniquement aux États-Unis (depuis 2010). Il présente cependant quelques problèmes notamment de
qualité ad hoc. Quelques cellules du sang du patient sont mises en vitro en présence de cytokines et
d'une protéine qui est l'acide phosphatidique de la prostate sous forme de recombinant. Après quelques
jours, on réinjecte cette solution au patient. Ce qui est peu satisfaisant d'un point de vue immunologique
est qu'il n'a jamais été démontré que ce procédé induit une réponse immune.
L'existence de PROVENGE a permis de réinitialiser la recherche sur les vaccins, malgré le fait que
depuis 1995 on soit en échec complet.
•
Better prognosis of patients with epithelial ovarian cancer and intramural T cells L. Zhang et al.,NEJM
2003 ; Extended to memory T cells in colon cancer (Pages et al., NEJM 2005 ; Science 2006)
Le rôle de l'infiltrat immun dans un cancer et la réponse permettent d'encourager la recherche de
vaccins. Au fur et à mesure des caractérisations d'infiltrats immuns chez des patients atteints de cancers,
on remarque de plus en plus que, dans certaines pathologies, plus il y a de LT CD8 (cytotoxiques, HLA
classe I), meilleur est le pronostic. Ex : cancer de l'ovaire, cancer du côlon, moins convaincant dans le
cancer du sein.
Le vaccin est une stratégie qui permettrait d'augmenter la réponse des LT CD8 afin d'améliorer le
pronostic de la maladie.
•
Role of suppressive mechanisms involving Treg, B, myeloids cells and cosignaling molecules
On sait maintenant que en même temps qu'une réponse positive, il y a toujours des événements qui vont
agir sur la tolérance, ce sont les mécanismes immuno-suppresseurs, qui vont perturber cette réponse.
II. Immunité adaptative
À partir de là vont être utilisés des produits modifiés par génie génétique, dans le domaine de l'immunité
adaptative.
•
•
•
Dès l'identification d'antigènes en 1991, dans la mesure où le récepteur T est un module (on récupère les
ARN des récepteurs T de la cellule reconnaissant l'antigène tumoral), on peut l'introduire dans une
cellule hôte lymphocytaire.
Le premier essai date de 2006 et a montré que si l'on faisait proliférer la cellule lymphocytaire hôte
ayant reçu le TCR contre un antigène tumoral, et que l'on réinjectait cette population cellulaire chez le
patient, il y avait un effet anti-tumoral avéré. Cela a constitué un choc assez important dans le monde de
la médecine.
En 2011, deuxième événement important : une stratégie proche a été utilisée par plusieurs groupes de
chercheurs aux États-Unis. À des cellules de patients atteints de leucémie, ils ont rajouté un gène
chimère particulier (improbable selon le prof) codant pour un morceau d'AC : Fab, couplé à des
éléments de co-stimulation. Parmi les patients qui avaient des masses tumorales très importantes,
certains ont été guéris.
Ces deux derniers éléments ont permis d'élargir et de revisiter le champ des biothérapies cellulaires qui était
jusqu'alors restreint au domaine de la transplantation.
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E. Immunothérapies fréquemment utilisées et leurs objectifs
D'une part, on peut utiliser des biothérapies actives, c'est-à-dire que l'on fait « travailler » le patient. La
stratégie adoptée dans ce cas est celle de la vaccination thérapeutique, dont le but est de générer des cellules
chez le patient par des artifices de vaccination. L'idée dans ce contexte est d'accepter que le patient a échoué à
éliminer sa tumeur, pour des raisons inconnues (facteurs immuno-suppresseurs, mécanismes de tolérance et
d'échappement). On essaie alors de reconstituer une vaccination avec les antigènes paraissant être les plus
efficaces. Cette stratégie est une idée ancienne et est en échec à l'heure actuelle.
D'autre part, il existe des biothérapies passives, pour lesquelles tout est fait in vitro, en laboratoire. On
part ici du principe qu'il n'y a pas assez de cellules anti-tumorales, quelles qu'elles soient, chez le patient, et on
va les recréer in vitro, grâce à des milieux contenant des cytokines et des facteurs de croissance. A l'heure
actuelle, ce type de stratégie est très avantageux puisque l'on parvient à obtenir certains types de cellules de
façon importante, que ce soit dans l'immunité innée ou acquise (NK, T).
Ainsi, les deux stratégies de biothérapies cellulaires ont pour but de combler un déficit immunitaire :
• Effecteurs immuns de l'immunité adaptative ou innée : vaccination, thérapie active
• Cellules transduites avec un TCR ou un CAR : thérapie passive.
À gauche : le récepteur TCR endogène est un hétéro-dimère inclus dans un complexe de transmission du signal
(CD3).
Au milieu : la première stratégie est représentée. Le premier essai date de 2006. On utilise un récepteur T
transgénique. Les constructions sont réalisées à partir de lymphocytes reconnaissant l'antigène tumoral, en
isolant les cDNA correspondants pour les transfecter/transduire dans des cellules T à potentiel cytotoxique.
Dans la mesure où il s'agit d'un module génétique autonome, il va amener avec lui la reconnaissance et la
fonction (reconnaissance ± cytotoxicité si la cellule est équipée). Si la cellule transfectée est de type CD8, il y
aura une fonction de cytotoxicité, et s'il s'agit d'un CD4, il y aura plutôt production de facteurs de croissance.
À droite : En 2011, le premier essai de récepteur chimère CAR (= Chimeric Antigen Receptor) est réalisé. La
plupart des gènes immuns fonctionne sous forme de domaines et l'on peut utiliser ces domaines pour les
combiner avec d'autres et produire de nouvelles protéines. C'est ce qui a été réalisé pour le CAR, qui associe
trois structures différentes :
• un transcrit codant pour le Fab d'un AC reconnaissant un antigène tumoral : CD19 ;
• un domaine transmembranaire qui permet à la construction de s'ancrer dans une membrane ;
• des éléments de signalisation qui sont un hybride entre CD3 (complexe qui permet la stimulation par le
TCR) et la molécule de co-stimulation, qui initialement était CD28. De nos jours, d'autres sont connues
ce qui permet de produire des gènes mixtes avec plusieurs molécules de co-stimulation de manière à
avoir un effet encore plus puissant.
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IMMUNOPATHOLOGIE ET IMMUNOINTERVENTION – Biothérapie cellulaire
Les différents domaines s'associent assez bien et les protéines obtenues sont stables. La transfection est réalisée
à l'aide de vecteurs rétro-viraux sur des cellules T d'un même patient.
F. Médicaments et vaccins
Si l'on reprend historiquement l'évolution de la médecine dans le cadre des biothérapies :
•
Les premières biothérapies cellulaires ont eu lieu il y a trente ans avec la réalisation des premières
transplantations dès 1985.
•
Par la suite, des lymphocytes étant retrouvés dans l'environnement tumoral, les scientifiques ont eu
l'idée de mettre en culture des biopsies de tumeurs (mélanomes) dans le but d'obtenir des populations
lymphocytaires capables d'avoir un effet anti-tumoral. Ceci a été rendu possible par le clonage du gène
de l'IL-2 (facteur de croissance), permettant ainsi de produire in vitro de l'IL-2 à usage thérapeutique.
Cette période a donc été propice à de grandes avancées thérapeutiques.
Le chirurgien Rosenberg a été l'un des premiers à pratiquer ce processus, qui correspond à de
l'immunothérapie passive : tous les éléments nécessaires à la production de cellules immunitaires sont
produits in vitro. Cette stratégie est toujours utilisée, mais l'inconvénient majeur est qu'il s'agit d'une
thérapie personnalisée : transplantation autologue.
•
Le vaccin PROVENGE (sipuleucel-T) : 2010
•
Les anticorps dirigés contre les molécules de signalisation : 2002 puis 2010
•
Les stratégies par CAR ont été acceptées comme médicaments aux États-Unis en 2014.
Le spectre de stratégies utilisables chez les patients s'est donc élargi au cours du temps, en gardant dans tous les
cas des résultats performants.
G. Antigènes associés aux Tumeurs (TAA) et Antigènes Spécifiques de Tumeurs (TSA)
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Les vaccins constituent une thérapie active : on va tenter « réveiller » les cellules du patient. La stratégie
est dérivée des travaux de Rosenberg ; elle consiste à isoler des pièces tumorales de patients, puis de les mettre
en culture en présence de cytokines (pools de cytokines, le plus souvent trois : IL-2, IL-7, IL- 21 ; parfois 15)
de façon à maximiser les chances de prolifération et donc de récupération de cellules lymphocytaires.
Après de multiples étapes, on vérifie finalement si les cellules, isolées in vitro et ayant proliféré, sont
capables ou non de tuer la lignée tumorale autologue (du patient) par reconnaissance de certains antigènes.
Cette stratégie a abouti à tout un catalogue des différentes catégories moléculairement définies d'antigènes
portés par les tumeurs.
•
Les premiers antigènes spécifiques de tumeurs ont été isolés en 1991. Ils suscitent alors beaucoup
d'engouement dans le milieu médical. En effet, la notion de spécificité pour le tissu tumoral implique
qu'il n'y aura pas d'effets éventuels auto-immuns, ni d'effets sur autres tissus.
Par ailleurs, leur régulation est intéressante : la plupart de ces gènes sont transcrits au moment de la vie
fœtale et ne s'expriment plus chez adulte, par des processus épigénétiques diminuant fortement leur expression.
Ces mécanismes sont essentiellement représentés par le processus de méthylation, ce qui présente un avantage
thérapeutique puisque l'on possède actuellement des agents déméthylants utilisables en clinique.
Le but des agents déméthylants est de modifier idéalement la tumeur, dont on sait qu'il y a des
altérations du génome, pour la rendre sensible à la chimiothérapie, et notamment lui faire exprimer des
transcrits qui permettent de métaboliser les drogues de chimiothérapie. De plus, il y a eu un impact imprévu de
ces agents sur certains antigènes tumoraux. Par exemple, ceux de la catégorie de 1991 (premiers isolés) voient
leur expression augmentée chez les patients sous agents déméthylants. Il s'agit donc du type de cycle qui
paraissait le plus intéressant initialement (spécificité et expression restreinte au fœtus) ; cependant les résultats
en vaccination n'ont rien donné.
•
Par ailleurs, il existe des antigènes associés aux tumeurs (TAA), non spécifiques des tumeurs. Parmi
les exemples les mieux connus, et faisant le lien avec les maladies auto-immunes, on trouve les
antigènes de différenciation, qui sont le plus souvent tissulaires.
Prenons l'exemple du mélanome : la contrepartie physiologique dans ce cancer est le mélanocyte :
cellule de la peau produisant la mélanine grâce à un équipement enzymatique spécifique. Chez les patients
atteints de mélanome, on peut isoler à partir de la tumeur certains effecteurs immuns, dont certains
reconnaissent les antigènes de mélanome mais aussi les mélanocytes (par exemple les enzymes de la voie de
synthèse de la mélanine) et c'est ça qu'on appelle les antigènes de différenciation.
La limitation majeure de ce processus est le risque d'auto-immunité. En effet, certains patients atteints
de mélanome développent un vitiligo : zones de dépigmentation de la peau par destruction de mélanocytes.
Donc ce phénomène existe naturellement et l'on peut aussi utiliser les TAA dans des essais de vaccination, mais
les résultats ne sont pas bien meilleurs.
•
Enfin, on retrouve un dernier type d'antigènes, qui sont spécifiques de tumeurs (TSA). Ils sont
spécifiques de tumeurs mais à la différence des exemples précédents, ce sont essentiellement des
mutations somatiques liées au processus tumoral. La modification du gène ne porte pas sur son
expression/non-expression (pas de loi du tout ou rien). Ces TSA sont également appelés néo-antigènes.
Par exemple dans le cancer du poumon, les mutations somatiques sont liées au tabac. Dans le cas des
mélanomes, ce sont les UV qui sont en cause.
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Ce type d'antigène est faiblement retrouvé : à l'heure actuelle, selon le type de tumeur humaine, le
nombre de TSA peut varier d'une dizaine à quelques milliers. Il a l'avantage d'être totalement spécifique de la
tumeur (donc pas de maladie auto-immune en conséquence).
L'inconvénient de ces TSA est qu'ils se révèlent le plus souvent être non conservés entre différents
patients : problème d'utilisation d'un point de vue thérapeutique, on se rapproche encore une fois de thérapies
qui doivent être personnalisées.
Il y a plusieurs raisons pour lesquelles on rediscute de la vaccination. Tout d'abord, PROVENGE en
2010 a suscité un certain intérêt. De plus, on s'est aperçu que les stratégies de traitement par AC, en particulier
contre les molécules de co-stimulation : anti-CTLA4, avaient des réponses d'autant plus efficaces que les
patients présentaient beaucoup de néo-antigènes au diagnostic.
En parallèle, on peut isoler les lymphocytes dirigés contre les néo-antigènes donc la réflexion est de
faire l'hypothèse que beaucoup de stratégies thérapeutiques utilisant des AC vont réveiller la réponse T contre
les néo-antigènes.
Par conséquent, les perspectives seraient de combiner les stratégies AC, pour enlever les mécanismes
inhibiteurs, avec des vaccins thérapeutiques utilisant ces TSA qui sembleraient plus efficaces. On reprendrait
ainsi une thérapie cellulaire active.
Les lymphocytes T et B ont une durée de vie très longue, donc ce sont les deux cellules capables de garantir une
réponse au long terme dans le contrôle des tumeurs, avec une notion d'équilibre, d'où l'intérêt de trouver un
vaccin efficace.
En synthèse :
1) Première thérapie cellulaire qui fonctionne : transplantation
2) Deuxième stratégie cellulaire, active, qui pour l'instant ne marche pas : vaccination thérapeutique
3) Partie passive :
Il y a différents types de constructions : les
transcrits des récepteurs T, et les récepteurs
chimères
AC/molécules
de
co-stimulation.
Actuellement ces thérapies cellulaires sont assez
stabilisées sur la façon d'obtenir les cellules, elles
sont à peu près standardisées même s'il subsiste une
question ouverte quant à savoir quels sont les
meilleurs antigènes à utiliser.
La
stratégie
consiste
à
récupérer
et
transfecter/transduire des cellules du patient, de type
CD4 et CD8 (production de cytokines et fonctions
tueuses). La technique universelle d'activation,
assez bien établie à l'heure actuelle, est d'utiliser des
produits de clinique qui sont des microbilles (5
microns) sur lesquelles sont fixées les AC
monoclonaux dirigés contre CD28 et CD3. Les
lymphocytes vont ainsi proliférer, également grâce à
un mélange de cytokines introduit dans le milieu de
culture.
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IMMUNOPATHOLOGIE ET IMMUNOINTERVENTION – Biothérapie cellulaire
Ensuite l'utilisation d'un vecteur de type rétrovirus permet de réaliser la transfection des molécules
d'intérêt : le CAR par exemple. Ces cellules, préparées in vitro, sont prêtes à être réinjectées chez le patient. Il
s'agit donc encore une fois d'une thérapie complètement personnalisée. Certaines compagnies tentent de mettre
en place une thérapie allogénique.
En conclusion, on peut remarquer que le spectre des thérapies cellulaires est devenu très large, en
développement actuel de façon très importante, avec des stratégies qui deviennent de plus en plus industrielles
(surtout aux USA).
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IMMUNOPATHOLOGIE ET IMMUNOINTERVENTION – Biothérapie cellulaire
Bon courage pour apprendre ce cours fort flou et soporifique... Je vous ai retranscrit tout ce que le prof a dit
sans avoir essayé d'en interpréter quoique ce soit. Cependant, il semblerait qu'il y ait eu confusion de sa part
(on ne juge pas!) entre « bone-marrow transplantation » et « donor-lymphocyte infusion » (en A) puisque dans
le premier cas on utilise plutôt des CS hématopoïétiques et dans l'autre, les lymphocytes, alors que le cours
avance une utilisation des lymphocytes dans les deux cas. Toutefois, je ne détiens pas la vérité absolue, alors
tirez-en les conclusions que vous voudrez.
Re-bon courage et des bisettes.
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